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PLAN DE COURS LA SOCIÉTÉ CIVILE AMÉRICAINE APPROCHE COMPARATIVE Professeur: Laurence Nardon Année universitaire 2015/2016: Semestre de printemps SÉANCES ET PROGRAMMES Séance 1. Introduction: Qu’est-ce que la société civile ? Définition du terme de société civile: "L'ensemble des rapports interindividuels, des structures familiales, sociales, économiques, culturelles, religieuses qui se déploient dans une société donnée, en dehors du cadre et de l'intervention de l'État." (J-L. Quermonne). Le concept est apparu au XVIIe siècle, avec l’émergence des classes bourgeoises comme force politique, la revendication de droits formels et la progression vers des sociétés plus égalitaires. Si les acteurs de la société civile peuvent être accusés de confisquer l’opinion à leur profit (lobbies, etc), ils se voient aussi, à l’inverse, investis de la mission de protéger la société contre les risques de totalitarisme. En l’absence « d’institutions de l’interaction » (Pierre Rosanvallon), le peuple se trouve massifié et démuni face au pouvoir. Cf les dynamiques de pouvoir dans la société telles que décrites par Michel Foucault. Aux États-Unis, la « passion de l’égalité » (Tocqueville), la revendication d’un espace commun où chacun peut défendre ses opinions et ses droits renforcent le rôle de la société civile. Les intérêts particuliers sont légitimes, c’est le libre jeu entre eux et leur somme qui permet d’atteindre un équilibre et le bien commun. Discussion: établissement d’une liste/typologie des acteurs de la société civile. Tous ces acteurs sont-ils des contre-pouvoirs ? (Distribution des exposés et revues de presse). Pour aller plus loin: Tocqueville, De la démocratie en Amérique (diverses éditions): Livre II ; deuxième partie ; chapitre V: « De l’usage que les Américains font de l’association dans la vie civile ». Séance 2. Les origines: l’époque coloniale et la conquête de l’Ouest L’époque coloniale et la conquête de l’Ouest sont deux moments importants de l’installation du rôle de la société civile en Amérique du Nord et aux États-Unis. 14.01.2016 1 PLAN DE COURS Période coloniale: double empreinte dans la culture et la philosophie politique américaine du calvinisme et de la philosophie des Lumières. Analyse des expériences d’auto-gouvernement des premières communautés. Conquête de l’Ouest: la philosophie de la self-reliance et de l’individualisme est renforcée par l’expérience des pionniers. Apport de Henry David Thoreau et Ralph Waldo Emerson. Exposés: Comment les nations indiennes sont-elles aujourd’hui représentées ? Portrait: Rose Wilder Lane, fille de pionniers et libertarienne. Pour aller plus loin: Alexis de Tocqueville, Quinze jours dans le désert, Folio, Gallimard, 1991. Séance 3. Les églises Entre l’affaire des sorcières de Salem (1692) et l’arrivée des Mennonites allemands à bord du Concord (1683), l’expérience religieuse américaine se développe autour du binôme intolérance/tolérance. Le pluralisme religieux est parfaitement établi aujourd’hui, mais jusqu’où peut aller la multiplication des dénominations ? Le rôle politique des différentes églises au cours du 20ème siècle. Le retour du protestantisme dans les années 1980 (révolution conservatrice). Exposés: Qu’est-ce qu’une secte aux États-Unis ? Que reste-t-il du rôle politique des églises noires ? Portrait: Jerry Falwell, un chrétien conservateur en politique. Pour aller plus loin: Sébastien Fath, Dieu XXL, La Révolution des Megachurches, Frontières, 2008: Chapitre II: « Le compte des mille et une églises. État des lieux et dernières tendances », pp 28-50. Séance 4. Autour de la Guerre de Sécession: l’abolitionnisme, les mouvements de tempérance La montée des abolitionnismes et la création du parti républicain en 1854. 