Le CMT au vêlage : Le retour aux sources

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Le CMT au vêlage : Le retour aux sources
CHRONIQUE VÉTÉRINAIRE
La plupart des infections mammaires de nos
vaches laitières sont impossibles à déceler
cliniquement ou sont subcliniques. Il faut donc
Le CMT au vêlage
utiliser un test pour les dépister. On sait par
Le retour aux sources
ailleurs que le vêlage est un moment
particulièrement à risque pour l’apparition de
nouvelles infections. Une étude, publiée en
1995, réalisée sur une période de sept ans
dans un troupeau de l’Ohio, a démontré que
près de 40 % des vaches présentaient une
infection intramammaire au vêlage.
PA R PA U L B A I L L A R G E O N E T
J O D I WA L L A C E *
S
Selon cette étude, la moitié des infections étaient apparues pendant la dernière
période de tarissement. On a aussi observé
que la plupart des mammites cliniques (présence d’inflammation et/ou de lait anormal)
survenant dans les 100 premiers jours de
lactation étaient causées par des infections
déjà présentes au vêlage.
Le dépistage précoce des infections
intramammaires est un élément essentiel
du programme de contrôle de la mammite.
Au cours des 20 dernières années, le comptage cellulaire du PATLQ est devenu l’instrument le plus utilisé pour l’identification des
vaches possiblement infectées. La culture
bactérienne demeure cependant le meilleur
moyen pour identifier les vaches réellement
infectées. Elle est aussi la seule façon de
connaître la nature de ces infections. Chacun
de ces deux moyens de dépistage présente
des inconvénients pour la conduite efficace
d’un programme de dépistage de la mammite. En effet, le résultat du CCS n’est dis-
ponible en moyenne que de 15 à 20 jours
après le vêlage. L’échantillonnage pour la culture bactérienne est une procédure qui doit
être suivie rigoureusement pour obtenir des
résultats fiables. De plus, la culture bactérienne est une procédure de laboratoire qui
représente un coût pour l’entreprise (7 à 8 $).
LA RECHERCHE RÉÉVALUE
LE CMT
Le California Mastitis Test (CMT), mis
au point il y a une cinquantaine d’années,
pourrait bien redevenir un outil intéressant
pour le dépistage précoce des infections
intramammaires au début de la lactation. Des
travaux effectués au Kansas dans trois stations expérimentales ont démontré que le
résultat positif (réaction 1, 2 ou 3) d’un test
CMT, au jour 3 après le vêlage, identifiait
correctement 75 % à 78 % des quartiers
infectés (sensibilité) par un agent pathogène
majeur contagieux ou d’origine environnementale. Le CMT serait ainsi un outil intéressant pour identifier les vaches sur lesquelles effectuer un prélèvement en vue de
faire une culture bactérienne. Par exemple,
pour un groupe de 25 vaches (100 quartiers) dont 20 quartiers seraient infectés
RÉPARTITION DES RÉSULTATS
DU CMT SELON LE STATUT
D’INFECTION DES QUARTIERS
CMT positif
(réaction 1, 2
ou 3)
CMT négatif
Infectés
Non
infectés
15
5
35
45
subcliniquement, le CMT permettrait d’identifier correctement 15 de ces quartiers pour
faire une culture. Par contre, environ 35 %
des quartiers positifs au CMT s’avèrent négatifs à la culture bactérienne et sont donc
de faux positifs (spécificité). Pour notre
groupe de 25 vaches, le test CMT aurait
quand même permis de diminuer de 50 %,
à peu de frais, le nombre de quartiers à
échantillonner et les coûts associés à la culture bactérienne, et cela, sans affecter la qualité du système de surveillance de la santé
du pis.
LE CMT DANS DES ENTREPRISES
COMMERCIALES
En vue d’évaluer l’utilité de cette stratégie lorsque l’interprétation du test est faite
par des producteurs de lait, 380 vaches ont
été échantillonnées dans 16 entreprises laitières du sud-ouest du Québec et de la
région de Guelph en Ontario au cours de
l’hiver 2000-2001. Le CMT et l’échantillonnage étaient effectués soit le jour du vêlage
ou jour 0 (19 %), soit le jour 1 (50 %),
soit le jour 2 (19 %), soit le jour 3 (9 %);
3 % des tests n’ont pu être retenus à cause
du délai. Les résultats indiquent que la capacité moyenne du test pour identifier correctement les quartiers infectés (sensibilité)
par des agents pathogènes majeurs a été
de 55 %. Les chercheurs ont noté que cette
sensibilité augmentait avec le nombre de
quartiers infectés dans le troupeau. Le taux
de faux positifs (CMT positif et culture négative) n’a été que de 14 % dans cette étude.
