PAR OLIVIER ASSAYAS - Festival du film de l`Outaouais
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PAR OLIVIER ASSAYAS - Festival du film de l`Outaouais
PAR OLIVIER ASSAYAS Véritable mythe, Carlos est au cœur de l’histoire du terrorisme international des années 1970 et 1980, de l’activisme propalestinien à l’Armée rouge japonaise. A la fois figure de l’extrême gauche et mercenaire opportuniste à la solde des services secrets de puissances du Moyen-Orient, il a constitué sa propre organisation, basée de l’autre côté du rideau de fer, active durant les dernières années de la guerre froide. LA SÉRIE ÉVÉNEMENT D’OLIVIER ASSAYAS Produite par Daniel Leconte Écrite par Olivier Assayas et Dan Franck D’après une idée originale de Daniel Leconte Conseiller historique Stephen Smith DIRECTION DE LA COMMUNICATION DANIÈLE MAISONNASSE 01 71 35 24 73 06 20 75 13 70 [email protected] ALEXIA VEYRY 01 71 35 20 58 06 88 81 92 73 [email protected] CARLOS.CANALPLUS.FR Un site dédié exclusif avec, notamment, des images d ’archives et des scènes clés de la série commentées par Olivier Assayas. Le film est l’histoire d ’un révolutionnaire internationaliste, manipulateur et manipulé, porté par les flux de l’histoire de son époque et de ses dérives. Nous le suivrons jusqu’au bout de son chemin, relégué au Soudan où la dictature islamiste, après l’avoir un temps couvert, l’a livré à la police française. Personnage contradictoire, aussi violent que l‘époque dont il est une incarnation, Carlos est aussi une énigme. C’est elle que nous avons voulu contribuer à déchiffrer. Avec Edgar Ramírez dans le rôle de Carlos Le film CARLOS a été réalisé à partir d’un important travail de documentation historique et journalistique. Pour autant, la vie de Carlos comportant d’importantes zones d’ombre, sujettes à controverse, ce film est avant tout une fiction retraçant deux décennies du parcours d’un des plus célèbres terroristes internationaux. Édito La question de la restitution du contexte historique a conditionné l’écriture des scénarios. Olivier Assayas, Dan Franck et Stephen Smith ont passé des mois à recouper les informations recueillies dans les multiples ouvrages et articles de presse consacrés à Carlos et au terrorisme des années 1970-80. Ils sont ainsi parvenus à reconstituer l’essentiel de sa “carrière”, assumant une part d ’interprétation des zones restées dans l’ombre. Ilich Ramírez Sánchez vit aujourd ’hui en prison. Et le terrorisme révolutionnaire d ’obédience marxiste a disparu avec l’effondrement du bloc communiste. Pourtant personne n’a oublié Carlos, dont la photographie volée au téléobjectif sur le tarmac de l’aéroport d ’Alger a fait le tour du monde. Les scénarios restituent avec une extraordinaire rigueur les enjeux du conflit au Moyen-Orient, les rivalités entre pays arabes, le climat de fin de guerre froide. Et Carlos trouve sa juste place dans l’échiquier politique de l’époque. La reconstitution historique démythifie le personnage. Sous le vernis de la fable apparaît un personnage complexe : sa violence, sa soif de reconnaissance et son goût immodéré pour l’argent et les femmes supplantent rapidement son engagement pour le FPLP et la cause palestinienne. Carlos finit par vendre ses services sur le marché du terrorisme international, là où le discours révolutionnaire tient lieu de cache-sexe. On est loin d ’une vision romantique et idéalisée de la lutte armée durant ces années de plomb. 1975. La prise d ’otages des ministres du pétrole vient de prendre fin. Elle a duré plusieurs jours et fait trois morts. Sur la fameuse photo, Carlos et un groupe de représentants algériens font quelques pas sur la piste. Le bain de sang a été évité, la tension est retombée, on discute. Carlos porte une courte barbe et un béret qui lui donnent de faux airs du Che. A ce moment-là, il sait que l’opération est un semi-échec. Il sait que les commanditaires lui reprocheront de ne pas avoir exécuté comme prévu le ministre saoudien du pétrole. Pourtant, il apparaît étonnamment détendu et affiche un sourire de vainqueur. Le mythe “Carlos” est né, et il en a parfaitement conscience. La presse et les services secrets du monde entier ont les yeux rivés sur lui. Il n’a pas 30 ans et fait désormais partie des hommes les plus recherchés de la planète. L’idéologie tiersmondiste et la révolution vont bientôt céder le pas à des intérêts plus triviaux. Ce jour-là Carlos entrevoit sa future carrière de mercenaire du terrorisme. C’est sans doute la raison de son sourire. Le travail d ’écriture et de documentation aura demandé environ deux ans à Olivier Assayas et Dan Franck. Et le résultat est un scénario de près de trois cents pages, dont l’action se déroule sur une vingtaine d ’années, dans une dizaine de pays, avec plusieurs dizaines de personnages qui s’expriment dans plus de cinq langues. Film politique, film d ’époque, film d ’action. Coproduction internationale, œuvre pour la télévision et pour le cinéma, c’est peu dire que ce projet est hors norme. Il fallait, pour mettre en œuvre la production Imaginer un film sur Carlos, c’est vouloir raconter l’histoire de ce sourire. Edgar Ramírez et la réalisation d ’un tel scénario, la ténacité, l’endurance d ’un producteur, Daniel Leconte, et la force de travail, l’immense talent, et le goût très sûr d ’un réalisateur de la trempe d ’Olivier Assayas. évoluent des personnages terriblement “authentiques”. C’est la beauté d ’une œuvre qui transcende le clivage cinéma/télévision : approcher la vérité grâce à la fiction. CARLOS est la plus cinématographique de nos fictions. Le montage financier d ’un tel projet est impossible dans le cadre restreint de la fiction traditionnelle. C’est pourquoi le plan de financement imaginé par Daniel Leconte tient davantage du cinéma que de la télévision, avec les avantages et les risques que cela comporte. C’est donc en équilibriste que la production a été forcée d ’avancer, tenant parfois à bout de bras de nombreux partenaires. En toute logique, Assayas a conduit la préparation des trois films avec le souci du détail qui avait guidé l’écriture. Les acteurs, les décors, les costumes, tout devait aller dans le sens d ’une reconstitution fidèle de l’époque. Le choix d ’Edgar Ramírez pour incarner Carlos est d ’ailleurs symptomatique de la démarche du réalisateur. Comme Carlos, Edgar Ramírez est vénézuélien, parle espagnol, anglais, français, et sa robustesse et son épaisseur ne sont pas sans rappeler celles de Carlos. C’est un CARLOS qui n’a rien à envier au cinéma que nous donnons à voir. Quand la télévision propose une vision cinéma et l’assume jusque dans le choix du CinémaScope. Assayas donne du souffle à son histoire. Pas de caméra faussement documentaire. Les déplacements des personnages sont un véritable ballet. On est happé par l’énergie de la mise en scène, par l’intensité du jeu des acteurs, par la très grande beauté de la lumière. L’esthétique tient une grande place dans le cinéma d ’Assayas. Dans CARLOS, elle permet de donner l’illusion de la réalité. On est plongé dans une époque minutieusement recomposée où Je salue le travail exceptionnel d ’Olivier Assayas, qui nous livre ici une série qui, à n’en pas douter, est l’un de ses meilleurs films. Je salue l’engagement des acteurs et de toute l’équipe. Je remercie Stephen Smith pour son aide sur la documentation. Je remercie Dan Franck pour son travail sur le scénario au côté d ’Olivier. Je remercie l’audace de Daniel Leconte, la patience et l’implication de Raphaël Cohen. Je salue bien entendu toute l’équipe de FILM EN STOCK et nos partenaires libanais d ’Orjouane productions qui se sont efforcés de rendre possible l’impossible. Plusieurs partenaires se sont joints à ¢ et FILM EN STOCK pour permettre la réalisation de cette aventure, notamment Egoli Tossell Film et Arte France. Je veux souligner l’éblouissante interprétation du jeune Edgar Ramírez qui a su donner à son personnage les nombreuses facettes qu’on prête à son modèle. Edgar Ramírez, c’est la rencontre dont ce film avait besoin. C’est surtout un grand comédien dont on n’a pas fini de parler. Un mot, enfin, pour saluer l’entrée déterminante de STUDIOCANAL dans le projet, qui montre l’engagement du Groupe ¢ et sa confiance dans la réussite de ce film exceptionnel. Fabrice de la Patellière Directeur de la fiction française ¢ Nora von Waldstätten et Edgar Ramírez Sur les traces de Carlos Lorsque Daniel Leconte m’a contacté pour me proposer de lire un synopsis de quelques pages qu’il avait écrit autour de l’arrestation de Carlos au Soudan, et de sa traque par le général Rondot, j’ai aussitôt, et je le lui ai dit, eu le sentiment qu’il y avait là, en germe, un passionnant sujet de cinéma, inédit : l’histoire de Carlos, l’histoire du terrorisme moderne, vue de l’intérieur. C’est cette histoire-là que je lui ai proposé de raconter, à partir des recherches historiques qui avaient été commandées à Stephen Smith et