14.01.2016 2 PLAN DE COURS Après la guerre de Sécession, reconstruction et progressisme: le réformisme féminin, les premiers mouvements noirs. Intervenante extérieure: Anne-Lorraine Bujon, IHEJ Exposés: Les évolutions du Parti républicain Portrait: Harriet Beecher Stowe, abolitionnisme ou stéréotype du « bon noir » ? Pour aller plus loin: Revue L’Histoire, n°361, février 2011: Dossier spécial guerre de sécession Séance 5. Les mouvements issus des minorités ethniques Le Bureau du recensement observe aujourd’hui un basculement démographique des États-Unis vers un pays « marron », avec la montée des populations hispaniques et asiatiques. Les débats autour des minorités ethniques ont évolué avec le temps. Après une époque assimilationniste largement tournée vers les immigrés d’origine européenne, les grands mouvements des droits civiques (NAACP, ACLU) ont légitimé le multiculturalisme. Les débats actuels portent sur le bien-fondé de l’affirmative action. Les États-Unis peuvent-ils toujours fonctionner sur la base des hyphenated identities ? Quelles relations les communautés entretiennent-elles les unes avec les autres ? Quels sont leurs positionnements politiques respectifs et leur poids dans la politique du pays ? Pourquoi les Asiatiques ne sont-ils pas plus visibles ? Exposés: Pourquoi les Arabes et/ou Musulmans américains n’arrivent-ils pas à se constituer en lobby ? Comment la langue espagnole est-elle aujourd’hui présente aux États-Unis ? Portraits: Booker T. Washington et W.E.B. Du Bois, figures opposées de la lutte pour l’émancipation ? Pour aller plus loin: Pierre Sicard, Frédérique Spill, Regards sur l’Amérique, approche documentaire des États-Unis, chapitre 9: Race et ethnicité, collection U, 2011. 14.01.2016 3 PLAN DE COURS Séance 6. Les partis et les syndicats Les États-Unis sont une société urbaine et industrielle et les relations de travail sont au centre des rapports sociaux. Si le syndicalisme se développe tôt et joue un grand rôle dans les années 1920 et 1930, le discours de la lutte des classes ne prend pas. Pourquoi ? Rôle de l’immigration et de l’afflux de main d’œuvre bon-marché. Les relations entre les différents groupes irlandais, italiens, polonais et du nativisme au XIXème siècle. Développement des « machines » politiques clientélistes et corrompues. Le grand syndicat AFL-CIO a connu de grands succès, mais apparait comme complètement sclérosé dans la société post-industrielle d’aujourd’hui: attitude corporatiste, anti-mondialisation. Exposés: Le parti communiste américain a-t-il jamais été une force politique significative ? Quelles sont les lignes de partage idéologiques au sein du parti démocrate aujourd’hui ? Portrait: Tammany Hall, machine politique. Pour aller plus loin: Michael Moore, Roger & me, 1989, documentaire sur des suppressions d’emploi chez General Motors. Séance 7. Les lobbies Pour définir les lobbies, il faut revenir sur la notion de « faction », employée dans les premiers écrits politiques des Pères Fondateurs. Les « special interest groups » sont tout à fait légitimes, à condition que chacun ait les mêmes possibilités de s’exprimer, qu’on joue sur un « level playing field ». Est-ce le cas ? Quelques géants du lobbying: NRA, AIPAC, les lobbies pétroliers (forages, fracking), les lobbies agricoles. Exposés: La NRA est-elle le premier parti américain ? Affrontements des lobbies au sujet de l’exploitation des hydrocarbures non-conventionnels: qui va gagner ? Portrait: Jack Abramoff, le corrompu. Pour aller plus loin: Andrew Cohen, « What the Gun Lobby and the Marijuana Lobby Have in Common », The Atlantic, 8 février 2013 14.01.2016 4 PLAN DE COURS Séance 8. La presse Le premier amendement, qui garantit la liberté d’expression, est au cœur de la pensée politique américaine. Il y a un respect de principe pour la dissension et une foi dans les vertus du débat pour garantir le fonctionnement démocratique. Ceci va jusqu’à la défense d’un droit à des opinions extrêmes: il n’y a pas d’équivalent aux États-Unis de la loi française condamnant l’incitation à la haine raciale. Ceci se conjugue avec le dynamisme du secteur de la presse, depuis les petits éditeurs indépendants jusqu’aux grands empires médiatiques aujourd’hui. C’est un contrepouvoir puissant (cf Watergate), mais aussi une machine à consommer des produits de masse, entrainant un nivellement de la culture par le bas. Avec l’apparition des radios libres, des chaînes du câble et des blogs, ce qui relevait d’une expérience démocratique commune avec la TV devient aujourd’hui un