Gens qui rient, gens qui pleurent

Transcription

Gens qui rient, gens qui pleurent
Gens qui rient,
Gens qui pleurent
Par Hélène KATSARAS
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Lire Ensemble 2013 : Concours de nouvelles
Gens qui rient,
Gens qui pleurent
Par Hélène KATSARAS
a reçu le Grand prix Agglopole Provence pour le
concours de nouvelles adultes de Lire Ensemble
2013 sur le thème « Gens d’ici et d’ailleurs »
" Gens qui rient, Gens qui pleurent "
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Président du jury :
> Jo Ros, auteur parrain
Membres du jury :
> Béatrice Clémente, bibliothécaire à Charleval
> Roselyne Elbel, bibliothécaire à Saint-Chamas
> Marie-France Givran, bibliothécaire à Sénas
> Jean-Christophe Incerti, libraire à «La Portée des Mots»
à Salon-de-Provence
> Dominique Marçon, journaliste à Zibeline
> Frédérique Relu, bibliothécaire à Mallemort
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préface
Gens d’ici, gens d’ailleurs
Comment savoir si les gens rencontrés sont
d’ici ou d’ailleurs, ou bien étaient d’ailleurs et
se sont installés ici, ou bien sont d’ici et ont
des rêves d’ailleurs ? Enigme difficile, sauf si
on prend le temps de l’échange, le temps de
la discussion, de l’écoute et enfin la perspective d’un mieux vivre ensemble entre ceux
d’ici et ceux d’ailleurs. Et comment savoir si
une écriture peut lever le doute des limites de
ces deux espaces du dedans et du dehors ?
Encore une fois aller aux rivages des mots,
au secret de la phrase.
Le jury, dans cet ailleurs et ce territoire a eu
du mal à se décider. Mais à force d’échange,
d’écoute, d’arguments contradictoires, il
espère que le choix aura été le bon pour ces
trois prix qui augurent de la bonne vivacité de
l’écriture. L’écriture, le seul passeport pour
que les gens d’ici et d’ailleurs n’aient aucune
frontière qui les sépare.
Jo Ros
" Gens qui rient, Gens qui pleurent "
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« Gens qui rient,
Gens qui pleurent »
C’est toujours le corps qui cause en premier,
avant la tête, avant que les mots ne montent,
ne se fraient une percée jusqu’à la bouche et
ne fassent résonner du sens, du vrai.
Ce matin face à l’assistante sociale, Marianne
s’est sentie hargneuse jusqu’aux os, un
condensé de rage qui donne envie de boxer.
Malgré ça, elle a réussi à trouver deux phrases
complètes. Et même correctes. Factuelles.
Elle a dit : « Oui, Madame, je suis actuellement
en recherche d’emploi active. J’ai eu deux
entretiens ce mois-ci et je suis optimiste, on
m’a dit qu’on me tiendrait au courant. »
Mais l’assistante sociale a fait la moue. Elle
s’est montrée chafouine et encore plus moche
qu’elle n’était. Arborant un maintien de paroissienne fraîchement absoute, calée sur de gros
mollets de pouliche au rencart. L’entrevue
s’est conclue sur sa voix de brebis mal traite :
« Mademoiselle, revenez me voir quand vous
aurez trouvé un emploi stable, un CDI de
préférence. On pourra alors songer à entamer
les démarches requises et envisager la récupération de la garde de votre fille. »
Poignée de main spongieuse. Contact écœurant. A gerber.
- Mais t’espérais quoi, ho couillonne ! demande
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Denis. Qu’elle te déroule le tapis rouge sur la
Canebière et que tu repartes avec ta gamine
sous le bras ? On devient pas apte comme ça,
du jour en lendemain à élever sa gosse, juste
parce qu’on fait un salamalec aux autorités…
surtout quand on s’est fait pécho la main au
goulot, estramassée dans le caniveau. Les
institutions, j’les connais, va ! C’est tous des
saletés là-dedans. Et la justice, pire que ça !
Elle veut bien le croire Marianne qu’il en a tâté
un rayon sur le sujet, à voir sa gueule cave,
son cheveu tout tordu de crasse et sa cicatrice à la joue. Avec son allure de mafalou, elle
parierait même que son casier s’est fait dépuceler bien avant lui.
