THÈSE 2003
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THÈSE 2003
Retour accueil du site Mémoires Thèses UNIVERSITE D’ANGERS FACULTE DE MEDECINE Année 2003 N° THESE Pour le DIPLOME D’ETAT DE DOCTEUR EN MEDECINE Qualification en : Médecine Générale Par Sandrine GRAVIER Née le 10 Juin 1974, au Mans Présentée et soutenue publiquement le : 9 Octobre 2003 TRAITEMENT DU TROUBLE BIPOLAIRE : ENTRE THEORIE ET PRATIQUE (Place des antipsychotiques) Président : Mr le Professeur GARRE Directeur : Mr le Docteur ALAMI 6 Composition du jury : Président du jury : Monsieur le Professeur GARRE Membres du jury : - Madame le Professeur PENNEAU-FONTBONNE - Monsieur le Professeur DUBAS - Monsieur le Docteur ALAMI 10 LISTE DES ABREVIATIONS AINS : Anti-inflammatoire non stéroïdien AMM : Autorisation de mise sur le marché ALD : Affection de longue durée ATCD : antécédents ATD : Antidépresseur AVC : Accident vasculaire cérébral BAV : Bloc auriculo-ventriculaire BDA : Bouffée délirante aiguë BH : Bilan hépatique BHCG : B Human Chorionic Gonadotrophine BZD : Benzodiazépine CIM : Classification internationale des maladies CIV : Communication interventriculaire CMP : Centre médico-psychologique Diag. : Diagnostic DSM : Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux ECG : Electrocardiogramme EDM : Etat dépressif majeur EEG : Electroencéphalogramme F : Femme H : Homme HAM-D : Echelle d’Hamilton (Hamilton depression) HDT : Hospitalisation à la demande d’un tiers HL : Hospitalisation libre HO : Hospitalisation d’office Hosp. : Hospitalisation HTA : Hypertension artérielle 11 Hyst. : Hystérique IC : Intervalle de confiance IDM : Infarctus du myocarde IEC : Inhibiteur de l’enzyme de conversion IM : Intramusculaire IMAO : Inhibiteur de la monoamine-oxydase IRS : Inhibiteur de la recapture de la sérotonine Li : Lithium LP : Libération prolongée NAP : Neuroleptique d’action prolongée NFS : Numération formule sanguine NLP : Neuroleptiques Parano. : Paranoïaque Phob. : Phobique Psychop. : Psychopathique PMD : Psychose maniaco-dépressive RMI : Revenu minimum d’insertion Sem. : Semaine SS : Sécurité sociale TCA : Tricycliques TB : Trouble bipolaire TR : Thymorégulateur TS : Tentative de suicide Y-MRS : Echelle de Young (Young Mania Rating Scale) 12 PLAN: INTRODUCTION PREMIERE PARTIE : PRESENTATION DU TROUBLE BIPOLAIRE I- Evolution des concepts II- Les facteurs de gravité du trouble bipolaire III- La prise en charge du trouble bipolaire DEUXIEME PARTIE : PLACE DES NEUROLEPTIQUES DANS LE TRAITEMENT D’ENTRETIEN DU TROUBLE BIPOLAIRE. REVUE DE LITTERATURE. I- La place des neuroleptiques dans le trouble bipolaire, en pratique clinique II- Les neuroleptiques conventionnels III- Les neuroleptiques atypiques TROISIEME PARTIE : PLACE DES NEUROLEPTIQUES DANS LE TRAITEMENT D’ENTRETIEN DU TROUBLE BIPOLAIRE, DANS LA PRATIQUE D’UN SERVICE DE PSYCHIATRIE ADULTE. OBSERVATIONS CLINIQUES. I- Méthodologie II- Observations III- Analyse des résultats IV- Discussion CONCLUSION BIBLIOGRAPHIE TABLE DES MATIERES 13 Introduction : Kraepelin, au début du 20è siècle, définit le concept de psychose maniacodépressive en l’opposant à la démence précoce (actuellement schizophrénie). Pour lui, cette pathologie se caractérise par une évolution périodique et un bon pronostic avec retour à l’état de base entre les accès et absence d’évolution déficitaire. Depuis cette définition, le traitement de la psychose maniaco-dépressive a connu une évolution importante. Le lithium, tout d’abord, a été le premier thymorégulateur utilisé dans la maladie et s’est montré efficace aussi bien dans les phases aiguës que dans la prévention des rechutes. Secondairement, la carbamazépine et le divalproate ont été proposés comme alternative au lithium, en particulier dans certaines formes cliniques de la maladie. Selon les consensus d’experts, ces traitements sont recommandés en première intention et en monothérapie. Des traitements adjuvants (antidépresseurs, neuroleptiques, benzodiazépines,…) peuvent être cependant nécessaires lors des phases aiguës. Malgré ces avancées thérapeutiques, le trouble bipolaire ne semble pas de si bon pronostic qu’on a pu longtemps le croire. Un quart des patients présentent des symptômes résiduels entre les accès et également un certain nombre d’entre eux développent un cycle rapide. De plus, le risque suicidaire et les répercussions sociales, familiales et professionnelles sont loin d’être négligeables. Enfin, en pratique, ces patients reçoivent plus souvent une polymédication qu’une monothérapie par thymorégulateur comme cela est préconisé. Ce décalage entre recommandations et pratique clinique est d’autant plus flagrant en ce qui concerne la place des neuroleptiques : alors que leur rôle est réservé à certaines phases aiguës de la maladie, beaucoup de patients en reçoivent au long cours. Cette pratique pose question pour deux raisons : 14 - D’une part les neuroleptiques comportent des risques d’effets indésirables neurologiques et cognitifs pouvant altérer la qualité de vie des patients. - D’autre part, aucune étude contrôlée n’a évalué l’intérêt de ces traitements au long cours. L’arrivée des antipsychotiques a donné un nouvel intérêt à la place des neuroleptiques dans le trouble bipolaire et de nombreuses études voient actuellement le jour. L’objectif de cette thèse est de comprendre pourquoi il existe un décalage entre les recommandations et la pratique clinique dans la prise en charge du trouble bipolaire. Pour cela, nous avons réalisé une étude qualitative sur treize dossiers de patients bipolaires. Nous avons retracé leur historique clinique et thérapeutique et répertorié, pour chacun d’entre eux, les périodes pendant lesquelles ils ont reçu des neuroleptiques et les raisons ayant motivé ces prescriptions. Avant d’aborder cette étude et de comparer nos résultats aux recommandations et à la littérature, nous retracerons dans un premier chapitre l’évolution du concept de trouble bipolaire et les diagnostics différentiels avec lequel il est souvent confondu. Le deuxième chapitre refait le point sur les stratégies thérapeutiques actuellement recommandées. 