Les choix de formulation dans la représentation

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Les choix de formulation dans la représentation
Journées Scientifiques de l’Université du Bénin
Lomé, 11-15 mai 1998
Journal de la Recherche Scientifique de l’Université de Lomé (Togo), Vol. 2/2002, pp. 33-44.
<paru en 2004>
Les choix de formulation dans la représentation textuelle
d’événements complexes : gammes de récits
Colette NOYAU
U.M.R. 7114 ‘Modèles, Dynamiques, Corpus’
C.N.R.S. / Université de Paris X-Nanterre
Mots-clé
récit oral, temporalité, éwé, gen-mina, français langue seconde.
Key-words
oral narrative, temporality, Ewe, Gen, French as a second language.
RÉSUMÉ
Ce travail présente les premiers résultats d’une étude de la production de récits oraux par des
enfants et des adultes en éwé et gen-mina L1 et en français langue seconde au Togo. Elle met
en évidence l’intérêt de la méthode des gammes de récits comparables pour caractériser les
tendances de conceptualisation et de formulation propres à une langue (point de vue
typologique), ainsi que l’appropriation progressive des façons propres à la langue seconde (ici
le français) de représenter les événements et leur placement dans le temps par les locuteurs
apprenants.
ABSTRACT
Formulation options in textual representation of complex events : comparison of
similar narrative productions in different conditions
This study bears on oral narrative production by children and adults in Togo, in Ewe and Gen
on the one hand, in French as a second language on the other hand, and presents the first
results of their analysis. It shows the interest of the method consisting of eliciting sets of
comparable narratives, to characterize the peculiar trends of conceptualizing and formulating
events in time in a given language (typological approach), and to explain how the learners
progressively acquire the ways to represent events proper of the second language (French L2
in our case).
1
La comparaison de différentes versions d’une même histoire est une voie d’approche
extrêmement féconde pour la compréhension de toute une série de phénomènes de la
production langagière et de l’organisation des textes. Et notamment, pour ce qui forme l’objet
principal de nos travaux récents : la conceptualisation et la formulation d’événements
complexes.
Nous avons mené plusieurs études selon cette perspective, portant sur différents cas de
gammes de récits, produits :
a) par différents locuteurs dans la même langue, qui est leur langue première ;
b) par des groupes de locuteurs similaires dans différentes langues ;
c) par des enfants de différentes tranches d’âge en langue première ;
d) par les mêmes locuteurs à des moments successifs de leur acquisition d’une langue
étrangère ;
e) oralement et par écrit ;
f) et aussi, pour le domaine littéraire, dans différentes versions d’une œuvre, ou par plusieurs
voix dans la même œuvre, écrite ou de tradition orale.
Après avoir explicité notree approche du récit, et présenté les hypothèses sur les
facteurs de variation entre récits produits, nous exposerons les méthodes pour recueillir ou
rassembler des versions comparables permettant d’aboutir à des conclusions à un niveau
suffisant de généralité. Puis nous commenterons quelques faits significatifs qui apparaissent
dans la comparaison entre gammes de récits, en éwé et gen-mina langue première (L1), et en
français langue seconde (L2).
1. SUR LE RÉCIT
1.1 Capacité narrative et récit
Ce type de texte est fondamental dans l’activité humaine, à divers titres. Le récit est
omniprésent dans les activités quotidiennes : dans la conversation, il se décline en divers sousgenres : anecdotes, histoires drôles, témoignages, illustrations à l’appui d’arguments…
Presque toutes les sciences humaines lui font une place centrale dans leur corpus.
L’activité narrative est un objet central des psychologues du langage dans leur étude
des processus de la mémoire, de la compréhension, et dans l’étude du développement cognitif
de l’enfant. Et bien entendu les linguistes, qui visent à décrire les principes d’organisation du
langage comme potentiel significatif et ceux de sa mise en œuvre dans le discours, placent le
récit au centre de la linguistique du texte.
Tout locuteur dans sa langue développe, étant enfant, et possède, comme adulte, une
capacité narrative. On peut définir des traits prototypiques du récit, potentiellement universels,
et des genres narratifs, plus ou moins libres ou conventionnalisés, et pouvant varier en fonction
des cultures.
1.2 Notre approche du récit
Notre analyse des productions narratives s’appuie sur
• une linguistique centrée sur les conduites discursives, prenant comme unité d’analyse le texte
(oral ou écrit), à décrire dans sa constitution (sa structure), son fonctionnement énonciatif et
pragmatique, et sa composition formelle, en tant que produit d’une activité narrative du
locuteur dans une situation d’interlocution ;
• une linguistique textuelle, qui montre comment le choix bien entendu, mais aussi la valeur, la
fonction des formes linguistiques, dépendent du niveau textuel et pas seulement du niveau
phrastique ;
pour contribuer à une linguistique à visée cognitive, rendant compte des processus mentaux
mis en œuvre par les locuteurs pour comprendre et pour produire du texte dans la
communication — et pour apprendre à le faire.