marché segmenté, fragmenté, polarisé. Exposés: Avec Fox News et les blogs conservateurs: les médias sont-ils responsables de la polarisation politique ? Quel modèle économique pour la presse en ligne ? Portrait: le Pulitzer Prize en journalisme, une fonction citoyenne ? Pour aller plus loin: Pierre Haski, « Portrait: Andy Carvin, le « Twitter-journaliste » des révolutions arabes », Le Nouvel Observateur, 26 juin 2012. Séance 9. Cultures et contre-culture: 1960-2012 Le conformisme extrême des années 1950 cède face aux mouvements étudiants. C’est la naissance de la contre-culture, avec l’opposition à la guerre du Vietnam, le mouvement des droits civiques, les mouvements féministes, gay et lesbian (Harvey Milk). Cette évolution précède de peu la montée des conservatismes: le fondamentalisme chrétien avec Bill Graham, Jerry Falwell et sa moral majority. Comment échapper au jeu politique imposé par Washington: en faisant du home schooling, en fondant sa propre milice ? Exposés: Faut-il craindre les White Supremacists et leurs milices ? Portait: Timothy Leary, apôtre du LSD Pour aller plus loin: Le film Hair, de Milos Forman, 1979 14.01.2016 5 PLAN DE COURS Séance 10. Les femmes La revendication du droit à l’éducation et du droit de vote pour les femmes est venue très tôt, puis les femmes se sont tues jusqu’au 1960, lorsqu’apparait un féminisme de « deuxième vague », autour des revendications d’émancipation sexuelle et de pleine participation à la vie économique. Passage en revue des différentes écoles du féminisme: le féminisme américain est plutôt différentialiste, le féminisme français plutôt universaliste. Les femmes ont toujours été très impliquées dans la vie publique via les questions d’éducation, la lutte contre la pauvreté et une veine de réformisme social (cf Prohibition). Aujourd’hui, la figure de la soccer mom est courtisée par les politiques. Exposés: Portrait: Gloria Steinem, le militantisme féministe Les femmes dans les mouvements radicaux actuels: de Sarah Palin à la home schooler. Pour aller plus loin: Tocqueville, De la démocratie en Amérique ; volume 2, troisième partie, chapitre XII « Comment les Américains comprennent l’égalité de l’homme et de la femme ». (pp 20-23). Séance 11. La philanthropie et les ONG La philanthropie, d’origine privée, est constitutive de l’expérience sociale américaine. L’apparition des ONG, en revanche, est un phénomène relativement plus récent, qui porte au niveau mondial la défense de causes humanitaires, sur le même modèle de mobilisation citoyenne que certains mouvements domestiques du XIXe siècle. Le tempérament missionnaire. Les notions d’ « advocacy », et d’« empowerment ». Les ONG sont aussi une forme de projection de la puissance américaine dans le monde, soit qu’elles contribuent à une infiltration par les services secrets U.S., soit qu’elles répandent seulement certaines idées et certaines visions du monde. Voir le débat sur ONG & CIA en Afrique. Intervenante extérieure: Claire Boulanger, Médecins du Monde Exposés: Portait: Andrew carnegie, le philanthrope complet. La philanthropie GAFA, de Bill Gates à Marc Zuckerberg 14.01.2016 6 PLAN DE COURS Pour aller plus loin: Numéro de La Revue des Deux Mondes de décembre 2012: “La Philanthropie, dernière idéologie?” Séance 12. Le rôle des réseaux sociaux Peut-on dire que Google et Facebook sont des acteurs politiques de la société civile ? En politique intérieure: la société reprend le pouvoir sur les partis, le financement de la vie politique par les micro-dons en ligne redonne une voix aux petits. Cf MoveOn.org, Americans Elect. En politique étrangère: la stratégie « Diplomacy 101 » du département d’État a-t-elle porté ses fruits ? Le débat lancé par le New Yorker sur la valeur du militantisme par internet (la mobilisation politique en ligne, les manifestations virtuelles). Exposés: Comment définir un cyber-mouvement ? Quels sont à votre avis les prochains réseaux à succès ? Portraits comparés: à quels modèles de héros correspondent Assange, Manning et Snowden ? Pour aller plus loin: Malcolm Gladwell, « Small Change, Why the revolution will not be tweeted », The New Yorker, 4 octobre 2010 14.01.2016 7