15 PREMIERE PARTIE : PRESENTATION DU TROUBLE BIPOLAIRE 16 I-Evolution du concept de trouble bipolaire : 1- Historique du concept de trouble bipolaire Le concept de trouble bipolaire n’a cessé d’évoluer au cours du temps. Après la distinction opérée dans les années soixante entre les troubles unipolaires et bipolaires, on assiste actuellement à un élargissement du spectre des troubles bipolaires vers les troubles unipolaires d’un côté et vers les troubles schizoaffectifs de l’autre. a)- Premières définitions : (1,2,3) C’est Hippocrate qui décrit dès 400 ans avant JC les termes de mélancolie et de manie. Cependant, les liens unissant ces deux entités en une seule maladie ne seront reconnus que dans la deuxième moitié du 19è siècle par Falret et Baillarger (1,2). En 1854, JP Falret décrit une entité qu’il nomme « folie circulaire » dans laquelle le patient vit alternativement des états de dépression et de manie. A la même époque, Baillarger décrit « la folie à double forme ». Ces auteurs permettent ainsi de dessiner un premier axe dans l’ensemble des troubles psychiatriques alors réunis en un seul concept de psychose unique (terme définit par Zeller en 1837 puis Griesinger en 1845) (3). b)- La conception unificatrice de Kraepelin.(3,4) Ces conceptions ont préfiguré la classification de Kraepelin qui, au début du 20è siècle, divise les troubles psychotiques en deux groupes : la psychose maniaco-dépressive d’un côté et la démence précoce de l’autre. La psychose maniaco-dépressive se distingue de la démence précoce par les critères suivants : - Evolution périodique avec des épisodes récurrents 17 - Bon pronostic avec retour à l’état de base entre les accès et absence d’évolution terminale déficitaire - Histoire familiale riche en psychose maniaco-dépressive (prédisposition héréditaire) Le diagnostic de « folie maniaco-dépressive » repose sur des critères évolutifs (évolution périodique, bipolarité), sur des critères symptomatiques (états maniaques, états dépressifs, états mixtes) et sur des critères étiologiques (maladie « endogène », c’est-à-dire indépendante de toute influence extérieure). Kraepelin décrit de nombreuses formes cliniques et n’oppose pas systématiquement dans la psychose maniaco-dépressive les syndromes maniaques et dépressifs, incluant même des formes mixtes et des fluctuations sub-syndromiques de l’humeur et de l’action (ce que Kraepelin nomme le « tempérament affectif »). Ce qui compte, c’est la récurrence et la périodicité du trouble. La distinction des formes unipolaires et bipolaires est évoquée, mais elles demeurent une même entité morbide. Plusieurs évolutions sont venues secondairement mettre en doute la dichotomie (3) proposée par Kraepelin : - La première concerne la classification des troubles bipolaires - La deuxième concerne les troubles schizo-affectifs - La troisième remet en question la validité de la dichotomie et suggère un continuum entre les deux grandes psychoses c)- Distinction des formes uni et bipolaires.(2,4,5) Dans les années soixante, à la suite de Kleist (1947), Leonhardt (1957) et des données établies par Perris (1966), Angst (1966) et Winokur (1967), la psychose maniacodépressive a été divisée en trouble bipolaire et trouble unipolaire. Le trouble bipolaire est 18 caractérisé par l’alternance d’épisodes maniaques et dépressifs, le trouble unipolaire n’inclut que des épisodes dépressifs (2,4,5) Cette dichotomie est officiellement instituée en 1980 avec la 3è édition du DSM. C’est Dunner (2) en 1976 qui, le premier, va affiner cette classification en distinguant parmi les troubles bipolaires les types I et II, qui se distinguent par l’intensité de la symptomatologie maniaque : les sujets bipolaires de type I sont définis comme ayant présenté un ou plusieurs épisodes maniaques suffisamment sévères pour être traités spécifiquement, et les sujets bipolaires de type II comme ayant présenté des épisodes dépressifs sévères et des phases hypomaniaques reconnues comme pathologiques par l’entourage, mais n’ayant pas nécessité un traitement spécifique ou une hospitalisation. Le DSM IV reconnaît actuellement quatre grands sous-types (4) (cf. figure n°1) : - Le trouble bipolaire de type I - Le trouble bipolaire de type II - La cyclothymie, définie par l’alternance au long cours de symptomatologie hypomaniaque et dépressive mineure (classée avant le DSM IV dans l’axe 2 des troubles de la personnalité). - Le trouble bipolaire non spécifié regroupant des troubles ayant des caractéristiques bipolaires qui ne répondent aux critères d’aucun trouble spécifié . (cf. tableau de sémiologie, annexe n°1) Le DSM IV reconnaît également les cycles rapides, définis par la survenue d’au moins quatre épisodes thymiques par an et les états mixtes, caractérisés par la présence simultanée de symptômes de la lignée dépressive et maniaque au cours du même épisode thymique. 19 Figure n°1 : Evolution de la distinction bipolaire-unipolaire : (8) Maladie maniaco-dépressive (PMD) Classifications (DSM-I, DSM-II et CIM 6-9) Unipolaire Bipolaire Personnalité cyclothymique RDC et DSM-III (1980) Cyclothymie (trouble) BP I BP II Cyclothymie DSM-III-R (1987) DSM-IV (1994), CIM-10 (1992) D MD Md mD md D: dépression majeure; d: dépression mineure; M: manie; m: hypomanie d)- Elargissement du spectre bipolaire : Aux dépens des dépressions unipolaires : (4) Depuis les années 1980, certains auteurs, comme Klerman, Akiskal ou Angst, défendent une conception élargie du « spectre bipolaire » et tendent à multiplier les soustypes dans leur classification du trouble. Ces sub-divisions leur semblent plus proches de la réalité clinique, souvent complexe (cf. tableaux n° I et n°II). 