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FICHE PÉDAGOGIQUE
Dame en blanc sur la plage de Trouville – Eugène Boudin
Auteurs : Patricia Brague de Labarthe, Dominique Beauvais
Contexte
Titre : Dame en blanc sur la plage de Trouville
Artiste : Eugène Boudin (1824-1898)
Date : vers 1869
Dimensions : H. 31,4 cm ; L. 48,6 cm
Technique : Huile sur toile
Lieu de conservation : Musée Malraux, Le Havre
© Ville du Havre, musée Malraux/Florian Kleinefenn
Lieu de création : Trouville
Les rivages de la Manche, longtemps « territoires du
vide », attirent dès 1820-1830 une clientèle aristocratique.
L’usage des bains de mer recommandé par les hygiénistes,
entraîne la naissance des premières stations balnéaires.
Dès 1850, le développement des chemins de fer favorise
leur fréquentation. Si les premiers « villégiaturistes »
fréquentent d’abord la Côte d’Albâtre, le Second Empire
voit naître un attrait pour les plages de sable de la future
Côte fleurie. Trouville supplante peu à peu Dieppe avant
d’être à son tour concurrencée par Deauville. À leur tour,
les peintres se fixent durant l’été sur cette portion du
littoral : ils inventent une peinture plus lumineuse et plus
naturelle.
En 1861, en proie aux difficultés financières, Boudin, sur
le conseil d’Isabey, entreprend ces scènes de plage qui
vont lui assurer un rapide succès. Il séjourne et réalise
chaque été un bon tiers de sa production à Trouville qui
voit affluer la haute société du Second Empire. Il trouve là
une nouvelle clientèle d’autant que l’ouverture de la ligne
ferroviaire Paris-Deauville en 1863 favorise l’essor des
deux stations.
Analyse de l’œuvre
haque été, Boudin, installé au Havre depuis 1835, séjourne à
C
Trouville et la représentation des citadins s’adonnant aux plaisirs
des bains de mer fera la réputation du peintre. La naissance du
thème des plages de l’artiste remonte sans aucun doute à sa
rencontre avec Isabey et Jongkind en 1862.
Un cadrage rapproché propose un groupe de personnages décentré
vers la gauche et disposé en frise venant fermer l’horizon. La
vision panoramique impose une foule étendue où joue la lumière.
Quelques touches esquissent les formes et seule la dame blanche,
au premier plan, se distingue plus nettement. Elle est d’ailleurs
présente dans un autre tableau similaire, Trouville, crinolines et
cabines de la même année. L’absence de contours évoque des silhouettes et la fusion des personnages des différents
plans semble propre à rendre l’essence même de la vie de ses contemporains.
Comme saisi sur le vif, Boudin sait traduire le mouvement des nuages, la variation de la lumière dans une approche
retenue mais moderne par l’adéquation de la forme avec le sujet.
CRDP de Haute-Normandie
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Pistes pédagogiques
Niveau : 4e
Disciplines : Histoire-géographie – Arts plastiques
Thématiques : L’œuvre d’art et la place du corps et de l’homme dans le monde et la nature
Histoire
Géographie
L’étude de l’œuvre de Boudin permettra à la fois d’aborder l’évolution culturelle et artistique mais aussi les conséquences
sociales du phénomène industriel au xixe siècle inscrit dans les programmes de 4e (« L’Europe et son expansion au
xixe siècle (1815-1914), l’âge industriel »).
La vidéoprojection est utilisée afin de présenter la toile dans son ensemble en classe.
La forme de l’œuvre est d’abord abordée. Après en avoir précisé le genre (un tableau), sa composition est analysée.
On peut ainsi mettre en évidence la disposition des personnages au centre, en frise, dans une vision panoramique,
fermant la ligne d’horizon ; on notera aussi la large place occupée par le ciel, marbré de nuages, peu engageant
pour la baignade mais lumineux et changeant. Différents effets de zoom sur la toile permettent ensuite aux élèves
d’appréhender l’absence de contours définis des silhouettes et des objets : on peut, par exemple, s’attarder sur les
personnages et montrer à quel point la symétrie des mâts surmontés de drapeaux et des cabines de bain à droite se
fond dans l’ensemble.
La répartition des personnages dans l’espace est ensuite observée. Les élèves identifient au premier plan la dame
en blanc au centre, seul personnage qui se distingue un peu du reste de la composition et donne son titre au tableau
(vue de profil, assise sur une chaise à l’ombre d’un parasol, la tête penchée sur des travaux d’aiguille) puis repèrent au
second plan, à gauche, une masse compacte et confuse de personnages assis vus de dos, hommes en habits noirs et
femmes protégées du soleil par des parasols, contemplant la mer et l’horizon.
