Huit millions d`euros pour restaurer les tourbières du Jura

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Huit millions d`euros pour restaurer les tourbières du Jura
LE JURA ET SA REGION
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Huit millions d’euros pour
restaurer les tourbières du Jura
Photo Philippe Galland
Classée et
ouverte au public
en février 2014
Environnement. Le projet, le plus important de France, est l’un des plus ambitieux en
Europe. Le programme « Life » a pour but de restaurer les tourbières du Jura et de leur
rendre leur autonomie.
« L’
écologie ne doit
pas être puniti­
ve », lançait,
lundi matin, Joël Alpy, maire
de Frasne (Doubs) alor s
qu’était présenté l’ambitieux
programme de restauration
des tourbières du village. Si
par la même occasion l’élu
regrettait l’absence de la
ministre, il insistait sur « un
projet qui est la reconnais­
sance d’un travail partagé ».
D’autant plus que l’enjeu
dépasse les limites même de
ce territoire du haut Doubs.
Geneviève Magnon, chargée
de mission à Natura 2000, en
explique toute l’importance :
« La tourbe, c’est autant de
Repères
6
Six ans seront nécessaires
afin de mener à bien le projet
« Life tourbières du Jura ».
8
C’est en millions d’euros le budget
qui sera consacré à la restauration
des tourbières du Jura.
25
Le nombre de salariés de 6 structures sont intégrés au programme,
soit 5 équivalents temps plein.
60
C’est le nombre de tourbières qui
bénéficient du programme sur 16
sites Natura 2000, en FrancheComté pour une superficie de
600 ha, dont pour le département
du Jura : Entrecôtes-du-Milieu,
Vallée de l’Orbe, la Combe du Lac,
vallée de la Bienne, Plateau du
Lizon, Combe de Nanchez et
Grandvaux. La Franche-Comté a
recensé 361 tourbières pour un
total de 2 800 ha.
845
C’est, en millions d’€, le budget
total du plan européen d’actions en
faveur du climat.
12

carbone stocké qui ne repart
pas dans l’atmosphère ». Et
d e d o n n e r d e u x c h i f f re s
significatifs : « les tourbières
représentent 3 % de la super­
ficie terrestre mais 30 % du
carbone stocké. Ce program­
me de restauration des tour­
bières, dont celle de Frasne,
s’inscrit dans un vaste pro­
gramme européen ». En
écho, Anne Vignot, présiden­
te du conservatoire d’espaces
naturels de Franche­Comté,
insistait : « Nous ne sommes
pas seulement dans la pré­
servation, mais dans la res­
tauration. Ces lourds travaux
doivent sauver la tourbière.
Il s’agit de rendre à nouveau
les tourbières autonomes
avec une réparation massive.
C’est également un espoir
pour une meilleure compré­
hension des milieux natu­
rels ».
«Une éponge
nécessaire en cas
de sécheresse
et d’inondations»
Laurent Teissier, directeur
régional de l’agence de l’eau
Geneviève Magnon préci­
sait : « D’ailleurs, l’Université
de Franche­Comté est char­
gée de travailler sur les tour­
bières et d’en mesurer leur
assèchement par rapport au
c hangement climatique.
Nous espérons en tirer de
précieux enseignements
pour l’avenir ». Longtemps
exploitées par l’homme (lire
par ailleurs), les tourbières
ont été considérablement
mises à mal. « Avec l’aban­
don de la tourbe comme
combustible ménager, elles
ont été longtemps considé­
rées comme zones improduc­
tives. Comme, ici, à Frasne,
LE PROGRES - VENDREDI 3 OCTOBRE 2014
l’homme a tenté de reboiser
en masse pour assécher ces
z o n e s . O n a p u c o mp t e r
jusqu’à 100 essences dont
une seule a survécu : le pin
veymouth. Ce fut une catas­
trophe, ses longues aiguilles
détruisaient toute forme de
végétation. Un contrat fores­
tier est en cours afin d’en
éradiquer la présence. On
constate d’ailleurs le retour
Photo Philippe Galland
« Une tourbière,
c’est du carbone
stocké qui ne
repart pas dans
l’atmosphère »
Geneviève Magnon, chargée
de mission Natura 2000.
11 autres sites du Jura
(massif) sont actuellement
en phase de classement
en réserve naturelle régionale, dont Combe du Nanchez,
à Prénovel.
du bouleau et des mousses,
ce qui est un bon signe ».
Laurent Teissier, directeur
régional de l’agence de l’eau
confirme : « Ces zones humi­
des sont essentielles pour
nos équilibres. Elles fonc­
tionnent un peu comme une
éponge. Abandonnées
depuis des décennies, les
tourbières jouent un rôle
important tant en période de
sécheresse que d’inonda­
tions ».
C’est ainsi que le programme
européen « Life » a pu arriver
jusqu’à Frasne, notamment.
« Il a été favorisé par deux
aspects majeurs : la nature
exceptionnelle du site et la
solidarité de l’ensemble des
acteurs qui agissent sur ce
territoire », souligne Anne
Vignot. « Life tourbières du
Jura » est un programme
européen qui a une double
compétence : l’environne­
Besançon
A36
Dole
Tavaux
s
ub
Do
Le N83 DOUBS
N57
Frasne
A39
JURA
Poligny
1
D47
Pontarlier
Censeau
Champagnole
Lons- N5
le-Saunier
Morez
Lons-le-Saunier: 60 km 0 h 55 mn
Champagnole : 26 km 0 h 25 mn
Dole :
89 km 1 h 10 mn
Besançon:
70 km 0 h 57 mn
Lyon:
213 km 2 h 10 mn
ment, pour 3,9 milliards
d’euros, et l’action climati­
que pour 864 millions
d’euros. « C’est l’un des plus
ambitieux projets européens.
Il est aussi le plus important
en France », rappelle Anne
Vignot. Du côté de l’État,
Bruno Charlot, sous­préfet
de Pontarlier, admet : « On
est dans du concret. Il faut
également sensibiliser la
population et l’associer au
projet. Finalement, nous
devons réparer ce que nous
avons détruit ! » 
Philippe Galland
* Une tourbière est composée de
moraines glacières issues de la
dernière glaciation. C’est une
accumulation, sur plusieurs
mêtres, de matières organiques
saturées d’eau qui en empêche la
décomposition.
L’exploitation des tourbières
a contribué à leur mise en péril
C
ombustible utilisé
jusqu’à la fin du
XIX e siècle, la tourbe a
fait l’objet d’une importante,
et vitale à l’époque, exploita­
tion par l’homme. Les tour­
biers transformaient la terre
en br ique, que femmes et
enfants manipulaient tout l’été
afin d’en favoriser le séchage.
Composé de 100 % de carbone
ces briques alimentaient les
foyers. C’est après 1880, avec
l’arrivée du chemin de fer,
donc du charbon, que les tour­
bières ont été abandonnées. 
La confrérie des tourbiers perpétue la tradition, désormais dans
le respect de la tourbière. Photo Philippe Galland

JUR