qui, à ce stade très précoce, comportaient encore beaucoup de zones d ’ombre, d ’ambiguïtés, de contradictions aussi, que je me suis efforcé, en constant contact avec lui, de résoudre. Cela n’a pas été une mince affaire. C’est en dialoguant avec Dan Franck qui, dans cette première étape de l’élaboration du projet, a été mon interlocuteur, que nous avons structuré une histoire que j’ai ensuite construite et rédigée : à force de me documenter, de recouper systématiquement les informations, les pièces du puzzle se sont mises en place avec une évidence éclatante, la même qui nous a tous portés depuis. Je veux rendre hommage à Fabrice de la Patellière qui nous a encouragés quand nous – Daniel Leconte, Raphaël Cohen, moi-même – avons commencé à réaliser combien ce projet était hors norme, extravagant, impossible ; qui, lorsque nous sommes revenus vers lui pour lui dire que non, un film n’y suffirait pas, qu’il en faudrait deux, puis pour lui dire qu’avec deux on n’y arrivait toujours pas et qu’il s’imposait d ’en ajouter un troisième, a cru en nous, a cru dans ce projet, avec une conviction qui, je veux le dire ici, noir sur blanc, est sans doute la raison pour laquelle, contre vents et marées, contre le bon sens aussi, et dans les pires moments de découragement – et il y en a eu souvent – j’ai eu le sentiment qu’il valait la peine de persévérer dans cette aventure. Pour être franc, je n’imaginais pas que, dans ce cadre, je pourrais obtenir une sorte de blanc-seing pour faire le film dont j’avais eu très tôt la vision d ’ensemble : malgré le soutien, la confiance de mes producteurs, entière, depuis le début, je pensais que, comme souvent, à un stade ou bien à un autre, on couperait les ailes du CARLOS que je voulais, et qu’au bout du compte le film ne se ferait pas faute d ’un accord sur les principes de base sur lesquels il me semblait vital d ’être intransigeant : durée – qui seule permettait de restituer la complexité de l’époque et de ses enjeux –, usage des langues originales des protagonistes – indispensable pour rendre compte des méandres du terrorisme international d ’alors –, pas de vedettes (quel acteur français aurait pu incarner Carlos ? ç’aurait été absurde), casting cosmopolite – oui, c’est important que les Sud-Américains soient interprétés par des Sud-Américains, les Libanais par des Libanais, les Allemands par des Allemands, les Syriens par des Syriens, même si c’est une gageure de lancer des castings simultanément à Paris, Berlin, Beyrouth, Madrid, Damas, Amman, Khartoum… –, choix du format Scope, double version télévision et cinéma, priorité à des techniciens de cinéma, en fait mes collaborateurs habituels, etc. L’incroyable est qu’on a passé obstacle après obstacle, difficulté insurmontable après difficulté insurmontable, il faut croire que notre conviction était communicative. J’ai écrit relativement vite la version définitive du scénario, et même dans une certaine fébrilité, la confrontant régulièrement aux relectures et aux remarques de Dan Franck. J’écrivais dans les avions, dans les trains, dans les chambres d ’hôtel, ce qui ne m’était jamais vraiment arrivé auparavant, puis je reprenais mes recherches, sollicitais les lumières de Stephen Smith, et j’écrivais encore. La version quasi définitive a été prête très tôt et, au fond, on n’en a depuis que très peu varié, le plus souvent pour remettre le récit à jour d ’informations nouvelles que nous n’avons jamais cessé de recueillir, jusque durant la préparation du film, et même quelquefois à la veille de tourner. L’une des questions centrales, depuis le début, est celle du jeu de la vérité et de la fiction dès lors qu’on utilise les moyens du cinéma, et du romanesque, pour traiter de faits réels, tout en préservant la liberté de création. Nous avons essayé d ’y répondre de notre mieux, pas à pas : les faits, et les mécanismes, de la “carrière” de Carlos sont aussi précis que possible en l’état actuel des connaissances, et notre travail de recherche a été particulièrement approfondi et vérifié. Cependant il a toujours été au service d ’une dramaturgie, qui imposait des contractions, des simplifications, indispensables pour rendre compte des complexités et des zones d ’ombre d ’une histoire qui s’étale tout de même sur vingt ans. Le portrait qui s’en dégagera sera aussi crédible que possible, basé sur des informations et non des fantasmes journalistiques. Mais, en somme, j’aurais aimé qu’on puisse intituler ce film CARLOS, ROMAN, car s’il s’inspire de faits réels, la narration, ses choix, son rythme et son parti pris d ’explorer y compris les aspects les moins publics du personnage relèvent de la fiction, de son énigme aussi. Carlos est un mythe contemporain, visible et invisible, compréhensible et incompréhensible, connu et inconnu : dès lors qu’une vérité semblait s’imposer, elle ne pouvait manquer d ’être aussitôt contredite par son inverse qu’elle paraissait porter en elle depuis l’origine. La séduction de Carlos tient à son mystère, à ce que, sans doute, il pourrait donner lieu à d ’autres récits, à d ’autres films, qui seraient bien différents du nôtre. Disons, donc, que ce CARLOS ne prétend à rien de plus qu’à être mon interprétation, subjective, de son mythe, certainement pas exclusive d ’autres lectures à venir… Carlos, tel que je le vois, a été, à une époque où il ressemblait à beaucoup de jeunes gens de sa génération, un militant politique engagé, fasciné par les luttes de libération en cours aux quatre coins du monde : c’était alors une vraie guerre, au Chili, au Vietnam, au Moyen-Orient, et même en Europe, déclinaison de l’affrontement des deux blocs de la guerre froide. Mais Carlos est bientôt passé du militantisme à un mercenariat cynique qui a prospéré à une époque où l’on pouvait maquiller cela d ’un vague discours politique, aussi confus qu’insupportable, celui des années de plomb. C’est un homme violent, un tueur, fasciné par les armes, par sa propre virilité. Mais c’est aussi un aventurier de son temps, qui est allé au bout des impasses d ’une histoire, celle de sa génération. Et dès lors qu’on examine son trajet, qu’on le suit dans les méandres de celui-ci, on ne peut faire l’économie d ’explorer aussi ce qui est humain, y compris pour le plus difficile : c’est cette vérité-là qui explique qui il est et ce qu’il a fait. Et c’est de ce point de vue qu’on doit aborder la façon dont il a incarné la version déformée, grimaçante, des fantasmes des gauchistes européens, la génération qui dans le sillage de Mai 68 a cru que la Révolution était pour demain et qu’elle aurait lieu par les armes. Carlos est un soldat de cette guerre-là, et pour mettre ses actes dans la bonne perspective, il faut pouvoir décrire, aussi précisément que possible, les rouages commandant les intérêts des États qui les ont déclanchés, qui les ont télécommandés. De mettre au jour les tensions géopolitiques d ’une époque pas si différente de la nôtre où la frontière entre la diplomatie et le droit commun était pour le moins poreuse. L’écriture, qui a débuté en 2007, a été interrompue par le tournage de mon film L’HEURE D’ÉTÉ, et ce n’est qu’à la fin de l’été 2008 que nous avons disposé d ’une version complète du scénario. Cela a permis d ’engager la préparation qui a débuté à l’automne. Elle a été difficile, chaotique, minée par les difficultés constantes du financement, la défection de partenaires, les incertitudes quant à la conception, y compris géographique d ’un plan de travail qui se promène dans une dizaine de pays, d ’innombrables décors, et elle met en jeu plus de cent vingt comédiens dans plus de sept langues. Jamais aucun d ’entre nous ne s’était confronté à un canevas d ’une pareille complexité. C’est enfin en partenariat avec l’Allemagne que les choses se sont cristallisées, mais là encore le terrain était mouvant ; un jour nous devions tourner dans une région, nous nous y rendions, préparions notre tournage, et du jour au lendemain c’était une autre qui s’y substituait où tout était à recommencer. Après avoir commencé à Paris, c’est enfin en ex-RFA que nous nous sommes fixés, partageant nos décors selon de subtils équilibres diplomatiques entre Leipzig, Halle, Naumburg. Lieux étranges, vidés de leur population active ; à Halle, en particulier, nous avons filmé dans les anciens et lugubres bâtiments de la police, dont les cachots avant d ’avoir été ceux de la Stasi avaient été ceux des nazis. C’est dans un hall d ’exposition de la même ville que nous avons improvisé le studio où nous avons construit les bureaux de l’OPEP, au prix de circulations extravagantes de nos interprètes, et même de nos figurants, venus des quatre coins du monde pour incarner les participants à la conférence des ministres du pétrole… Après de longs repérages au Maroc, c’est au Liban que nous avons choisi de tourner les nombreuses séquences du Moyen-Orient. Nous devions restituer Beyrouth, Damas, Tripoli, Bagdad, et même