2
2. HYPOTHESES
On part d’un modèle psycholinguistique de la production langagière allant de la
conceptualisation à la formulation (Levelt 1989), envisagé du point de vue des activités de
référenciation (Stutterheim & Klein, 1989; cf. Noyau, 1996). De ce point de vue, la production
par le locuteur d’un texte suivi comprend
- l’évocation ou la construction d’une représentation cognitive globale du macro-événement ou
de la situation (réels ou fictifs) à mettre en mots, en fonction d’un projet de communication;
- la sélection et l’organisation de l’information en une structure textuelle principale (formée
des énoncés constituant une réponse à la question sous-jacente définissant le texte),
généralement accompagnée de structures secondaires ;
- et la formulation des énoncés successifs par instanciation de chacun des domaines
référentiels fondamentaux (entités <personnes et objets>, procès, espace, temps, modalité), en
fonction de contraintes découlant du type de texte, et de la mise en contexte (cf. Stutterheim &
Klein, 1989).
Une question centrale de notre recherche est la suivante : comment caractériser la façon
dont des locuteurs, à différents paliers d’acquisition d’une langue non-maternelle, construisent
leurs discours pour présenter des événements complexes situés dans le temps, dans des genres
de textes principalement organisés par la dimension temporelle, et en particulier dans le récit.
Les variables à étudier sont des types suivants :
a) au niveau conceptuel : la sélection ou non d’un procès pour la mise en texte ; le degré de
segmentation de procès complexes en micro-procès ou degré de ‘granularité’ caractérisant le
texte, le degré de ‘condensation’, c’est-à-dire d’intégration-hiérarchisation de procès
multiples en une seule énonciation (cf. Noyau, 1997, 1998, Noyau et al., à par.) ; les types de
relations sémantiques entre procès : de nature chronologique, aspectuelle, causale,
intentionnelle (cf. Denhière & Baudet, 1991) ;
b) au niveau proprement linguistique : par quels moyens, et surtout quelles constellations de
moyens — procédés phrastiques de divers niveaux, discursifs, et pragmatiques — les
locuteurs construisent-ils dans leurs discours une représentation structurée d’événements
complexes reliés entre eux, situés dans le temps et mis en perspective ;
c) compte tenu de a) et de b), comment le texte produit se caractérise-t-il du point de vue de sa
cohésion et de sa cohérence (cf. Charolles, 1988).
Pour ce faire, il est nécessaire de décrire en regard de la production de textes en langue
seconde (L2) les principes d’organisation de textes similaires dans la langue première (L1)
des locuteurs. Ces aspects n’étant que peu présents par ailleurs dans les travaux descriptifs
sur les parlers concernés (de façon partielle en ce qui concerne les grammaires de phrase, pas
du tout en ce qui concerne les structures textuelles), il est nécessaire de mener les analyses en
parallèle sur des données de L2 et de L1.
Les facteurs essentiels à prendre en compte sont les suivants :
- la structure linguistique du lecte (du locuteur, en L1, ou de l’apprenant, en L2) au regard des
moyens contribuant à l’expression des procès et de la temporalité (notamment la présence ou
non d’une morphologie verbale fonctionnelle pour le temps, l’aspect ; les procédés
syntaxiques de hiérarchisation comme la subordination) ;
- les préférences de conceptualisation liées à la L1, susceptibles d’être transférées à la
production de textes en L2 même chez des apprenants avancés (cf. Slobin 1996, Berman &
Slobin, 1994) ;
- les modes relationnels dominants vs secondaires ou absents dans l’organisation du texte
(organisation purement chronologique / organisation causale / organisation intentionnelle par
but et sous-buts : cf. Denhière & Baudet, 1991) — reflétant le type de hiérarchisation que
présentent la structure conceptuelle et le texte.
3
Des études de même type sont menées en Europe et en Amérique sur des productions
d’enfants lors de l’acquisition de leur langue première, en situation monolingue ou plurilingue
(acquisition simultanée de deux langues premières), sur des situations d’apprentissage précoce
d’une L2, sur l’acquisition de langues étrangères, et chez des sujets adultes bilingues dans
leurs deux langues. L’intérêt crucial dans ce type de démarche, c’est d’élucider les processus
psycholinguistiques de production langagière, de compréhension, et d’appropriation de
systèmes linguistiques, et notamment l’interaction entre les processus cognitifs généraux et
leur mise en œuvre dans des langues possédant des caractéristiques typologiques spécifiques,
c’est-à-dire induisant des habitudes spécifiques de “penser pour parler” (Slobin 1996).
Notre parcours de recherche va de l’étude de l’acquisition de langues étrangères à celle
du fonctionnement des situations de bilinguisme et de l’acquisition du bilinguisme, toujours
dans une visée de compréhension des processus de production et de compréhension, et avec
une dimension de comparaison translinguistique fondée sur la typologie linguistique.