Denis, elle le croise souvent dans ce bar. Il
habite dans un hôtel pourave à Belsunce et
zone méticuleusement aux Réformés. Quand
elle est entrée, il était seul avec son pastis. Il
lui a proposé de boire un verre. Certes, elle
s’était déjà pas mal imbibée mais l’occasion de
se prendre quelques milligrammes de rab était
trop belle, et sans bourse délier. L’occasion de
trinquer aussi.
- Non mais tu réalises pas, mec ! Combien de
temps encore avant que je trouve un taf ? J’ai
tout essayé, n’importe quoi à faire, vendeuse,
caissière, nettoyeuse de métro, de bureaux,
de chiottes. Tout, j’te dis ! Mais ici je suis trop
vieille, là-bas pas assez d’expérience, putain,
j’y comprends rien. Et même si je trouve un
" Gens qui rient, Gens qui pleurent "
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taf, combien de temps avant que je le signe le
CDI ? Et encore combien avant que je trouve
l’appart décent ? Parce que c’est pas vivable
le taudis où je vis pour une gamine de 6 ans.
Avec le water et les douches sur le palier,
toutes moisies, bouchées tout le temps. C’est
une puanterie que t’imagines même pas. C’est
simple, t’en ressors plus crade que quand t’es
entré. J’te promets, c’est pas humain tant de
saleté.
Marianne harponne son verre, le vide d’un
trait, tête renversée.
Or, même ce bouge, Marianne n’a plus les
moyens de se le payer. Elle doit trois mois de
loyer. Et son logeur l’a prévenue ce matin, si
elle ne lui paye pas ce qu’elle doit d’ici ce soir,
demain matin au plus tard, il la fout dehors, l’encatané ! Et pas à coup d’huissier, mais à coup
de poings. Les huissiers, c’est pour ceux qui
déclarent leurs revenus au fisc, pour ceux qui
ont du fafiot à dépenser en impôts et en actes
de procédure. Lui son acte de procédure, il l’a
prévenue, sera bien plus expéditif : quelques
gros bras et bing bang. Et peu importe si t’es
une femme, il a ajouté. Les femmes, elles
voulaient l’égalité ? Alors elles seront traitées
pareil qu’un mec. Une mauvaise payeuse,
c’est un mauvais payeur. Donc, même tarif. Et
parce qu’un nez cassé, c’est autrement plus
convaincant qu’un papelard, tout aussi timbré
et tamponné soit-il.
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C’est pour ça qu’en sortant de chez l’assistante sociale, Marianne n’est pas rentrée.
Ses jambes l’ont envoyée promener dans
Marseille, au hasard des rues du centre, son
quartier. Par cœur, elle le connaît. Elle pourrait
y marcher les yeux fermés. Mais là ses yeux,
ils n’étaient pas fermés, ils étaient en larmes.
Ça s’était mis à couler tout seul, avec tout ce
qu’elle aurait voulu dire et qu’elle gardait, un
nœud de barbelé dans l’estomac, une douleur
muette. Tout ce manque de mots. Ce manque
d’alcool, ce manque de Léa qui lui remontait
avec, tout aussi brut, rudimentaire. Léa et ses
petits bras, sa petite voix, ses yeux tendres
comme du caramel au beurre salé, son souffle
à la vanille.
Il avait fait beau et froid toute la journée. Un
soleil honnête pour un mois de décembre. Les
rues étaient bondées de ces gens qui vont
quelque part, avec des objectifs en tête, des
familles et du boulot dans leur vie, une carte
bancaire en poche. Beaucoup faisaient des
achats, des sacs et des paquets pleins les
bras, tout frénétiques à préparer Noël.