20 Ainsi, ces auteurs insistent, au-delà de formes cliniques classiques, sur : - des formes atténuées de trouble bipolaire (trouble bipolaire de type II où les épisodes dépressifs majeurs alternent avec une hypomanie supérieure à 4 jours et / ou cyclothymie, trouble bipolaire de type III ou dépression pseudounipolaire où la bipolarité ne va se révéler que secondairement, notamment après intervention pharmacologique). (4) - des pathologies sub-syndromiques de la personnalité, de type hyperthymique ou cyclothymique (6), terrain sur lequel peut se développer la bipolarité. Aux dépens des troubles schizoaffectifs : Enfin, on a également assisté à un élargissement progressif du spectre bipolaire vers les troubles schizophréniques, avec l’intégration de caractéristiques psychotiques congruentes, puis non congruentes à l’humeur dans les accès maniaques ou dépressifs de la maladie bipolaire(4,7). La place accordée aux formes cliniques associant de manière concomitante des symptômes psychotiques et thymiques a varié au cours du temps et des classifications. Deux conceptions en particulier se sont opposées : - Une conception européenne (E. Régis, 1914 ; H. Ey ; J. Delay, 1946), qui incluait des symptômes délirants dans la définition des accès aigus de la maladie bipolaire, tout en insistant sur la volatilité de ces idées délirantes. Ces idées délirantes sont plus considérées comme des « fabulations inconsistantes » ou un « délire verbal », auquel le sujet n’adhère que partiellement. 21 - Une conception nord-américaine (Bleuler, 1916 ; Schneider, 1950) qui étend le diagnostic de schizophrénie à toute personne présentant une symptomatologie délirante, quels que soient les symptômes thymiques associés. Les symptômes de premier rang décrits par Schneider (cf. annexe n° 2) sont considérés comme pathognomoniques de la schizophrénie. Ainsi, dans les années soixante dix, une étude anglo-américaine retrouvait que le diagnostic de manie était trois fois plus fréquent en Angleterre qu’aux Etats-Unis. Dans le début des années soixante-dix, une démarche différente s ‘est amorcée : la perturbation de l’humeur devient le symptôme central permettant de poser le diagnostic de trouble bipolaire, qu’elle que soit la symptomatologie psychotique associée. La mise en évidence des propriétés thérapeutiques du lithium a eu un rôle majeur dans cette nouvelle approche. En effet, la distinction entre trouble bipolaire et schizophrénie n’avait plus seulement un intérêt théorique, mais aussi des conséquences thérapeutiques. En 1978, Pope et Lipinski démontrent que les symptômes classiquement considérés comme « schizophréniques » (y compris les symptômes de premier rang de Schneider), sont en fait présents dans 20 à 50% des phases aiguës du trouble bipolaire, et que les patients concernés ne diffèrent pas des autres patients bipolaires par leurs antécédents familiaux et leur réponse aux traitements (7). Cette étude a influencé l’élaboration des critères diagnostiques du DSM-III puis du DSM-IV qui distinguent trois types d’accès aigus maniaques ou dépressifs (cf. annexe n°3) : - sans idée délirante - avec idées délirantes congruentes à l’humeur - avec idées délirantes non congruentes à l’humeur 22 Enfin, certains auteurs défendent l’idée d’un continuum entre troubles bipolaires et schizophrénie, voyant dans ces deux pathologies deux sous-ensembles flous ayant en commun une vaste zone d’intersection symptomatique. L’élargissement du spectre bipolaire se fait donc à la fois aux dépens des dépressions unipolaires, mais également des troubles schizoaffectifs. A l’opposé, certains auteurs insistent sur l’importance du modèle nucléaire du trouble bipolaire. Le concept bipolaire dans sa forme « classique » telle qu’elle est décrite dans les classifications internationales, représente une entité cohérente et repérable permettant la réalisation d’études génétiques, biologiques et thérapeutiques (2). L’enjeu de ces deux points de vue opposés est : - D’un côté l’amélioration de la prise en charge du trouble bipolaire en diminuant le risque de sous diagnostic et ses conséquences : retard à la mise en route du traitement le plus adapté ou aggravation iatrogène de la maladie. - D’un autre côté, le risque de diluer le concept de trouble bipolaire, en particulier en y intégrant des dépressions unipolaires ou de véritables schizophrénies. Tableau n°I : Le spectre bipolaire, selon Akiskal et Pinto (8) BP 1 /2 BP 1 BP 1 1/2 BP 2 BP 2 1/2 BP 3 Trouble schizo-bipolaire Maladie maniaco-dépressive Dépression avec hypomanie prolongée Dépression avec épisodes hypomaniaques discrets Dépression sur fond de tempérament cyclothymique Dépression + hypomanie survenant seulement en relation avec un traitement antidépresseur ou somatique BP 3 Virage de l’humeur dans un contexte d’abus d’alcool ou de substance 1/2 toxicomaniaque BP 4 Dépression sur fond de tempérament hyperthymique BP bipolaire 23 Tableau n°II : Spectre de la manie, spectre maniaco-dépressif, et spectre de la dépression (J. Angst) (2,4) Spectre de la manie : Manie (unipolaire) sévère / modérée Hypomanie Personnalité hyperthymique Spectre maniaco-dépressive (bipolaire) : Manie avec dépression modérée Manie avec dépression sévère Dépression et hypomanie Dépression modérée et manie modérée Spectre dépressif : Etat dépressif majeur (EDM) Dysthymie Dépression récurrente brève M manie m hypomanie Dys dysthymie M m mm Md MD BP I Dm BPII dm cyclothymie DD Dys RDB D dépression sévère d dépression modérée 2- Données épidémiologiques : (2,9,10) a)- Prévalence : L’évaluation de la prévalence du trouble bipolaire a été très influencée par l’évolution des conceptions nosographiques, en particulier par la distinction entre psychose maniaco-dépressive et schizophrénie. Classiquement, cette prévalence était de 1% dans la population générale (tout comme la schizophrénie). Aujourd’hui, on estime que ces chiffres sont probablement moins élevés pour la schizophrénie (0,5 à 0,8%), mais nettement supérieurs pour les troubles bipolaires (9). Deux études américaines à grandes échelles (étude ECA- Epidemiologic Catchment Area- menée par Weisman et al et enquête nationale de comorbidité) retrouvent une 24 prévalence comprise entre 1,2 à 1,6%. La prévalence du trouble bipolaire de type 1 est estimée à 0,8% et le type 2 à 0,5%. Cependant, ce dernier chiffre est probablement sousévalué du fait de la non-reconnaissance fréquente de l’hypomanie. Si on prend en compte une vision élargie du spectre bipolaire, telle que l’ont décrite Angst ou Akiskal, la prévalence varie de 3 à 7%. Dans l’étude de Zurich menée par Angst (10), la prévalence du trouble bipolaire de type I est ainsi de 4,4%, celle de l’hypomanie de 1,1% et celle l’hypomanie brève (définie par une durée inférieure à 4 jours) de 2,2%. b)- Sex. ratio : Le sex. Ratio du trouble bipolaire est classiquement de une femme pour un homme, contrairement au trouble unipolaire qui retrouve un ratio de 2 / 