trophee AG 2007 - Grand Prix de l`AG
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trophee AG 2007 - Grand Prix de l`AG
juillet 2007 Numéro 2 Cap sur AG les Editorial De nouveaux enjeux pour les AG... Repères mobilisation sur les explications, la « contextualisation » et la justification de ce qui a été accompli. Bien des résolutions ont été contestées parce que l'AG n'a pas été « pensée » en amont comme un enjeu stratégique. La saison 2007 des Assemblées Générales a été marquée par des évolutions particulièrement significatives. Les « AG » ne sont plus L'AG est une opportunité majeure pour l'image ce qu'elles ont pu être par le passé, que les dirigeants veulent donner de leur à savoir des sortes de grandes messes société, à savoir une démonstration de cérémonieuses, mais bien désormais le lieu d'enjeux qui peuvent être majeurs pour l'avenir dynamisme, d'innovation et de transparence dans les pratiques de gouvernance des entreprises. L'obligation de vote imposée d'entreprise. Il est essentiel que les entreprises aux gérants de fonds, la montée en puissance cherchent à associer leurs de l'actionnariat salarié, l'intérêt de compter sur un « Il est essentiel que actionnaires à un vrai projet de les faire entrer actionnariat individuel fort les entreprises cherchent d'entreprise, dans leur univers industriel, et fidèle pour consolider le à associer leurs dans leurs laboratoires de capital social, et surtout la suppression à compter de actionnaires à un vrai recherche, dans leurs cette année de l'obligation projet d'entreprise » ambitions internationales… d'immobiliser ses actions Il était frappant de voir, cette pour participer à l'AG, tout cela a contribué année, l'ampleur de la couverture médiatique -et va continuer- à animer des débats toujours dont ont bénéficié les AG. Les tentatives de plus poignants. déstabilisation des dirigeants en place dans certaines sociétés (Eiffage, Valéo…), ainsi que Ainsi, nous avons observé cette année une les questions de rémunération et les nette augmentation du nombre des résolutions « packages » (golden hello, golden parachute, rejetées (14 contre 5 l'année dernière) et retraite chapeau, stock options) ont suscité une adoptées avec une faible majorité (39 cette attention croissante. Cette évolution souligne année). Certes, ce mouvement de contestation également la nécessité de prendre le temps de est relatif comparé au nombre total de forger le discours stratégique pour convaincre résolutions (694 pour les 39 Groupes du les investisseurs sur les résolutions clés, CAC 40) dont nous avons analysé les AG. Mais comme les augmentations de capital sans DPS, je ferai remarquer que ces 49 résolutions les rachats de titres, les « BSA Breton », les « rejetées -ou difficilement votéesAGA » et conventions réglementées relatives ne concernent que 19 sociétés, qui sont celles aux dirigeants. Autant de résolutions sensibles dont le capital n'est pas contrôlé. qui imposent de redoubler d'efforts Concrètement, cela donne un taux de d'explication et d'argumentaire. contestation de 15%, ce qui n'est pas négligeable. Il devient donc tout à fait essentiel Notre objectif, à travers ce Prix de l'Assemblée de bien préparer une Assemblée Générale. Générale de l’Année, est bien de mettre en évidence les meilleures pratiques en termes de L'enjeu aujourd'hui est double. lisibilité de la stratégie suivie et de L'AG, comme le rappelle très justement transparence à l'égard des actionnaires. Sir Lindsay Owen-Jones, a pour objet de « rendre des comptes aux propriétaires de l'entreprise que sont les actionnaires ». Ce qui exige des argumentaires très solides sur la stratégie, les perspectives, les questions sensibles et les résolutions. Ce n'est pas une belle mise en scène qui va emporter la Caroline de La Marnierre conviction des actionnaires, mais toute une Présidente de CAPITALCOM 1 PDG sur 2 dirigeants du CAC 40 2 7 Commandite PDG 19 Président et DG 12 Directoire et Conseil de surveillance Dans la moitié des sociétés seulement, la fonction de Président du Conseil est séparée de celle opérationnelle de Directeur général. 4 270 Les 6 AG les plus fréquentées 2 820 2 120 85 1 950 1 7 1 690 z s Sue Pariba lt BNP Renau H LVM otal Air Liquide est ide T ir Liqu A largement l'AG qui rassemble le plus d'actionnaires. 1 450 actionnaires en moyenne -comme l'année dernière (1 480)ont assisté aux Assemblées. Une durée moyenne d'AG en baisse La durée des Assemblées du CAC 40 est passée sous la barre des 3 heures cette année. 3 h 16 2 h 54 2006 2007 INSTANTS D'HISTOIRE Trois grands capitaines d'industrie, qui ont été les maîtres d'œuvre de la construction de leur Groupe, ont passé la main cette année : Jean-Louis Beffa, après 21 ans comme Président de Saint-Gobain, devient Président du Conseil d'administration, aux côtés de Pierre-André de Chalendar, Directeur général ; Jean-François Dehecq a pris aussi la fonction de Président du Conseil d'administration de SanofiAventis, et a cédé les rênes à Gérard Le Fur ; il dirigeait Sanofi depuis 34 ans ; Bertrand Collomb se retire comme simple administrateur après 18 ans à la tête du Groupe Lafarge et Bruno Lafont accède au poste de PDG. Cabinet d’avocats d’affaires international Lindsay Owen-Jones : « La réussite d’une AG dépend en grande partie de sa préparation » Cette année vous avez présidé l'AG de L'Oréal en tant que Président et non plus comme Président-Directeur général. Comment avez-vous ressenti cette séparation des pouvoirs ? Lindsay Owen-Jones : La séparation des pouvoirs a pour conséquence de partager la charge de l'animation de l'AG qui est une sorte de marathon. Cela permet de se compléter et de faciliter l'écoute pour les actionnaires. J'ai été heureux de voir que mon successeur avait trouvé le ton juste, avait répondu avec simplicité, respect et sincérité. Et j'ai le sentiment d'avoir bien fait mon devoir en acceptant de m'éclipser de mon rôle opérationnel en faveur de quelqu'un de plus jeune. Notre entente est évidente parce que nous nous connaissons depuis longtemps. Sans doute aussi parce que nous avons été très clairs sur ce que seraient nos rôles respectifs. Jean-Paul Agon a la totale responsabilité opérationnelle dans tous les domaines. Mon rôle est d'être vigilant sur la stratégie et la politique d'acquisition. Le Conseil d'administration attend que j'aie l'œil ouvert pour assurer une certaine continuité et une bonne gouvernance d'entreprise. Chacun