Article 4_6

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Article 4_6
JANUSZ KORCZAK
2012 a été déclarée « Année Janusz Korczak », après 2010 « Année Chopin » et 2011
« Année Marie Curie ».
Oui, les polonais célèbrent cette année quelqu’un qui n’est pas aussi connu que Chopin et
Marie Curie … et qui n’a pas vécu en France.
Alors faisons un peu connaissance avec Janusz Korczak et
commençons par proposer ce petit texte à votre réflexion…
Vous dites :
— C’est épuisant de s'occuper des enfants.
Vous avez raison.
Vous ajoutez :
— Parce que nous devons nous mettre à leur niveau. Nous baisser, nous
pencher, nous courber, nous rapetisser.
Là, vous vous trompez. Ce n'est pas tant cela qui fatigue le plus, que le fait
d'être obligé de nous élever jusqu'à la hauteur de leurs sentiments.
De
nous élever, nous étirer, nous mettre sur la pointe des pieds, nous
tendre.
Pour ne pas les blesser. »
Janusz KORCZAK, Quand je redeviendrai petit (prologue), (1)
C’est, vous l’avez compris, un pédagogue dont il est question. Grâce à Wikipédia, voici
quelques renseignements le concernant.
Janusz Korczak (né le 22 juillet 1878, mort le 5 août 1942), de son vrai nom Henryk
Goldszmit, est un médecin-pédiatre et écrivain polonais. Avant la Seconde Guerre
mondiale, il est une des figures de la pédagogie de l'enfance les plus réputées. Il laisse
son nom à la postérité pour avoir choisi délibérément d'être déporté vers Treblinka
avec les enfants juifs du ghetto de Varsovie dont il s'occupait dans un orphelinat (voir le
film d'Andrzej Wajda : Korczak, 1989).
En 1898, il entreprit des études de Médecine à l'Université de Varsovie. Cette
même année, il prit le pseudonyme de Janusz Korczak à l’occasion d’un
concours littéraire. En 1899, Korczak partit en Suisse, afin de se familiariser avec
la pédagogie de Johann Heinrich Pestalozzi. Visitant le pays, il s'intéressa
beaucoup aux écoles, aux hôpitaux pour enfants, ainsi qu’aux salles gratuites de lecture pour les
enfants. Le 17 mars 1905, il obtint son diplôme de médecin à la fin de ses cinq années d'études.
Entre 1903 et 1912, il travailla comme pédiatre dans un hôpital pour enfants.
(1) Quand je redeviendrai petit, est l'un des plus beaux romans pour enfants de Korczak dédié aux
droits de l’enfant. Il a été traduit et publié en français sous le titre : Le droit de l’enfant au
respect (AFJK, Association Française Janusz Korczak). Pour en savoir plus sur Korczak : http://korczak.fr
En 1907, il partit pour Berlin, pour parfaire ses études de médecine. Il allait à des conférences (pour
lesquelles il devait payer lui-même) et travailla dans une clinique pour enfants, il visita aussi
différentes institutions d'enseignements. Quand il travailla pour la Société des Orphelins en 1909, il
rencontra Stefania Wilczyńska. En 1911-1912, il devint le directeur de Dom Sierot, l'orphelinat qu'il
créa pour les enfants juifs de Varsovie. Il prit Stefania Wilczyńska comme associée. Il y mit en
place une sorte de "République" des enfants avec son propre Parlement, Tribunal et Journal et
réduisit en conséquence ses activités de médecin.
1912 – 2012 : Voici donc 100 ans que Janusz Korczak fonda cet orphelinat pour enfants où
il mit en œuvre ses conceptions pédagogiques dont nous reparlerons plus loin.
C’est donc ce centenaire (mais aussi les soixante-dix ans de sa mort) qui a conduit la
Pologne à dédier cette année 2012 à Janusz Korczak.
En 1926, il met en place Mały Przegląd (1926-1939), qu'il dirige pendant quatre années. Il
s'agit d'un supplément au journal Nasz Przegląd qui était rédigé par des enfants et des adolescents. Il
milita activement pour la popularisation de la défense des droits de l'enfant par le biais d'émissions
de radio. En septembre 1939, Korczak est conférencier à la Radio Polonaise.
Le Ghetto de Varsovie.
Dans le Ghetto, il portait son uniforme polonais et refusait de porter l'étoile de David. Au cours des
deux dernières années de sa vie, il s'occupa presque exclusivement des enfants de son orphelinat. À
cette époque, Igor Newerly essaya d'obtenir des papiers pour Korczak, mais ce dernier refusa (ce
qu'il fit à plusieurs reprises lorsque des occasions de s'échapper seul du ghetto se présentèrent).
Durant les trois derniers mois de sa vie, à partir de mai 1942, il travailla sur un mémoire (publié à
Varsovie en 1958) du ghetto de Varsovie. Il écrivit dans son mémoire pour la dernière fois le 5 août
1942, à propos de plantes et d'un soldat allemand posté près du mur du ghetto.
La dernière marche
Il disparut en même temps que ses enfants du ghetto en 1942, décidant de lui-même et insistant
même pour pouvoir accompagner ses enfants sur leur route vers les chambres à gaz de Treblinka.