Nous allons présenter quelques aspects d’une étude en cours, qui porte sur des
productions de locuteurs du sud-Togo en L1 et en français. Les situations linguistiques de
cette région du monde n’ont pas encore été étudiées sous l’angle des processus d’acquisition
ni plus généralement dans une perspective psycholinguistique. Nous voulons contribuer à le
faire.
3. MÉTHODES
Comment procéder pour recueillir ou rassembler des gammes de récits comparables
autorisant des généralisations fondées ?
Evoquons différentes gammes de récits sur lesquels on peut envisager de faire porter
l’étude, en commençant par les récits spontanés d’expériences personnelles (anecdotes,
incidents, etc.) racontées en contexte spontané dans la conversation (les ‘récits
conversationnels’ selon Labov 1972).
Dans les versions successives données par le même locuteur, interviennent des
variables qui ne sont pas contrôlables en situation spontanée :
- la variable situationnelle, déterminant la saisie de la tâche à effectuer
cf. Berta, adulte chilienne, Histoire de l’étang, en espagnol L1 / en français L2 : narration dans le
premier cas (avec toutes les composantes de la macro-structure d’un texte narratif), remémoration de son
propre texte (tâche métalinguistique à structure additive et non temporelle) dans l’autre.
- la variable interactionnelle, selon le rapport à l’interlocuteur (coopératif / neutre)
cf. Berta, Histoire des vagues, en français I / II, après 9 mois / après 25 mois de séjour en France, le
récit I, malgré le répertoire linguistique plus pauvre, étant plus complet de par l’attitude empathique et
de coopération de l’interlocutrice.
Ces deux gammes de récits sont étudiées en profondeur dans Noyau (1991).
Selon Gülich & Quasthoff (1985), il y a toujours co-construction du récit par les
interactants, même lors d’un récit apparemment monologal. Ces auteurs déclinent un
continuum de types de réalisation de récits allant du plus sommaire au plus développé en
fonction des paramètres de l’interaction :
• annonce de nouvelle : il s’agit d’une production minimale en un énoncé, en général
l’événement clé ou la résolution, et en fonction de la réaction de l’allocutaire, on décide ou non
de s’engager dans la narration;
• compte-rendu : récit purement factuel, non interprété ni mis en relief, simple structure
chronologique éventuellement accompagnée d’éléments descriptifs : ex. les témoignages sur
un fait-divers, un accident ;
• récit d’événements : le narré est interprété, organisé en chaîne causale, et évalué ;
• récit ‘re-vécu’, mis en scène : il s’agit de faire partager de l’intérieur le vécu des
protagonistes, la composante d’interprétation psychologique des actions est plus forte, et l’on
4
a du discours rapporté, renvoyant à des paroles réelles ou non — il s’agit toujours d’une
reconstruction du locuteur — et comprenant parfois des récits enchâssés, tenus par un
protagoniste.
Il est difficile de maîtriser les conditions interactionnelles dans lesquelles sont donnés
les récits au cours de conversations, même lorsque l’interlocuteur est un linguiste conscient de
ce facteur de variation. Et par ailleurs, la sollicitation d’une seconde ou énième version de la
même histoire peut induire une conduite métalinguistique de reproduction d’un texte antérieurement produit (cf. Berta, Histoires de l’étang), et non pas une narration à partir d’une
représentation d’événements.
On est donc conduit à recourir à des récits sollicités dans des conditions contrôlées et
reproductibles, notamment à des histoires produites à partir d’un support, avec consignes et
mise en situation prédéfinies : récits d’histoires en images, récits à partir d’un extrait de film,
etc.
Bien entendu, le recours à ces techniques de sollicitation suppose que soit assurée la
compréhension du message graphique ou audio-visuel — et la construction d’une
représentation cognitive de la structure événementielle par le locuteur, base de sa
conceptualisation. Cela implique la maîtrise des aspects [inter-]culturels, la formulation de
consignes définies (comme de raconter pour un destinataire identifiable (par ex. pour un petit
frère ou sœur), des précautions dans la prise de connaissance de l’histoire (telle image est-elle
interprétée?), ainsi que dans la sollicitation de versions successives en deux langues (dans quel
ordre procéder? changement d’interlocuteur? distance temporelle entre les deux tâches). Pour
mieux contrôler les biais linguistiques de la conceptualisation chez des locuteurs bilingues, il
est bon de constituer deux sous-groupes avec inversion de l’ordre de passation langue a /
langue b.
De même, le comportement interactionnel de l’enquêteur est aussi à contrôler dans la
narration d’histoires sur support : il doit savoir être un vrai interlocuteur, qui réagit
positivement et manifeste sa réception des informations, mais sans fournir de matériaux
linguistiques influençant la construction de l’histoire.