de nous a admis l'utilité et la complémentarité des rôles. Nous nous voyons au moins tous les dix jours. Vous avez assisté à de nombreuses autres AG en tant qu'administrateur. Quelles sont, selon vous, les bonnes pratiques à suivre ? Lindsay Owen-Jones : En tant que chef d'entreprise, il me semble que quelques règles d'or sont à respecter. La première est de ne jamais oublier que le premier rôle d'une AG est de rendre compte de sa gestion aux propriétaires que sont les actionnaires. La réussite d'une AG dépend en grande partie de sa préparation. Il faut être à l'écoute pour identifier les thèmes que les actionnaires souhaitent voir aborder. Il faut s'expliquer spontanément sur les questions qui préoccupent ou qui fâchent. Il est essentiel de bien commenter les résolutions. Dans certaines AG, je suis frappé par le nombre de résolutions mal votées ou refusées, alors qu'une rédaction légèrement différente aurait permis de les faire accepter. Il faut répondre aux questions avec gentillesse et respect. Une AG n'est pas une réunion d'analystes pointilleux agressifs, mais d'hommes et de femmes qui vous font confiance. Cela n'exclut pas une certaine fermeté lorsque la question l’exige. Les AG doivent-elles désormais tendre vers une présentation plus stratégique que purement financière ? Lindsay Owen-Jones : Cette évolution correspond à un désir de fidéliser les actionnaires. Un actionnaire qui comprend la stratégie de l'entreprise est plus fidèle qu'un autre qui n'aurait que des intérêts financiers. L'exposé de Béatrice Dautresme sur la stratégie vis-à-vis des seniors aurait été considéré comme exceptionnel il y a quelques années. Aujourd'hui, il faut s'attendre à voir ces présentations se développer. A la condition qu'elles ne soient pas au détriment de l'information financière, mais qu'elles la complètent. Sir Lindsay Owen-Jones, 61 ans, entré chez L’Oréal en 1969, est devenu en 1984 VicePrésident Directeur général et administrateur du Groupe. A 42 ans, il est nommé PDG. En 2006, il est nommé Président du Conseil d’administration. Il est aussi Vice-Président du Conseil d’administration d’Air Liquide et administrateur de Sanofi-Aventis et de Ferrari. Il est Commandeur dans l’Ordre de La Légion d’honneur et Knight Commander of the Order of the British Empire. Philippe Marini : « On ne peut pas légiférer sur tout et par convulsion, certainement pas sur le niveau des rémunérations » 22 Plusieurs réformes ont renforcé les droits des actionnaires individuels. L'équilibre vous paraît-il être le bon aujourd'hui ? Philippe Marini : Indéniablement l'implication, la participation et l'esprit critique des actionnaires se sont améliorés, comme en témoigne l'ambiance contestataire de certaines AG, mais des progrès sont souhaitables et possibles. D'une part, les actionnaires individuels ne sont pas suffisamment informés de leurs droits par les intermédiaires teneurs de comptes, du fait notamment de la détention au porteur. La participation aux AG -physiquement ou par correspondance- relève d'une démarche individuelle perçue comme complexe et dissuasive. D'autre part, la sophistication croissante des résolutions implique un effort de connaissance et d'information de la part des petits porteurs. La question de la formation aux enjeux de l'entreprise et de l'éducation financière des épargnants est donc une priorité. Dans plusieurs AG, des voix se sont élevées contre le fait qu'une action ne soit pas égale à une voix. Quelle est votre position ? Philippe Marini : Je pense qu'il faut étendre les facultés d'émettre des actions à droit de vote multiple plutôt que se conformer strictement au principe anglo-saxon « une action, une voix ». L'intérêt des actions à droit de vote multiple est de renforcer la stabilité de l'actionnariat en pérennisant la position de l'actionnaire de contrôle, ou d'accroître au sein du Conseil d'administration l'influence des actionnaires « historiques » comme contrepoids aux dirigeants qui disposent d'un avantage structurel en termes d'information et de décision sur la gestion de la société. la croissance se poursuit avec succès. La réglementation devrait-elle être plus stricte ? Philippe Marini : On ne peut pas légiférer sur tout et par convulsion et certainement pas sur le niveau des rémunérations actuelles ou différées. En revanche, on voit bien que c'est le lien entre la rémunération et la notion de Comment réagissez-vous aux polémiques performance de l'entreprise comme du sur les rémunérations des dirigeants et dirigeant qui fait débat. Dès lors que la loi les indemnités de départ ? doit intervenir, je préfèrerais qu'elle se place Philippe Marini : Depuis plusieurs années, sur le terrain fiscal et que les conditions de les AG progressent sur ces sujets qui sont dénouement des contrats existants puissent varier en fonction de la situation économique devenus moins tabous. Néanmoins, une grande pudeur continue à régner et souvent de chaque groupe lorsque le dirigeant le quitte. Un traitement fiscal prohibitif devrait la question est traitée dans la documentation et non en AG. Mieux vaudrait que les s'appliquer lorsque le groupe aurait un résultat net négatif, lorsqu'il aurait connu dirigeants, et le président en tête, osent une chute importante de sa capitalisation communiquer sur ce sujet. Sur les boursière pendant la période où le dirigeant avantages de départ des dirigeants, je était aux commandes ou lorsque son conçois que certaines pratiques aient pu indépendance économique aurait été aliénée choquer parce que contraires à la morale à la faveur d'une offre publique. élémentaire. En contrepoint, il existe heureusement des pratiques individuelles Philippe Marini, 57 ans, avocat, est Sénateur de l’Oise depuis 1992 et, à ce titre, Rapporteur Général comme celle de Pierre Bilger pour une de la Commission des finances, du contrôle budgétaire entreprise en situation difficile ou de et des comptes économiques de la Nation. Il est aussi Bertrand Collomb pour une entreprise dont maire de Compiègne. Tendances des AGs DES QUORUMS EN HAUSSE Le quorum moyen en 2007 a progressé à 56,1% vs 48,8% en 2005 ; il devrait continuer à progresser l'année prochaine. Les hausses les plus nettes ont concerné Thomson (+15%), Capgemini (+14%), Lagardère (14%), Sanofi-Aventis (+13,3%), Total (+12,7%), Vivendi (+11,4%), Accor (+10,4%), France Télécom (+10,2%), Vinci (+9,2%). Le quorum n'a baissé que dans 6 groupes sur 40, et de façon assez marginale hormis Essilor (-8,6% de 50,1% à 41,5%), LVMH (-4%), Saint-Gobain (-3,4%), Danone (- 2%), Alcatel-Lucent (-1%), Renault (- 0,8%). PLUS DE « 1ÈRE CONVOC'» 83% des Assemblées se sont tenues sur première convocation, contre 81% en 2006 et 57% en 2005. Preuve que les entreprises rencontrent moins de difficultés pour mobiliser les actionnaires et obtenir le quorum légal pour délibérer. DÉFENSE ANTI-OPA Deux sociétés seulement se sont déclarées hostiles aux mesures antiOPA : Capgemini et Air Liquide, dont le Président Benoît Potier estime que « l'arme contre les opérations hostiles, c'est une croissance régulière et la qualité des relations avec les actionnaires ». 