La fin de non recevoir

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La fin de non recevoir
La fin de non-recevoir de Marisol Touraine au cri d'alarme des infirmières
Le Figaro Par Marie-Cécile Renault
Publié le 08/11/2016 à 19:09
Plusieurs milliers d'infirmiers et d'aides-soignants ont défilé mardi, partout en France, pour réclamer une
revalorisation de leurs salaires, de meilleures conditions de travail et une reconnaissance de leur activité. En
réponse, la ministre de la Santé a évoqué un vague plan à venir d'accompagnement des personnels de
santé.
Alors que Marisol Touraine s'est glorifiée fin octobre d'avoir mis fin au «trou de la Sécu», on avait
l'impression depuis la présentation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) que tout
allait mieux... Pourtant plusieurs milliers d'infirmiers et d'aides-soignants ont défilé mardi partout en France à
l'appel d'un mouvement unitaire, inédit depuis 1988, afin de dénoncer des cadences infernales, le manque
de temps passé auprès de malades et demander une meilleure reconnaissance de leur travail. Les
fédérations FO, CGT, SUD et CFTC de la fonction publique hospitalière, mais aussi, fait rare, une vingtaine
d'organisations infirmières salariées, libérales ou étudiantes, avaient choisi la même date pour tirer la
sonnette d'alarme.
À Paris, le cortège était composé de 3500 manifestants, selon la préfecture de police. À Strasbourg, entre
500 et 650 salariés des hôpitaux ont battu le pavé, 250 à Rennes, 1100 à Nantes... Sans oublier les
personnels assignés, c'est-à-dire se déclarant grévistes mais assurant leur travail. Le taux de mobilisation
sur l'ensemble des personnels hospitaliers était dans la matinée de 8% (y compris les personnels assignés)
et de 12% chez les infirmières, selon le pointage du ministère des Affaires sociales.
« Ce n'est plus possible de travailler dans ces conditions. Au final c'est la santé des patients qui
en pâtit»,
Jessica, infirmière à la Salpêtrière
«Infirmiers méprisés, patients en danger», ont scandé les manifestants vêtus de blouses blanches ou
bleues, masques sur le visage et calot sur la tête. Dans le cortège à Paris, entre Montparnasse et Invalides,
les infirmières réclament des revalorisations de salaires, alors qu'une débutante démarre à 1500 euros par
mois, son diplôme bac+3 en poche. Mais elles demandent surtout de meilleures conditions de travail.
«Bien sûr, j'aimerais gagner plus, mais ce n'est pas mon souci prioritaire. Je manifeste parce que ce n'est
plus possible de travailler dans ces conditions et qu'au final c'est la santé des patients qui en pâtit», explique
Jessica, 25 ans, infirmière à la Salpêtrière. «Nous travaillons en sous-effectif, nous ne pouvons pas prendre
nos récupérations, nous sommes épuisées, éreintées. Comment peut-on s'occuper des patients dans ces
conditions?», confirme Claire, infirmière à l'hôpital de Corbeille, payée 2200 euros nets par mois après 20
ans de service. «On ne peut pas faire des économies avec la santé. On travaille sur de l'humain, on ne tape
pas à la machine!», s'indigne sa collègue. «On nous embête pour une compresse utilisée en trop. On nous
demande de faire de la traçabilité, mais nous n'avons qu'un seul ordinateur qui marche quand il veut»,
soupire une autre.
«Nous travaillons en sous-effectif, nous ne pouvons pas prendre nos récupérations, nous
sommes épuisées, éreintées»
Claire, infirmière à l'hôpital de Corbeille
L'intersyndicale réclame «l'abandon d'un plan d'économies» de 3,5 milliards d'euros sur trois ans d'ici à 2017
ainsi que «l'arrêt des fermetures de lits» et dénonce la mutualisation des moyens des hôpitaux avec la mise
en place de Groupements hospitaliers de territoire. Reçue par la Direction générale de l'offre de soins
(DGOS) à la mi-journée, elle ne s'est vue proposer «qu'un groupe de travail sur la qualité de vie au travail»,
a regretté Denis Basset (FO). «Nous tirerons un bilan de cette journée et des réponses qui nous ont été
apportées mercredi à 18h et verrons quelles suites donner au mouvement» a expliqué Luc Delrue,
secrétaire fédéral FO.
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Interpellée à trois reprises mardi à l'assemblée nationale sur la crise des infirmières, la ministre de la santé
Marisol Touraine a annoncé qu'elle aurait l'occasion dans les semaines à venir «d'annoncer un plan
d'accompagnement des professionnels de santé, notamment à l'hôpital public».
Le premier ministre en personne a ensuite volé à son secours, fustigeant les députés de l'opposition qui
«réclament plus de postes à l'hôpital alors que les candidats à la primaire proposent 300.000, 500.000, voire
700.000 fonctionnaires de moins». Et Manuel Valls de rappeler que 31.000 postes ont été créés depuis 2012
dans la fonction publique hospitalière.
Une chose est sûre, cette manifestation est symptomatique d'un malaise profond au sein des personnels de
santé. Le feu couve déjà depuis plusieurs mois, et les suicides de cinq infirmières dans différents hôpitaux même si chacun reconnaît qu'un suicide est un drame complexe aux causes multiples- ont été perçus
comme un signal d'alarme. «Le malaise est réel. Il est en partie le résultat des ambiguïtés du discours
politique. On ne peut pas faire des économies sans les accompagner des réformes qui les rendent
supportables», conclut Frédéric Valletoux, président de la Fédération Hospitalière de France (FHF).
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