On repère ensuite les techniques utilisées par l’artiste (peinture à l’huile sur carton) et le choix des couleurs (le blanc
sale pour le ciel marbré de nuages, bleu, jaune, gris, noir, l’ocre pour la plage). Un zoom sur la toile permet d’observer
le travail par touches rapides et colorées pour évoquer, par exemple, des enfants vêtus de blanc jouant sur le sable à
gauche.
On conduit ensuite l’analyse vers le sens de l’œuvre. Son sujet sert de point de départ à une réflexion sur les pratiques
de plage au xixe siècle : les élèves doivent comprendre que le séjour à la mer privilégie la contemplation et l’acte social,
laissant au second plan les plaisirs de la baignade. Ces messieurs en habits et ces dames élégantes vêtues de longues
robes à crinolines dissimulant paradoxalement leur corps, contemplent la mer et conversent sur la plage comme dans
un salon recréant ainsi au bord de la mer un mode de vie semblable à celui de la capitale. On montre toutefois que
Boudin donne plus d’importance aux jeux de lumière qu’aux personnages eux-mêmes : dans cette œuvre, il parvient
à saisir sur le vif une foule moderne dans ses habits quotidiens avec un sens de l’instantané, proche de l’esprit de
l’impressionnisme.
Les usages de l’œuvre sont enfin précisés. ils doivent permettre aux élèves de conclure que Boudin savait pouvoir
trouver à Trouville une clientèle fortunée, la haute société du Second Empire qu’il peignait dans ces scènes de plage.
De la même façon qu’elle aimait se faire représenter au milieu des salons parisiens, elle appréciait ces toiles où elle se
donnait aussi à voir en villégiature.
Prolongements
Plusieurs pistes sont possibles.
La confrontation de l’œuvre de Boudin avec l’affiche publicitaire d’une station balnéaire permettra d’approfondir
l’étude des effets des progrès industriels sur la culture au cours du xixe siècle. Plusieurs exemples sont notamment
conservés dans les collections du château musée de Dieppe. L’une d’elle, attribuée au dessinateur Amigues (Japhet),
commandée par les chemins de fer de l’Ouest en 1894 est intitulée L’Été à Dieppe. Les arguments mis en avant pour
vanter les attraits de la station peuvent facilement être mis en évidence par les élèves : la distance horaire depuis
Paris (3 heures), des liaisons fréquentes (dix trains express par jour), les attraits touristiques de la région (les châteaux
de Dieppe et d’Arques, l’église Saint-Jacques de Dieppe) ; les aménagements balnéaires propres au site (la plage
ainsi que le casino et le champ de courses qui offrent d’autres loisirs possibles à la haute société) ainsi que la liaison
possible par paquebot avec l’Angleterre.
L’art, reflet des transformations de la société européenne au xixe siècle : une recherche sur différentes affiches et
œuvres d’art montrant l’avènement des loisirs populaires prolongera le travail réalisé (Renoir : Le Bal du moulin de la
Galette ; La Grenouillère ; Manet : La Serveuse de bocks ; Degas : L’Orchestre de l’Opéra ou Le Défilé ; Monet : Les
Régates à Argenteuil ; Sisley : Les Régates à Molesey ; Seurat : Le Cirque, Un dimanche dans l’île de la Grande-Jatte ;
Toulouse-Lautrec ; La Danse au Moulin-Rouge, etc.).
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L’œuvre de Boudin pourra enfin être mise en perspective avec une œuvre romantique (Le Moine au bord de la mer de
Friedrich par exemple) puis réaliste (La Vague de Courbet par exemple) afin d’analyser l’évolution du regard porté sur
la nature par les artistes au xixe siècle.
Arts plastiques
Niveau : 4e
Références aux programmes : Images, œuvre et réalité
La nature et les modalités de production des images. Cette entrée permet d’interroger les relations entre la nature de
l’image, les moyens de production (estampe, impression, photographie, image numérique), le geste et le support.
Formulation des propositions
Détournement
Distribution du tableau de Boudin, Dame en blanc sur la plage de Trouville.
Par reproduction ou par collage, utiliser l’image de la dame blanche pour la création d’une image publicitaire sur un
produit ou un service de votre choix.
Mot de vocabulaire : détournement ; statut ou fonction de l’image ; communication visuelle.