1. Cependant, Angst (10) retrouve pour le trouble bipolaire une légère prédominance féminine. c)- Age : Classiquement, l’âge de début était d’environ 30 ans. Les résultats des études épidémiologiques récentes le situent plus précocement, vers 21 ans. Ceci serait en faveur d’un rajeunissement de l’âge de début et d’un diagnostic plus précoce. d)- Comorbidité : (9) Elle est fréquente dans le trouble bipolaire. L’étude ECA a retrouvé que le trouble bipolaire était associé dans plus de la moitié des cas à une autre entité diagnostique. Les associations les plus fréquentes sont l’alcoolisme et la toxicomanie. Ainsi, 60,7% des patients bipolaires de type I ont un abus de substance et la fréquence d’association avec l’alcool serait de 35%. Quant aux troubles anxieux, ils sont également fréquents : la prévalence du trouble panique sur la vie chez les 25 bipolaires seraient de 20,8% contre 10% chez les unipolaires et 0,8% dans la population générale. Ceci représente une probabilité 26 fois supérieure. 3- Diagnostics différentiels : a)- Dépression unipolaire : (4,5,6) Lorsque la maladie débute par un épisode maniaque ou une hypomanie évidente et repérée, le diagnostic ne pose, en général, pas de problème. Par contre, lorsque la maladie débute par un état dépressif majeur, la question est de savoir s’il s’intègre dans un trouble unipolaire ou dans un trouble bipolaire. La dépression bipolaire peut être facilement confondue avec la dépression unipolaire pour plusieurs raisons : - Certains patients peuvent ne pas considérer leurs épisodes hypomaniaques comme un trouble. Ils ne consultent alors qu’au moment des épisodes dépressifs. Dans ce cas, c’est l’interrogatoire de l’entourage et la notion d’une histoire familiale de bipolarité qui peuvent être des éléments évocateurs du diagnostic. - Le trouble bipolaire peut n’être reconnu qu’après quelques années d’évolution chez des patients présentant en premier lieu des épisodes dépressifs. - Les brefs épisodes hypomaniaques peuvent être difficiles à diagnostiquer et à différencier de la thymie de base chez certains patients. Ainsi, certaines dépressions considérées au premier abord comme unipolaires pourront ultérieurement évoluer vers un trouble bipolaire (dépressions « pseudounipolaires »). Pour permettre d’orienter le diagnostic devant un épisode dépressif « tout venant » (5), des indices de bipolarité ont été proposés (cf. tableau n°III). 26 Tableau n°III : Les différents facteurs prédictifs pour les trouble bipolaire de type I (D’après Akiskal et Al, 1983) (4) Facteur prédictif Sensibilité Hypomanie 32 pharmacologique Histoire familiale de 56 bipolarité Spécificité 100 Valeur prédictive 100 98 94 Dépression avec 59 hypersomnie et ralentissement Dépression 42 psychotique Début en post partum 58 88 83 85 74 84 88 Les facteurs prédictifs les plus spécifiques sont les suivants : - Les antécédents familiaux de bipolarité - L’ hypomanie pharmacologique - La dépression psychotique - Un début précoce avant 26 ans Plus récemment, Akiskal a cherché à définir des facteurs prédictifs de bipolarisation de type II devant un état dépressif majeur (6). L’indice le plus fiable est la labilité de l’humeur. Ainsi, un certain nombre de facteurs prédictifs permettent maintenant d’évaluer le risque pour un patient dépressif d’entrer ultérieurement dans la catégorie bipolaire, et même de préciser s’il s’agit d’un type I ou II. L’apparition d’une manie ou d’une hypomanie vient ensuite confirmer la nature de son trouble affectif. Des études récentes (Akiskal, Angst, Hirshfeld) ont évalué que les dépressions survenant au cours de l’évolution d’un trouble bipolaire seraient le fait de 30 à 50 % de l’ensemble des dépressions. 27 L’étude multi-centrique française EPIDEP, achevée en 1997 (8,11) a montré qu’une meilleure prise en compte de l’hypomanie permettait d’améliorer le diagnostic de trouble bipolaire. Elle a été menée sur une population de 537 patients présentant un état dépressif majeur. Ces patients étaient évalués lors de deux visites : la première lors de l’épisode dépressif majeur, la deuxième, à distance de l’épisode. Lors de la deuxième visite, une recherche systématique de l’hypomanie a été effectuée à l’aide d’auto questionnaires et d’entretiens semi-structurés. A la deuxième visite, le pourcentage de patients unipolaires était de 43% alors qu’il était de 70% à la première visite. Pour les bipolaires de type I, les chiffres sont restés stables. Par contre, le taux de troubles bipolaires de type II, qui était initialement de 21,7% a pratiquement doublé (39,8%) après la recherche systématique de l’hypomanie. Le diagnostic de dépression bipolaire est souvent difficile à établir, et il importe de se poser la question devant un état dépressif majeur de sa nature uni ou bipolaire afin d’orienter au mieux la réponse thérapeutique. b)- Trouble bipolaire et symptômes psychotiques : Les symptômes psychotiques sont fréquemment présents dans les accès aigus du trouble bipolaire (7). Dans la pratique, devant un épisode aigu présentant à la fois des symptômes thymiques et psychotiques, la question du diagnostic différentiel avec une bouffée délirante aiguë (surtout lorsqu’il s’agit d’un premier accès), une décompensation d’une schizophrénie ou d’un trouble schizoaffectif peut se poser. C’est classiquement l’évolution de la maladie qui permet le plus souvent d’établir le diagnostic. Cependant, des études de suivi récentes ont montré que l’évolution elle-même ne permettait pas toujours de distinguer ces deux maladies. Ainsi, dans l’étude de Chen l’instabilité diagnostique s’est révélée être fréquente (12). Leur étude a inclus 936 patients ayant présenté au moins 4 hospitalisations sur 7 ans. Au cours de cette période, 28,9% 28 d’entre eux sont passés du diagnostic de trouble bipolaire à celui de schizophrénie et 16% d’un diagnostic de schizophrénie à celui de trouble bipolaire. 