Gorfou n°14
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Gorfou n°14
Le mensuel du gorfou FEVRIER 2012 63ÈME MISSION La gazette des hivernants de l’île d’Amsterdam N°14 LA CHASSE AU TRÉSOR A COMMENCÉ ! La chasse au trésor est devenue une tradition pour les VAT d'Ams. Depuis désormais cinq ans, la mission qui précède cache des indices aux quatre coins de l'ile, indices qui mènent à un fabuleux trésor, à charge pour la mission suivante de suivre les indications et espérer trouver le gros lot. La mission 63 a fait une entrée fracassante dans cette chasse. Déjà deux indices trouvés à son actif et ça ne fait que commencer! Grâce à ses talents de déduction, de réflexion et de ténacité, elle saura déjouer les pièges posés par les VAT de la 62 et trouver un à un les indices qui mèneront au fameux trésor que nous espérons conséquent! EQUIPE DE LA REDACTION : Rédaction : Chloé Maindron, Boris Bouillard, Olivier Jossoud, Bernard Lermite. La bande d'apprentis chasseurs de trésor a donc pu faire un retour triomphal sur base et qui, comme tout triomphe, s'est terminé autour d'une "bonne" bière. Maquette : Aurélie Chaput Illustrations : Anaïs Féron Bien sûr, les VATs ne se reposent pas sur leurs lauriers, tout cela n'est que le début de l'aventure, le trésor est encore loin. Ils ont déjà remis leur cerveau en marche pour comprendre l'indication et trouver le lieu du prochain exploit. DANS CE NUMÉRO : CHASSE AU TRÉSOR 1 RUBRIQUE TRAVAUX « MANUEL » 2 PHOTOS : LA STERNE ANTARCTIQUE 2 FEUILLETON DE L’ÉTÉ 3 EPISODE I OPÉRATION : BASE VERTE 4 Beaucoup de secrets entourent cette chasse et notre équipe d'investigation a tout fait pour connaitre la nature des indices et leur localisation, malheureusement ici personne ne veut prendre le risque de se faire doubler et voir le trésor s'envoler sous ses yeux. Nous savons tout de même, de source sûre, que le dernier indice a été trouvé par Jérèm, notre ornitho, d'ores et déjà connu pour ses talents de chercheur d'aiguilles dans une botte de foin. En effet, il a déjà fait parler de lui en retrouvant la balise d'un gorfou, que tout le monde désespérait de retrouver un jour, en ANNIVERSAIRES DU MOIS Yann ier 10 févr plein milieu des scirpes à Entrecasteaux. Mais il ne pouvait se contenter de ce seul exploit et lors de la recherche de l'indice dans cet endroit jalousement gardé secret, alors que tous cherchaient de fond en comble, ce fut encore Jérèm qui a pu s'écrier: "Je l'ai!!!!!". Be n 3 février Ils tiennent tous à remercier la mission 58 pour avoir mis en place cette chasse et à toutes celles qui l’ont suivie pour l'avoir perpétré. Chloé PAGE 2 LE MENSUEL DU GORFOU RUBRIQUE TRAVAUX « MANUEL » V ous n’êtes pas au courant ?! Bon on reprend pour les retardataires, mais tachez de suivre la prochaine fois ! Je parlais donc d’un évènement sans équivalent dans le monde de la science austral : Pointe B viens de refaire a neuf tout son dispositif électrique ! Ah je vous vois rire d’ici avec vos gros sabots, mais quand on voit les boîtiers électriques en formica, les multiprises jouant à la queuleuleu, les souris faisant contact dans le tableau principal et les dominos courant sous les faux planchers, en nombre suffisant pour faire une partie, excusez moi du peu, mais tout cela méritait bien un imposant article dans le journal le plus diffusé du pays ! C’est donc après plusieurs semaines harassantes que notre équipe d’électriciens experts est finalement venue à bout de cette tâche, et non sans mal. Ils n’ont pas lésiné sur les efforts : goulottes arrachées à mains nues, câbles tirés à la force des bras,…et tout cela bien sûr en prenant toutes les précautions nécessaires pour préserver le matériel scientifique. Alors le Gorfou tient à décerner le grand merci d’or à Aurélien, le meilleur électricien de tout le pays Amsterdamien, pour son travail irréprochable, et un petit merci de bronze à ses aide-amateurs pour leurs contributions (même si on peut pas dire que ce soit des flèches !). Boris LA STERNE ANTARCTIQUE Photos : Benjamin Callard N°13 PAGE 3 LA PHOTO DU MOIS Par Jérémie Contexte de la photo : « A la recherche de la balise perdue » Le 22 janvier, alors que nous étions à la recherche d’un gorfou équipé d’une balise Argos, nous avons retrouvée celle-ci gisant au sol, au milieu des quelques scirpes qui jonchent la falaise d’Entrecasteaux. Son propriétaire s’en était tout simplement débarrassé pendant sa mue, en même temps qu’il avait abandonné ses vieilles plumes, et avant de retourner vers de nouvelles eaux doté de son plumage flambant neuf. EPISODE I : LE VAISSEAU FANTÔME L 'action se passe dans un port au cours de l'hiver 1931. Comme chaque nuit, une fois le quai devenu désert, nous avions pris l'habitude de nous faufiler dans le ventre d'un cargo, pour ripailler dans la soute, sur les stocks de nourriture qui y étaient entreposés. Cette nuit là, comme d'habitude, Jules faisait le guet, nous indiquant si la voie était libre. Alors, en file indienne, nous nous faufilions à découvert, afin de rejoindre au plus vite la zone d'ombre ménagée par la coque rouillée. La présence inhabituelle de nombreuses personnes à bord n'avait pas éveillé nos soupçons, alors que nous nous enfoncions dans l'antre du navire. Ce n'est qu'une fois l'estomac bien rempli, que nos autres sens se remirent en éveil, pour remarquer qu'il manquait une odeur habituelle, celle de la terre. Nous baignions à présent dans une ambiance iodée et salée. Il y avait aussi un roulis inhabituel. Jules, notre éclaireur, partit aux nouvelles, pour revenir tout essoufflé, quelques minutes plus tard. Ce qu'il nous annonça nous coupa instantanément la digestion. Le bateau avait quitté son mouillage et plus aucune lumière de la terre n'était même visible. Nous voguions en pleine mer. L'effroi pouvait se lire dans nos yeux. Passagers clandestins involontaires, nous n'avions aucune idée de la destination du navire. En accéléré chacun se projeta mentalement tout ce qu'il lais- sait dernière lui, tout ce qu'il perdait... Il fallait bien survivre et au fil des jours, la vie s'organisa. A notre avantage, nous avions déjà une bonne connaissance des lieux. Mais dans cet espace confiné, les rivalités commencèrent à se faire jour avec la formation de clans. Jules réussissait tant bien que mal à garder la cohésion, mais celle-ci vola en éclat lorsqu'une nuit, il disparu mystérieusement. Accident, assassinat, personne ne sut jamais le vrai mot de l'histoire. Pour ma part, je ne m'étais jamais vraiment acclimaté à la vie à bord. Le roulis continu me laissait en permanence l'estomac au bord des lèvres, jusqu'au jour fatal où, une mer démontée me porta le coup de grâce. Vidée et épuisée, je me terrais dans un boute lové dans l'entresol. C'est dans cet état de faiblesse, que je fus vilement attaquée et violée. Meurtrie et démoralisée, je pensais en finir en me jetant par dessus bord. L'écume aux lèvres, des idées noires circulant en boucle sur le réseau de mes pensées, je n'aspirais plus à grand chose quand, mon odorat m'apporta une information inattendue. En effet, je venais de capter un effluve oublié, celui de la terre. J'escaladai le cordage pour me glisser sur le pont. C'était une nuit étoilée et je pouvais à peine distinguer au loin une masse sombre, mais qui ne me trompait pas, c'était bien un bout de terre. Après toutes ces semaines, où l'œil ne pouvait s'ac- crocher qu'à la ligne d'horizon, ce fut une bouffée d'espoir qui me submergea, pouvoir enfin quitter cette prison flottante. Dans mon état normal, j'aurais peut être pesé le pour ou le contre, mais ce n'était pas le cas. Dans les secondes qui suivirent je pagayais déjà de toute la force de mes pattes, direction la terre. Trempée et glacée, je luttais pour ma survie. Tantôt sur une crête ou dans un creux de vague, j'entrevoyais par intermittence la terre. Le sel me brûlait les yeux et mes forces déclinaient. Je bus une tasse d'une écume mousseuse avant de recevoir un choc sur la tête qui me laissa inconscient. Je n'ai pas la moindre idée du temps que dura cet état, mais lorsque je repris le contrôle de mes sens, je sentis sous mes pattes le sol ferme. En trottinant, je m'éloignai de l'océan en circulant sous d'énormes blocs qui me masquaient les étoiles. Lorsque je me sentis en