D’une façon générale, la production dans des conditions contrôlées est une condition
nécessaire pour une comparabilité autorisant des conclusions sur les processus de production,
et ce, que les comparaisons portent sur des généralisations intra-groupes, sur des différences
significatives inter-groupes, sur des étapes d’acquisition ou de développement du langage, ou
sur les caractéristiques des productions en différentes langues premières.
4. NOTRE ÉTUDE SUR DES RÉCITS EN L1 ET EN L2 AU TOGO
Des récits sur images ont été sollicités auprès d’enfants et d’adultes locuteurs d’éwé et
de gen-mina, deux parlers étroitement apparentés du groupe gbe, dans leur langue première et
en français. Il s’agit d’une part de caractériser les moyens linguistiques mis en œuvre dans
ces parlers pour construire la référence aux procès, leur inscription dans le temps et leurs interrelations, et plus globalement pour construire un texte narratif, d’autre part d’explorer ce qu’il
en est en français langue non-maternelle (‘langue seconde’) acquise ou en cours d’acquisition
à travers la scolarisation et le contact avec ses fonctions officielles et sociales chez les locuteurs
de ces parlers dans un pays dit ‘francophone’.
4.1 Les données
Les locuteurs sont des groupes d’enfants scolarisés (en français) à deux paliers :
début du second degré (classe de 6ème), en ville ; fin du second degré (classes de 4ème et
5
3ème), en zone rurale, ainsi que des adultes ayant fait des études secondaires (en français),
résidant en ville, paliers fin du second degré (classe de 3ème, BEPC), et fin du troisième degré
(terminale, baccalauréat).
Pour chaque locuteur, on a sollicité deux récits sur images, d’abord en français L2,
puis en langue première : a) Les oisillons et le chat ; b) Grenouille où es-tu? (supports repris
des travaux en psycholinguistique de l’acquisition de Hickmann (1987, 1995), et de Berman
& Slobin, 1994). On table sur des données complètes en L1 et en L2 pour au moins un
groupe homogène de dix adultes et un groupe de dix enfants d’un même palier de
scolarisation.
Les observations qui suivent sont fondées sur les premières analyses des productions
d’une douzaine de locuteurs tous groupes confondus. Elles portent sur les moyens
linguistiques de référence aux procès, à la temporalité, et de construction du récit, et leur mise
en œuvre. Nous donnons d’abord une présentation sommaire de quelques aspects
linguistiques de ces parlers, pertinents pour ce qui est de la représentation de structures
événementielles dans le discours. Nous formulerons sur cette base des hypothèses sur la
référence aux procès, leur inscription dans le temps, et la construction dans le discours narratif
d’une structure événementielle complexe.
5. PRODUCTIONS EN EWE-GEN
5.1 La référence aux procès
En éwé et en gen-mina, le verbe est une catégorie centrale, il est porteur de clitiques de
personnes (en l’absence de SN), et de marques anté- ou post-posées de temps-aspect-mode
(TAM). La forme nue non-marquée correspond à l’impératif, à l’aoriste (passé défini), et à la
mention non-prédicative du procès. Les lexèmes verbaux sont le plus souvent
monosyllabiques1 . Ils peuvent être associés de façon productive en séries verbales
(phénomène des ‘verbes sériels’ ou ‘constructions verbales sérielles’ (CVS), étudié d’un
point de vue typologique notamment par Givón 1991, Lemaréchal 1997 ; voir Bole-Richard
1978 pour ce qui est du gen-mina), qui encodent de façon analytique comme séquence de
micro-procès co-prédiqués ce qui serait conceptualisé comme un procès unique dans d’autres
langues :
(1)2
tsO’·
tsi,
va’
na’
m
prendre eau venir donner Pro1Sobliq
‘apporte-moi de l’eau’ 3
(2)
fo,fo
nye
frère.aîné- 1S
‘mon grand frère est venu de Kpalimé à Lomé’
tso’
kpa’lime va’· lo,me
quitter Kpalimé venir Lomé
1 Structure d’une syllabe : (C)(C)CV + ton haut/ bas/ ascendant/ descendant.
2 Transcription dérivée de la graphie standard (proche d’une représentation phonologique). Dans les
énoncés déclaratifs des récits, on note par : xxxx ° une courbe intonative de proposition à valeur
suspensive, par xxxx _ une courbe intonative à valeur conclusive.