des intérieurs situés à Aden et Khartoum… Admettons que le Liban avait sur le Maroc cet avantage de se situer dans la zone géographique des activités de Carlos : plus facile pour les décors, pour les accessoires, mais aussi pour le casting de nos interprètes libanais, bien sûr, mais aussi syriens, jordaniens, irakiens, yéménites, iraniens, algériens, libyens, soudanais… Le désavantage tenait au manque d ’infrastructure, très peu de films se tournant au Liban et certainement aucun film d ’époque international, il fallait constamment tout inventer. Nous l’avons fait avec l’aide précieuse, indispensable, de nos partenaires libanais, souvent débordés, dépassés, mais qui, bien que leur patience ait été mise à rude épreuve, n’ont jamais baissé les bras. L’aéroport de Beyrouth nous prêtait ses pistes et, par chance, l’un des derniers DC-9 en activité (l’avion de la prise d ’otages de Vienne) se trouvait faire la liaison hasardeuse Kiev-Beyrouth, nous pouvions en disposer entre ses rotations. Tant mieux : ailleurs, nous ne l’aurions sans doute pas trouvé. Tant pis : après quarante-huit heures, l’avion repartait, et nous devions interrompre nos prises de vue, y compris si telle ou telle scène n’était pas achevée, et ce jusqu’à la semaine suivante. Ce jeu a duré un mois… Encore très tard dans notre tournage, nous avons cru que nous pourrions filmer au Yémen et au Soudan les extérieurs dont nous avions besoin. Pour ce qui est du Yémen, à la suite de longues tractations avec l’ambassade, d ’abord, les plus hautes autorités sur place, ensuite, nous sommes miraculeusement parvenus à obtenir ce qu’aucun film occidental n’avait obtenu depuis Pasolini pour LES MILLE ET UNE NUITS dans les années 1970, une autorisation de tournage à Aden et même à Sanaa… Une semaine avant de nous y rendre, nous avons reçu un avis défavorable du Quai d ’Orsay et de l’ambassade de France : il a fallu en moins d ’une semaine trouver au Liban tous nos décors yéménites, au prix des pires acrobaties auxquelles j’aie jamais dû recourir. Comme un malheur n’arrive jamais seul, les Soudanais, dont le président Omar Al-Bachir était mis en cause par une juridiction internationale pour les atrocités du Darfour, se sont révélés peu enclins à rendre des services à une production française. C’est donc l’Afrique, aussi, qu’il nous a fallu réinventer à Beyrouth. Pire : après notre casting à Damas, l’un de nos interprètes syriens a pris peur en raison de la teneur politique du film, et a donné à la presse de Damas un entretien pour déclarer que s’il renonçait à la “reconnaissance internationale” que sa participation à CARLOS lui aurait valu, c’est qu’il ne voulait pas être associé à un projet anti-syrien… Mettant ainsi en grave danger nos autres comédiens établis à Damas. Un acteur soudanais, rencontré en Syrie, a répercuté à Khartoum ses propos : du coup les Soudanais se sont, à leur tour, défilés. Et ceux qui ont eu le courage de maintenir leur engagement ont été placés sur une liste noire d ’interdiction de sortie du territoire… Résultat, à la veille de tourner leurs séquences, nous n’avions plus le moindre interprète soudanais. Eriq Ebouaney (Hassan al-Tourabi), contacté la veille à Paris, a eu juste le temps de sauter dans un avion. Quant aux autres rôles, nous avons dû piocher parmi nos figurants de la communauté soudanaise du Liban, souvent des exilés politiques. Mais c’est le gynécologue qui nous a donné le plus de fil à retordre : le matin du tournage, nous ne l’avions pas, c’est notre costumière libanaise qui a suggéré son dentiste, recruté aussitôt ; par chance il s’est révélé excellent. Par la suite nous avons pu tourner quelques plans de paysage, sans acteurs, à Khartoum et à Aden, à l’automne 2009 ; ils ont le mérite de poser la toile de fond. Le tournage, qui a débuté en hiver à Londres, fin janvier, s’est achevé dans la chaleur accablante de l’été libanais à la veille du week-end du 14 Juillet. Entre-temps nous nous étions arrêtés trois semaines pour permettre à Edgar Ramírez de prendre l’embonpoint nécessaire à l’ultime incarnation de Carlos. Et des élections avaient même eu lieu au Liban d ’où n’était pas sorti le chaos redouté. Quatre-vingt-douze jours. C’est à la fois beaucoup et très peu, bien plus long qu’un tournage normal, mais hélas ce n’était pas un film qu’il fallait faire, mais trois, et trente jours pour chacun. Vu les déplacements, les scènes d ’action, les complexités liées à la reconstitution historique, c’est terriblement serré. Mais ces difficultés étaient intrinsèques à un projet unique, sans vrai point de repère, sans référence, et que nous avons dû inventer au jour le jour, à tous les stades et dans tous les départements : on ne s’en est sortis que parce que chacun, à tous les niveaux, y compris les plus modestes, tous les jours, a fait des miracles, rendu l’impossible possible. Olivier Assayas Edgar Ramírez et Martha Higareda Rami Farah et Christoph Bach Scénario 1. PARIS – FILM EN STOCK – BUREAU PRODUCTEUR – INT/JOUR Un homme balèze et sportif attend, assis derrière un bureau : le producteur. Un barbu poivre et sel entre et referme la porte : l’écrivain-scénariste. Ils s’embrassent. LE PRODUCTEUR Je vais te proposer un sujet de film. C’est top secret. J’ai écrit quelques pages. Lis-les. Le scénariste s’assied et lit. LE PRODUCTEUR Il y a quelques années, j’ai réalisé un film autour du personnage. Je te le donnerai. Qu’est-ce que tu en penses ? LE SCÉNARISTE Formidable. LE PRODUCTEUR Tu le fais ? LE SCÉNARISTE Oui. Ça m’intéresse de savoir comment un type qui s’appelle Ilich, dont le frère est Lénine, qui étudie à l’université Patrice Lumumba de Moscou, devient l’un des meilleurs amis du banquier nazi Genoud, légataire des droits d ’auteur de Goebbels… 2. PARIS – FILM EN STOCK – BUREAU PRODUCTEUR – INT/JOUR Le même bureau, avec du thé, du café et des croissants. Le producteur et le scénariste sont assis. Une jeune femme et un homme jeune entrent : Canal Plus. On s’embrasse. On s’assied. On parle. LE RÉALISATEUR Non. Écrivons à deux. Ils s’embrassent. L’HOMME JEUNE DE CANAL … Vous avez choisi un journaliste pour vous aider ? LE PRODUCTEUR Il travaille déjà. LA JEUNE FEMME DE CANAL Et le metteur en scène ? LE PRODUCTEUR Nous allons organiser un rendez-vous avec lui. 3. PARIS – FILM EN STOCK – BUREAU PRODUCTEUR – INT/JOUR Le même bureau, avec du thé frais, du café neuf et des croissants chauds. Le producteur, le scénariste, la jeune femme et l’homme jeune de Canal sont assis. Un homme en T-shirt, jeans et tennis entre : le réalisateur. On s’embrasse. On s’assied. On parle. 4. PARIS – RUE DES ARCHIVES – EXT/JOUR 5. PARIS – ATELIER SCÉNARISTE – INT/JOUR Un atelier avec livres et verrière. Le scénariste et le réalisateur sont assis autour d ’une table. Le journaliste entre. Ils s’embrassent. 6. PARIS – ATELIER SCÉNARISTE – INT/JOUR Le réalisateur et le scénariste lisent, relisent, se partagent les tâches, argumentent, corrigent, écrivent, recommencent, suggèrent, coupent, hésitent, se séparent, se retrouvent, argumentent, relisent, recorrigent, récrivent… 7. LE BOURGET – EXT/JOUR Un an plus tard. Le réalisateur tourne une scène d ’embarquement sur un tarmac désaffecté du Bourget. Le scénariste est présent en compagnie des attachées de presse. Il est content. Il s’approche du réalisateur. Le réalisateur et le scénariste marchent dans la rue. LE SCÉNARISTE Le film sera formidable. Bravo. LE SCÉNARISTE Comment veux-tu qu’on travaille ? Ils s’embrassent. LE RÉALISATEUR Je ne sais pas. En général, j’écris seul. LE RÉALISATEUR Coupez ! LE SCÉNARISTE Moi aussi. Mais je peux très bien me retirer. Dan Franck, coscénariste Une aventure collective Je cherchais un sujet universel. Un sujet qui parle à tous. Que l’on soit français, allemand, russe, américain ou algérien. Un sujet exigeant qui séduirait des réalisateurs de cinéma, des vrais auteurs, des acteurs de talent, comme il avait séduit en son temps Pavel Lounguine, Amos Kollek ou Gabriel Aghion quand je leur avais proposé de travailler pour la télévision. Un sujet ambitieux capable de fédérer des producteurs, des distributeurs et des chaînes de télévision autour d ’un financement hors du commun. Avec pour objectif de relever un défi immodeste : faire du cinéma avec l’argent de la télévision, faire de la télévision avec l’argent du cinéma. Autrement dit, additionner l’argent de la télévision et du cinéma pour faire deux œuvres distinctes à partir d ’un même tournage, une œuvre de cinéma et une œuvre de télévision. CARLOS est d ’abord né de ce désir-là. Restait à trouver l’oiseau rare : le sujet du film. J’ai toujours été révolté par la lâcheté des prises d ’otages. Et plus révolté encore quand, dans les pays libres, les démocrates se tirent une balle dans le pied en légitimant ces méthodes. Est-ce pour cette raison qu’à l’époque où, reporter, je courais le monde pour “Le Monde diplomatique”, “Libération” ou Antenne 2, j’ai multiplié les entretiens personnels avec Yasser Arafat, Georges Habache, Bassam Abou Charif, Aboul Abbas, le chef du commando de l’Achille Lauro, et bien d ’autres encore ? Est-ce pour cette raison, aussi, que dans l’un de mes films j’ai fait dire à Marcus Wolf, “l’espion qui venait du froid”, le “deal” passé entre la Stasi et les groupes terroristes propalestiniens ? En gros, “on vous couvre, on vous entraîne, on vous finance, en échange de quoi vous pouvez frapper où vous voulez sauf sur le territoire allemand”. Est-ce pour cette raison, enfin, que passé alors à autre chose, j’ai rencontré Hans-Joachim Klein, un des acteurs de la prise d ’otages de l’OPEP à Vienne ? 