Références aux champs artistiques : Pop Art ; M. Ragon et La Nouvelle Figuration ; G.Gassiot-Talabot et les mythologies
quotidiennes.
Œuvre inachevée
Une photographie même floue ou ratée est achevée ; un dessin, par contre, en fonction des choix ou des intentions de
l’artiste, du temps dont il dispose ou de la technique utilisée, peut être inachevé. Réalisez une production inachevée
qui nous montre quelque chose de plus.
Technique et format libres.
Mots de vocabulaire : esquisse ; croquis ; projet ; geste ; hyperréalisme.
Références aux champs artistiques : carnet de croquis et œuvres préparatoires d’artistes ; Dubuffet ; œuvres graphiques
de Giacometti ; Adami ; Cy Twombly ; R. Opalka.
Intempérie
Réflexion collective en classe sur les différents types d’intempéries et catastrophes naturelles : tellurique : séisme ;
atmosphérique : brouillard, cyclone ; climatique : tempête de neige ; maritime : tsunami, etc.
En utilisant une technique appropriée, donnez à voir une intempérie.
Production en 2 ou 3 dimensions ; création numérique.
Références aux champs artistiques : W. Turner : Tempête de neige : vapeur au large d’un port, Vague se brisant contre
le vent ; J.A. Whistler : Nocturne en gris et or : Picadilly ; Monet : Tempête, côte de Belle-Île, La Pie ; Rose Finn-Kelcey :
sans titre (nuage de vapeur), 1992 ; Bill Viola : Theater of memory ; Pierpaolo Calzolari : sans titre (gel sur une feuille
de cuivre) ; J. Beuys : Plight.
Ressources complémentaires
• Barthélémy, Sophie (dir.), Monet et ses amis, exposition, Budapest, musée des Beaux-Arts de Budapest, 2003, p.
144-145 du catalogue.
• Bergeret-Gourbin, Anne-Marie (dir.), Un siècle de bains de mer dans l’estuaire de la Seine (1830-1930), exposition
(28 juin-6 octobre 2003), Honfleur, musée Eugène-Boudin, p. 121 du catalogue.
• Clary, Daniel, Tourisme et villégiature sur la côte normande, Caen, thèse d’État, 1974.
• Cohen, Françoise, La Visite. Le Havre. Les chefs-d’œuvre du musée Malraux, Paris, Adam Biro, 1999, p. 48-49.
• Corbin, Alain (dir.), L’Avènement des loisirs : 1850-1960, Paris, Aubier, 1995.
• Désert, Gabriel, La Vie quotidienne sur les plages normandes du Second Empire aux années folles, Paris, Hachette,
1983.
• Klein, Jacques-Sylvain, La Normandie, berceau de l’impressionnisme (1820-1900), Rennes, Ouest-France, 1999.
• Néret, Gilles, Les Impressionnistes de la révolte à la consécration, Fribourg, Office du livre, 1985, p. 74.
• Oliveira (de), Nicolas, Oxley, Nicolas, Pétry, Michael, Installations (l’art en situation), Londres, Thames et Hudson,
1994.
• Schmit, Robert, Eugène Boudin (1824-1898), Paris, galerie Schmit, 1973-1993 (3 vol., tome I, no 499, p. 186 –
Vignette en noir et blanc – Sous le titre : Scène de plage à Trouville).
•W
ildenstein, Daniel, Claude Monet. Biographie et catalogue raisonné, Lausanne/Paris, La bibliothèque des arts,
1974, p. 421, lettre XIII.
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www.musee-orsay.fr : photographies et commentaires du Bal au moulin de la Galette de Renoir ; L’Orchestre de
l’Opéra et Le Défilé de Degas ; Les Régates à Argenteuil de Monet ; Le Cirque de Seurat.
www.culture.gouv.fr : base Joconde du ministère de la Culture pour Les Régates à Molesey de Sisley (conservé au
musée d’Orsay, Paris).
www.histoire-image.org : site de l’Histoire par l’image (1789-1939) pour La Danse au Moulin-Rouge de Toulouse-Lautrec
(conservé au musée d’Orsay, Paris) et Moine au bord de la mer de C.D. Friedrich (conservé à la Alte Nationalgalerie
de Berlin).
www.ville-lehavre.fr : le site permet d’accéder aux collections du musée Malraux du Havre et notamment à La Vague
de Courbet.
http://collections.musees-haute-normandie.fr/collections : portail des musées de Haute-Normandie pour l’affiche des
chemins de fer de l’Ouest, L’Été à Dieppe (conservée au château musée de Dieppe).
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