3 Pour les données en gengbe et éwé du sud-Togo, il n’existe pas de système de notation standardisé. Nous
avons par commodité évité le recours à des caractères spéciaux, et rendu les distinctions phonologiques
nécessaires par les distinctions minuscule / majuscule et l’utilisation détournée de quelques signes de
ponctuation :
ton bas
a,
ton modulé haut-bas / bas-haut : a‘, / a,’
ton haut
a’
a~, O~, E~, u~, i~
voyelles nasales
Distinctions signalées par majuscule :
O, E
o ouvert, e ouvert (vs o fermé, é fermé)
D, N,
d rétroflexe, n vélaire
6
(3)
gbO, va’
(= arriver + venir)
‘retourner’ (au lieu de référence, par ex. à la maison)
(4)
gba, trO’ yi, De’ SN
(= itération + V (mouvement inverse) + aller + atteindre SNlieu)
‘retourner ’ (ailleurs, par ex. au travail)
Des verbes jouent dans certains contextes la fonction de marqueurs de rôles casuels
(datif, localisateurs) ce qui serait rendu par des pré- ou postpositions ou par des cas
morphologiques en d’autres langues (cf. (1) : na· donner —> pour ; Ái· ‘être en haut’ —>
sur), leur nature syntaxique est discutée étant donné les processus de grammaticalisation en
cours (verbes ou prépositions homophones de verbes? cf. Lewis 1989, Lemaréchal 1997,
Heine & Reh, 1984) mais ils restent perçus comme de nature verbale par les locuteurs.
Plusieurs verbes peuvent être associés en phrases polyprédicatives (‘serial clauses’, cf.
Duthie, 1988 auquel nous empruntons les deux exemples qui suivent) où les V sont
juxtaposés, éventuellement avec leur environnement actanciel et moyennant certaines
contraintes de co-référence sujets - objets, et où les marques de TAM peuvent affecter un seul
des V ou plusieurs (voir Lewis 1991 pour une discussion de ce dernier point) :
(5)
De,vi‘- a- wo’·
Da,- a
te,
Du,- na
ndo, sia’ ndo,
enfant DEF-PLfaire-cuire HAB igname manger HAB tous les après-midis
‘les enfants se préparent des ignames à manger tous les après-midis’
(6)
ama’
Fo,
De,vi’- a·-wo’· fa, avi,
Ama
frapper enfant DEF·-PL pleurer larmes
‘Ama a battu les enfants et les a fait pleurer (jusqu’à les faire pleurer)’
Ce type de construction est à distinguer des manifestations de l’asyndèse paratactique
dans des énoncés complexes, comme dans :
(7)
ma,’
yi,
ma, va’
1S-FUT aller 1S-FUT venir
‘j’irai je viendrai’ —> ‘je reviens’, ‘à bientôt’
et de l’exploitation spécifique du continuum parataxe - hypotaxe (cf. Lehmann, 1988), sur
laquelle nous reviendrons.
5.2 Inscription des procès dans le temps
Les tiroirs verbaux de l’éwé et du gen-mina marquent des différenciations aspectuelles,
partiellement combinées à des distinctions d’époque4 :
aoriste (forme morphologiquement minimale)
V-Ø
présent habituel / présent progressif (procès singulier)
V-(n)a / le (copule) V -m·
futur simple / futur progressif (dit ‘intentionnel’)
-a·-V / le (copule) V -ge
Il existe en outre des particules (invariables mais de nature verbale) de perfectivité ( vO,
(‘finir’); se (‘s’arrêter’); kpO (‘voir’) ) correspondant selon les contextes à : achèvement
naturel d’un procès (atteinte du telos), interruption avant achèvement naturel d’un procès,
achèvement imminent (cf. Ameka 1988, 1990, ex.(8), (9)) :
(8)
ama’
Ama
Du,
nu’
manger chose
vO,
PFV
‘Ama a fini de manger’
4 Nous n’entrons pas dans le détail des systèmes temporo-aspectuels de chaque parler. Sur les modèles
linguistiques récents de l’aspectualisation, cf. Combettes, François, Noyau & Vet (1993).
7
(9)
e’dzo’
vO,
3SG- quitter PFV
(10)
do’ Nku’ ze, De,ka’ ke o, võ,
kpO’
mets œil fois une que tu avoir-peur PFV
‘souviens-toi d’une fois où ça t’est arrivé d’avoir peur’ (conversation entre adolescents, Lomé)
[kpO’ ‘voir’, ici = avoir eu l’expérience de, c’est déjà arrivé que ]
‘il est déjà parti’
Dans le récit, la forme narrative de base est l’aoriste (la forme nue du V), associée à
une forme progressive pour les situations d’arrière-plan envisagées de façon imperfective,
schème à nominalisation nO, V(± redoublé)(-m) (~ être (Passé) dans le-fait-de-V), ou
schème le V avec neutralisation de l’opposition Passé / Présent, selon les parlers.
5.3 Construction dans le discours d’une structure événementielle complexe :
relations entre situations et plans du récit
Le marquage des relations entre procès dans le discours exploite de façon originale le
continuum parataxe-hypotaxe — ce qui est déjà perceptible à l’exemple des constructions
sérielles. On peut dire avec Houis (1971: 255) a) que l’éwé et le gen-mina tendent à privilégier
l’asyndèse paratactique : juxtaposition de propositions sans marquage explicite de relations ;
b) que l’usage de la subordination y est beaucoup moins fréquent que dans les langues
européennes, et la coordination plus fréquente que la subordination.