Rue Paradis, elle était rentrée dans un magasin
de déco. Juste pour voir. Sentir, humer, toucher
des beaux produits, des objets tout neufs, des
choses qui n’avaient encore jamais servi et
qui sentaient le fraîchement déballé, l’ordre,
le neuf. Une couverture en laine vierge, un
plaid si doux qu’elle s’était demandée en quoi
" Gens qui rient, Gens qui pleurent "
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ça pouvait être fait. Des châles, des étoles,
des coussins abondamment garnis et en
vrai velours… mohair, cachemire, coton, elle
avait regardé toutes les étiquettes. Elle avait
passé sa main dessus, juste pour le toucher,
la sensation. Toutes ces étoffes si douces, si
soyeuses. Ça lui avait redoublé le volume des
larmes qui avaient roulé drues, silencieuses le
long de ses joues. Dans un coin du magasin,
il y avait même un lit, admirablement fait, avec
des draps qui n’ont jamais été sales, une
couette molletonnée. Puis une table de fête
dressée, impeccable, des verres d’un bleu
nuit transparent, des assiettes en faïence, des
serviettes en pur tissu, des bougies, des paillettes… difficile à croire que des gens ont ce
genre de choses chez eux.
Dans le rayon enfant, elle avait caressé un
petit éléphant en peluche. Elle l’avait pris dans
ses mains et l’avait tenu comme on tient un
objet rare et précieux. Hoquets et sanglots
soudains, impossibles à retenir. La vendeuse
s’était alors pointée et lui avait demandé si
elle avait besoin d’aide. Marianne était sur le
point de lui répondre que oui, elle avait besoin
d’aide, carrément besoin d’aide…
Mais un magasin de décoration n’est pas un
chez-soi, un doudou n’est pas son enfant,
une vendeuse n’est pas sa sœur, ni son amie.
Même rue Paradis.
Ravalant sa morve, Marianne avait fait non
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de la tête, et détalé. Dans une ruelle, elle était
entrée dans le premier bar qui avait la mine
assez glauque pour être abordable. Au comptoir, elle s’était avalé un demi. Le premier
depuis un certain temps. Puis un deuxième. Et
un troisième. Jusqu’à ce qu’elle sente que ça
circulait de nouveau en elle. Le sang qui bat
des tempes, l’excitation qui monte, la sensation d’être vivante. S’envoyer des coups, façon
de faire monter l’adrénaline et ragaillardir les
neurotransmetteurs, de sorte que l’air paraisse
moins poissé.
Voilà pourquoi elle boit Marianne. L’alcool
comme un rempart entre elle et la terreur.
- Tu remets une tournée ?
- ‘tain, Marianne, tu biberonnes comme une
chamelle ! Tu m’étonnes que les services
sociaux ils t’ont retiré ta mioche. Avec c’que tu
t’envoies…
Denis, c’est tout l’art d’asséner des vérités qui
vous tordent les boyaux. C’est le tact incarné
des gens de la rue, des foyers et des centres
de réinsertion. Ces créatures sans destination,
qui ne vont jamais nulle part et ne tiennent
jamais en place.
- Ça va Denis, tu vas pas t’y mettre aussi toi,
tu vas pas faire comme l’assistante soss’ ou
les psy, ou les flics avec tout leur bon sens
moral… puis j’ai diminué, vachement diminué.
J’ai même réussi à arrêter. Trois semaines où
" Gens qui rient, Gens qui pleurent "
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j’y ai pas touché. Trois semaines pleines ! Pas
moins !
- Ouais. Pas plus non plus.
- Quoi ? Tu peux en dires autant p’t-être ? T’es
déjà resté clean plus de trois jours d’affilée,
toi ?
- J’ai pas ma gosse à la DDASS, moi.
Sur ce, il se lève. Sourire narquois. Et tangue
jusqu’au comptoir où il se perd en palabres
avec le patron, un type énorme qui sue beaucoup et qui a un œil qui court après son
jumeau. Son crâne chauve brille d’un jaune
crème sous le néon. Au-dessus du crâne du
patron qui réapprovisionne en combustible,
pend un énorme drapeau de l’OM, figé de
n’avoir pas été dépoussiéré depuis le débarquement de Protis.
De dos, Denis a un petit cul parfait dans son
jean un peu trop grand et très usé. Avec son
sweet à capuche, il a la pause décontract’ du
craquant cacou. De face, la gueule balafrée
du bad boy, regard rageur et mélancolique, un
rien hautain. Pile le genre qui remue Marianne.