9 DÉPÔTS DE « RÉSOLUTION A » Plusieurs résolutions ont été déposées par des actionnaires. 5 réclamaient la suppression de la clause de plafonnement des droits de vote insérée dans les statuts de la société (Alcatel, Danone, Schneider, Lafarge, Total) ; l'une a abouti en dépit de l'opposition du Conseil (Alcatel, 71,3% de vote pour la suppression de la clause). 4 ont été portées par des actionnaires salariés (Schneider / représentation ; Total / nouvelle procédure de désignation et attribution d'actions gratuites ; Peugeot / augmentation de capital réservée) ; aucune n'a abouti. A L'HEURE D'INTERNET 25 AG seulement sur 40 ont été retransmises en direct. Et 3 sociétés ont fait savoir qu'elles permettent de voter par Internet. 7% 30% Répartition des 14 résolutions rejetées Les actionnaires ont réagi fortement à toute résolution pouvant servir à gêner les attaques hostiles contre l'entreprise, ces « pilules empoisonnées » les privant d'une envolée du cours de Il n’est plus nécessaire d’immobiliser les bourse. Ainsi, les « BSA Breton » titres comme les années passées. Seuls (opportunité accordée au Conseil face à la Suisse, les Pays-Bas, la Belgique et une OPA de lancer des bons de l'Italie imposent encore le blocage des souscription pour contraindre actions pour pouvoir participer à une AG. l'agresseur à augmenter son prix), ont Toutes les autres places financières suscité une certaine réticence : sur les internationales ont adopté la record date. 7 résolutions portant sur ce sujet, 4 ont recueilli un accord étriqué des Cette réforme a nettement favorisé la actionnaires. Saint-Gobain a réussi à participation des actionnaires, faire voter sa notamment des institurésolution avec 81,3% tionnels étrangers qui « Le nombre (contre 55% l'année détiennent en moyenne dernière), mais avec presque 46% du capital de résolutions une condition de des groupes du CAC 40. rejetées ou moins dilution potentielle très Le nombre de résolutions acceptable (émission rejetées ou moins bien bien votées plafonnée à 368 M€). votées (rejet supérieur à (rejet supérieur De même pour PSA 25%) est en nette hausse. Peugeot Citroën. Il paraît loin le temps où à 25%) est en toutes les Assemblées Autre dispositif de nette hausse » entérinaient les protection : dans propositions sans réagir. 5 sociétés, des On observera que cette vague de actionnaires ont tenté de faire supprimer contestation est souvent liée à la le plafonnement du droit de vote en progression de la participation. vigueur (une clause insérée dans les statuts pour empêcher les prises de Les crispations les plus fortes ont contrôle rampante) ; l'une a réussi concerné les dispositifs anti-OPA, (Alcatel-Lucent) et le score pour les les augmentations de capital sans droit autres est assez élevé. 2 sociétés ont préférentiel de souscription, les voulu faire adopter cette protection. attributions d'actions gratuites aux Sans succès. Les 2 ont échoué devant dirigeants et/ou aux collaborateurs, l'hostilité des actionnaires, notamment les conventions réglementées institutionnels étrangers, très attachés (indemnité des dirigeants en cas de à la règle « one share, one vote ». départ, retraite chapeau…) L’entrée en vigueur de la réforme de la « record date » (décret du 11 décembre 2006) cette année a permis, à tout actionnaire possédant ses actions trois jours avant la date d'AG, de participer au vote des résolutions. Une contestation plus forte 14 résolutions présentées par les sociétés ont été refusées contre 5 l'année dernière. En outre, 35 résolutions ont été votées mais avec un quorum moins bon (inférieur à 75%) et parfois de justesse, soit plus d’1 résolution par société. Au total, 49 résolutions ont suscité des réserves, les critiques se concentrant sur 19 sociétés, à savoir celles dont le capital est ouvert. Ce qui fait un taux de contestation réel de 2 à 3 résolutions attaquées par société ! 7 5 Les résolutions qui ont obtenu une faible majorité : l'augmentation de capital sans DPS à Saint-Gobain 4 (66,74% pour un seuil à 66,66%) et le dividende 2006 2005 d'EADS (52% pour un seuil à 50%). 04 14 2007 20 14% 21% 4% 14% 1 Actions gratuites Limitation du droit de vote Déclaration de franchissement de seuil Augmentation de capital en cas d'offre publique Augmentation sans DPS Émission par des filiales de titres convertibles Répartition des 49 résolutions rejetées et votées à faible majorité (<75%) 16% 47% 37% Repère s Dirigeants et administrateurs Anti-OPA Stratégie 3 Jean-Pierre Hellebuyck : « Je ne suis pas favorable aux délégations de pouvoir à l'aveugle » Certains s'élèvent contre le fait qu'une action ne soit pas égale à une voix. Les entreprises répondent qu'il s'agit d'une protection contre les OPA rampantes. Quelle est votre position ? Jean-Pierre Hellebuyck : J'estime qu'une action doit être égale à une voix car le manque de concordance entre les droits de vote et les droits économiques peut entraîner des effets pervers. Une minorité de contrôle peut prendre une décision qui lui est favorable mais qui est défavorable à l'avenir de l'entreprise. De même pour les emprunts de titres. Je ne veux pas les remettre en cause car ils permettent plus de fluidité et peuvent être indispensables pour effectuer des transactions, mais la prudence s’impose. Par exemple, lorsqu'une résolution est présentée en AG par des intérêts minoritaires contre l'avis du Conseil, on devrait connaître la nature économique des titres à l'origine de la proposition. Cela éviterait les déviations dangereuses et de plus en plus fréquentes aux Etats-Unis où des fonds vendeurs à découvert empruntent des titres et votent contre l'intérêt de l'entreprise. De telles pratiques arrivent en France. L'an dernier chez Vivendi, il semblerait