1994 : Klein, alors traqué par la police, d ’une part, et par les hommes de main de Carlos, de l’autre, menait une vie chaotique. Et plus chaotique encore après qu’il eut dénoncé les siens et rompu avec le terrorisme. Dans une période de répit, il nous avait donné rendez-vous, à Jean-Marcel Bouguereau et à moi-même, quelque part en Europe. Trois jours d ’entretiens au cours desquels cet ancien lieutenant de Carlos nous avait raconté de l’intérieur “les années Carlos”. Puis il était reparti vers nulle part, comme il était arrivé de nulle part. Douze ans plus tard et après avoir entre-temps produit une dizaine de films sur la guerre civile algérienne et sur le terrorisme international, j’ai pioché dans le souvenir de ces rencontres pour initier CARLOS et pour en écrire l’argument. CARLOS est donc né aussi de ce désir-là, puisé à la source de mon patrimoine intime. Mais le cinéma, comme la télévision, sont des aventures collectives. Et c’est collectivement que ce projet est devenu ce qu’il est. Avec Raphaël Cohen et Éric Dionysius, d ’abord, mes si précieux compères de FILM EN STOCK. Ils étaient là au départ. Ils sont là à l’arrivée, avec quelques cheveux blancs en plus mais si peu... Quel plus bel hommage que de leur dire comme dans la chanson : “Que ferais-je sans vous ?” Avec Dan Franck, mon complice de toujours sur les projets les plus improbables, pour écrire le scénario. Son talent sûr et sa présence, précoce, m’ont rassuré, presque autant que son sourire si doux derrière sa moustache batailleuse… Mais pour aller au bout de grandes aventures collectives, il faut croiser la route de grands partenaires. Jusque-là j’avais surtout croisé celle de Jérôme Clément avec, entre autres, PRINCESSE MARIE de Benoît Jacquot ; Jérôme Clément qui sera constant dans ses fidélités et suivra ¢ sur CARLOS. Avec Stephen Smith, journaliste et professionnel réputé, à qui j’ai demandé de nous guider dans les méandres forcément obscurs de la vie de Carlos. A partir de là, c’est le privilège – rare – de cette aventure exceptionnelle de m’avoir donné l’occasion de croiser la route d ’autres grands partenaires. Sans eux, sans leur engagement absolu, ce projet n’était pas possible. Avec encore Radu Mihaileanu. J’ai aimé et distribué son OPÉRATION MOISE, version documentaire de son film de cinéma VA, VIS ET DEVIENS. Son nom associé à CARLOS dès l’origine du projet a donné un coup de pouce important pour engager ¢ dans cette aventure. Et puis Radu s’est retiré du projet. A peu près au même moment, j’étais alors en discussion avec Olivier Assayas pour l’adaptation de UNE AFFAIRE DE TRAHISON. J’admirais depuis longtemps le réalisateur, mais je craignais ses réticences concernant CARLOS, une œuvre qui était d ’abord une série pour la télévision. Puis nous avons discuté de SYRIANA : Moi : “Mais pourquoi ce sont les Américains qui font ça ? Pourquoi pas nous ? Pourquoi pas toi ?” Lui : “Pourquoi ? Mais parce que personne ne me l’a jamais proposé !” Un mois plus tard, je le lui proposais. Merci à Olivier Assayas d ’avoir mis son grand talent au service d ’une histoire qui n’était pas la sienne et qu’il s’est appropriée sans réserve. Fabrice de la Patellière, bien sûr. Ses “fictions du réel” m’avaient séduit. Son adhésion enthousiaste à CARLOS, dès le départ, m’a bluffé. Son jugement et sa constance tranchaient tellement avec les atermoiements de la plupart de ses concurrents. J’ai alors compris pourquoi, en France, les fictions de ¢ avaient plusieurs longueurs d ’avance sur tout le monde. Judy Tossell, aussi, productrice d ’Egoli Tossell, mon copartenaire allemand. Sa loyauté m’a été précieuse dans les moments décisifs. Harold van Lier, bien sûr, aussi. Il a engagé financièrement STUDIOCANAL sur le film et rendu ainsi possible l’utopie de départ : compléter l’argent de ¢ pour aller au bout de l’ambition de la série et profiter du matériel exceptionnel généré par la série pour faire un film de cinéma digne de ce nom. Rodolphe Belmer, enfin. Il a donné le feu vert à ce projet encore plus fou que tous les projets pourtant fous qu’il avait engagés jusqu’alors. Un projet qui permettrait à ¢ de donner une nouvelle fois à la fiction française une ampleur internationale. Rodolphe Belmer a considéré à ce moment-là que ce projet-là était le bon. Il a fait preuve à la fois d ’une audace rare et d ’une assurance tranquille, un cocktail parfait pour relever les défis les plus périlleux. Qu’il en soit sincèrement remercié. Cela a été notre grande chance, la chance de CARLOS, la série, la chance de CARLOS, le film. Daniel Leconte, producteur Christoph Bach Synopsis Première partie - 98 minutes CARLOS retrace l’histoire d ’Ilich Ramírez Sánchez qui, durant deux décennies, fut l’un des terroristes les plus recherchés de la planète. Entre 1974, à Londres, où il tente d ’assassiner un homme d ’affaires britannique, et 1994, quand il est arrêté à Khartoum, il aura vécu plusieurs vies sous autant de pseudonymes, et traversé toutes les complexités de la politique internationale de son époque. Qui était Carlos, comment ses identités entrecroisées, superposées, s’articulent-elles, qui était-il avant de s’engager corps et biens dans sa lutte sans fin ? C’est autour de ces questions que la fiction s’est construite. Ilich Ramírez Sánchez, militant d ’origine vénézuélienne qui a combattu auprès des Palestiniens en Jordanie, exécute à Londres une série d ’attentats. Il s’installe à Paris où le FPLP (Front populaire de libération de la Palestine) lui a assigné la responsabilité de sa branche européenne sous les ordres d ’un militant libanais, Michel Moukharbal, “André”. Il coordonne plusieurs opérations, en particulier la prise d ’otages à l’ambassade de France à La Haye par des militants de l’Armée rouge japonaise. Lorsque André est arrêté, les agents français de la DST commencent à s’intéresser à Ilich, qui a adopté le nom de guerre de Carlos. Pour échapper à l’arrestation, Carlos abat trois policiers. Il rejoint alors au Yémen du Sud le chef du FPLP, Wadie Haddad, qui lui confie une mission d ’une rare audace, la prise en otages des ministres du pétrole de l’OPEP lors de leur prochaine conférence, à Vienne. Jean-Baptiste Malartre Deuxième partie - 106 minutes Troisième partie - 115 minutes L’essentiel de cette deuxième partie est consacré au récit détaillé de l’opération qui restera comme l’une des plus spectaculaires du terrorisme de son temps. A la tête d ’un groupe de six militants, des gauchistes des Cellules révolutionnaires allemandes, et de militants palestiniens, dont Anis Naccache, Carlos prend le contrôle du bâtiment de l’OPEP, retenant en otages les ministres et les délégations qui les accompagnent. Carlos est au sommet de sa notoriété médiatique, mais en libérant les ministres à l’aéroport d ’Alger en échange d ’une importante rançon il faillit à la mission que lui a confiée Haddad. C’est la rupture entre les deux hommes. Dès lors, Carlos devient un mercenaire au service des États les plus offrants. L’Irak, d ’abord, la Syrie, ensuite. Il installe sa base de l’autre côté du rideau de fer, entre Budapest et Berlin-Est, sous la protection de la Stasi, avec les survivants des Cellules révolutionnaires, en particulier Johannes Weinrich et son épouse Magdalena Kopp, qui bientôt le quittera pour devenir celle de Carlos. Le groupe de Carlos, installé à Budapest et protégé par la Syrie, établit des liens avec différents clients intéressés par leur savoir-faire particulier : entre autres, la Roumanie de Ceaucescu et la Libye. Cette intense activité de déstabilisation géopolitique, orchestrée par Carlos qui trafique des armes, brasse des fortunes en liquide et vit une existence de parrain du terrorisme européen, va bientôt toucher à sa fin. Son déclin est bien sûr lié à la transformation du monde. Après la chute du mur de Berlin, il perd plusieurs de ses commanditaires et son espace se rétrécit dramatiquement. C’est enfin au Soudan qu’il trouve un ultime refuge : Carlos est désormais un terroriste à la retraite, traqué par les services secrets de plusieurs pays, abandonné par ses plus proches, loin des enjeux de la politique internationale. Son rôle est achevé, il observe de loin les changements du monde. Avec l’aide des autorités soudanaises, il est capturé et