La coordination est également structurée de façon spécifique par rapport aux langues
européennes : coordonnant additif entre syntagmes, différent du coordonnant additif entre
propositions dérivé d’une préposition comitative, rôle effacé du connecteur interpropositionnel neutre à valeur additive (P1 eye’ P2 ; SN kple, SN ‘et’) au profit de la
juxtaposition ou bien de connecteurs plus chargés sémantiquement :
SN ku’(do) SN ‘avec’ —> ‘et’, entre SN
(11)
avu,’
ku’
akpO,kplO,bi,to’ vi’tu’kui’
le
e’- si’
chien avec
crapaud
petit COP 3S main
‘il a un chien et* un tout petit crapaud’
(Comlan (M adulte), L1 éwé)
P1 kpO,a, kO,a P2 ‘et puis’, ‘ensuite’, ‘alors’ —> et , entre propositions 5:
(différant du et du français, qui relie de façon symétrique des composants de tout niveau
hiérarchique, du morphème à la proposition)
(12)
ga,·mea
‘à ce moment-là alors
kpO,a
la mère
enO,a va’
vient’ (Dédé (F adulte), L1 gen-mina)
Ce lien entre énoncés de la trame d’un récit peut être exprimé par une formule
apparemment conclusive : (fi’fi’a,) kpO,a e’vO, (= (alors) puis c’est fini), avec ou sans pauses
et courbes intonatives de changement d’énoncé entre cette formule et les propositions
précédente et suivante :
e’ dze,· agba,gba’ ka’ka’ e’ va’ kpO’ xO, De’ le eme, kpO,a evO,
il s’est débrouillé jusqu’à-ce-que il a vu une chambre est.entré dedans et puis c’est fini
exO,ame
fa,·
ka’ka’
e’- sO’ *briquet* to’ e’- si, zo,a
dans la chambre il faisait.froid tellement-que il a pris le briquet il s’est mis à l’allumer
‘il s’est débrouillé pour trouver une chambre mais il y faisait si froid qu’il a allumé le briquet’
(récit de conte, Adjé, 13 ans, 4ème, Lomé)
(13)
5 Notons que le connecteur de séquence temporelle kpO,a (mina), kO,a (ewe) ‘et puis’, ‘ensuite’ tend à
clore prosodiquement la proposition A et non à ouvrir la proposition B (cf. énoncés 4-5 et 7-8 du corpus
ci-dessous).
8
Au niveau de l’enchaînement entre énoncés dans le récit, notons également un procédé
de cohésion caractéristique : le tuilage, ou reprise (littérale le plus souvent, ou avec variation,
par exemple passage du procès à la situation résultante ou à la clôture du procès), en
subordonnée temporelle initiale d’un énoncé b, du procès d’événement constituant le focus de
l’énoncé a précédent, ce qui constitue ainsi un repère temporel explicite de consécutivité
temporelle, pour le procès nouveau introduit en focus de l’énoncé b (cf. pour l’observation de
ce phénomène en kasim, Bonvini (1992).
(14)
ke alO, va’ sO’- e’ a, + e’ vE’, mlO, anyi, + e’ dã, lõ,
quand le sommeil l’a pris il est allé se coucher il a dormi
ke ebe’ dã, lõ,a ∞ + akpO,kplO,bi,to’-a si’ dzo’ +
quand ils ont dormi la grenouille s’est enfuie (= se sauver + partir)
ke ebe’ si’ dzo’- a ∞ + ke De,vi’-a fõ, a + m’ gba, kpO’- e’ o,
quand elle s’est enfuie quand l’enfant s’est réveillé il ne l’a pas retrouvée
(jeune fille 16 ans, Terminale, Lomé)
On peut donc affirmer que globalement, les modes d’enchaînement entre propositions
et de cohésion dans le récit, dans les parlers de ce groupe, se présentent de façon très
différente de ce qu’ils sont dans le récit (oral) en français, et que les notions de phrase, et de
coordination / subordination, trouvent difficilement à s’y appliquer dans le discours suivi.
6. PRODUCTIONS EN FRANÇAIS
En fonction de ces observations linguistiques, nous avons formulé des :
6.1 Hypothèses sur la construction de récit en français L2 par des locuteurs d’éwé et
de gen-mina
L’examen préliminaire de corpus narratifs obtenus en français chez des enfants
locuteurs d’éwé et de gen-mina nous avait fait supposer une influence de la langue première
dans l’usage du français pour construire des récits, s’ajoutant aux phénomènes
acquisitionnels. Les aspects linguistiques évoqués ci-dessus permettent de préciser une série
d’hypothèses, dont le poids est à valider quantitativement sur des corpus complets, tant au
niveau des préférences de conceptualisation qu’à celui des moyens linguistiques mis en œuvre
et de leur fonctionnement.
6.2 La référence aux procès en français L2
Les locuteurs de gen-mina et d’éwé, langues analytiques du point de vue de la
référence aux procès, tendront à conceptualiser davantage les procès de façon analytique.
