Progrès incrémental La France en retard
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Progrès incrémental La France en retard
Dossier Recherche Progrès incrémental La France en retard La reconnaissance du progrès incrémental est nécessaire pour que la recherche pharmaceutique puisse continuer d’apporter des progrès radicaux et des progrès moindres (incrémentaux). Le point avec Marie-Laure Pochon, présidente du CRIP. DR D IL FAUT RECONNAÎTRE ET VALORISER LE PROGRÈS INCRÉMENTAL, PLAIDE MARIELAURE POCHON, PRÉSIDENTE DU CRIP. oit-on distinguer progrès radical et progrès incrémental ? Pour Marie-Laure Pochon présidente du CRIP1 la réponse est clairement négative. Ces deux types de progrès sont intimement liés et se nourrissent l’un de l’autre. La non-reconnaissance de l’un est délétère pour l’autre. Deux tiers à trois quarts des médicaments de ville évalués chaque année par la commission de transparence sont des médicaments à progrès incrémental (ou innovation progressive). Pourtant, depuis 2003, cette commission ne reconnaît plus le progrès incrémental. En effet l’évaluation du niveau d’ASMR 2 par la commission ne tient plus compte des critères d’acceptabilité, de commodité d’emploi, d’observance et de complément de gamme justifié, qui sont les critères spécifiques de l’innovation incrémentale. L’amélioration du service médical rendu ne prend en compte aujourd’hui que des critères d’efficacité et de tolérance. Pourtant, la mise à disposition d’un médicament présentant une meilleure facilité d’administration ou une meilleure observance sont, pour le patient, des améliorations réelles, ressenties au quotidien explique Marie-Laure Pochon. L’absence de reconnaissance aboutit à nier l’existence du progrès incrémental et de ses bénéfices pour le patient. Pourtant, ce type progrès est reconnu et valorisé dans tous les autres domaines techniques où le progrès incrémental est nécessaire et permanent : automobile, informatique, téléphonie par exemple. Des prix dissuasifs pour la recherche Sur le plan économique, la mise à disposition de molécules nouvelles ou de formulations nouvelles présentant une innovation incrémentale n’est plus viable. Car le prix proposé par les autorités de santé est trop bas. Ce dernier prix est en effet celui du médicament de référence, non réévalué de l’inflation et en outre diminué de 20 %. Si le médicament de référence est génériqué, le prix est celui du générique 64 PHARMACEUTIQUES - SEPTEMBRE 2008 moins 20 %. Ce prix économiquement injuste, explique Marie-Laure Pochon, a pour conséquence d’assécher et de décourager la recherche, qui, par ailleurs, coûte de plus en plus cher et devient de plus en plus risquée. C’est ainsi que la recherche en antibiothérapie ne progresse plus, pas plus que celle concernant l’HTA3 par exemple. Au total, cette non reconnaissance, appuyée par une politique de prix dissuasive, a pour conséquence d’empêcher de commercialiser certains médicaments en France et ce, au détriment des patients. Le CRIP et IMS Health mènent actuellement une étude, pour mettre en évidence cette problématique spécifiquement française, dont les résultats seront publiés en septembre et médiatisé pour faire évoluer le système d’évaluation. n Emmanuel Cuzin (1) Centre de réflexion de l’industrie pharmaceutique – CRIP. (2) Amélioration du service médical rendu – ASMR. (3) Hypertension artérielle – HTA. L’UE reconnaît le progrès incrémental Dans les autres pays de l’UE, des solutions acceptables ont été trouvées pour le prix des médicaments à innovation incrémentale. Une récente enquête montre que les médicaments ayant une ASMR IV ont en France un prix fabricant hors taxe systématiquement inférieur de 26 à 39 % à celui obtenu chez nos voisins (Allemagne, Italie, Espagne, Royaume Uni). Dans ces pays, le système de l’ASMR (rigide) n’existe d’ailleurs pas. Pour Marie-Laure Pochon, la demande est simple et raisonnable : obtenir le prix du médicament de référence réévalué de l’inflation. Ce prix situerait logiquement les médicaments à progrès incrémental entre celui des génériques et celui des médicaments représentant un progrès radical.