Le départ du ghetto a été maintes fois décrit par des témoignages extérieurs comme celui de Joshua
Perle ou de Władysław Szpilman (dans Le pianiste).
Au petit matin du 5 ou 6 août 1942, des soldats SS, ukrainiens et lettons encerclèrent le Petit
Ghetto. Le cortège se mit en route pour aller à l’Umschlagplatz. Korczak menait les enfants, sans
chapeau, dans des bottes militaires, tenant deux enfants par
la main. Il y avait dans le cortège 192 enfants et près de dix
de leurs soignants, dont Stefania Wilczyńska. Les enfants
marchaient 4 par 4 dans leurs plus beaux habits, portant le
drapeau du Roi Mathias Ier. Ce même jour, l'armée nazie
déporta d'Umschlaplatz 4 000 enfants des orphelinats et
leurs aides du ghetto de Varsovie. La pièce de théâtre de
Liliane Atlan, Monsieur Fugue ou le mal de terre est
inspirée par le dernier trajet de Korczak avec les enfants
Jérusalem - Mémorial de Yad Vashem sculpture en hommage à Janusz
Korczak, représenté avec les enfants
de son orphelinat. On remarquera les
petits cailloux blancs déposés sur la
statue en divers endroits qui semblent
être de délicats pétales de fleurs
tombés d'un arbre.
Œuvre
Dès le début du XXe siècle, Korczak a œuvré à une refonte
complète de l’éducation et du statut de l’enfant, sur des
bases constitutionnelles entièrement nouvelles, privilégiant
la sauvegarde et le respect absolu de l’enfance. Ses
multiples écrits pour enfants et pour adultes (Comment
aimer un enfant, Le Roi Mathias Ier ), l’exemple de ses deux
orphelinats organisés en républiques d’enfants (« Dom Sierot » créé en 1912 et « Nasz Dom » en
1919), ses émissions de radio, son journal national d’enfants (« Mały Przegląd ») ont marqué des
générations entières de petits Polonais.
En artiste tout autant qu'en scientifique et clinicien, il a incarné une véritable pédagogie du respect,
une école de la démocratie et de la participation qui font aujourd’hui universellement référence.
Sur le plan pédagogique, l’œuvre de Korczak s'inscrit dans la lignée de la « pédagogie active » et de
« l’École nouvelle », aux côtés de :
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Johann Heinrich Pestalozzi, promoteur de l’éducation populaire (1746-1827)
Maria Montessori et sa méthode d’éducation sensorielle non-directive (1870-1952)
Ovide Decroly et son « École de la vie » (1871-1932)
Fernand Deligny (1913-1996), théoricien et éducateur d’enfants autistes
Alexander Sutherland Neill et l'école de Summerhill (1883-1973)
Anton Semenovitch Makarenko et la réadaptation par le travail (1888-1939)
Célestin Freinet, promoteur des méthodes actives d’enseignement (1896-1966).
Janusz Korczak lui-même est de plus en plus étudié comme l’un
des précurseurs de la pédagogie institutionnelle et de « l’autogestion
pédagogique ». Il pourrait aussi être reconnu comme un « pédagogue
autogestionnaire », aux côtés de Paul Robin, Sébastien Faure et
Francisco Ferrer (1859-1908), anarchiste espagnol qui reste le seul
pédagogue avec Korczak à avoir été assassiné pour ses idées.
Dans le domaine des droits de l'enfant, il est aussi le précurseur de
la mise en pratique des droits positifs de l’enfant (droits d’expression,
de participation, d’association, etc.) officiellement établis le 20
novembre 1989 par les articles 12 à 17 de la Convention des Nations
unies pour les droits de l’enfant, un texte et un acte politique majeur
dont il exigeait l’élaboration depuis la fin du XIXe siècle.
Soixante-dix ans après sa mort, l’histoire et l’œuvre littéraire,
pédagogique, philosophique et sociale du « Vieux docteur », souvent
méconnues en France, interpellent encore l’ensemble des pratiques et
des regards des adultes sur les enfants et les jeunes
Cénotaphe de Janusz Korczak au
Cimetière juif de Varsovie
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Bibliographie
Janusz Korczak : Pédagogues et Pédagogies", Jacques Ladsous, PUF, 11/1995
Martineau, 1967 ; Gallimard "folio junior". ISBN 2-07-033036-2
Le Droit de l'enfant au respect, Robert Laffont, Paris, 1979.
Colonies de vacances, La Pensée universelle, Paris, 1984.
Le Roi Mathias sur l'île déserte, Atelier Cauchois, Rouen, 1986 ; Paris, Gallimard "folio
junior". ISBN 2-07-033598-4
Korczak, un homme, un symbole, Lili Berger. Paris, Magnard, 1989.
Journal du ghetto, Paris, Ed Robert Laffont, 1998. ISBN 2-221-08660-0
Herschele, et autres contes, Paris, Ed Est-Ouest internationales, 2003.
Janusz Korczak-Les droits de l'enfant, Ed Fleurus Presse (Histoires vraies) 2009.
On peut également trouver un excellent dossier des éditions Fabert sur le site suivant :
http://www.fabert.com/pages/annee_janusz_korczak.php