ramené à Paris où il devra répondre de ses crimes qu’en France on n’a pas oubliés. Alexander Scheer et Nora von Waldstätten Badih Abou Chakra, Alejandro Arroyo et Edgar Ramírez Interview d’Edgar Ramírez Jeune espoir d’Hollywood, l’acteur vénézuélien Edgar Ramírez, 32 ans, incarne le terroriste international Ilich Ramírez Sánchez, alias Carlos, pour Olivier Assayas. Rencontre. Comment avez-vous été amené à incarner Carlos ? Je crois qu’Olivier Assayas m’avait repéré dans DOMINO de Tony Scott. Il m’a envoyé le scénario du film à Caracas et nous nous sommes rencontrés à Paris en août 2008. Nous avons alors parlé de Carlos, de politique internationale, d ’histoire, des années 1970, et notre collaboration s’est imposée comme une évidence. Qu’est-ce qui vous a séduit dans ce projet ? Avant tout l’occasion de travailler avec Olivier Assayas car je suis fan de ses films, notamment de CLEAN. C’est un cinéaste ultrasensible et un fin observateur de la nature humaine. Il est capable de raconter des histoires très simples avec une profondeur rare. N’importe quel autre réalisateur aurait pu faire de Carlos un vulgaire stéréotype : soit un horrible terroriste, soit un révolutionnaire romantique. Alors qu’en réalité son personnage est bien plus contradictoire. Je savais d ’avance que le Carlos d ’Olivier Assayas serait tout sauf manichéen. Par-delà la dimension historique et politique de son histoire, il l’a d ’abord envisagé d ’un point de vue humain. Pouvez-vous dire que Carlos était humain ? Humaniser un personnage ne signifie pas le rendre humaniste. Assayas décrypte le mythe en tenant compte de tous ses clairs-obscurs : sa cruauté, son charisme, sa misogynie, ses doutes, son pouvoir de séduction, sa cupidité... Il dépeint Carlos comme un être extrêmement complexe prenant des décisions dont les conséquences sont terribles, parfois même à ses dépens. Son film porte avant tout sur les choix d ’un homme et leurs répercussions sur son existence. Cela a-t-il été compliqué d’interpréter un personnage aussi ambigu que Carlos ? J’ai toujours été attiré par les personnages opaques qui évoluent à la frontière de l’humanité. J’aime les rôles qui me permettent de remettre en question mes propres valeurs et de mieux appréhender les paradoxes de la Edgar Ramírez et Alexander Scheer nature humaine. J’ai compris qu’il fallait que j’éprouve un minimum d ’empathie pour Carlos si je voulais réinterpréter le plus honnêtement possible ce personnage. Sinon j’en aurais fait un cliché... L’avez-vous rencontré en prison pour le rôle ? Cela ne s’est pas produit pour des raisons juridiques et logistiques. Mais j’ai approché des membres de sa famille, des proches et d ’anciennes maîtresses afin de mieux cerner son caractère. Parallèlement, je me suis documenté sur lui à travers des livres d ’histoire et de nombreuses archives, avant de me plonger, avec Olivier Assayas, dans le scénario. Comment avez-vous vécu le tournage ? C’était très intense. Nous avons tourné durant sept mois entre la Grande-Bretagne, les Pays-Bas, la France, l’Allemagne, l’Autriche, la Hongrie, mais aussi au Liban. Les conditions climatiques ont été parfois très éprouvantes, notamment lors des scènes filmées en plein désert ou dans l’avion DC-9 à l’aéroport de Beyrouth, en plein été et sans air conditionné... Le film n’en est que plus réaliste. Quels souvenirs les plus percutants conservezvous du tournage ? Au Liban, lors d ’un contrôle sur un barrage routier, je n’avais pas mon passeport et j’ai fini en prison. Heureusement pour moi, cela n’a duré que quatre heures. L’équipe du film a expliqué aux autorités locales qui j’étais et tout est finalement rentré dans l’ordre. Je me souviens surtout d ’un tournage très rock’n’roll et très vivant. Olivier Assayas a la capacité de créer des atmosphères si réalistes qu’on en finit presque par oublier la fiction. Lors de la scène d ’anniversaire de Carlos dans un hôtel de Budapest, par exemple, je me suis tellement amusé que j’ai eu l’impression que cette fête était donnée en mon honneur et que les acteurs étaient mes amis. Au fil des mois, nous formions une vraie famille. Est-il possible pour un acteur de sortir indemne d’un tel personnage ? Après le tournage, j’ai entrepris une thérapie durant un mois et demi. Non pas que je me sois identifié outre mesure à Carlos, mais j’ai vécu sept mois tellement frénétiques que mon système émotionnel en a été quelque peu altéré. J’avais besoin d ’évacuer toute cette énergie de mon corps. Comme Carlos, vous vous nommez Ramírez, vous êtes vénézuélien et polyglotte... Ces similitudes ont-elles été des atouts pour le rôle ? D’une manière ou d ’une autre, cela m’a forcément aidé à me glisser dans la peau de Carlos. Nos familles respectives viennent de San Cristóbal, au Venezuela, et nous avons tous deux vécu à Caracas. Mon père était attaché militaire et, comme Carlos, j’ai beaucoup voyagé. J’ai vécu en Autriche, au Mexique, au Canada, aux États-Unis ou en Colombie... Par conséquent, je maîtrise cinq langues : l’espagnol, l’italien, l’allemand, l’anglais et le français. Pour les besoins du film, j’ai également dû apprendre l’arabe phonétiquement. Comment êtes-vous devenu acteur ? Parallèlement à des études de communication politique à l’université de Caracas, je coordonnais un festival de courts métrages. Lors d ’un voyage au Mexique, j’ai rencontré le scénariste Guillermo Arriaga qui m’avait vu dans le film d ’un ami et m’a encouragé à devenir acteur. A l’époque, je ne me sentais pas disponible, car je dirigeais un organisme en faveur du droit de vote et du libre accès aux moyens de communication en Amérique latine. En 1998, Arriaga m’a proposé de jouer dans AMOURS CHIENNES d ’Alejandro González Iñarritu et j’ai accepté. Ma carrière internationale a démarré grâce à ma prestation dans DOMINO de Tony Scott, puis j’ai enchaîné THE BOURNE ULTIMATUM de Paul Greengrass et CHE de Steven Soderbergh. Parallèlement au cinéma, votre nom reste associé à de multiples ONG. Pourquoi cet engagement ? Je me destinais initialement à la diplomatie et reste très sensible à la question des droits de l’homme. L’an dernier, j’ai donc participé à une campagne d ’Amnesty International contre la violence des armes à feu au Venezuela. Je représente également une association nationale de lutte contre le cancer du sein et milite aux côtés de l’Unicef en Amérique latine. Utiliser mon image d ’acteur pour défendre des causes humanitaires me permet de pérenniser cette vocation et de ne pas perdre de vue mes convictions. Nora von Waldstätten, Edgar Ramírez et Jule Böwe Biographies OLIVIER ASSAYAS 1986 DÉSORDRE 1989 L’ENFANT DE L’HIVER 1991 PARIS S’ÉVEILLE 1993 UNE NOUVELLE VIE 1994 L’EAU FROIDE 1996 IRMA VEP 1997 HHH - Portrait de Hou Hsiao-hsien 1999 FIN AOUT, DÉBUT SEPTEMBRE 2000 LES DESTINÉES SENTIMENTALES 2002 DEMONLOVER 2004 CLEAN 2005 NOISE - Documentaire musical 2006 PARIS, JE T ’AIME (épisode ”Quartier des enfants rouges”) 2007 BOARDING GATE 2007 CHACUN SON CINÉMA (épisode ”Recrudescence”) 2008 ELDORADO - Documentaire 2008 L’HEURE D’ÉTE LIVRES ”Hong Kong Cinéma” (en coll. avec C. Tesson), 1984. ”Conversation avec Bergman” (en coll. avec S. Björkman), 1990. ”Éloge de Kenneth Anger”, 1999. ”Une adolescence dans l’après-Mai”, 2005. ”Présences - Écrits sur le cinéma”, 2009. Edgar Ramírez, Alexander Scheer et Fadi Yanni Turk EDGAR RAMIREZ ALEXANDER SCHEER CHRISTOPH BACH (Ilich Ramírez Sánchez, alias Carlos) (Johannes Weinrich) (Hans-Joachim Klein ”Angie”) Edgar Ramírez Arellano est né en 1977 à San Cristóbal, au Venezuela. Fils d ’un attaché militaire, il passe sa jeunesse ballotté d ’une capitale à l’autre. Parlant couramment cinq langues, il se destine d ’abord à une carrière diplomatique, mais, dès l’université, il est attiré par l’art dramatique et devient bientôt la vedette d ’une série à succès, COSITA RICA (2003-2004). C’est Tony Scott qui, en 2005, lui donne son premier rôle important au cinéma dans DOMINO, où il débute en compagnie de Keira Knightley dont il joue le petit ami, Choco. On l’a vu depuis dans LA VENGEANCE DANS LA PEAU de Paul Greengrass (2007), CHE de Steven Soderbergh (2008), CYRANO FERNANDEZ d ’Alberto Arvelo (2008), pour lequel il reçoit le prix d ’interprétation au festival d ’Amiens, ainsi que dans ANGLES D’ATTAQUE de Pete Travis. Il est considéré à Hollywood comme l’un des jeunes acteurs latinos les plus prometteurs. Le personnage de Carlos, déployé sur une période de vingt ans, et imposant une spectaculaire transformation physique, lui donne la possibilité d ’explorer toutes les facettes d ’un talent qui semble sans limites, aussi bien dans l’action que dans l’intime. Il est vrai que les similitudes sont troublantes : vénézuélien comme Carlos, il partage avec lui son patronyme, sa carrure et sa facilité pour les langues. A l’aise en espagnol, en anglais, en français ou en allemand, Edgar Ramírez a également appris des rudiments d ’arabe pour les