Comment te dire…

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Comment te dire…
Comment te dire…
fascicule 08
L e s
d i f f é r e n t e s
l é g e n d e s
Une légende est un récit que les gens racontent
comme une histoire vraie. Les détails sont parfois
difficiles à vérifier, mais on peut nommer l'endroit
où l'événement est arrivé, les personnes à qui la
chose est arrivée. La plupart du temps, la personne qui raconte l'histoire n'a pas ellemême été témoin de l'événement, mais elle connaît quelqu'un qui connaît quelqu'un qui
a entendu dire que c'est vraiment arrivé... Les légendes ont souvent une morale ou une
leçon, et servent à renforcer les valeurs de la communauté. Elles contiennent souvent
des éléments surnaturels ou religieux.
Une légende urbaine est une histoire étrange et spectaculaire souvent
inspirée d'un lointain fait divers qui fait le tour du monde circulant de
bouche à oreille, qui est racontée de bonne foi par des gens sincères,
déformée ou amplifiée par chaque narrateur. Ces histoires
abracadabrantes qui alimentent les conversations se propagent à une
vitesse phénoménale, surtout depuis l'arrivée d'Internet. Elles traversent les frontières,
au gré des cultures des mœurs ou de la géographie, afin de préserver un semblant de
vraisemblance. Ce phénomène fascinant des légendes urbaines est crées par la peur
de la nouveauté et la peur de l'autre, elle représente toujours une certaine verité, mais
celle-ci reste pour le plus souvent déformée.
La légende personnelle est cette histoire que nous portons tous en
nous-même. Au-delà de l'histoire, elle est l'essence même de notre
parcours sur cette planète. Chacun de nous porte sa légende, qu'elle
soit connue, ignorée, bafouée ou attendue, elle est là portant sa
révélation, voir même sa manifestation. Nous sommes sur cette terre
pour vivre intensément notre vie. La légende personnelle est donc un
processus, un mouvement et surtout des retrouvailles avec soi-même,
avec l'essence de notre essence au cœur de notre cœur. Et c'est par
l'expérimentation et l'exploration en conscience que nous prenons
connaissance de la légende que nous portons en nous.
La légende du sirop d’érable nous apprend que bien avant l'arrivée des colons
européens en Amérique du Nord, les tribus amérindiennes de l'est du Canada et du
nord-est des États-Unis auraient découvert comment recueillir la sève des érables et la
transformer en sirop. Certains racontent que les chiens des Amérindiens, par leur
comportement, auraient mis la puce à l'oreille de leurs maîtres : une branche s'était
cassée et les chiens se bousculaient tout autour pour lécher la sève qui coulait, et c'est
ainsi que les Amérindiens eurent l'idée d'y goûter.
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fascicule 08 : page 29
Une autre version indique qu'un petit écureuil grimpa le long
d'un tronc d'arbre et mordit une branche... et se mit à boire.
Un Amérindien au bas de l'arbre le regardait et se demandait
pourquoi, puisqu'une source d'eau fraîche coulait tout près. Il
imita l'écureuil en faisant une fente de son couteau... quelle
surprise ! Jusqu'alors, sa tribu ne trouvait du sucre que dans
les fruits sauvages. Et voilà un arbre qui pleure du sucre en
larmes de cristal. En plus, il venait de découvrir un remède
contre le scorbut dont les siens souffraient souvent au
printemps. Tout ça parce qu'il avait regardé et imité un écureuil se désaltérer avec la
sève d'un érable. Autant de tribus, autant de légendes amérindiennes expliquent
comment cela a pu se passer...
Micmac : par une journée de tôt printemps, alors que le vent était encore frisquet, une
vieille femme Micmac alla ramasser la sève des érables et, comme elle goûte meilleure
chaude, elle en mit dans un pot qu'elle plaça au-dessus de son feu de teepee.
Fatiguée, elle alla s'étendre pour se reposer. Lorsqu'elle se réveilla, le soir était déjà là.
Dans le pot, elle trouva un sirop doré, clair et sucré.
Algonquin : le chef prit son tomahawk de l'érable dans lequel il l'avait enfoncé la veille.
Comme le soleil montait dans le ciel, la sève se mit à couler. Sa femme la goûta et la
trouva bonne. Elle s'en servit pour cuire la viande ; ce qui lui évita d'aller à la source
pour chercher de l'eau. Le goût sucré et l'odeur douce furent très appréciés par le chef.
Il appela le sirop dans lequel avait bouilli la viande, « Sinzibuckwud », mot algonquin qui
veut dire « tiré des arbres ».
Iroquois : par un matin froid et piquant, il y a fort longtemps, un
chef iroquois du nom de Woksis sortit de sa hutte. Puisqu'il
devait aller à la chasse, il retira son tomahawk de l'érable dans
lequel il l'avait plantée la veille au soir. Le tomahawk avait fait
une profonde entaille dans l'arbre mais Woksis n'y fit pas
attention. Il partit chasser. Un récipient en écorce de bouleau
était posé au pied de l'érable. Goutte à goutte, la sève qui
ressemblait à de l'eau s'écoula de l'entaille faite dans le tronc de l'érable et remplit le
récipient. Le lendemain, la femme de Woksis remarqua que le récipient était plein.
Pensant que la sève incolore était de l'eau, elle s'en servit pour faire un ragoût de
gibier. Le soir venu, au souper, Woksis sourit et dit à sa femme : « Ce ragoût est
délicieux. Il a un goût sucré ». N'y comprenant rien, la femme trempa son doigt dans le
ragoût qui avait mijoté tout l'après-midi. Woksis avait raison: le ragoût était sucré. On
venait de découvrir le sirop d'érable !