29 II- Les facteurs de gravité : (13,14,15) Si globalement le pronostic de la maladie bipolaire apparaît relativement bon, les évolutions défavorables ne sont pas rares (13), notamment sous la forme de cycles rapides (12 à 20% des bipolaires) et de la persistance de symptômes résiduels à minima (dans 20 à 25% des cas). L’évolution sur le long terme est surtout marquée par deux conséquences importantes : le risque suicidaire et les répercussions socioprofessionnelles. Ainsi, le taux de suicide atteindrait 19% des patients, soit 30 fois plus que dans la population générale. Ce risque persiste tout au long de la maladie et est plus élevé lors des épisodes dépressifs et chez les patients présentant un trouble bipolaire de type II. Quant aux complications psychosociales, elles sont souvent sévères et durables, puisque un tiers des patients présenterait une détérioration sociale marquée à 3 ans et que 30 à 40% auraient une pension d’invalidité à 10 ans. Tous les domaines de la vie sont touchés : professionnels, financiers, relationnels au niveau amical ou conjugal. Plusieurs paramètres peuvent influencer de manière défavorable l’évolution du trouble bipolaire. Certains de ces facteurs sont liés au patient ou à la maladie elle-même ; d’autres sont plus liés à la prise en charge thérapeutique. 1- Facteurs de gravité liés au patient ou à la maladie : (14,15) - L’âge précoce du début, en particulier par le biais des conséquences délétères sur l’insertion sociale et scolaire. - Le nombre d’épisodes antérieurs et leur gravité : plus le nombre d’épisodes est élevé, plus l’insertion socioprofessionnelle et les relations sociales sont dégradées. 30 - La présence de symptômes psychotiques, en particulier non congruents à l’humeur. Tohen et al (14) retrouvent une association entre la présence de symptômes psychotiques lors de l’épisode maniaque initial et la mauvaise insertion socioprofessionnelle et la survenue de récurrences. - L’existence d’une personnalité antérieure pré morbide, de type névrotique ou instable. - Une comorbidité avec des conduites addictives à l’alcool et autres toxiques. La comorbidité pourrait favoriser la survenue d’états mixtes et est un facteur de résistance aux traitements. Une évolution défavorable avec des récurrences fréquentes peut également favoriser la consommation d’alcool et de toxiques. Il est ainsi souvent difficile d’établir le primum movens de l’association comorbide conduite addictive / trouble bipolaire. - L’influence des événements de vie (15), qui jouent un rôle dans l’apparition du premier épisode thymique, mais également dans le risque de rechutes ultérieures, maniaques ou dépressives. Parmi les facteurs précipitants, on peut souligner : les séparations et les deuils, la discorde conjugale, les interactions sociales et particulièrement professionnelles, et certains événements « positifs » comme une promotion ou une grossesse. Enfin, plutôt qu’un événement unique, c’est l’accumulation d’événements qui paraît le plus souvent en cause. Pour certains auteurs (Post, 1992), la survenue d’un stress marqué ou d’un épisode thymique pourrait induire une sensibilisation durable du trouble bipolaire. Cette sensibilisation pourrait ainsi se révéler par une baisse du seuil au-delà duquel se déclenchera un nouvel épisode thymique sous l’influence de facteurs de stress (vulnérabilité au stress). Le type de la décompensation, maniaque ou dépressive, n’est pas dépendant de la nature de l’événement lui-même. 31 2- Les facteurs de risques liés à la prise en charge sont : (14,15) - La mauvaise observance thérapeutique et les interruptions de traitement, en particulier celle du lithium. Elle serait de 20 à 50 % et expliquerait 75 % des récidives (15). Elle est très probablement sous-évaluée. Hormis le risque d’inefficacité, l’arrêt brutal du lithium entraîne 50 % de récidive dans les 3 mois suivants et est source de résistance ultérieure. Ce paramètre souligne que l’efficacité d’un traitement, quel qu’il soit, passe aussi par l’adhésion du patient à ce traitement et donc dépend de l’alliance thérapeutique établie avec lui (meilleure connaissance de sa maladie, etc.). - L’utilisation itérative d’antidépresseurs, en particulier tricycliques, qui favorise l’évolution vers un cycle rapide. - L’errance diagnostique devant des tableaux atypiques ou pauci- symptomatiques (ce qui induit un retard dans la mise en route du traitement approprié). - Les limites d’efficacité des thymorégulateurs ainsi que leurs effets indésirables, peuvent être une cause d’arrêt des traitements. Ainsi, l’efficacité prophylactique du lithium serait passée de 80 à 50%. Cette apparente résistance peut être liée à l’élargissement du concept des troubles bipolaires, avec l’inclusion de formes de moins bon pronostic. 32 En conclusion : Malgré les avancées thérapeutiques récentes, le trouble bipolaire reste une affection grave avec un taux de mortalité par suicide élevé et un retentissement socioprofessionnel important. La prévention des récurrences par les thérapeutiques actuelles semble encore insuffisante. L’inobservance thérapeutique est un phénomène sous-évalué, mais qui a probablement une part non négligeable dans l’évolution défavorable du trouble. 33 III- Prise en charge au long cours du trouble bipolaire : La prise en charge au long cours du trouble bipolaire a pour but de prévenir ou d’atténuer les récurrences maniaques ou dépressives, de réduire le taux de suicide, d’améliorer le pronostic social et la qualité de vie des sujets atteints. Elle nécessite une alliance thérapeutique entre le médecin et le patient afin de permettre l’acceptation de la maladie, l’observance thérapeutique et les règles d’hygiène de vie qui sont des éléments déterminants. Elle est basée à la fois sur une psychothérapie et sur un traitement médicamenteux, lequel nous intéresse, ici. Le traitement médicamenteux se divise en 3 parties : - le traitement des phases aiguës - le traitement de consolidation après phases aiguës - le traitement prophylactique ou traitement d’entretien Il varie selon la forme clinique de la maladie bipolaire, les contre-indications et les résistances présentées par le patient. Il s’appuie principalement sur les traitements normothymiques, prescrits à la phase aiguë et poursuivis pendant la phase d’entretien. Cependant, d’autres classes thérapeutiques sont souvent associées (neuroleptiques, antidépresseurs, hypnotiques, anxiolytiques). 