Il n’y a pas eu de différence significative entre
les tests effectués aux jours 0, 1 et 2. Des
données complémentaires provenant de
troupeaux américains soumis au même protocole permettront éventuellement de clarifier
cette question.
Le producteur de lait québécois Décembre 2001/Janvier 2002
35
QUE FAIRE DU RÉSULTAT?
Même s’il est démontré que le CMT
pourrait réduire les coûts d’échantillonnage
de près de 50 %, la question la plus pertinente demeure : « Est-ce qu’il est utile
d’intervenir précocement et avec efficacité
sur les quartiers positifs? » L’intervention en
début de lactation permettrait logiquement
de diminuer le nombre de cas de mammite entraînant des pertes de lait au cours
de la lactation et de diminuer le risque de
résidus médicamenteux. Les chercheurs
impliqués dans les études mentionnées
précédemment estiment que la décision
doit être prise individuellement pour chaque
troupeau en consultation avec le médecin
vétérinaire traitant.
Nous savons qu’un certain nombre
d’infections apparues au cours de la période
de tarissement disparaîtront spontanément.
Dans un volet de l’étude Québec/Ontario
mentionnée plus haut, la moitié des vaches
positives au CMT, désignées au hasard, ont
été traitées avec une préparation intramammaire commerciale. Parmi les 78 quartiers
testés positifs à la culture bactériologique
et traités par la suite, 73 (93,5 %) ont été
guéris (au moins une culture subséquente
négative). L’autre moitié des vaches de
l’étude, positives au CMT, n’ont eu aucun
traitement. Parmis les 76 quartiers testés
positifs et non traités, seulement 60
(78,9 %) ont guéri spontanément. La différence entre les deux groupes était
significative statistiquement.
Il est important de rappeler que le premier objectif de cette stratégie est le dépistage et l’identification des agents bactériens : toutes les vaches positives au CMT
devraient être échantillonnées pour culture
bactériologique.
La tendance actuelle en régie de la
santé de la période du vêlage est à l’observation individuelle systématique des animaux par le biais d’examens rapides et peu
coûteux. L’expansion des troupeaux et la
multiplication des intervenants y travaillant
augmentent l’utilité de cette stratégie en
permettant aux gestionnaires, de façon ponctuelle, de prendre des décisions et d’intervenir de façon appropriée. Le CMT au vêlage
a le potentiel pour s’ajouter à d’autres
méthodes d’observation, comme le suivi de
la température rectale ou la détermination
de la condition de chair dans l’arsenal dont
disposera le producteur laitier de demain
pour bien gérer son troupeau. ❂
* Paul Baillargeon, médecin vétérinaire, Clinique
vétérinaire Saint-Louis-Embryobec et Jodi Wallace,
étudiante finissante, Ontario Veterinary College
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Décembre 2001/Janvier 2002 Le producteur de lait québécois
Procédure et interprétation
du California Mastitis Test (CMT)
1
2
3
4
1. Conserver toujours la même position pour la palette afin de savoir
quel quartier est observé dans chacune des cellules.
2. Conserver assez de lait pour remplir le quart de la cellule.
3. Ajouter la même quantité de réactif dans chaque cellule.
4. Agiter avec un mouvement de rotation et en basculant la palette de
gauche à droite. La lecture se fait de 30 à 60 secondes après avoir
ajouté le réactif.
Négatif
1
2
3
Description
Truc *
Le mélange demeure
liquide et bleuté.
Le mélange devient visqueux
sans formation de gel au
centre et la viscosité persiste.
Formation de gel qui tend à
se retrouver au centre de la
cellule avec la portion liquide
du mélange autour.
La cellule se vide
au goutte à goutte.
Le mélange, quoique
épaissi, se vide
graduellement.
La masse gélatineuse
qui tombe au début
laisse une certaine
quantité de liquide
dans la cellule.
La masse gélatineuse
tombe d’un seul coup
et ne laisse aucun
liquide dans la cellule.
Formation d’un gel au centre
de la cellule. Il n’y a pas de
présence évidente de liquide.
Lorsque l’on verse le
mélange, celui-ci tombe
d’un coup.
* En vidant le contenu des cellules, observez l’écoulement de la réaction.
Interprétation
(cellules 1000/ml)
0 – 200
400 - 1500
800 - 5000
> 5 000

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