que des minoritaires aient demandé le démantèlement de l'entreprise à travers des titres empruntés. Des résolutions ont porté sur les «BSA Breton». En dépit des interrogations des investisseurs, aucune n'a été rejetée parmi les grands groupes. Qu'en pensez-vous ? Jean-Pierre Hellebuyck : Les résolutions portant sur la faculté d'émettre des bons de souscription en cas d'offre publique ont été votées parce qu'elles requièrent une simple majorité qualifiée. Mais de nombreuses résolutions sur les augmentations de capital sans DPS et dilutives ont été rejetées, avec raison. A chacun son rôle. Les opérations de capital et les mouvements qui ont une influence sur la valeur de l'entreprise sont du ressort des actionnaires et ne se délèguent pas. Lorsqu'une entreprise est confrontée à une OPA, elle peut convoquer rapidement une AG extraordinaire et demander à ses actionnaires de voter des mesures de protection. Mais elle ne doit pas leur demander de voter des augmentations de capital importantes avec effet dilutif si elles ne sont pas destinées à un projet précis. Je ne suis pas favorable aux délégations de pouvoir à l'aveugle. Faut-il un vote en AG sur la politique de rémunération des dirigeants ? Jean-Pierre Hellebuyck : Ce qui touche aux rémunérations des dirigeants doit être du ressort du Conseil d'administration par le biais du comité des rémunérations composé en majorité d'administrateurs indépendants. Les critères d'évaluation des performances sont tellement complexes qu'ils ne peuvent être déterminés que par le Conseil. Mais ils doivent être portés à la connaissance des actionnaires. Il faut réagir contre les débordements devenus un phénomène mondial intolérable. On a pensé que la transparence apporterait discipline et retenue. C'est le contraire qui s'est produit. Elle a entraîné une sorte de course poursuite, personne ne voulant être en dessous de la moyenne… Quelles sont à vos yeux les évolutions qui ont marqué les AG ces dernières années ? Jean-Pierre Hellebuyck : Les Conseils d'administration et les dirigeants prêtent une plus grande attention à la tenue des AG et au gouvernement d'entreprise. Mais souvent la peur d'OPA ou de raid les amène à prendre des décisions qui ne vont pas dans le bon sens. Les entreprises ont besoin d'actionnaires stables alors qu'il y a de moins en moins d'actionnaires à long terme dans le monde. Vice-Président d'Axa Asset Management et d'Axa Private Equity, Jean-Pierre Hellebuyck, 58 ans, est membre de la Société Française des Analystes Financiers (SFAF) et, depuis 1997, Président de la commission de gouvernement d'entreprise de l'AFG. Diplômé de l'ESC Lille et du collège d'Europe à Bruges, il a débuté sa carrière comme analyste financier à la BUP puis chez Paluel Marmont. Yves Mansion : « Les AG ont encore gagné cette année en participation et en qualité de l'information » Quel est votre bilan sur la mise en œuvre de la record date ? Yves Mansion : La campagne des AG 2007 essuie les plâtres de cette réforme. Le décret n'a pas été complètement compris et appliqué en temps utile, notamment dans les réseaux bancaires. Car l'abandon de l'obligation de blocage des titres ne supprime pas l'obligation de s'inscrire pour participer. C’est important car beaucoup d'actions sont au porteur et ne sont connues de l'émetteur que par l'intermédiaire du banquier qui gère le compte titres. Les institutionnels ont ainsi plus vite profité de la nouvelle record date que les particuliers. A la lumière de votre rapport, pensez-vous que les AG évoluent dans le bon sens ? Yves Mansion : Oui. Les AG qui étaient déjà plus satisfaisantes que nombre d'AG étrangères tant pour la qualité des débats que pour l'importance des délibérations, ont encore gagné cette année en taux de participation et en qualité de l'information des actionnaires. J’observe aussi que la couverture médiatique des AG ayant un enjeu a été plus importante que les années précédentes. Certaines questions dont on ne connaît pas la réponse en entrant dans l'AG sont tranchées par les délibérations des actionnaires. Deux évolutions sont souhaitables. D'abord, la question du partage des pouvoirs entre l'AG et le Conseil d'administration. Ensuite, la question du droit de vote des actionnaires et de la légitimité discutée du vote des emprunteurs de titres qui ont le 4 droit de vote sans avoir le risque patrimonial de l'actionnaire. Plus les délibérations seront serrées, plus cette question sera sensible. Les autorités vont avoir à intervenir dans ce débat. Faut-il aller plus loin en matière de transparence sur les rémunérations, stock options, retraites-chapeau, indemnités ? Yves Mansion : Pour les sociétés cotées, la question n'est plus la transparence, mais la cohérence et la légitimité de la rémunération des dirigeants. De nombreuses résolutions ne sont pas toujours très claires. Vous ne pensez pas que l'on devrait mieux les expliquer ? Yves Mansion : C'est vrai et cela tient au caractère juridiquement très précis des résolutions soumises en France au vote des actionnaires. La langue du droit est parfaite pour les professionnels mais pas facile pour le public. Pour limiter le risque d'incompréhension, l'AMF a recommandé que toutes les résolutions, et surtout les plus ardues, soient précédées d'une présentation synthétique de l'objet du texte. De nombreux émetteurs le font et il faut que cela continue à progresser, en particulier par une présentation pédagogique en AG. Yves Mansion, X et ENA (inspecteur des finances), 56 ans, est administrateur Directeur général de la Société Foncière Lyonnaise (SFL) où il est entré en 2002 après avoir passé 12 ans aux AGF comme Directeur général et 12 ans au Ministère des Finances. En parallèle, il est devenu, en 2004, membre du collège de l'AMF. Jean-Louis Beffa a annoncé qu'il cède les rênes à Pierre-André de Chalendar, nouveau DG- a proposé à ses deux nouveaux administrateurs de se présenter devant l'Assemblée et Ce thème reste néanmoins marginal (6% d'expliquer leurs motivations. Suez a fait de la durée moyenne d'une AG). Mais intervenir en vidéo ses présidents des plusieurs groupes ont montré la voie de 4 Comités pour une la transparence en matière de politique de « Plusieurs groupes explication de ce qu'ils font concrètement. rémunération des ont montré la voie Vinci a présenté un dirigeants en y consacrant de la transparence portrait filmé des un temps significatif : 3 nouveaux Vivendi (25'), Axa (20'), en matière administrateurs. BNP Paribas (16'), Société La durée des explications sur le fonctionnement des instances dirigeantes a progressé de 7' en 2005 à 10' cette année. de politique de rémunération des dirigeants » Générale (15'). Certains, notamment L'Oréal (15'), Suez (14'), Renault (10'), Total (10') et Alcatel-Lucent (10'), ont insisté sur le travail des organes de direction. Suez a annoncé ainsi son souci de renforcer le nombre d'administrateurs indépendants. Alcatel-Lucent a souligné le taux Répartition 2007 des questions sur le gouvernement d’entreprise Administrateurs 7% 21% 11% 61% Politique de rémunération des dirigeants, stock options, retraite Fonctionnement du Conseil Parité homme & femme d'indépendance de son Conseil, le plus élevé du CAC 40 (11 sur 12 hors les deux managers). Les innovations à souligner : Saint-Gobain -dont le Président L'emphase médiatique sur certains cas de golden parachute a provoqué des réactions parfois vives des actionnaires lors des AG. Dans presque toutes les AG, les questions ont fusé sur les rémunérations, les retraites, les stock options. Ce contexte a conduit plusieurs sociétés à mettre en avant de bonnes pratiques. Chez Air Liquide, on n'accorde pas d'actions gratuites aux mandataires sociaux déjà attributaires de stocks options ; Danone et Axa ont expliqué que les actions gratuites servent à mobiliser l'énergie de l'ensemble des collaborateurs du Groupe. 4 résolutions sur des conventions réglementées ont suscité une réticence nette (France Télécom, Renault, Vallourec, Vivendi). Concernant les stock options, nous n'avons pas relevé d'opposition mais, en revanche, les « AGA » (attributions d'actions gratuites) ont encore provoqué des réserves (Alcatel-Lucent, Danone, Essilor), avec deux résolutions rejetées (Capgemini, Vallourec). Ajoutons à cela le vote du dividende à EADS, une résolution adoptée de justesse (52%). brèves Une montée en puissance du thème du Gouvernement d'entreprise Des dirigeants jeunes La moyenne d'âge des dirigeants (PDG, DG, Président du directoire) est de 52,5 ans. Soit le même âge que le Chef de l'Etat français. 10 d'entre eux ne dépassent pas les 50 ans. Les 5 quadra benjamins : Guillaume Poitrinal (Unibail), Axel Miller (Dexia), JeanPascal Tricoire (Schneider), José Luis Duran (Carrefour) et François-Henri Pinault (PPR). 15% 60% 25% Age des dirigeants du CAC 40 50 ans ou moins 51 à 59 ans 60 ans et plus Pratiques exemplaires 7 dirigeants ont déclaré lors de l'AG ne pas disposer de golden parachute : BNP Paribas, Capgemini, Bouygues, Axa, Lafarge, L'Oréal, Suez. En outre, 4 dirigeants ont signalé que leur Conseil d'administration a décidé de renforcer l'obligation de détention d'actions de la société : Axa, BNP Paribas (détention de titres pour l'équivalent de 7 ans de rémunération pour Baudouin Prot et Michel Pébereau et de 5 ans pour les DG délégués), Société Générale, Vivendi. Questions en hausse Les questions sur la politique de rémunération ont fortement pesé lors du débat avec les actionnaires : de 48% dans le registre « gouvernement d'entreprise », ce sujet a bondi à 61%. L'autre thème en vogue dans les questions : la compétence et l'indépendance des administrateurs. Ce sujet a augmenté de 15 à 21%. L'AG la plus longue EADS l'emporte largement au palmarès de la durée, avec presque 6 heures, dans un contexte singulier. Arrive ensuite France Télécom, avec 3 heures 40. La plupart des AG tournent autour de 3 heures. Deux exceptions : 1 heure 40 pour PPR et pour AGF. 1 administrateur sur 10 est désormais une femme Alors que l'évolution était très lente ces dernières années, 8 femmes sont entrées cette année dans les cercles jusquelà très fermés des Conseils. L'évolution est significative : de 7,9% (44 sur 557), elles se rapprochent de la barre des 10% (52 sur 560). Les cinq groupes en tête avec plus de 20% d'administratrices sont : BNP Paribas et Pernod Ricard (3 sur 13), L'Oréal et Alcatel-Lucent (3 sur 14), Saint-Gobain (3 sur 15). Le nouveau Directeur général de Saint-Gobain, Pierre-André de Chalendar, a même insisté en déclarant que « ce sujet est clairement important pour l'entreprise ». Les 9 nouvelles élues : Annette Roux, Présidente de Bénéteau (L'Oréal), Suzanne Berger, Professeur de sciences politiques au Massachusetts Institute of Technology (BNP-Paribas), Yuko Harayama, Professeur au département Management of Science and Technology de l'université Tohoku au Japon (Saint-Gobain), Catherine Bréchignac, Présidente du CNRS (Renault), Sylvia Jay (Alcatel-Lucent), Aicha Mokdahi (actionnaire salarié) et Bridget Cosgrave, executive Vice-Président de Belgacom (Essilor International), Claudie Haigneré, spationaute, ancien ministre de la recherche (France Télécom), Pascale Sourisse, PDG d'Alcatel Space (Vinci). Mais à Essilor, Dominique Reiniche sort. 5 Des questions d'actionnaires qui portent plus sur la stratégie que sur l'action La stratégie (objectifs de croissance, innovation, perspectives en Chine, Inde…) demeure largement le thème numéro 1 des préoccupations des actionnaires, comme l'année dernière (34%). Le thème numéro 2 devient -actualité oblige- le « gouvernement d'entreprise », avec notamment les interrogations sur les rémunérations des dirigeants, les « golden parachutes », les « retraites chapeau », la compétence et l'indépendance des administrateurs, les attributions gratuites et les stock options. Ce thème progresse de 19% à 21%. La surprise vient de l'augmentation très significative des interrogations (écrites et orales) concernant l'activité des sociétés : performance des produits, état de la R&D, difficultés sur tel ou tel secteur, répartition des parts de marché, contrefaçon…. Ce type de questions progresse de 10% à 19% ! Dans la même veine, la gestion financière a suscité nettement plus d'interrogations (parité euro-dollar, état de la dette, rentabilité opérationnelle…) ; ces sujets gagnent aussi en importance (de 6 à 10%). A l'inverse, les questions boursières (sur le cours de l'action, le dividende) ont fortement chuté (de 26% à 15%), signe d'un vrai retour à la confiance des investisseurs. Deux évolutions marquantes cette année sont venues renforcer la relation d'association de l'actionnaire à l'entreprise (affectio societatis) : 1) 3 entreprises sur 4 ont présenté un film pour valoriser leurs atouts. L'année dernière, on atteignait presque 1 sur 2, et en 2005, tout juste 1 sur 3. Certains se démarquent par l'originalité, d'autres par l'émotion, d'autres encore par la qualité du reportage, historique, ou pédagogique. Ainsi, LVMH a adopté un scénario à la « Hitchcock / 24 heures chrono » dans la mise en valeur de ses « emblèmes » ; Alcatel-Lucent a projeté une présentation futuriste de son métier pour marquer son « ambition d'acteur de la mutation des technologies de communication » ; Danone a fait 6 applaudir son superbe reportage de 7' au Bangladesh (Grameen Danone Foods, une usine de yaourts à petit prix) ; Lafarge a proposé une rétrospective sur la transformation du Groupe durant les 20 années de présidence de Bertrand Collomb ; Air Liquide a présenté ses réalisations en Europe de l'Est ; Suez a fait découvrir tous les enjeux du Développement Durable ; Saint-Gobain a montré la diversité et la complexité des compositions minéralogiques des matériaux qu'elle commercialise. 