1- Les traitements disponibles : a)- Les normothymiques : (16,17) Ils représentent le traitement de première intention du trouble bipolaire. En plus du lithium, utilisé depuis la fin des années soixante-dix, il s’y ajoute actuellement la carbamazépine et les dérivés valproïques (valpromide, acide valproïque et divalproate). Le lithium est le premier traitement ayant démontré son efficacité dans la prophylaxie du 34 trouble bipolaire et dans les accès aigus. Il est aussi le produit le plus étudié dans cette indication et c’est le seul qui ait démontré son efficacité dans la prévention du risque suicidaire (16). Le taux de réponse au lithium (en traitement préventif) était évalué à 70 - 80 % dans les années soixante-dix. Il semble actuellement moindre (50 % selon certaines études), en particulier dans certaines formes cliniques (16) : - Les cycles rapides - La présence d’une dépendance à l’alcool ou autres toxiques - Les états mixtes En plus de son rôle prophylactique, il possède l’AMM dans le traitement des phases maniaques aiguës et semble efficace également dans les décompensations dépressives du trouble bipolaire. Cependant, son utilisation est limitée par ses effets indésirables, ses contreindications et la nécessité d’une bonne observance thérapeutique et d’une surveillance biologique régulière (cf. tableau n°IV). Un autre inconvénient est son délai d’action qui nécessite souvent une association thérapeutique dans les phases aiguës, en particulier sévères ou agitées, du trouble bipolaire (neuroleptiques, benzodiazépines ou antidépresseurs en particulier). Il est à noter également que le lithium est le seul thymorégulateur indiqué dans le traitement préventif des troubles schizoaffectifs. Les anticonvulsivants sont indiqués préférentiellement en cas de contre-indication ou de résistance au lithium. La carbamazépine (Tégrétol®), est habituellement proposée comme alternative au traitement par lithium dans le traitement curatif des états maniaques et dans la prévention des rechutes. Ses indications préférentielles sont les cycles rapides et les états mixtes. Elle 35 possède comme inconvénient le fait d’être inducteur enzymatique (cf. tableau n° IV). En première intention dans les accès maniaques, son efficacité varie de 50 à 75 % (16), avec un délai d’action d’une à deux semaines (18). La carbamazépine semble plus efficace que le lithium sur le long terme dans le traitement du spectre bipolaire. Mais elle semble moins efficace dans le traitement des formes classiques de la maladie (19). Enfin, la carbamazépine n’a pas d’indication dans le traitement des accès dépressifs bien que certaines études tendent à suggérer son efficacité (16). Bien que l’utilisation des dérivés valproïques dans le trouble bipolaire remonte au début des années soixante, il n’y a que quelques études ouvertes qui suggèrent son efficacité dans le traitement prophylactique (19). Parmi ces dérivés valproïques, le valpromide (Dépamide®) est proposé dans le traitement préventif du trouble. Le divalproate (Dépakote®), du fait de l’absence de preuves contrôlées dans le traitement préventif, ne possède l’AMM que dans les accès maniaques. Cependant, il est de plus en plus souvent utilisé sur le long terme, même en dehors des cas d’intolérance ou de contre-indication au lithium ou à la carbamazépine. Il semble particulièrement intéressant dans la prévention des cycles rapides et le traitement des états mixtes. D’autres anticonvulsivants sont actuellement en cours d’évaluation : lamotrigine, gabapentine, topiramate. Parmi ceux-ci, la lamotrigine semble la molécule la plus prometteuse, en particulier dans les accès dépressifs, bien que ses effets indésirables sur le plan cutané nécessitent des précautions d’emploi. En attendant des études contrôlées évaluant l’intérêt de ces molécules, leur rôle se limite aux cas réfractaires aux autres traitements (19). b)- Les antidépresseurs : (16,20,21) En cas d’épisode dépressif, le recours aux antidépresseurs peut être nécessaire, en particulier dans les formes sévères. Toutes les familles d’antidépresseurs ont démontré leur efficacité. Les tricycliques ont été les plus étudiés. 36 Cependant, ils favorisent l’induction de virages maniaques. Selon certains auteurs, ce risque varie de 30 à 70 % chez les patients bipolaires de type I sous tricycliques (20). L’utilisation chronique d’antidépresseurs peut également favoriser l’induction de cycles rapides et ainsi entraîner une évolution défavorable de la maladie. Cela concernerait 26 à 56% des patients (21). Ce risque semble réduit avec les IRS et lorsque l’antidépresseur est associé à un thymorégulateur. c)- Les neuroleptiques : La place des neuroleptiques dans le traitement du trouble bipolaire a évolué avec l’émergence des antipsychotiques. Les neuroleptiques conventionnels : (16) Seulement deux possèdent une indication officielle dans les accès maniaques : le zuclopentixol (Clopixol®) et la loxapine (Loxapac®). Cependant, d’autres neuroleptiques possèdent l’AMM dans les états d’agitation aiguë et sont donc utilisés couramment à but sédatif dans les accès du trouble bipolaire. Les neuroleptiques sont plus rapidement efficaces que le lithium dans le traitement de l’accès maniaque et sont utiles dans les formes très agitées ou délirantes. Cependant, ils n’ont pas démontré leur efficacité dans la prévention des rechutes et semblent même favoriser des dépressions post-maniaques (16). Classiquement, ils peuvent être indiqué en association avec un thymorégulateur dans les cas suivants : - Dans la manie : lors des accès sévères et / ou avec symptômes psychotiques ou agitation psychomotrice. Cette utilisation est souvent nécessaire du fait du délai d’action des thymorégulateurs et en particulier du lithium. - Dans la dépression bipolaire : lors des épisodes sévères et / ou avec symptômes psychotiques. 