besoins du rôle. Né en 1976 à Berlin-Est, Alexander Scheer a grandi en RDA et a vécu adolescent la chute du communisme. Membre de la troupe de la Volksbühne, il a travaillé régulièrement avec les plus grands metteurs en scène allemands, dont Frank Castorf, récoltant au passage les récompenses les plus prestigieuses. Leur dernière collaboration, “Kean”, lui a valu une reconnaissance unanime. Ce spectacle a été repris au Théâtre de l’Odéon en avril 2010. Au cinéma, son premier long métrage, SONNENALLEE de Leander Haussmann (1999), est un succès qui connaîtra une carrière internationale. Dans DAS WILDE LEBEN d ’Achim Bornhak (2007), inspiré de la vie d ’Uschi Obermaier, icône branchée des années 1960, il joue le rôle de Keith Richards. Passionné de musique, il a son propre groupe et a fondé un label, Audio Chrome. Christoph Bach a commencé sa carrière d ’acteur en 2002 dans NARREN de Tom Schreiber. En 2003, il joue dans un road-movie, DETROIT, grâce auquel il reçoit le prix de la meilleure interprétation masculine en Allemagne. A partir de 2006 il se consacre à la télévision avec, entre autres, DUTSCHKE et plus récemment un épisode de la série TATORT, “Der oide Depp”. NORA VON WALDSTATTEN (Magdalena Kopp) Autrichienne née à Vienne, et descendante d ’une protectrice de Mozart, Nora von Waldstätten a fait des études d ’art dramatique à Berlin où elle vit désormais. Elle se partage entre le théâtre et le cinéma où elle est remarquée très tôt dans FALSCHER BEKENNER (L’IMPOSTEUR) de Christoph Hochhäusler (2005). Élue en 2008 meilleure jeune actrice par le magazine “Bünte”, elle a également obtenu en 2010 le prix Max Ophüls du meilleur espoir féminin. On l’a vue notamment dans THE COUNTESS (Julie Delpy, 2009) et dans SCHWERKRAFT, (Maximilian Erlenwein, 2009). Dans TANGERINE, de Irene von Alberti, tourné au Maroc en 2008, elle a pour partenaire Alexander Scheer (Johannes Weinrich dans CARLOS). Et la musique du film est signée par Zeid Hamdan (Youssef dans CARLOS). AHMAD KAABOUR (Wadie Haddad) Né à Beyrouth en 1955, Ahmad Kaabour est diplômé de l’École normale et du théâtre de l’Université libanaise. Auteur-compositeur et interprète engagé, il travaille également à la Commission pour le théâtre, le cinéma et les expositions au ministère de la Culture du Liban. FADI ABI SAMRA (Michel Moukharbal) Fadi Abi Samra est un comédien libanais reconnu au théâtre comme au cinéma. Après sa participation dans AUTOUR DE LA MAISON ROSE en 1999, il a enchaîné les rôles dans FALAFEL, UN HOMME PERDU, LA ROUTE DU NORD, DANS LE SANG et CHAQUE JOUR EST UNE FÊTE. RODNEY EL-HADDAD (Anis Naccache) D’origine libanaise, Rodney El-Haddad est acteur et scénariste pour le théâtre et le cinéma. Il a exercé pour la première fois ses talents d ’écriture en tant que coscénariste sur CARAMEL, de Nadine Labaki. Puis a commencé en tant que comédien sur les longs métrages BOSTA L’AUTOBUS et BEYROUTH, VILLE OUVERTE. Rodney participe actuellement à l’écriture d ’un nouveau long métrage avec Nadine Labaki, et sera au générique du prochain film de Danielle Arbib, CHAMBRES D’HOTEL. Points de repères ILICH RAMIREZ SANCHEZ, DIT “CARLOS” 1949, 12 octobre : Naissance d ’Ilich Ramírez Sánchez à Caracas (Venezuela), premier fils de l’avocat marxiste José Altagracia Ramírez et d ’Elba Maria Sánchez. Les deux frères cadets de “Carlos” seront prénommés Lénine et Vladimir. 1966 : Carlos passe l’équivalent du bac dans le meilleur lycée public de Caracas. L’hypothèse selon laquelle le jeune Carlos aurait été formé à Cuba est infondée. Comme son père, il n’a jamais adhéré à un parti communiste. 1966, été : La mère de Carlos emmène ses trois fils à Londres ; ce sont les “swinging sixties”. La famille demeurera neuf ans dans la capitale britannique où Carlos fait ses études et acquiert une bonne connaissance de l’anglais. A la même période, il apprend aussi le russe. 1968, septembre : Le père de Carlos inscrit ses deux fils aînés à l’université Patrice Lumumba à Moscou, également appelée “l’Université de l’amitié entre les peuples” ; Carlos et son frère sont boursiers du Parti communiste vénézuélien. Son recrutement, à l’époque, par le KGB – souvent insinué, sans preuves – paraît improbable. 1970, juin : Carlos et son frère Lénine sont exclus de l’université Lumumba en compagnie d ’une vingtaine d ’autres étudiants. Le motif, pour Carlos, est “provocation antisoviétique et indiscipline”. 1970, juillet : Carlos rejoint le FPLP (Front populaire de libération de la Palestine) à Beyrouth. Il rencontre Bassam Abou Charif, “le visage connu du terrorisme”, qui lui donne son nom de guerre “Carlos”, la version hispanique de l’arabe “Khalil”. Il suit des stages d ’entraînement sous l’autorité directe de Wadie Haddad (cofondateur du FPLP). Carlos participe au conflit qui oppose Jordaniens et Palestiniens et qu’on appelle “Septembre noir”. Il subit l’épreuve du feu, est blessé à la jambe et rentre en Europe le 1er février 1971. Carlos a alors le projet de rejoindre le maquis au Venezuela. En effet, jusqu’à l’été 1973, c’est en Amérique latine qu’il voit son avenir révolutionnaire. 1974, 11 septembre : Carlos participe en soutien extérieur à une prise d ’otages à l’ambassade de France à La Haye par un commando de l’Armée rouge japonaise. Le lendemain, il retourne à Paris. 1972, septembre : Carlos s’inscrit comme auditeur libre à l’université de Londres pour un Bachelor of Science (économie). Il travaille comme professeur d ’espagnol et met en veilleuse ses activités militantes. 1975, 13 janvier : Deux Palestiniens (du FPLP) tirent deux RPG-7 sur un appareil d ’El Al à Orly ; les roquettes manquent leur cible. 1973, 24 juillet : Carlos se rend à Beyrouth pour se porter candidat à la succession de Mohamed Boudia, le représentant du FPLP à Paris, qui a trouvé la mort, le 28 juin 1973, dans sa voiture piégée par le Mossad. Wadie Haddad intègre Carlos comme numéro 2 dans son réseau européen. 1973, 30 décembre : Carlos tente de tuer, à Londres, Joseph Edward Sieff, le patron de Marks & Spencer et vice-président de la Fédération sioniste de Grande-Bretagne. Sieff est grièvement blessé mais survit. 1974, 24 janvier : Carlos manque son attentat contre la banque israélienne Hapoalim, dans la City de Londres ; l’explosif reste accroché à un battant de la porte au moment où il veut le projeter à l’intérieur. 1974, 13 septembre, vers 14 h : Pour faire aboutir les tractations entre les autorités françaises et les Japonais, Carlos revendique l’attentat à la grenade à fragmentation du Drugstore Saint-Germain (deux morts et trente-quatre blessés). Revendication démentie par Carlos plusieurs années après. 1975, 19 janvier : Une nouvelle tentative de tir sur un Jumbo Jet d ’El Al à Orly échoue ; présent en soutien, Carlos parvient à s’enfuir, alors que le commando de trois Palestiniens prend des otages pour obtenir en échange un avion pour Beyrouth, lequel se posera finalement à Bagdad. Anis Naccache (“Khalid”). Outre un Palestinien et un autre Libanais, deux Allemands (membres des Cellules révolutionnaires) dont Hans-Joachim Klein (“Angie”) font également partie du commando. Les services secrets occidentaux imputent la responsabilité principale de la prise d ’otages (l’essentiel du financement, la livraison d ’armes et de renseignements) à Saddam Hussein (trois morts). 1975, 22 et 23 décembre : L’avion mène le commando et ses otages à Alger, Tripoli, puis de nouveau à Alger, faute de pouvoir atteindre Bagdad. La crise se dénoue dans la capitale algérienne où le versement d ’une rançon sauve la vie des otages et, notamment, des ministres saoudien et iranien du pétrole, Ahmed Zaki Yamani et Jamshid Amouzegar. D’Alger, Carlos se rend à Aden où Wadie Haddad l’exclut du FPLP pour avoir désobéi 1975, 27 juin : Carlos tue deux policiers de la DST et en blesse grièvement un troisième, le commissaire Jean Herranz, au 9 de la rue Toullier, à Paris. Il exécute, à bout portant, Michel Moukharbal qui, arrêté par la DST, a amené les policiers au domicile d ’une amie de Carlos. 1975, 21 décembre : Prise d ’otages au siège de l’OPEP à Vienne par un commando dirigé par Carlos. Le numéro 2 de l’opération est le Libanais Christoph Bach, Katharina Schüttler et Aljoscha Stadelmann à ses ordres et négocié la vie des deux ministres, cibles de l’opération. 1976, 6 septembre : Carlos se rend d ’Alger à Belgrade, où il pose les premiers jalons pour établir une base derrière le rideau de fer. En effet, depuis la rupture avec Wadie Haddad, ses efforts d ’implantation autonome au Moyen-Orient n’ont pas été concluants. er 1978, 1 avril : La mort de Wadie Haddad (48 ans) dans un hôpital de Berlin-Est fait tomber en déshérence le réseau du FPLP. A partir de l’Europe de l’Est, Carlos travaille désormais pour le plus offrant : l’Irak, toujours, mais bientôt, aussi, la Syrie et la Libye. 