2) La plupart des entreprises ont évoqué, en AG, leurs engagements en matière de Développement Durable, ce qui souligne une véritable réflexion sur leur responsabilité d’acteur économique et social. Les initiatives à signaler plus particulièrement : Danone a constitué le premier Comité CSR (Corporate Social Responsability) aux côtés du Conseil d’administration. Face à « la financiarisation des comités », Franck Riboud veut rétablir « l’équilibre entre l’économique et le social ». Le Groupe a également présenté une résolution rendant possible la souscription au fonds à finalité sociale qu’il a constitué (Danone Communities). Une consultation des actionnaires qui n’était pas obligatoire, mais Franck Riboud tenait à les associer à cet engagement de Développement Durable. L’Oréal a présenté un film sur son initiative « les coiffeurs du monde contre le sida ». Suez, spécialiste du Développement Durable, a diffusé un film mettant en valeur son action à l’aune de ses enjeux et de ses valeurs sociales. Accor a proposé un film de 8 minutes sur les « engagements du Groupe » (en faveur des collaborateurs, du Développement Durable, du Mécénat). Lafarge a dévoilé ses « Ambitions Développement Durable 2012 », avec des engagements sociaux, managériaux et environnementaux (réduction de 20% des émissions de CO2 par tonne de ciment d’ici 2010 et aussi de 20% sur les rejets. ZOOM sur La typologie des questions posées par les actionnaires dans les AG du CAC 40 Le palmarès de sujets d'intérêt : 1) la stratégie ; 2) le gouvernement d'entreprise ; 3) les métiers et marchés. L'évolution par rapport à l'année dernière est impressionnante sur la gestion de l'entreprise : globalement, les sujets « finance » et « métiers » grimpent de 16% à… 29% ! Répartition des questions 4% 1% 6% 19% 26% 10% 34% 35% 10% 21% 15% 19% 2006 Stratégie Métiers Gestion du capital/action 2007 Résultats Fusions et OPA Gouvernement d'entreprise Forte hausse du dividende dans la plupart des sociétés En moyenne, les actionnaires vont obtenir 26,5% de plus. Dans 1 entreprise sur 4, la hausse de la rémunération des actionnaires est supérieure à 30%. Cumulée à la forte hausse des cours de bourse en 2006 de 17,6% (après 23,4% en 2005), leur pouvoir d'achat progresse largement plus que les autres types de revenus. Les 10 plus fortes hausses de dividendes du CAC 40 : Vallourec (168%), Accor (156%), StMicro (150%), GDF (62%), EDF (47%), Capgemini (40%), Schneider, Bouygues, Vinci (33% tous trois), Renault (29%). Répartition des entreprises du CAC 40 selon l’évolution du dividende 12 9 9 4 3 2 Diminution Augmentation de 0 à 10% Augmentation de 20 à 30% Stabilité Augmentation de 10 à 20% Plus de 30% NB : Alstom 80 centimes de dividende en 2007, rien l’an dernier. VU ET ENTENDU AUX AG • Records de slides : L'Oréal en a projeté 130 et Air Liquide 122. A l'inverse, ArcelorMittal s'en est tenu à une quinzaine… • Lapsus : Jean-Pascal Beaufret, Directeur financier d’Alcatel-Lucent, annonce un dividende de 16 € avant de se raviser avec le sourire : « je voulais dire 16 centimes d'euro ». • Plébiscite pour Lakshmi Mittal à l'AG d'ArcelorMittal. La résolution pourtant critiquée entérinant sa nomination en tant que PDG d'Arcelor alors qu'il reste Président du Conseil d’administration a été adoptée à 98,2%, et à 97% celle prévoyant la nomination de sa femme en cas de carence. A noter : il a précisé que sa famille et lui-même s'étaient abstenus de voter pour ces deux résolutions les concernant. Trois autres résolutions ont été adoptées à 100% et trois à 99,9%. • Emouvant : le retrait de Bertrand Collomb, qui devient simple administrateur de Lafarge, et celui de Jean-Louis Beffa chez Saint-Gobain. Deux records de longévité et de succès : 32 ans passés dans le Groupe dont 18 à la présidence pour le premier, 33 ans dans le Groupe, 21 comme président pour le second. • Avant-gardiste : Pierre-André de Chalendar, le nouveau Directeur général de Saint-Gobain, souligne que « la présence de femmes au Conseil et au Comex est clairement un sujet important sur lequel je m'engage à travailler ». • Décontracté : Franck Riboud, PDG de Danone, rétorque à un actionnaire qui l'interpelle sur l'éco-emballage : « Je ne vais pas faire le malin, je n'ai pas la réponse ». Et Louis-Pierre Wenes, patron d'Orange France, qui explique que « tous les lundis matins le Président me fait des remarques » (au sujet des services à améliorer). • Impressionnant : le sang-froid de Pat Russo. L'élégante Directrice générale d'Alcatel Lucent a exposé sa stratégie contre vents et marées alors que des syndicalistes essayaient de la perturber. Quarante minutes d'affilée ! • Attentionné : 71% des sociétés remettent un cadeau à leurs actionnaires présents. Deux bougies pour Suez, un tournevis à lunettes pour Essilor, un porte-clés pour Renault, PPR et France-Telecom, un minuteur de cuisine pour GDF, un sac à dos avec accessoires de pique-nique pour Peugeot, un coffret de dégustation pour BNP Paribas et Total, un livre d'art avec une lampe liseuse pour Veolia, un CD de Polnareff pour Vivendi. • Innovant : le film de LVMH pour mettre en valeur les marques du groupe : une ravissante vêtue de Dior et de Vuitton, parfumée de Guerlain, vient fêter son anniversaire au Dom Pérignon dans un grand hôtel. Son fiancé arrivera-t-il ? Un scénario à la Hitchcock.... • Fushia : couleur dominante de la saison des AG (hôtesses des AGF, foulards et cravates chez Lagardère, fond d'écran d'Accor, moquette de Vivendi…). Une exception pour France Télécom c'est… l'orange