37 Le risque de survenue de symptômes extrapyramidaux et de dyskinésies tardives (et pour certains auteurs de dépression post maniaque avec les neuroleptiques conventionnels), limite leur utilisation. Les neuroleptiques atypiques : (17) Le rôle des neuroleptiques atypiques est de plus en plus important dans la prise en charge du trouble bipolaire. Lorsqu’un neuroleptique est nécessaire, les experts préconisent aujourd’hui un atypique, de préférence aux neuroleptiques classiques, du fait du moindre risque d’effets indésirables. L’olanzapine (Zyprexa®) possède, depuis peu, l’AMM dans la prise en charge de la manie et d’autres molécules (en particulier la risperidone) sont actuellement en cours d’évaluation à la fois dans le traitement des phases aiguës de la maladie, mais également dans la prévention des rechutes. Les neuroleptiques atypiques sont recommandés en première intention en association avec le thymorégulateur dans la dépression psychotique et apparaissent comme alternative de premier choix dans toutes les phases du cycle rapide. La persistance d’une symptomatologie psychotique ou la résistance au traitement peut nécessiter le maintien d’un traitement antipsychotique au long cours. Les neuroleptiques atypiques sont préférés par rapport aux conventionnels. Les cas de nonobservance au traitement peuvent justifier le maintien au long cours d’un neuroleptique classique sous forme injectable. d)- Les benzodiazépines : Le clonazépam (Rivotril®) pourrait posséder des propriétés antimaniaques. Il peut être utile dans les phases aiguës de la maladie, mais le risque de dépendance et d’accoutumance rendent sont utilisation limitée sur le long terme. 38 e)- La sismothérapie : La sismothérapie peut également être indiquée dans les phases dépressives du trouble bipolaire, en particulier chez la personne âgée, la femme enceinte et en cas de résistance ou de contre-indication aux traitements habituels et en cas de dépression psychotique. Elle permet une réduction importante des symptômes dépressifs et des idéations suicidaires. Elle nécessite le consentement « éclairé » du patient et un bilan pré-anesthésique. f)- Anxiolytiques et hypnotiques : Ils sont parfois ajoutés pendant les phases aiguës et au traitement d’entretien, bien que ne faisant pas partie des consensus. 2- Les stratégies thérapeutiques (19,22,23,24) Les stratégies thérapeutiques ont évolué au fil du temps avec l’émergence de nouvelles molécules. Ils se basent sur la balance bénéfice / risque des différents traitements. Actuellement, des algorithmes et des consensus sont publiés (cf. figures 2 et 3), en particulier par les Nord-américains, permettant de faciliter les décisions thérapeutiques et de servir de base de référence commune. Ces consensus sont établis à partir de données scientifiques (avec une hiérarchisation des études allant des études contrôlées contre placebo aux études de cas), mais aussi à partir de l’expérience pratique de plusieurs experts. Le but de ces « guidelines » est d’apporter des stratégies plus claires dans une maladie souvent complexe. 39 Les lignes directrices des consensus actuels sont : 1- L’utilisation d’un thymorégulateur est recommandé à toutes les étapes du traitement. Le lithium et le divalproate sont les deux molécules de choix lors des phases aiguës, mais également en prévention des rechutes. 2- Quand un antipsychotique est nécessaire, les atypiques sont préférés aux conventionnels, en première intention. 3- Une dépression modérée devrait être traitée par thymorégulateur seul initialement. On peut y associer d’emblée un antidépresseur en cas de sévérité. 4- Le cycle rapide doit être traité préférentiellement par thymorégulateur en monothérapie, que ce soit lors d’une phase maniaque ou dépressive. a)- Le traitement préventif : Quand l’instituer ? Pour B. Müller-Oerlinghauser (19), un patient qui a présenté au moins 2 épisodes thymiques sur 5 ans peut débuter un traitement préventif. Cependant, un seul accès maniaque peut-être un critère suffisant, en fonction de la gravité de l’épisode, de l’enjeu socioprofessionnel et familial et des antécédents familiaux du patient. Quelles molécules sont préconisées ? Le lithium reste classiquement le traitement de première intention, en monothérapie. En cas d’intolérance, de contre indication ou de résistance au lithium, un autre thymorégulateur doit être envisagé. 40 Le valproate apparaît plus efficace que le lithium dans les accès mixtes et les cycles rapides. En cas d’efficacité insuffisante, les consensus actuels recommandent l’association du traitement initial à un 2ème thymorégulateur et non plus la substitution d’un traitement pour un autre. Cette stratégie ne possède pas encore officiellement l’AMM, et en particulier n’est pas une association indiquée dans le Vidal®, ce qui peut parfois être source de questionnement de la part des patients. De même, en cas de résistance le choix porte soit sur un 3ème thymorégulateur, soit sur l’association à un traitement adjuvant (en particulier neuroleptique). En cas de résistance, les experts préconisent de vérifier en premier lieu la concentration plasmatique du thymorégulateur en place. Il faut toujours penser au risque de mauvaise observance du traitement ou à des facteurs associés qui peuvent induire une résistance secondaire, en particulier : - Les pathologies neurologiques (accident vasculaire par exemple) - Une hypothyroïdie Il est à noter que les études évaluant le traitement au long cours du trouble bipolaire et l’efficacité des associations thérapeutiques sont insuffisantes pour établir des consensus précis. Les experts s’accordent pour dire que le traitement efficace à la phase aiguë doit être maintenu par la suite sur le long terme. Durée du traitement : Il n’existe pas de durée de traitement idéale. Elle est liée à la gravité de la maladie , aux antécédents du patient. La question peut se poser après plusieurs années de stabilisation thymique ou après 6 mois de rémission s’il s’agit d’un premier épisode peu sévère et sans histoire familiale de bipolarité. 