TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE NANTES N° 081045 ______

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TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE NANTES N° 081045 ______
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE NANTES
N° 081045
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PREFET DE LA VENDEE
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M. Lesigne
Rapporteur
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Mme Loirat
Rapporteur public
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Tribunal administratif de Nantes,
(1ère chambre),
Audience du 2 mars 2010
Lecture du 30 mars 2010
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68-03-03-01-02
C
Vu le déféré, enregistré le 27 février 2008, présenté par le PREFET DE LA VENDEE ;
le PREFET DE LA VENDEE demande au Tribunal d’annuler la décision tacite en date du
13 mai 2007 par laquelle le maire de La Faute-sur-Mer a autorisé M. et Mme Bethon à édifier
une maison individuelle sur un terrain situé rue des Trois Mâts ;
……………………………………………………………………………………………………...
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 mai 2008, présenté pour M. et Mme Bethon,
par Me Le Mière, qui concluent au rejet de la requête et demandent la condamnation de l'Etat à
leur payer une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 7611-1 du code de justice
administrative ;
……………………………………………………………………………………………………...
Vu la lettre en date du 8 janvier 2010, informant les parties, en application de
l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision à intervenir est susceptible
d'être fondée sur un moyen soulevé d'office ;
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Vu le mémoire, enregistré le 14 janvier 2010, présenté pour M. et Mme Bethon, par
Me Le Mière, qui concluent aux mêmes fins que leurs précédents écrits, par les mêmes moyens
et demande, par ailleurs, la condamnation de l’Etat à leur payer une somme de 10 000 euros au
titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
……………………………………………………………………………………………………...
Vu le mémoire, enregistré le 14 janvier 2010, présenté pour la commune de
La Faute-sur-Mer, représentée par son maire en exercice, par Me Reveau, qui conclut au rejet de
la requête et demande la condamnation de l’Etat à lui payer une somme de 1 500 euros au titre de
l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
……………………………………………………………………………………………………...
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
Vu le code de l’urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 mars 2010 :
- le rapport de M. Lesigne, rapporteur,
- les conclusions de Mme Loirat, rapporteur public,
- et les observations de M. Bessonnet, représentant le préfet de la Vendée et de
Me Reveau, avocat de la commune de La Faute-sur-Mer ;
Vu la note en délibéré, produite le 30 mars 2010 pour M. et Mme Bethon, par
Me Le Mière, laquelle ne comporte aucun élément nouveau de nature à justifier une réouverture
de l'instruction ;
Considérant que le PREFET DE LA VENDEE demande l’annulation du permis tacite
qui a été délivré par le maire de La Faute-sur-Mer au bénéfice de M. et Mme Bethon à la suite de
leur demande d’autorisation pour l’édification d’une maison individuelle rue des Trois-Mâts ;
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Sur les fins de non-recevoir opposées par M. et Mme Bethon et par la commune :
Considérant, en premier lieu, que la circonstance que le préfet de la Vendée n’a pas
demandé l’annulation de la décision implicite par laquelle le maire de La Faute-sur-Mer a rejeté
le recours gracieux du sous-préfet des Sables-d’Olonne tendant au retrait du permis tacite qu’ils
ont obtenu ne rend pas le déféré préfectoral irrecevable ;
Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que le maire de La Faute-sur-Mer ne
pouvait légalement, en application des dispositions de l’article 23 de la loi susvisée du 12 avril
2000, retirer le permis litigieux dès lors que le recours gracieux avait été effectué plus de deux
mois à compter de la date à laquelle est intervenue la décision ne faisait pas obstacle à ce que le
préfet de la Vendée effectuât un déféré préfectoral à l’encontre de ce permis en application des
dispositions de l’article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales ; que si le
bénéficiaire du permis invoque, par la voie de l’exception, l’illégalité des dispositions de
l’article R. 421-35 du code de l’urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur, l’exception
d’illégalité n’est, en tout état de cause, pas recevable dès lors que le permis qui lui a été
tacitement accordé, et qu’il ne saurait du reste contester, n’est pas un acte d’application des
dispositions dont l’illégalité est invoquée ; que, par suite, les fins de non-recevoir opposées par
M. Bethon ne peuvent qu’être écartées ;
Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article R. 600-1 du code de
l’urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date du recours gracieux : « En cas de déféré du
préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un document d'urbanisme ou d'une décision
relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l'auteur du
recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et, s'il y
a lieu, au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les
mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision
juridictionnelle concernant un document d'urbanisme ou une décision relative à l'occupation ou
l'utilisation du sol. L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine
d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du
recours administratif. / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre
recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt
du déféré ou du recours. / La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au
titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec
accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée
auprès des services postaux. » ; qu’en application de ces dispositions, il appartient au préfet, en
cas d'exercice par lui d'un déféré, ainsi qu'à l'auteur d'un recours contentieux, quand ceux-ci sont
dirigés contre un document d'urbanisme ou une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du
sol régie par le code de l'urbanisme au sens de l'article L. 600-3 de ce code, d'adresser au greffe
de la juridiction où le déféré ou le recours contentieux a été enregistré une copie du certificat de
dépôt de la lettre recommandée adressée à l'auteur du document d'urbanisme ou de la décision
contestée et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation ; qu’en outre, si ce recours a été précédé
d'un recours administratif qui a eu pour effet de conserver le délai de recours contentieux, doit
également être transmise au greffe de la juridiction concernée une copie du certificat de dépôt de
la lettre recommandée afférente au recours administratif ;
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Considérant qu’il ressort des pièces du dossier qu’à la suite de la réception le 8 octobre
2007 par les services préfectoraux du dossier de permis tacite de M. Bethon, le sous-préfet des
Sables-d’Olonne a effectué le 26 novembre 2007 un recours administratif auprès du maire de
La Faute-sur-Mer tendant au retrait du permis de construire tacite en date du 13 mai 2007 ; que
ce recours gracieux a eu pour effet de proroger le délai de recours contentieux ; qu’il ressort des
pièces du dossier que ledit recours gracieux a été notifié au bénéficiaire du permis litigieux dans
les conditions prévues par les dispositions précitées de l’article R.600-1 du code de l'urbanisme ;
qu’ainsi, la fin de non-recevoir opposée par la commune de La Faute-sur-Mer doit être écartée ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les fins de non-recevoir opposées en
défense ne peuvent qu’être écartées ;
Sur la demande d’annulation du permis tacite :
Considérant qu’aux termes de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme : « Le permis de
construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions
spéciales si les constructions, par leur situation ou leurs dimensions, sont de nature à porter
atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. Il en est de même si les constructions projetées,
par leur implantation à proximité d'autres installations, leurs caractéristiques ou leur situation,
sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. » ; qu’il ressort des pièces
du dossier que la parcelle d’assiette du projet est située le long de la digue est de l’estuaire du
Lay et a été de ce fait classée en zone rouge, zone d’aléas et enjeux forts, au plan de prévention
du risque inondation de l’estuaire de la rivière « Le Lay » dont certaines dispositions ont été
rendues opposables par anticipation par l’arrêté préfectoral du 8 juin 2007, compte tenu des
risques de submersion de la digue lors des tempêtes marines et de ce que cette dernière doit être
considérée comme un dispositif susceptible de se rompre ; que si cet arrêté est entré en vigueur
postérieurement au permis tacite contesté, le maire de La Faute-sur-Mer pouvait légalement se
fonder sur un projet de ce plan ainsi que sur les études préalables à son établissement afin
d'apprécier dans quelle mesure le projet de construction litigieux était susceptible de présenter un
risque pour la sécurité publique; qu’il suit de là qu’eu égard à l’importance des risques
susévoqués, le maire de La Faute-sur-Mer a commis une erreur manifeste d’appréciation en
délivrant le permis tacite contesté ; que le préfet de la Vendée est dès lors fondé à demander son
annulation ;
Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice
administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l’Etat qui n’est pas dans la
présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à M. et Mme Bethon et à la commune
de La Faute-sur-Mer la somme que ces derniers demandent au titre des frais exposés par eux et
non compris dans les dépens ;
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DECIDE:
Article 1er : Le permis tacite accordé à M. et Mme Bethon pour l’édification d’une
maison individuelle rue des Trois-Mâts est annulé.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. et Mme Bethon et par la commune de
La Faute-sur-Mer au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de
l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des
négociations sur le climat, à M. et Mme Jean-Raymond Bethon et à la commune de
La Faute-sur-Mer .
Une copie en sera, en outre, adressée au PREFET DE LA VENDEE et au procureur de
la République près le Tribunal de grande instance des Sables-d’Olonne.
Délibéré après l’audience du 2 mars 2010 à laquelle siégeaient :
M. Iselin, président,
M. Lesigne, premier conseiller,
M. Molla, premier conseiller,
Lu en audience publique le 30 mars 2010.
Le rapporteur,
Le président,
Signé : F. LESIGNE
Signé : B. ISELIN
Le greffier,
Signé : M-C MINARD
La République mande et ordonne
au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer,
en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat,
en ce qui le concerne et à tous huissiers à ce
requis, en ce qui concerne les voies de droit commun
contre les parties privées de pourvoir
à l’exécution du présent jugement.
Pour expédition conforme,
Le greffier,

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