sécurité, je me lovai et m'endormis comme une masse. A mon réveil, le premier contact avec la vie fut un aboiement de chien. Je cherchais donc autour de moi, l'image familière de ce quadrupède, mais je ne pus trouver qu'une drôle de bestiole affublée de palmes et avec de grands yeux vagues. Mais où donc me trouvais-je ? (à suivre...) Bernard Lermite C'était une nuit étoilée et je pouvais à peine distinguer au loin une masse sombre, mais qui ne me trompait pas, c'était bien un bout de terre. LE MENSUEL DU GORFOU PAGE 4 OPÉRATION : BASE VERTE C’est l’été, le soleil brille, les abeilles butinent, les oiseaux chantent et les tondeuses cassent les oreilles des voisins. Oui, parce que l’été, c’est aussi la corvée de l’entretien des espaces verts. La plupart des districts des TAAF n’ont pas ce genre de préoccupation : « herbe », « arbre », « fleurs » sont des mots presque oubliés et évoquent plus la mythologie d’un monde fantastique qu’une réalité quotidienne. Ainsi, le pommier de Crozet est vénéré comme un dieu et ce qui reste de la serre fait office de temple. Sur Amsterdam, nous avons la chance de voir pousser autre chose que des cailloux et la malchance de devoir entretenir nos espaces verts. Quand l’herbe commence à chatouiller sous les bras, quand la végétation empêche la magnésismo de viser la mire, il est grand temps de déclencher l’opération « base verte ». A l’aube, toute la base se retrouve devant la mansarde espace verts et chacun occupé de la préparation. Je reviendrai à la prochaine pour améliorer mon temps. » « - J’étais à la débroussailleuse. Je coupais l’herbe le long des bordures quand j’ai entendu un « tchac ». Tout de suite, j’ai coupé le moteur et j’ai regardé. Là, étendu dans l’herbe, j’ai vu les restes d’un petit phylica. Le pauvre était si jeune, haut comme trois pommes d’Antonelli. Il était caché dans les hautes herbes, je ne l’ai pas vu. L’accident bête. On a rien pu faire pour le ranimer. Si vous voyez Jacques, dites-lui que je ne l’ai pas fait exprès. Je suis vraiment désolé. » « - Quand j’ai pris un râteau ce matin à la mansarde, ça m’a rappelé des moments forts de ma vie. » se munit de l’outil qui lui a été attribué et toute la matinée les uns et les autres coupent, ratissent, arrachent, débroussaillent, taillent, ramassent, brouettent, tondent jusqu’à ce que Le Nôtre luimême puisse être fier du résultat. Les matinées base verte sont des moments forts de la vie sur base et les hivernants ne manqueraient ça pour rien au monde. Laissons-leur la parole. « - Je suis un habitué de ce terrain, je tonds ici dès qu’il y a une base verte. Je suis parti tranquillement alors que les nouveaux ont voulu aller beaucoup trop vite dès le départ, résultat : une sortie de route au niveau du virage du Skua et une casse moteur. La base verte d’Amsterdam c’est une épreuve de fond, c’est souvent le dernier carré d’herbe qui est décisif. Encore une fois, c’est l’expérience qui a fait la différence. J’avais une bonne tondeuse, je tiens d’ailleurs à remercier tout le staff qui s’est « - Ils m’ont mis dans les mains un rotofil puis ils m’ont dit qu’il fallait que je coupe tous les brins d’herbe que je voyais, sans exception. J’ai essayé de protester mais ils m’ont répondu qu’il le fallait, que c’était bon pour la base, bon pour notre île. Ca a été un carnage. Pas un seul brin n’a survécu. » « - Au début j’étais râteau. Mais très vite mes qualités professionnelles ont été remarquées par mes supérieurs et je suis passé brouette. C’est sûr, une ascension aussi rapide a fait des jaloux. Je ne compte pas m’arrêter là, la prochaine fois je suis quasiment sur d’obtenir la tondeuse, j’ai de bons contacts dans le milieu de la base verte. Certains disent que j’ai les dents qui rayent la pelouse, mais je pense qu’il faut avoir de l’ambition dans la vie, moi je vise la direction de la Reuneuneu, et j’y arriverai. » Toute ressemblance avec la base verte qui a réellement eu lieu ce mois-ci serait totalement fortuite puisqu’étant de Petite Marie, je n’y ai pas assisté. Comme quoi, ce n’est pas parce qu’on est au courant de rien qu’il faut se dispenser d’en parler. Olivier