Ainsi, pour des procès comme les placements et déplacements d’objets (par ex. rapporter N),
on peut s’attendre à des formulations décomposant l’action en composantes de maniement
d’objet + des composantes de mouvement (par ex. aller prendre N et revenir).
Une telle tendance devrait se trouver renforcée lors de l’acquisition par les limitations du
lexique verbal en L2, et par la tendance générale à l’utilisation des lexèmes verbaux au niveau
de base de la catégorisation des procès et de fréquence élevée dans l’acquisition d’une langue
non-maternelle (cf. Viberg, 1993).
6.3 L’inscription des procès dans le temps en français L2
La forme verbale non-marquée en éwé et gen-mina correspond à l’aoriste qui a
vocation naturelle à constituer le temps narratif de base (procès singuliers révolus perfectifs :
MSit IN MQ, cf. Klein, 1994, Noyau 1992)6. Par ailleurs, le présent, dans ces parlers,
6 Les intervalles temporels constitutifs, dans ce modèle de la temporalité, sont : MP : moment de la
parole, MQ : moment en question (sur lequel porte l’assertion) ; MSit : moment de la situation. Les
9
contraint à choisir entre deux valeurs aspectuelles spécifiques dérivées de l’imperfectivité
intrinsèque du présent : progressif (MQ IN MSit; perspective sur le déroulement du procès),
ou habituel (itérations sur une durée non close). Pour cette raison, on s’attend peu à ce que les
locuteurs adoptent le présent (de narration) comme temps de base dans leurs récits en français
L2. Il est en revanche à supposer que l’on trouvera du présent pour les situations imperfectives
d’arrière-plan même révolues, chez les locuteurs de gen-mina au moins, étant donné la
neutralisation de l’opposition temporelle passé / non-passé pour la forme progressive en genmina.
Cette tendance cependant pourrait être contrecarrée par le facteur acquisitionnel : chez
les jeunes enfants lors de la phase d’acquisition initiale, on peut s’attendre à trouver du
Présent même dans la trame narrative, pour deux raisons, la première tenant à l’exposition à la
langue en milieu scolaire : la suprématie du présent dans les progressions pédagogiques avant
l’introduction des autres temps ; et la seconde tenant au processus d’acquisition lui-même : les
apprenants d’une langue étrangère tendent à généraliser au départ une forme non-marquée
temporellement (cf. Dietrich, Klein & Noyau 1995).
6.4 La construction dans le discours d’une structure événementielle complexe : les
relations entre situations et plans du récit en français L2
Dans le discours narratif suivi, on peut s’attendre en L2 - et pas seulement chez les
apprenants mais aussi chez les adultes - à une forte tendance à la parataxe par simple
juxtaposition, qui exige du destinataire un appui sur des inférences pragmatiques pour
construire la relation contextuellement appropriée mais qui est autorisée par le code. On peut
s’attendre aussi à trouver un recours préférentiel à des connecteurs sémantiquement
différenciés au détriment du coordonnant neutre. Enfin on fait l’hypothèse que l’on aura
moins de relations hypotactiques entre procès narrés qu’on ne s’y attendrait en français dans
les contextes considérés, notamment pour les relations temporelles et de cause-but.
6.5 Quelques résultats sur les récits en français L2
6.5.1 Sur la référence aux procès
On trouve des instances nombreuses de conceptualisation analytique des procès par
chaînes de verbes ou de propositions, chez les locuteurs les plus jeunes ou ceux de zone rurale
:
(15)
le chauffeur veut taper fifi puis ° ++ fifi a pris le chauffeur l’a jeté dans le puits
(Adjévi, 9 ans 1/2, élève de CM1, Lomé, récit de livre)
(16)
i prend son singe + et lui donne des nourritures pour qu’il donne à fifi à anika
+ pour qu’ils mangent (Adjévi,ibid.)
(17)
le petit garçon a couru et a fui
(Kokou N, 18 ans, élève de 3ème CEG, Grenouille où es-tu?)
(18)
i s’est tombé de l’arbre et s’est jeté par terre (Kokou N, ibid.)
(19)
et + le chat + lorsqu’il voyait l’oiseau + il s’est retourné + en partant
(= la mère oiseau a fait fuir le chat)
(Kossi A., 17 ans, élève de 3ème CEG, Les oisillons)
valeurs des tiroirs verbaux aspecto-temporels s’obtiennent par leurs différentes configurations relationnelles
(Klein 1994, Noyau 1992).
10
6.5.2 Sur l’inscription des procès dans une structure temporelle
On observe chez les enfants une oscillation du temps de base de la narration entre
Présent et Passé Composé ou Passé Simple, conforme aux hypothèses (cf. ex. 15, 21), sans
qu’on puisse attribuer cette oscillation au choix fonctionnel d’un Présent de narration pour la
mise en relief de certains procès.