Mots et expressions en italique et soulignés : vocabulaire à chercher dans le dictionnaire
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fascicule 08 : page 30
L e
c o q
d e
p o u l a i l l e r
e t
l e
c o q
d e
g i r o u e t t e
Il était une fois deux coqs, un sur le tas de fumier, l’autre sur le
toit, et ils étaient aussi prétentieux l’un que l’autre. Mais lequel
des deux était le plus utile ? Dites ce que vous en pensez …
nous ne changerons pas d’avis pour autant. La basse-cour était
séparée du reste de la cour par un grillage. Là il y avait un tas de
fumier et là poussait un grand concombre. Il savait bien qu’il était
en fait une plante de serre.
Cela dépend des origines, se disait le concombre. Tout le monde ne peut pas être un
concombre, d’autres créatures doivent également exister. Les poules, les canards et
tous les habitants de la cour voisine sont aussi des êtres vivants. J’observe le coq du
poulailler lorsqu’il est assis sur la clôture. Il est autrement plus important que le coq de
girouette qui est, il est vrai, très haut perché, mais ne sait même pas piailler et encore
moins coqueriquer. Il n’a ni poules ni poussins, ne pense qu’à lui et transpire en plus le
vert-de-gris. Par contre, notre coq, lui est un coq ! Regardez-le comment il marche,
c’est presque de la danse ! Et on l’entend partout. Quel clairon ! Oh, s’il voulait venir
ici, s’il voulait me manger tout entier, avec les feuilles et la tige, ce serait une bien belle
mort.
La nuit, un terrible orage arriva. La poule avec ses poussins ainsi que le coq
s’abritèrent. La bourrasque fit tomber avec fracas la clôture entre les deux cours. Des
tuiles tombèrent du toit mais le coq de girouette était bien assis et ne tourna même pas.
Il ne tournait pas, malgré son jeune âge. C’était un coq fraîchement coulé mais très
pondéré et réfléchi. Il était né vieux. Il n’était pas comme tous ces oiseaux du ciel, les
moineaux et les hirondelles qu’il méprisait, « oiseaux qui piaulent et sont, de surcroît,
très ordinaires ».
Les pigeons sont grands, luisants et brillants comme la nacre, ils ressemblent même à
des coqs de girouette. Mais ils sont gros et bêtes, ne pensent qu’à s’empiffrer et sont
très ennuyeux, disait le coq de girouette. Les oiseaux migrateurs lui rendaient parfois
visite. Ils lui parlaient des pays lointains, des vols en bandes, lui racontaient des
histoires de brigands et leurs aventures avec les rapaces. La première fois, c’était
nouveau et intéressant, mais plus tard le coq comprit qu’ils se répétaient et racontaient
toujours la même chose. Ils l’ennuyaient, tout l’ennuyait, on ne pouvait parler avec
personne, tout le monde était inintéressant et lassant.
Le monde ne vaut rien, déclarait-il. Tout cela n’a aucun sens ! Le coq de girouette
était, comme on dit, blasé et c’est pourquoi il aurait été certainement un ami plus
intéressant pour le concombre s’il s’en était douté. Mais celui-ci n’avait d’yeux que pour
le coq de poulailler, qui justement marchait à ce moment vers lui. La clôture gisait par
terre et l’orage était passé.
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fascicule 08 : page 31
Comment avez-vous trouvé mon cri de coq ? demanda le coq
aux poules et aux poussins ; il était un peu rauque et manquait
d’élégance. Les poules et les poussins passèrent sur le tas
de fumier et le coq les suivit.
Œuvre de la Nature ! dit-il au concombre. Ces quelques mots
convainquirent le concombre que le coq avait de l’éducation et
il en oublia même que le coq était en train de le picorer et de
le manger.
Quelle belle mort ! Les poules accoururent, les poussins
accoururent et vous le savez bien, dès que l’un se met à courir
les autres font de même. Les poules caquetaient, les poussins caquetaient et
regardaient le coq avec admiration. Ils en étaient fiers, il était de leur famille.
Cocorico, chanta-t-il. Les poussins deviendront bientôt de grandes poules, il me suffit
d’en parler à la basse-cour du monde. Et les poules caquetèrent et les poussins
piaillèrent. Le coq leur annonça la grande nouvelle.
Un coq peut pondre un œuf ! Et savez-vous ce qu’il y a dans un tel œuf ? Un basilic !
Personne ne supporte le regard d’un basilic ! Les hommes le savent, vous le savez
aussi, et maintenant vous savez tout ce que j’ai en moi ! Je suis un gaillard, je suis le
meilleur coq de toutes les basses-cours du monde ! Et le coq agita ses ailes, secoua
sa crête et chanta. Toutes les poules et tous les poussins en eurent froid dans le dos.
Et ils étaient très fiers d’avoir un tel gaillard dans la famille, le meilleur coq de toutes les
basses-cours du monde. Les poules caquetèrent, les poussins piaillèrent pour que
même le coq de girouette les entende. Et il les entendit, mais cela ne le fit même pas
bouger.
Tout cela n’a aucun sens, se dit le coq de girouette. Jamais le coq de girouette ne
pondra un œuf et je n’en ai pas envie. Si je voulais, je pourrais pondre un œuf de vent,
un œuf pourri, mais le monde n’en vaut même pas la peine. Tout cela est inutile !…
Maintenant, je n’ai même plus envie d’être perché là ! Et le coq se détacha du toit.
Mais il ne tua pas le coq de poulailler même si « c’était ce qu’il voulait », affirmèrent les
poules. Et quel enseignement en tirerons-nous ?
Il vaut mieux chanter que d’être blasé et se briser !
Mots et expressions en italique et soulignés : vocabulaire à chercher dans le dictionnaire
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fascicule 08 : page 32