qui s'imposait. • Econome : pas de vote électronique à l'AG de Pernod. Patrick Ricard a préféré éviter cette charge (40 000 €). Selon le DG de Saint-Gobain, le coût global d'une AG s'élève à 940 000 €. • Délicieux : les macarons Lenôtre du buffet d'Accor. • Branché : le choix par PPR de la salle Pleyel nouvellement restaurée pour tenir son AG. Les bonnes pratiques Coulisses Plusieurs groupes ont ouvert la voie au progrès pour rendre les AG plus transparentes, plus conviviales, plus instructives : Transparence sur les rémunérations. Axa s'est montré exemplaire à travers la présentation faite par Claude Bébéar, Président du Conseil de surveillance sur la politique de rémunération des dirigeants. Henri de Castries, Président du directoire, a renoncé à ses stock-options. Dans ce registre, signalons aussi Vivendi, BNP Paribas et Société Générale. AlcatelLucent et Total ont judicieusement expliqué la répartition des pouvoirs entre le Conseil d'administration et le Directeur général. Vision stratégique sur l'entreprise. Le Président d'Air Liquide a développé longuement ses ambitions (relais de croissance, R&D, stratégie financière), alors que Jean-Claude Buono, Directeur financier, a synthétisé l'exposé sur les résultats 2006. Danone a développé deux axes clés de son développement (les alicaments et l'alimentation des populations défavorisées). L'Oréal a mis l'accent sur les seniors de plus de 50 ans. Le Président d'Axa a pris le soin d'expliquer, sur la base « d'indicateurs de progrès » et à l'appui d'un dispositif de motivation (100 actions gratuites pour tous), comment il va réaliser ses objectifs 2012. Pédagogique. Citons à nouveau Air Liquide, Suez et Axa, mais aussi Renault, France Télécom, exemplaires dans leur intention de faire comprendre leurs métiers et leurs enjeux. Concernant le décryptage des résolutions, Peugeot, Air Liquide et Essilor ont tracé la voie à suivre. Responsable. Presque toutes les entreprises ont consacré du temps en AG à leurs engagements pour le Développement Durable. Notamment Danone (qui a présenté une résolution pour permettre au Groupe de souscrire au fonds à finalité sociale qu'il a constitué, Danone Communities), L'Oréal qui a lancé « les coiffeurs du monde contre le sida », Suez, Accor, Lafarge. A la hausse Accor : pour ses résolutions séparées sur les conventions réglementées. C'est le seul Groupe à avoir scrupuleusement respecté la recommandation de l'AMF ! De même, regrettons la résolution « balai » de remise à jour des statuts où certains Groupes ont inséré à la fois l'application de la record date et un relèvement de l'obligation de déclaration de franchissement de seuil dans le capital. Air Liquide : pour sa stratégie menée depuis 30 ans. Le Président a souligné que le retour sur investissement pour l'actionnaire est de 81 fois ! LVMH : pour le discours stratégique de Bernard Arnault rythmé en trois temps selon les trois thèmes de préoccupations des actionnaires (Stratégie, Perspectives, Relations avec les actionnaires) recueillis par une consultation préalable. Suez : pour son reportage sur le Développement Durable. Les explications données ont parfaitement mis en relief les enjeux et les opportunités pour l'entreprise. Danone : pour avoir constitué le premier Comité de Responsabilité Sociale au sein du Conseil d'administration et avoir présenté une résolution destinée à associer les actionnaires à son engagement de Développement Durable (le « Grameen Danone Foods » au Bangladesh). PPR : pour son rapport annuel new look. Quelle idée sympathique de présenter ce document rébarbatif sous une forme de roman intitulé « Entreprendre, notre grande aventure »! Il ne reste plus qu'à rendre tout le contenu complètement accessible à tous les actionnaires. A la baisse Les quelques sociétés qui ont présenté des résolutions sans les expliquer avant, en dépit de la recommandation de l’AMF. Certaines étaient rédigées dans un jargon particulièrement rébarbatif ! Tous les groupes qui ne comportent aucune femme à leur Conseil d'administration, alors que 8 sociétés ont décidé de réagir cette année. L'absence de retransmission par Internet de 15 AG sur 40. Et l'impossibilité d'exprimer son vote par Internet pour… 37 Groupes sur 40. 7 éditoriaux Jean-Paul Picard Président de Deloitte Les réformes législatives de ces dernières années avaient pour but d'améliorer la transparence et les droits des actionnaires. Y a-t-il encore des progrès à faire ? En matière de textes et de régulation, les dernières années ont été riches, parfois trop, tant au niveau français qu'international. Cette abondance de textes a permis d'apporter un nouvel éclairage sur les droits des actionnaires, mais aussi sur le rôle de la direction des entreprises. Pour ma part, je ne vois pas la nécessité de produire davantage de textes dont la complexité pourrait constituer un frein à l'activité des entreprises et à la prise de risques liées à leur fonction de production de richesses. Les évolutions des prochaines années passent à mon sens par une bonne prise de conscience de ces risques et la capacité des actionnaires à les assumer en connaissance de cause. On a enregistré cette année une forte opposition des actionnaires à certaines résolutions jugées sensibles. Pourquoi ? J'interprète cette augmentation comme résultant du plein exercice par les actionnaires de leur droit de vote. Il me paraît sain qu'après un solide débat les actionnaires puissent le cas échéant ne pas soutenir les propositions du management, la loi leur a donné un pouvoir, les actionnaires l'utilisent. C'est l'illustration d'une bonne gouvernance, a fortiori lorsque les sujets sont sensibles et que les analyses peuvent donc diverger. Il semble cependant que certaines résolutions soient peu expliquées et parfois mal comprises. Une meilleure pédagogie ne serait-elle pas utile ? Par expérience je sais que les équipes de direction sont pragmatiques, dès lors qu'elles identifient les points de difficulté elles améliorent le niveau d'explication et s'efforcent de réunir, dans le cadre de la réglementation, un consensus. L'objectif premier d'une AG est bien d'obtenir les accords nécessaires au bon déroulement de la stratégie mise en place, si la résolution présentée s'inscrit dans cette stratégie elle doit en toute logique être votée. Si un effort de pédagogie doit être fait c'est plutôt en amont dans le cadre général de la stratégie de l'entreprise. A ce niveau