Quarante ans sonnés elle a, et encore les
mêmes goûts qu’à vingt. Cette réflexion faite,
elle s’en émeut. Se sourit à l’intérieur, l’alcool
lui fait effet, pas de doute. Elle sent qu’elle se
radoucit en dedans, elle se dit qu’il y a quelque
chose d’intact en elle, d’intouché. Au prochain
verre, elle pourrait même se trouver sympa,
Marianne. Voire attachante. Voire irrésistible.
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Lire Ensemble 2013 : Concours de nouvelles
Enfin, elle se demande si Denis, il pourrait
l’aimer. Si ses bras seraient assez vastes pour
l’entourer, assez solides pour la maintenir
en équilibre, et la retenir pour pas qu’elle se
vautre encore, à plat ventre, dans sa flaque de
solitude.
Quand il revient finalement, pétant la dégaine,
deux pastis généreux à chaque main, il se
marre. Il a l’air content. Elle demande :
- On va chez toi ?
- De quoi ?
- On pourrait baiser. J’suis bonne, tu sais.
Décontenance soudaine chez Denis, la gueule
qui se verrouille. Il fait le cul cousu. Ce qui ne
la démonte guère. Elle se jette, riant fort, à coté
de lui sur la banquette défoncée. Elle se colle
à lui. S’y répand en bras, en jambes, en seins.
- Arrête Marianne, t’es pas drôle.
- Ben quoi, on n’est pas bien là ? On se donnerait pas un peu de douceur, non ?
Elle cherche sa bouche. D’un bond, il est
debout.
- T’es vraiment qu’une emplâtre ! Mais je baise
pas les alcoolo moi, tu piges ? Je trempe pas
ma queue dans un tonneau, j’ai mieux à faire,
ok ?
Il rajuste sa capuche. Et, doigt pointé sur
Marianne, il a ces mots inspirés :
- T’es qu’une paumée, Marianne, une cagole,
et t’es complet jetée. Et vieille avec ça. Fais
gaffe, ma vieille, c’est moche les alcoolos
" Gens qui rient, Gens qui pleurent "
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cagoles quand ça devient vieilles.
Quelques pas vers la porte qu’il ouvre en
grand, brutal. Le froid et la nuit s’engouffrent
dans la salle. Ça fait appel d’air, ça gifle aux
joues, ça griffe la peau. La porte se referme
dans un fracas métallique sur Denis, dehors,
qui trace la route.
Dans la glace, Marianne se croise. Elle a le
regard boueux des nuits merdiques. Par terre,
une mouche cherche son chemin sur le lino,
slalome entre les taches.
Indolente, Marianne boit. Un à un, tous les
verres. Les quatre. Pour la route. Elle hésite
même à s’en remettre un dernier, mais elle se
rappelle qu’il ne lui reste que 20 sacs. Tout ce
qui reste de son RSA.
Elle prend appui sur la table, s'extrait balinbalan de la banquette, cherche un certain
temps la manche de sa doudoune pour l’enfiler. Elle est à la porte quand le gros bigleux du
comptoir lui lance : « Eh la petite dame, tous
les pastis là, sont pas payés… »
Ce soir, elle a bu presque autant que ce jour-là.
C’était un dimanche d’avril. Un dimanche ensoleillé. Sans raison véritable d’être déprimée.
Mais on ne boit pas que quand on est déprimé.
On boit aussi parce qu’un petit rayon de soleil
vous traverse la chair et vient vous réchauffer
l’instant et que ça aussi on voudrait le partager.
Elle était entrée dans un bar pas loin de chez
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Lire Ensemble 2013 : Concours de nouvelles
elle, en milieu de matinée. Elle avait laissé la
petite Léa, 5 ans à peine, seule dans la thurne
à dessiner un clown.
Plusieurs heures après, comme elle ne revenait pas, la moufflette était sortie, pieds nus
dans la rue. Elle avait fait tous les bistrots du
coin la gamine à la recherche de sa mère et
avait fini par pousser la porte derrière laquelle
Marianne s’enivrait et s’égayait sur un vieil
édenté.
