la maison, terrain de jeu des entreprises

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la maison, terrain de jeu des entreprises
Dossier
La ville intelligente
Le boîtier Mylight Systems
permet de contrôler la consommation
d’énergie d’une maison à distance.
La smart city fait rêver les entreprises. Au cœur des préoccupations, la pro­
blématique énergétique. Il s’agit d’assurer de l’énergie (renouvelable) pour
les infrastructures, de plus en plus interconnectées et interactives, mais
également de rapprocher les centres de production des utilisateurs finaux.
Parmi eux, les locataires, qui se voient proposer maints produits innovants
pour optimiser la consommation de leur logement.
consiste à rendre la ville autonome, en par­­
tant de l’habitant », explique Yvan Gra­vier,
président de Neosesame, société spécialisée
dans l’internet des objets et qui a participé
au développement du boîtier de Mylight
Systems.
Économique lorsqu’il s’agit de faire baisser ses factures d’électricité et de mutualiser des équipements, écologique parce que
la production d’énergie provient avant tout
d’énergies renouvelables et de déchets recy­
clables, la ville intelligente semble également
favoriser les partenariats inter-entreprises.
« L’opération IssyGrid, le pilotage du réseau
d’énergie sur tout un quartier à Issy-lesMoulineaux, a été montée en consortium
avec 10 sociétés. Un des enjeux de la ville intelligente, c’est le travail d’équipe, personne
ne peut la construire seul, il faut associer des
compétences et expertises », affirme Gilles
de Colombel. De la collaboration naissent
aussi de nouveaux métiers : energy managers chez certains, cadres responsables de
l’autorité numérique chez d’autres…
Et les habitants dans tout ça ? Qui dit smart
city ne dit pas forcément smart citadins…
« Il reste à travailler l’acceptabilité et l’adhésion des usagers à ces nouveaux systèmes,
c’est la grande demande des villes »,poursuit le
directeur du pôle public de Schneider Electric
France. Pourtant, certains usagers ne sont
Par Juliette Kinkela
IssyGrid, un projet expérimental situé dans un quartier d’Issy-les-Moulineaux,
dispose de lieux de stockage de batteries, de panneaux photovoltaïques et de bornes
de recharge pour véhicules électriques.
82 objectif nouveau grand paris
des services sur mesure. Le numérique le
rend désormais possible grâce à la collecte
des données en temps réel.
Du côté des habitants, c’est la recherche
d’économies financières qui est mise en
avant. « La pierre angulaire de la smart city,
c’est le smart building. Une maison peut
produire sa propre énergie, notamment
grâ­ce aux panneaux solaires, et la stocker à
domicile. De quoi réduire sa facture d’électricité… », précise Virgile Suavet, co-fondateur
de la société Mylight Systems, développeur
de solutions en énergies renouvelables.
Parmi les outils numériques utilisés aujour­
d’hui, la « smart grid », un réseau de distribution d’électricité qui permet de réguler la
production et la consommation grâce à l’informatique. Le système permet de répondre
aux fluctuations occasionnées par les énergies renouvelables qui, par définition, ont
une production par intermittence.
favoriser Des partenariats
inter-entreprises
Adieu le modèle linéaire et centralisé, ce
« réseau électrique intelligent » est l’un des
piliers de « la troisième révolution industriel­
le », une expression popularisée par Jeremy
Rifkin, essayiste américain et auteur de
l’ouvrage du même nom, qui encourage la
production d’énergie à l’échelle locale. Sur
ce modèle, de produits innovants émergent,
qui combinent énergie solaire et numérique.
C’est l’objectif de Mylight Systems, une ancienne start-up qui développe aujourd’hui
un boîtier permettant, via une interface numérique, de connecter différents appareils
électriques à une source d’énergie solaire. Le
surplus de production est stocké sous forme
d’eau chaude, une énergie qui pourra être
réinjectée ou revendue. « Le but est d’aller
vers l’indépendance énergétique. À terme,
la maison n’aura plus besoin d’acheter de
l’énergie à un fournisseur public. Nous
som­­mes vraiment dans une révolution qui
Le capitalisme vivrait ses dernières heures
selon Jeremy Rifkin, essayiste et théoricien
américain, auteur de l’ouvrage La troisième
révolution industrielle publié en 2012, et de
La nouvelle société du coût marginal zéro
paru en 2014. Les énergies renouvelables
associées au numérique seraient la solution
la plus écologique pour répondre à la
baisse de la production de pétrole.
L’ère post-carbone serait donc proche :
la troisième révolution donnerait naissance
à l’émergence de nouveaux modèles
économiques, basés sur la production
d’énergie verte par chaque habitant
et sur le partage de celle-ci au sein de
communautés collaboratives.
que trop familiers avec ces systèmes : les pira­
tes informatiques. Pour contrer ce phénomè­
ne, les partenariats entre entreprises sont à
nouveau de mise. Thalès, groupe spécialisé
dans la défense et dans les technologies
de l’information et des communications, a
conclu un partenariat avec Schneider Electric
en 2013 pour développer des solutions de
cybersécurité. « Sur un système centralisé, le
risque est centralisé. Lorsque les systèmes de
production se délocalisent, les pirates font de
même », conclut Yvan Gravier. De quoi faire
réfléchir… l
Au premier plan, le nouveau centre d’excellence
de Schneider Electric à Barcelone, consacré aux
solutions pour les villes intelligentes. Ouverture
prévue mi-2016.
La protection
de la vie privée,
un impératif européen
Le G29, un groupe de travail européen
composé des Commissions nationales
de l’informatique et des libertés (CNIL),
a adopté un avis les 16 et 17 septembre
2014 afin de proposer une harmonisation
du cadre réglementaire européen sur la
protection de la vie privée. Tout objet
intelligent créé, que ce soit par des fabri­
cants, des développeurs d’application
ou encore de plateformes de données,
devrait intégrer des obligations de respect
de la vie privée des utilisateurs.
Le G29 encourage ces « pratiques
vertueuses » et espère qu’elles permet­
tront aux entre­prises de proposer aux
consommateurs des objets plus sécurisés.
© DR
Car oui, à l’heure où les conventions internationales défendant la préservation de l’environnement incitent les villes à adopter des
comportements vertueux (lutte contre les
gaz à effet de serre, développement des pistes
cyclables, recyclage des déchets…), de nombreuses collectivités souhaitent augmenter
l’attractivité de leur territoire en proposant
© DR
«I
l n’y a pas de définition de la ville
intelligente, c’est surtout une dé­
mar­­che de co-construction avec
les villes pour développer plus de
ser­vices en utilisant le moins d’énergie possible », déclare Gilles de Colombel,
directeur du pôle public de Schneider Electric
France, spécialiste de la gestion d’énergie.
© DR
la maison,
terrain de jeu
des entreprises
La troisième révolution
industrielle en marche ?
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