1979, avril : Carlos, Magdalena Kopp (qui deviendra sa femme) et Johannes Weinrich s’installent à Berlin-Est. L’entourage allemand de Carlos sert d ’interface avec la Stasi, qui accorde au groupe (surnommé dans ses archives “Separat”, c’est-à-dire “à part”) des facilités logistiques mais refuse que Berlin soit utilisé comme base opérationnelle. A la fin 1981, la Stasi évaluera le réseau de Carlos à quarante membres en Europe et environ deux cents auxiliaires dans le monde arabe. 1979, printemps : Carlos, Kopp, Weinrich et al-Issawi établissent à Budapest une seconde base en Europe de l’Est. Leurs relations avec les autorités hongroises seront parfois tendues. 1979, 29 août : Exaspéré par la surveillance dont il fait l’objet, Carlos ouvre le feu sur des agents hongrois. Les relations avec les autorités est-allemandes sont également marquées par des hauts et des bas. 1979, automne : Carlos épouse Magdalena Kopp, l’ex-compagne de Weinrich, son collaborateur le plus proche durant cette période. 1982, 16 février : Magadalena Kopp et Bruno Bréguet, chargés de préparer un attentat à l’explosif contre le journal “Al Watan Al Arabi”, rue Marbeuf à Paris, sont arrêtés par la police française. Dans une lettre adressée à Gaston Defferre, ministre de l’Intérieur, Carlos réclame leur libération. A défaut, il menace de déclencher une série d ’attentats contre la France. 1982, 29 mars : 48 heures après l’expiration de l’ultimatum fixé par Carlos, un attentat contre le “Capitole” (le train reliant Paris à Toulouse) fait cinq morts et vingt-sept blessés. Jacques Chirac aurait dû être à bord de ce train. 1982, 22 avril : A quelques minutes de l’ouverture du procès contre Kopp et Bréguet, une voiture piégée explose devant le siège d ’”Al Watan Al Arabi” à Paris, tuant une passante et blessant une soixantaine d ’autres personnes. 1983, 31 décembre : Double attentat, en France, contre le TGV Marseille-Paris (trois morts) et dans la gare Saint-Charles, alors que le président Mitterrand s’adresse à la Nation à la télévision. Le lendemain, 1er janvier, une bombe détruit le Centre culturel français à Tripoli (Liban), sans faire de victimes. Carlos revendique la série d ’attentats dans une lettre à l’agence AFP de Berlin-Ouest. 1984, été : Point culminant des pressions occidentales, le sous-secrétaire d ’État américain chargé de l’Europe de l’Est, Mark Palmer, convoque les ambassadeurs de cinq pays d ’Europe de l’Est (Bulgarie, Tchécoslovaquie, Allemagne de l’Est, Hongrie et Roumanie) au Département d ’État à Washington. Il leur explique que, les États-Unis ayant la certitude que ces pays procurent des facilités à Carlos, une normalisation de leurs relations avec Washington restera impossible tant qu’ils soutiendront le terrorisme international. Dans les neuf mois, toutes les bases de Carlos en Europe de l’Est seront fermées les unes après les autres. 1985, mai : Libération de Magdalena Kopp qui rejoint Carlos désormais installé à Damas. 1986, 17 août : Naissance d ’Elba Rosa, la fille de Magdalena Kopp et de Carlos alors âgé de 37 ans. 1991, décembre : Lâchés par Damas, Carlos, sa famille et Weinrich s’installent sous de fausses identités à Amman, après plusieurs vaines tentatives pour trouver un autre pays d ’accueil dans le monde arabe. Ils sont identifiés par les autorités jordaniennes durant l’été 1992. Carlos et Kopp décident alors de se séparer. 1993, août : Carlos s’installe à Khartoum, sous la protection de Hassan al-Tourabi, l’éminence grise du régime soudanais. Prévenue par les services syriens, la CIA l’y localise à l’automne et passe l’information aux services secrets français. Ahmad Kaabour 1994, 14 août : Carlos, qui vient de subir une intervention chirurgicale aux testicules dans un hôpital de Khartoum, est enlevé et mis dans un avion pour Paris. Cette opération est l’aboutissement d ’un an de négociations entre le gouvernement français et la junte militaro-islamiste à Khartoum. En arrivant à Villacoublay, Carlos est inculpé en vertu d ’un mandat d ’arrêt national émis le 7 juin 1994 par le juge Bruguière. 1997, du 12 au 23 décembre : Procès à Paris contre Carlos (48 ans), qui est condamné à perpétuité pour le meurtre de deux agents de la DST, rue Toullier. réprouve les méthodes du second et met en garde contre le danger de “criminalisation” ; Habache est en particulier hostile à l’internationalisation du combat dont il estime, au contraire, qu’il faut le mener en Palestine. Carlos se range du côté de Haddad, “l’inventeur du terrorisme moderne”, selon Pierre Marion, ex-patron de la DGSE. Carlos admire et craint Haddad, un maniaque du secret et un génie de l’organisation. Selon deux auteurs qui ont eu accès aux archives du KGB, Haddad aurait été un agent de Moscou recruté au début des années 1970. Le chef du FPLP est mort à 48 ans, le 1er avril 1978, dans un hôpital de Berlin-Est. WADIE HADDAD HANS-JOACHIM KLEIN Né en 1928, issu d ’une famille grecque orthodoxe de Safad, en Galilée, où son père était instituteur jusqu’à l’exil de la famille en 1948, Wadie Haddad accomplit sa scolarité au lycée de Jérusalem, avant de poursuivre des études de chirurgien-dentiste à l’université américaine de Beyrouth. Il s’y lie d ’amitié avec un autre Palestinien grec orthodoxe, étudiant en médecine, Georges Habache, né à Lydda en 1925. Les deux hommes – Habache l’intellectuel, Haddad l’homme d ’action – ouvrent une clinique à Amman, puis, fuyant la répression des nassériens en Jordanie, partent à Damas. Après la prise de pouvoir des baassistes, ils s’installent à Beyrouth où ils fondent, en 1967, le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP). En 1968, Habache est arrêté et emprisonné par les Syriens, qui l’accusent de complot ; Haddad réussit alors une spectaculaire libération de son ami. La même année, le FPLP opère le premier détournement d ’un avion d ’El Al. Cependant, en 1972, c’est la rupture entre Georges Habache et Wadie Haddad : le premier Né en 1948 à Francfort, Hans-Joachim Klein est l’un des rares ouvriers des Cellules révolutionnaires. Mécanicien automobile, délinquant juvénile, il s’engage dans la lutte armée en 1974. Lors de la prise d ’otages au siège de l’OPEP à Vienne, Klein (“Angie”) tente de circonscrire la violence mais est lui-même grièvement blessé par balle. Il abandonne la lutte armée en mai 1976, alors que Carlos, exclu du FPLP, cherche à monter son propre réseau terroriste. L’Allemand se cache au nord de Milan, d ’où il envoie, en avril 1977, son arme et une lettre au magazine “Der Spiegel” ; dans sa missive, il prévient de deux assassinats en préparation pour marquer sa rupture avec “la terreur comme arme politique”. Klein s’explique ensuite, les 7 août et 5 octobre 1978, dans des interviews accordées, respectivement, au “Spiegel” et à “Libération”. Enfin, en 1979, il publie un livre, “Rückkehr in die Menschlichkeit. Appell eines ausgestiegenen Terroristen”, qui paraît un an plus tard en France sous le titre “La Mort mercenaire. Témoignage d ’un ancien terroriste ouest-allemand”. Arrêté en Normandie en 1998, il est jugé en Allemagne en 2001. Condamné à neuf ans de prison pour sa participation au raid de Vienne, il est gracié après cinq ans de détention, en 2003. Il vit, depuis, en France. MAGDALENA CACILIA KOPP Elle est née en avril 1948 à Neu-Ulm, dans le sud de l’Allemagne. Devenue photographe, elle fuit la province avec son premier mari et sa fille, pour “monter” à Francfort où elle devient vendeuse à la librairie “Étoile rouge” fondée par Wilfried Böse et Johannes Weinrich, à partir de laquelle ils allaient créer les Cellules révolutionnaires. En 1973, Kopp divorce pour partager la vie de Weinrich (“Steve”). Au sein des Cellules révolutionnaires, elle se forge une réputation de bonne falsificatrice de documents. Dans un témoignage publié le 30 juin 2003 dans le quotidien berlinois “Der Tagesspiegel”, Kopp affirme avoir vécu dans la clandestinité avec Weinrich et Carlos à partir de 1978. En 1979, elle épouse Carlos. Arrêtée en 1982 à Paris, où elle préparait un attentat contre le journal “Al Watan Al Arabi”, Kopp est jugée et condamnée à cinq ans de prison. A sa libération en mai 1985, elle rejoint Carlos à Damas où le couple s’installera à demeure après la naissance de leur fille Elba Rosa, en août 1986. Ils se séparent quand Magdalena part au Venezuela, en 1992, pour se placer sous la protection de la famille de Carlos, en attendant que ce dernier rétablisse sa situation au Moyen-Orient, compromise depuis la fin de la guerre froide. C’est par une lettre que Carlos lui écrira bien plus tard depuis la prison de la Santé, à Paris, que Kopp apprendra l’existence d ’une seconde épouse, musulmane. Julia Hummer GABRIELE KROCHER-TIEDEMANN (“NADA”) Étudiante en sociologie, membre du Mouvement du 2 juin, Gabriele Kröcher-Tiedemann participe à des braquages de banques et, en 1973, résiste à son arrestation en ouvrant le feu sur un policier qu’elle blesse grièvement. Condamnée à neuf ans de prison, mais échangée contre un otage dès 1975, elle suit un