la pédagogie participe de la transparence, c'est la responsabilité de chacun, actionnaires et dirigeants, d'y veiller. Une répartition plus claire entre ce qui doit être décidé en Assemblée générale ou par le Conseil d'administration est-elle nécessaire ? Là aussi il ne me semble pas nécessaire de produire de nouveaux textes, la répartition des pouvoirs entre exécutif, surveillance et Assemblée générale est clairement définie. Le souhait par chacun des acteurs d'utiliser l'ensemble de ses droits me semble légitime et sain. Il s'agit de faire jouer à plein les mécanismes prévus qui doivent permettre le bon fonctionnement de l'entreprise et d'encadrer la prise de risques. Je conclurai juste en disant que le fait que chacun utilise ses droits et remplisse ses devoirs devrait contribuer à une meilleure transparence de la gouvernance. Pascale Gallien Associée de Norton Rose Rémunérations des dirigeants, stock options, retraites chapeau ont été, plus encore que l'année dernière, au cœur des préoccupations dans les AG. Quels enseignements en tirez-vous ? Il apparaît une distorsion entre les avancées rapides du législateur sur ces thèmes et la capacité des entreprises à accompagner ou devancer cette évolution. Le dispositif légal aux fins d'information des actionnaires est vécu comme une obligation contraignante, respectée mais pas toujours relayée par une présentation en AG. Ceci est de nature à alimenter réserves et suspicions. Les groupes plus institutionnels, tels AXA, BNP Paribas, Société Générale ou encore AGF, jouent davantage la transparence et traitent le sujet avec moins de retenue que des groupes d'origine familiale ou plus traditionnelle, pour qui cela semble encore tabou. Ils préviennent ainsi des difficultés de compréhension et anticipent les interrogations. Le tollé qui a marqué certaines AG a souvent pour origine des exagérations. Quelles sont selon vous les bonnes pratiques ? Les écarts entre les rémunérations des dirigeants et celles des autres acteurs sont d'autant plus mal vécus que nombre de groupes sont confrontés à des restructurations ayant pour corollaire des problèmes sociaux. Le respect d'un certain équilibre participe des bonnes pratiques mais il paraît difficile de figer in abstracto les critères d'appréciation. Divers paramètres doivent être pris en considération tels le marché de référence, la situation financière et sociale de l'entreprise, son passé récent, ses performances, les objectifs assignés aux dirigeants concernés. Le rapport de l'AFEP et du MEDEF de janvier 2007 préconise divers critères et procédures d'appréciation et, partant, des règles de conduite dans le sens d'un meilleur gouvernement d'entreprise. La mobilité actuelle des équipes dirigeantes accentue aussi ce sentiment d'inquiétude et de suspicion. Les petits actionnaires conservent un rapport plus affectif avec leur entreprise dans une perspective de plus long terme, ils craignent que l'implication de ces nouveaux dirigeants ne soit moindre ou plus opportuniste. Cette sensibilité cristallise certaines distorsions de perception. D'où l'intérêt de prévenir les incompréhensions par un traitement spontané et oral de ces sujets en AG. La loi est-elle suffisante pour entraîner une réelle transparence ? Depuis la loi NRE du 15 mai 2001, le dispositif légal a été renforcé dans le sens d'une information plus transparente et complète, comme le reflète le contenu actuel du rapport de gestion. Dès 2001, il est imposé que celui-ci rende compte de la rémunération totale et des avantages de toute nature versés aux dirigeants, y compris par les sociétés contrôlées et, suite à loi du 1er août 2003, la société contrôlante. L'ordonnance du 24 juin 2004 a étendu le champ des informations requises en visant l'attribution de titres de créance ou de capital telles les options et actions gratuites. La loi Breton du 26 juillet 2005 a ajouté l'obligation d'une information précise et exhaustive (parts fixe et variable de la rémunération, engagements souscrits au bénéfice du dirigeant y inclus après la cessation des fonctions…), et sanctionne par une possible nullité la méconnaissance des dispositions légales. Ces modifications législatives ont visé la qualité de la communication, opérée a posteriori, sans affecter, hors la mesure à laquelle peut inciter la perspective d'une divulgation, le pouvoir de décision des seuls organes de gestion. La loi du 30 décembre 2006 a amorcé une évolution dans la nature des prescriptions légales puisqu'elle encadre l'exercice des droits octroyés aux dirigeants sur les titres de capital via des options ou attributions d'actions gratuites, au-delà de la transparence exigée dans l'information y afférente. Faut-il aller plus loin ? Les règles de bonne gouvernance et le souci de moralisation doivent demeurer conciliables avec la flexibilité nécessaire à la vie des affaires et la prise en compte des particularités de l'entreprise. En revanche, le législateur peut aider dans la recherche d'une adhésion à la définition d'une politique globale de rémunération. Les recommandations et préconisations de place peuvent aussi contribuer très significativement à la normalisation des pratiques en la matière. Capitalcom, Agence de Communication Corporate, Financière et Développement Durable présidée par Caroline de La Marnierre, conseille et accompagne les sociétés dans leur stratégie en France et à l’International. Cabinet d’avocats d’affaires international 8 ÉQUIPE RÉDACTIONNELLE Deloitte propose à ses clients une palette d'offres très large : audit, consulting et Éditoriaux : Caroline de La Marnierre, risk services, juridique et fiscal, expertise comptable et corporate finance. Jean-Paul Picard, Pascale Gallien En France, Deloitte regroupe 5000 collaborateurs et associés répartis sur Ont collaboré à ce numéro : Jean-Denis Errard, Nadège Forestier 140 bureaux pour servir les entreprises de toutes tailles et de tous secteurs. (interviews), Yann Gontier, Marie-Laure Herold Conception-Réalisation : Pascal Ferrari Norton Rose est un cabinet d'avocats d'affaires international implanté Pour toute information : Yann Gontier en Europe, en Asie et au Moyen Orient. A Paris, plus de 80 avocats et Tél.: 01 45 49 94 15 - [email protected] sollicitors interviennent en droit des affaires et de la finance, notamment dans les secteurs suivants : corporate finance, institutions financières, transport, énergie, infrastructures, technologies.