Il apparaît entre autres une sur-utilisation de l’imparfait pour des procès perfectifs de la
trame narrative :
(20) 1. il était une fois un oiseau et ses oisillons _
2.
3.
4.
5.
6.
7.
les oisillons avaient faim _
alors l’oiseau est parti leur chercher à manger _
quand il partait un chat venait _
quand le chat est venu le chat regardait les oiseaux °
et montait dans / et monta dans l’arbre _
quand il montait un chien vient _ …
(Têlé, 10 ans, CM2, Les oisillons)
Les procès imperfectifs d’arrière-plan sont souvent traités au Présent :
(21)
lorsqu’il est sur l’arbre + les abeilles et les oiseaux le dérangent °
+ et il est tombé par terre _ (David, 17 ans, 4ème CEG, Grenouille où es-tu?)
6.5.3 Sur les relations entre situations et les plans du récit
On observe une tendance, en L2 aussi, à l’asyndète paratactique entre énoncés
successifs de la trame :
(22) 7. quand il montait un chien vient _
8.
9.
10.
11.
quand il atteignait les oiseaux le chien lui mordit la queue _
il descendit _
l’oiseau donna à manger à ses enfants _
quand le chat descendit le chien court après lui et l’attrappe _
(Têlé, 10 ans, CM2, Les oisillons)
Le recours à des connecteurs sémantiquement ‘lourds’ alterne avec l’asyndète paratactique :
(23)
le chien est tombé par terre* + puis le pot est cassé (David, ibid.)
(* avec la tête dans le pot ) 7
Le procédé de tuilage est massivement attesté : des suites de type : A. quand A, B. sont
massivement utilisées comme procédé de cohésion entre propositions de la trame narrative : la
proposition A se trouve reprise (textuellement ou non) dans la proposition B en topique dans
une subordonnée temporelle, comme cadre temporel d’un procès nouveau donné en focus
dans la principale, comme on l’observe en éwé et en gen-mina :
(24) 6 en même temps il commence à grimper sur la + plante
7
8
9
10
11
lorsque il est fait cela ° un chien aussi est venu °
et ce chien le voyait +++
en même temps lorsqu’il est / lorsqu’il a grimpé sur l’arbre
le chien l’a tenu la queue +
et lorsqu’il faisait cette scène ° l’oiseau est venu avec un ver dans la bouche pour nourrir ses enfants
(Kokou N, 18 ans, 3e CEG, Les oisillons)
7 Ce qui marque, en termes de la LC, une relation APRÈS, et NON ADJACENT (consécutivité avec
distance temporelle), contraire aux faits et à leur logique.
11
L’ensemble de ces caractéristiques de la construction du récit en L2 contribuent à
étayer l’hypothèse d’une forte influence des préférences de conceptualisation et de
formulation de la L1 sur la construction des récits en L2 lors de son apprentissage.
7. POUR POURSUIVRE
Ces traits relevés de façon récurrente à travers les corpus de récits en français L2
doivent être retracés de façon systématique en comparant transversalement des groupes de
locuteurs à des moments successifs de l’acquisition du français, et mis en relation avec les
productions d’adultes scolarisés dont le lecte de français est stabilisé, pouvant ainsi donner
une image de la variété cible de L2 à laquelle les enfants sont exposés. On entreprendra ainsi
de départager les phénomènes acquisitionnels des phénomènes de convergence dûs au substrat
de L1 dans l’acquisition et l’utilisation du français au Togo.
Au-delà, les résultats sur les différents groupes de locuteurs seront à examiner à un
double point de vue, celui de la construction de lectes de français par la scolarisation, et celui
de l’appropriation de la langue française par une communauté culturelle particulière.
En ce qui concerne le premier aspect : la construction par les apprenants de lectes de
français plus ou moins conformes au système linguistique (phrastique et textuel) de la langue
française de référence, les résultats devraient permettre de mieux définir des approches
didactiques pour la construction d’une compétence narrative en langue française, et plus
généralement pour la construction des aspects linguistiques de la référence aux procès et à leur
inscription dans le temps — ce qui est crucial également pour d’autres types de textes, comme
les descriptions d’action ou les instructions (le ‘dire de faire’ ; cf. Noyau 1994, 1996).
Ce parcours aura sans doute permis d’entrevoir la fécondité de l’approche des
phénomènes de conceptualisation et de formulation linguistiques par des gammes de récits. Et
l’intérêt — la nécessité — d’envisager les langues africaines sous l’angle des processus de
leur utilisation par les locuteurs, à la fois pour élargir la connaissance des processus
psycholinguistiques par la prise en compte de langues plus diverses typologiquement, et pour
l’éclairage descriptif que cela procure sur des aspects linguistiques mobilisés dans les textes
dont une simple description structurale phrastique ne donne pas une juste idée.
Contact :
Colette NOYAU
Département des Sciences du langage
Université Paris X-Nanterre
F-92001 NANTERRE Cedex
Fax : 00 33 1 4097 4073
Courriel : [email protected]
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