Des clauses d`indexation sous surveillance

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Des clauses d`indexation sous surveillance
23/09/2016
Baux commerciaux: Des clauses d'indexation sous surveillance | L'Agefi Actifs
Baux commerciaux
Des clauses d'indexation sous
surveillance
Publié le 23.09.2016
Aurélie POLI, avocat associé, Lexplus Avocats et Jean­Marc Peyron, avocat, Herbert Smith Freehills Paris © DR ­ CHRISTIAN FOURNIER
Par Arnaud Lelong ([email protected])
Un arrêt de la Cour de cassation annule les clauses d’indexation des loyers n’évoluant
qu’à la hausse
Ces clauses risquent de modifier la gestion des actifs immobiliers composant le
patrimoine des bailleurs
L’objectif d’une clause d’indexation (ou clause d’échelle mobile) est de faire varier
automatiquement un loyer en fonction d’une périodicité et d’un indice contractuellement définis
entre le bailleur et son locataire. On retrouve ces clauses dans de nombreux baux commerciaux.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 14 janvier 2016 (1), considère comme « nulle une clause
d’indexation qui exclut la réciprocité de la variation et stipule que le loyer ne peut être révisé
qu’à la hausse ». Autrement dit, la Haute juridiction considère comme nulle et non écrite une
clause d’indexation dont l’objectif n’est que de faire augmenter le loyer et excluant tout
ajustement lorsque l’indice de référence se met à baisser.
NOUS CONSTATONS QUE CETTE CLAUSE EST PRÉSENTE
Le montant du loyer est rétroactivement fixé
DANS UN QUART DES BAUX QUE NOUS AUDITONS
au montant ayant cours au moment de la
signature du bail et le locataire est alors fondé
à demander le remboursement des sommes indûment perçues par le bailleur dans la limite des
cinq dernières années d’indexation illicite. Dans l’affaire en cause, le propriétaire a été condamné
à restituer au locataire une somme qui correspondait à plus de 14 mois de loyers. Cet arrêt de
principe vient trancher un débat qui a opposé pendant longtemps les juridictions du fond sur la
validité des clauses d’échelle mobile n’évoluant qu’à la hausse. Certaines juridictions telles que
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les Cours d’appel de Douai et d’Aix­en­Provence (2) n’écartent pas leur application alors que
d’autres, comme les Cours d’appel de Paris et de Versailles (3), les réputent non écrites.
CETTE JURISPRUDENCE A ÉGALEMENT DES EFFETS EN Cet arrêt concerne tous les bailleurs, qu’ils
MATIÈRE DE GESTION DU DROIT AU BAIL POUR LES
gèrent un bien de façon isolée ou un parc
LOCAUX DE COMMERCE
immobilier comme peuvent le faire les
foncières ou les gérants de SCPI.
Un arrêt applicable à tous les baux commerciaux.
« Nous constatons que cette clause est présente dans un quart des baux que nous auditons »,
indique Edouard Lemiale, cofondateur de clausecombat.com, un site qui permet aux locataires
de savoir si leur bail est conforme à la nouvelle jurisprudence. « Notre objectif n’est pas
d’envenimer les relations entre bailleurs et locataires mais d’assainir les contrats en
supprimant la clause litigieuse. Nous privilégions la négociation plutôt que le contentieux »,
poursuit­il.
Du côté des bailleurs, le sujet est considéré comme sensible. « Beaucoup de gérants
institutionnels savent qu’ils ont des fragilités dans ce domaine. Ils profitent généralement du
renouvellement du bail pour modifier la clause litigieuse en espérant que le locataire n’y fera
pas trop attention, explique un professionnel. Il y a toutefois un certain nombre de baux qui
passent au travers du filet et dans ce cas, le bailleur fait le dos rond en espérant que le locataire
ne viendra pas lui réclamer les trop­perçus. » Il reste toutefois difficile d’estimer l’ampleur du
phénomène et combien de baux seraient potentiellement concernés.
« L’arrêt de la Cour de cassation n’invalide pas toutes les clauses d’indexation mais uniquement
celles qui empêchent le loyer de baisser. Beaucoup de baux commerciaux ne prévoient pas des
choses aussi radicales et les clauses qu’ils contiennent pourraient être jugées valables, même en
présence de mécanismes d’encadrement de l’indexation. Par ailleurs, et dans la mesure où cet
arrêt était attendu depuis quelque temps, de nombreux bailleurs ont pris les devants et
supprimé les clauses litigieuses », analyse Jean­Marc Peyron, avocat au sein du cabinet Herbert
Smith Freehills Paris. « Nombre de bailleurs et de preneurs ignorent le contenu exact de leurs
baux. C’est souvent à l’occasion d’un litige que les parties découvrent précisément le contenu de
leurs obligations, explique Aurélie Poli, avocat associé au sein de Lexplus Avocats. Compte tenu
des conséquences financières que peuvent avoir des clauses mal rédigées, il est plus prudent
pour un gestionnaire de baux de faire auditer tous ses contrats. »
Une incidence sur la gestion d’actifs des bailleurs.
L’arrêt du 14 janvier 2016 a également des conséquences sur la gestion des actifs immobiliers
composant le patrimoine du bailleur. « Un immeuble dont les baux contiennent la clause
incriminée ne se vendra pas au même prix qu’en l’absence de cette clause, indique un expert. Les
anticipations que peut faire l’acheteur de l’immeuble sur les montants des loyers qu’il peut
encaisser sont faussées si les locataires décident d’attaquer. Ce risque se répercutera forcément
sur le prix et peut constituer un manque à gagner important pour le vendeur. » A grande
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échelle, cette minoration du prix de cession peut devenir problématique dans la revalorisation du
patrimoine immobilier du bailleur.
Cette jurisprudence a également des effets en matière de gestion du droit au bail pour les locaux
de commerce. « En vertu de la règle du plafonnement, les loyers ne sont pas fixés en fonction de
la valeur locative du bien. Si ce loyer est trop faible, un bailleur a tout intérêt à se séparer du
locataire mais il doit lui verser une indemnité d’éviction qui compense cette différence de
valeur, explique un professionnel. La présence de la clause d’indexation n’évoluant qu’à la
hausse a pour effet de rapprocher le loyer payé par le commerçant de la valeur locative du
bien. Ce qui minore le montant de l’indemnité d’éviction dûe par le bailleur. Si la clause est
annulée, on revient à la valeur initiale du loyer, ce qui a pour conséquence d’augmenter
l’indemnité d’éviction. » Là encore, difficile d’avoir des estimations pour savoir combien de baux
commerciaux seraient concernés mais selon une source proche du dossier, « de nombreux
bailleurs sont actuellement en train de faire leurs comptes afin de savoir quel montant passer
en provisions pour risques. »
(1) Cour de cassation 3e chambre civile, 14 janvier 2016, n°14­24.681.
(2) CA Douai, 21 janvier 2010 n°08/08568, et CA Aix­en­Provence, 15 mars 2013 n°11/06632.
(3) CA Versailles 12e chambre, 10 mars 2015, n°13/08116.
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