La petite chialait, terrifiée. Marianne, dans un
élan, avait voulu la prendre dans les bras, la
serrer, la rassurer. Mais elle avait trébuché ou
perdu l’équilibre et s’était retrouvée par terre,
ça elle s’en souvient bien. C’est d’ailleurs la
dernière image précise qu’elle garde de cette
journée, le regard horrifié de Léa. Le reste est
un trou noir. Elle se serait sentie mal, aurait
vomi et perdu connaissance. On avait appelé
les pompiers, paraît-il. Au matin, réveil chassieux en cellule de dégrisement. Commissariat
de Noailles. Le flic, avant de la libérer et après
lui avoir expliqué que sa gamine venait d’être
placée, lui avait tenu un discours dégoulinant
de philosophie bradée : « Tu sais, ma belle,
tous les gens, d’ici ou d’ailleurs, on a tous ses
valises à porter, et il faut faire avec leur poids.
On a tous des regrets, des ratages. Faut pas
se laisser abattre, tu sais. Faut résister. »
Comme si elle ne savait pas déjà tout ça,
Marianne. En marchant, elle murmure : Les
" Gens qui rient, Gens qui pleurent "
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gens d’ici, les gens d’ailleurs. Les gens qui
rient, les gens qui pleurent... Ça rime et ça
l’amuse. On dirait une comptine.
Les gens d’ici, les gens d’ailleurs, on serait
tous pareils en somme. On se coltinerait le
même ciel, le même sol. Probable. Mais pas la
même réalité, c’est sûr. Et elle sait, Marianne,
dans quelle réalité elle se place. Elle sait où
exactement elle se situe dans la géographie
sociale. Parce que quand même, c’est pas des
conneries qu’il y a ceux qui ont de la chance
et ceux qui n’en ont pas. Qu’il y a les gens qui
respirent l’air frais du haut du panier et ceux
qui mordent la poussière. Ceux qui sont dans
la vie, et ceux qui sont à côté. Ceux de nulle
part et dont les traces s’effacent avant même
d’être déposées.
Au pied de son immeuble, elle cherche un
moment les clés dans toutes ses poches et
ânonne en s’énervant : « Gens d’ici, gens d’ailleurs ! Gens qui rient, gens qui pleurent ! »
Elle ouvre enfin la porte et grimpe, démarche
de louve aux abois, les quatre étages. La pisse
emboucane dans l’escalier.
Et dans sa chambre, c’est une bouffée d’air
rance qui la prend à la gorge. Elle ouvre la
fenêtre pour renouveler l’air. Faire entrer la nuit
et ses particules. Un souffle d’ailleurs dans l’ici.
Elle allume une clope. Tire fort dessus. L’air
glacé a l’odeur du charbon.
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Lire Ensemble 2013 : Concours de nouvelles
Que fait Léa à cette heure ? Elle l’imagine
endormie dans un petit lit, sous une couette,
la tête posée sur un oreiller doux, des rêves à
profusion. Elle suce son pouce sûrement. Elle
dort. Ne pas la réveiller. Ne pas la bousculer.
Léa aura une vie ajustée à ses rêves, peutêtre.
Marianne lâche son mégot. Le bout rouge fend
la nuit jusqu’en bas, dans la cour. Elle ne se
sent plus ivre soudain. Elle a trouvé comment
faire pour qu’ici, ce soit enfin ailleurs.
Et son corps bascule en avant, la tête la
première.
C’est toujours lui, le corps, qui cause en
premier, elle l’a toujours su.
" Gens qui rient, Gens qui pleurent "
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Œuvre certifiée originale, personnelle et inédite.
Edition Lire Ensemble 2013
Fête intercommunale du Livre créée en 2006 par la
communauté d’agglomération Agglopole Provence qui
propose des spectacles, des rencontres d’auteurs, des
ateliers… dans les 17 communes du territoire.
" Gens qui rient, Gens qui pleurent "
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Concours de
nouvelles 2013
Fête intercommunale du livre
Gens qui rient,
Gens qui pleurent
Par Hélène KATSARAS
Stratis (stratis.fr) • 4/13
a reçu le Grand prix Agglopole Provence pour le
concours de nouvelles adultes de Lire Ensemble
2013 sur le thème « Gens d’ici et d’ailleurs »
www.agglopole-provence.fr
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