stage d ’entraînement au Yémen où elle est repérée par Carlos. Elle participe ensuite à la prise d ’otages au siège de l’OPEP à Vienne, où elle exécute un inspecteur de police autrichien, Anton Tichler, 60 ans, à deux mois de prendre sa retraite. Elle tue également un garde de sécurité irakien. Arrêtée en novembre 1977 à la frontière franco-suisse, après une fusillade au cours de laquelle elle blesse deux gardesfrontières helvétiques, “Nada” – son nom de guerre – est condamnée à quatorze ans de prison. Extradée en Allemagne et censée y comparaître, en 1984, pour répondre de sa participation au raid contre l’OPEP à Vienne, elle voit son procès reporté sine die par les autorités allemandes, à la suite d ’une lettre de menaces de Carlos adressée au ministre allemand de l’Intérieur. Son procès n’a finalement lieu qu’en 1990. KröcherTiedemann est alors acquittée faute de témoins à charge pour les meurtres commis lors de la prise d ’otages au siège de l’OPEP à Vienne. Elle meurt cinq ans plus tard d ’un cancer, à 44 ans. MICHEL (“ANDRÉ”) MOUKHARBAL ANIS NACCACHE (“KHALID”) Né en 1941, ce Libanais chrétien issu d ’une famille influente, diplômé de la Sorbonne, devient en 1973 le représentant du FPLP à Paris. Il parle l’arabe, le français, l’anglais. En janvier 1975, André prépare avec un commando palestinien les attentats à la roquette contre des appareils de la compagnie israélienne El Al à Orly. Interpellé, le 7 juin, à l’aéroport de Beyrouth, puis pris en filature et arrêté à Paris, il emmène la DST au 9 de la rue Toullier où Carlos tue, au cours d ’une fusillade, deux agents et l’exécute comme “traître”. Né en 1948, Libanais sunnite converti au chiisme, Anis Naccache a été le mystérieux numéro 2 du commando de Vienne, en 1975. Pendant vingt ans, il a réussi à dissimuler sa participation sous le nom de guerre “Khalid”. En fait, il était l’homme de confiance de Wadie Haddad, chargé de “marquer” Carlos. Selon une autre interprétation, il aurait d ’abord été un militant de l’OLP infiltré au sein du FPLP pour en contrôler les activités. En 1979, quand l’imam Khomeiny arrive au pouvoir en Iran, Naccache se met au service de ce régime qu’il considère comme le meilleur allié de la cause palestinienne. L’été 1980, à Neuilly, il tente d ’assassiner Shapour Bakhtiar, l’ancien Premier ministre du chah d ’Iran. Il se trompe de porte, l’attentat échoue : deux morts, dont la voisine de sa cible, et trois blessés, dont un policier paralysé à vie. Naccache est arrêté et condamné à la prison à perpétuité en 1982, avant de bénéficier de la grâce de François Mitterrand, en 1990, dans le cadre d ’un marchandage entre Paris et Téhéran. Il se consacre alors à la formation de milices dans le Liban du Sud, qui deviendront le fer de lance du Hezbollah sous le commandement d ’Imad Mugnieh. Aujourd ’hui Anis Naccache, toujours actif, collabore régulièrement à la télévision libanaise en tant que consultant en géopolitique. Il vit entre Beyrouth et Téhéran. JOHANNES WEINRICH Terroriste allemand, proche de la Stasi. Il fonde les Cellules révolutionnaires avec Wilfried Böse. Ensemble ils créent une librairie d ’extrême gauche à Francfort, “Roter Stern”, “Étoile rouge”. Après la prise d ’otages de Vienne et l’exclusion de Carlos du FPLP, Weinrich deviendra le bras droit du Vénézuélien, qui cherche alors à s’implanter en Europe de l’Est. C’est lui qui présentera son amie, Magdalena Kopp, à Carlos. “Heinrich Schneider” – son nom dans les archives de la Stasi – sera l’interface du groupe de Carlos, non seulement à Berlin-Est mais aussi à Budapest, Bucarest et Prague. Très bien introduit au Yémen, de même qu’en Libye, Weinrich a été arrêté dans un faubourg d ’Aden, le 3 juin 1995, puis extradé en Allemagne. En 2000, il est condamné à perpétuité pour l’attentat contre la Maison de France à Berlin, le 25 août 1983, qui avait fait un mort et vingt-deux blessés. Il purge actuellement sa peine en Allemagne. Rodney El-Haddad Talal El-Jurdi et Edgar Ramírez Fiche artistique Fiche technique EDGAR RAMIREZ ILICH RAMÍREZ SANCHEZ “CARLOS“ ALEXANDER SCHEER JOHANNES WEINRICH NORA VON WALDSTATTEN MAGDALENA KOPP AHMAD KAABOUR WADIE HADDAD CHRISTOPH BACH HANS-JOACHIM KLEIN “ANGIE” RODNEY EL-HADDAD ANIS NACCACHE “KHALID” JULIA HUMMER GABRIELE KROCHER-TIEDEMANN “NADA” RAMI FARAH ”JOSEPH” ZEID HAMDAN ”YOUSSEF” TALAL EL-JURDI KAMAL AL-ISSAWI “ALI” FADI ABI SAMRA MICHEL MOUKHARBAL “ANDRÉ” ALJOSCHA STADELMANN WILFRIED BOSE “BONI” KATHARINA SCHUTTLER BRIGITTE KUHLMANN JULE BOWE MILITANTE ALLEMANDE JUANA ACOSTA AMIE DE CARLOS MARTHA HIGAREDA AMPARO JEAN-BAPTISTE MALARTRE AMBASSADEUR A LA HAYE OLIVIER CRUVEILLER COMMISSAIRE JEAN HERRANZ ANDRÉ MARCON GÉNÉRAL PHILIPPE RONDOT NICOLAS BRIANÇON MAITRE JACQUES VERGÈS JEAN-BAPTISTE MONTAGUT “ERIK” RAZANE JAMMAL LANA JARRAR BADIH ABOU CHAKRA CHEIKH AHMED ZAKI YAMANI ALEJANDRO ARROYO VALENTIN HERNANDEZ ACOSTA MOHAMMED OURDACHE DOCTEUR BELAID ABDESSALAM BASIM KAHAR CHARGÉ D’AFFAIRES IRAKIEN ABBES ZAHMANI ABDELAZIZ BOUTEFLIKA NOURREDINE MIRZADEH JAMSHID AMOUZEGAR LAURA CAMERON SECRÉTAIRE ANGLAISE UDO SAMEL CHANCELIER BRUNO KREISKY GEORGES KERN OTTO ROESCH ET YANILLYS PEREZ RIVAS ANSELMA LOPEZ GABRIELA SANCHEZ MARIA TERESA ALEXIS LAMEYDA EDGAR ANA MARIA DURAN ALBAIDA CAROLINA CALLEJAS LEYMA SHAMIR ALI LUIS MARIA FERNANDA RUETTE JOUEUSE DE CUATRO CESAR DELGADO WIXAM GALERISTE PIERRE-FRANÇOIS DUMÉNIAUD INSPECTEUR DOUS SIMON-PIERRE BOIREAU INSPECTEUR DONATINI BELKACEM DJEMEL BAREK MOHAMED BOUDIA PHILIPPE TRAD FEDAYIN ORLY 1 FARID ELOUARDI FEDAYIN ORLY 2 HUGO DIAZ CHANTEUR LATINO BIBI JACOB ANGLAISE A ORLY MAIWENN HEURTAUX FILLE DE L’ANGLAISE HIRAKU KAWAKAMI YUKATA FURUYA RYOSUKE SATO CHEF DU COMMANDO GO NABETANI COMMANDO ARJ 1 AKIHIRO HATA COMMANDO ARJ 2 YUKO HIRATA MADEMOISELLE PLEINE LUNE VINCENT JOUAN COMMISSAIRE BROUSSARD KIDA KHODR RAMADAN ATTACHÉ IRAKIEN CEM SULTAN UNGAN HASSAN SAID LESLIE CLACK JOSEPH EDWARD SIEFF LUIS-JAIME CORTEZ MAJORDOME LIANE LETTNER ÉPOUSE SIEFF PAOLO OSPINA JEUNE GARÇON THOMAS SINCLAIR SPENCER POLICIER LONDRES BASSEL MADI POLICIER AÉROPORT DE BEYROUTH 1 JOHNNY KAZEN POLICIER AÉROPORT DE BEYROUTH 2 ELIE YOUSSEF FEDAYIN CHEZ WADIE HADDAD 1 KARAM GHOSSEIN FEDAYIN CHEZ WADIE HADDAD 2 STEPHAN RIVES AGENT DST BEYROUTH EDITH HELLER STANDARDISTE PETER BENEDICT POLICIER 1 RONNIE PAUL POLICIER 2 SARKAW GORANY MÉDECIN KURDE JOHANN VON BULOW PILOTE DC-9 CHARBEL AOUN OFFICIER LIBYEN MANFRED BUNHOLZER AMBASSADEUR AUTRICHIEN ANTOINE BALABAN GÉNÉRAL AL-KHOULY ANTON KOUZNETSOV IOURI ANDROPOV KARL FISCHER COLONEL HARRY DAHL ROBERT GALLINOWSKI MAJOR HELMUT VOIGT FADI YANNI TURK COLONEL HAITHAM SAID TIMO JACOBS AMI DE “NADA” LAURENS WALTER POLICIER SUISSE CARLOS CHAHINE ASSEM AL-JOUNDI ISSAM BOU KHALED GÉNÉRAL LIBYEN GUILLAUME SAURREL BRUNO BRÉGUET OLIVIA ROSS AMIE DE BRUNO BRÉGUET HENDRIK HEGRAY GARDIEN DE PARKING 1 CÉDRIC HERGAULT GARDIEN DE PARKING 2 LOULWA MAAD FILLE DE CARLOS SAMUEL ACHACHE GUY CAVALLO LAETITIA SPIGARELLI MARIE-CAROLINE CAVALLO ALEXANDER BEYER LIEUTENANT BOROSTOWSKI MARIA KWIATKOWSKI INFORMATRICE STASI 1 IREEN KIRSCH INFORMATRICE STASI 2 GABRIELLA CSIZMADIA MÈRE DE MAGDALENA CAROLINE DE BLED GARDIENNE DE PRISON JEF BAYONNE POLICIER FRANÇAIS JOHANNES RICHARD VOELKEL POLICIER ALLEMAND AHMAD HATOUM RELIGIEUX SYRIEN LAMIA AHMAD ÉPOUSE DU RELIGIEUX SYRIEN ERIQ EBOUANEY HASSAN AL-TOURABI FADI SABBAH GYNÉCOLOGUE GIGI LEDRON MAITRESSE SOUDANAISE DE CARLOS SALAH EL DIN ABOU CHANAB DOCTEUR NAFAA MOUNZER BAALBACKI DIPLOMATE IRANIEN 1 MOHEB NADER DIPLOMATE IRANIEN 2 PATRICK RAMEAU AGENT DE LA CIA 1 KEITH THOMSON AGENT DE LA CIA 2 JULIEN SCHMIDT DIPLOMATE FRANÇAIS HAMID, SAMIR BASHA GARDES DU CORPS DE CARLOS EMMANUEL AGENT SOUDANAIS ABDALAH ABDEL MAJID MÉDECIN SOUDANAIS MUSTAPHA OSMANI MÉDECIN MILITAIRE SOUDANAIS UN FILM EN TROIS PARTIES DE OLIVIER ASSAYAS PRODUIT PAR DANIEL LECONTE ÉCRIT PAR OLIVIER ASSAYAS ET DAN FRANCK D’APRÈS UNE IDÉE ORIGINALE DE DANIEL LECONTE CONSEILLER HISTORIQUE STEPHEN SMITH PRODUCTEUR EXÉCUTIF RAPHAEL COHEN COPRODUCTEUR JENS MEURER AVEC LA PARTICIPATION DE ¢ ET AVEC LA PARTICIPATION DE ARTE FRANCE IMAGE YORICK LE SAUX, DENIS LENOIR DÉCORS FRANÇOIS-RENAUD LABARTHE COSTUMES JURGEN DOERING MONTAGE LUC BARNIER, MARION MONNIER SON DIRECT NICOLAS CANTIN ASSISTANT A LA RÉALISATION LUC BRICAULT SCRIPTES CLÉMENTINE SCHAEFFER, SANDRINE BOURGOIN MONTAGE SON NICOLAS CANTIN, NICOLAS MOREAU, OLIVIER GOINARD MIXAGE DANIEL SOBRINO, OLIVIER GOINARD CASTING ANTOINETTE BOULAT, ANJA DIHRBERG (BERLIN), NICOLE KAMATO (BEYROUTH), ROSA ESTEVEZ (MADRID) DIRECTEUR DE PRODUCTION FILM EN STOCK ÉRIC DIONYSIUS DIRECTRICE DE PRODUCTION SYLVIE BARTHET PRODUCTION FILM EN STOCK EN COPRODUCTION AVEC EGOLI TOSSELL FILM AVEC STUDIOCANAL, CINÉCINÉMA, TV5 MONDE, BETV, LE CNC, LA PROCIREP ET ANGOA VENTES INTERNATIONALES STUDIOCANAL © CAROLE BETHUEL / JEAN-CLAUDE MOIREAU / PATRICK SWIRC / FILM EN STOCK / ¢ © CAROLE BETHUEL / JEAN-CLAUDE MOIREAU / PATRICK SWIRC / FILM EN STOCK / ¢