41 Souvent, le traitement est poursuivi à vie. L’arrêt du traitement doit de toute manière se faire progressivement afin de diminuer le risque de rechute et nécessite une surveillance spécialisée prolongée. b)- Traitement de l’accès maniaque : (cf. tableau n° V et figure n°2) Pour ce qui est de la prise en charge des accès, les consensus distinguent le traitement des premiers épisodes, maniaques ou dépressifs, et celui des rechutes sous traitement prophylactique. - 1er épisode : Le traitement de choix est, là encore, un thymorégulateur en monothérapie, sauf en cas de symptômes psychotiques associés ou de critères de sévérité (agitation, insomnie). Le lithium est le traitement de choix de la manie euphorique ainsi que le divalproate qui est cependant préféré au lithium dans les état mixtes, dysphoriques et les symptômes psychotiques. Dans la pratique quotidienne, cet « idéal thérapeutique » est difficile à réaliser, en particulier du fait des délais d’efficacité des thymorégulateurs qui obligent souvent le prescripteur à associer (voire à débuter le traitement par) un neuroleptique. Il est à noter que les derniers consensus parus placent l’olanzapine en monothérapie en traitement de première intention (au même titre que le lithium et le divalproate). La carbamazépine est actuellement préconisée en 2ème intention. Les neuroleptiques sont recommandés en cas de signes psychotiques. Les atypiques sont préférés aux conventionnels. En cas de critères de gravité, l’association avec un neuroleptique atypique est d’emblée recommandée. 42 En cas d’inefficacité ou d’efficacité insuffisante un 2ème thymorégulateur peutêtre ajouté. Cependant, un délai d’attente de 1 à 3 semaines en cas d’inefficacité et de 2 à 4 semaines en cas d’efficacité partielle est recommandé. Pour les patients aux antécédents dépressifs sévères, les experts préconisent une bi thérapie par lithium / divalproate ou l’association du thymorégulateur à un antidépresseur au long cours (2ème intention). Les neuroleptiques sont progressivement diminués après la phase aiguë, mais les consensus précisent que « certains patients peuvent bénéficier d’un traitement sur le long terme » (24), sans que ces patients soient clairement définis. C’est encore les neuroleptiques atypiques qui sont préférés, ou les formes à action prolongée en cas d’inobservance. - Rechute maniaque : La stratégie est la suivante : - Optimiser le thymorégulateur déjà en place - Ajouter un 2ème thymorégulateur ou un traitement adjuvant (neuroleptique ou benzodiazépine) - Si une bithérapie est déjà en place, associer un traitement adjuvant. c)- Traitement de l’accès dépressif : (cf. tableau n° V et figure n°3) La phase dépressive dans le trouble bipolaire est souvent plus longue et plus sévère en terme de retentissement socioprofessionnel que les phases maniaques. Les risques suicidaires y sont élevés. 43 - Chez un patient ne prenant pas de thymorégulateur : Le traitement de choix est un thymorégulateur en monothérapie. L’antidépresseur est recommandé dans les accès sévères ou résistants. Les symptômes psychotiques nécessitent l’ajout d’un neuroleptique (de préférence atypique). Pour le choix de l’antidépresseur, ce sont les IRS qui doivent être privilégiés. Les tricycliques sont les moins recommandés par les experts, mais peuvent avoir un rôle dans les formes sévères. La durée de prescription des traitements adjuvants (antidépresseurs ou neuroleptiques) est de 2 à 6 mois, avec une diminution progressive afin d’éviter les rechutes. Cependant, 25 % des experts préconisent le maintien de l’antidépresseur au long cours, certains patients récidivant dès leur arrêt. - Rechute dépressive sous thymorégulateur : La stratégie est la suivante : - Optimisation du thymorégulateur en place - Ajout d’un 2ème thymorégulateur (en particulier dans les cycles rapides) ou d’un antidépresseur - Electroconvulsivothérapie dans les formes sévères ou résistantes. Il est à préciser que la recherche d’un facteur déclenchant est une étape essentielle, avec en particulier recherche d’une mauvaise observance du traitement. d)- Prise en charge du cycle rapide : (cf. tableau n° V) Le Divalproate est le traitement de première intention dans la phase maniaque et la phase dépressive. Le lithium et la carbamazépine sont un traitement de 2ème intention. Dans les phases dépressives, un antidépresseur peut éventuellement être ajouté en cas d’échec du thymorégulateur. 44 Conclusion : Les consensus d’expert sont une aide importante dans la prise en charge thérapeutique du trouble bipolaire et ils ont le mérite de faire le point sur les nouvelles stratégies thérapeutiques et les nouvelles molécules disponibles. Cependant, on peut émettre quelques critiques : - Les stratégies préconisées ne reposent pas toujours sur des preuves validées (cf. tableau n° VI), en particulier en ce qui concerne l’association de plusieurs thymorégulateurs qui n’a jamais fait l’objet d’études sur le long terme. - La définition des patients nécessitant des traitements « adjuvants » (antidépresseurs ou neuroleptiques) en phase aiguë ou au long cours reste imprécise. - Ce sont des outils « théoriques » et ne sont pas applicables à tous les cas de figures. Dans le chapitre suivant, nous nous proposons de voir les contrastes entre ces principes théoriques et la pratique clinique, en prenant pour exemple la place des neuroleptiques. 45 Tableau n° IV : Les principaux thymorégulateurs : (16,17) Lithium Propriétés TR confirmée par Dates d’utilisation Schou en 1953 Utilisé dans le TB depuis les années 1970 Indications Traitement curatif manie Traitement préventif du trouble bipolaire et psychoses dysthymiques Limites :cycles rapides états mixtes, abus toxiques Carbamazépine Dérivés valproïques Synthétisé par Schindler en 1953 Utilisé dans TB depuis 1975 Traitement curatif manie Traitement préventif du TB en cas de contre indication ou inefficacité du lithium Préconisé dans cycles rapides 1 à 2 semaines Valpromide utilisé depuis 1970 Divalproate depuis 2000 Valpromide : prévention TB, états d’agressivité Divalproate : accès maniaque en cas de contre indication au Lithium Délai d’action Contre indications 2 semaines 1 à 2 semaines Non-collaboration du patient, Insuffisance cardiaque décompensée Coronaropathie sévère Certains troubles du rythme, grossesse, insuffisance rénale, régimes hypo ou désodés Allergie à la molécule Grossesse, allaitement BAV, glaucome, adénome prostate IMAO Atteinte hépatique Déconseillé en cas d’allaitement, 1er trimestre grossesse (anomalies tube neural) Effets indésirables Neurologiques : tremblements des extrémités, ralentissement idéique Diarrhée, douleur abdominale Prise de poids Sd polyuropolydypsique Insuffisance thyroïdienne, goître Neurologiques : somnolence, ataxie, vertiges, diplopie, céphalées Troubles atropiniques (sécheresse buccale, constipation,…) Syndrome de Lyell Troubles hématologiques (neutropénie, thrombopénie, aplasie) Hyponatrémie, chute des cheveux Bonne tolérance neurologiques : sédation, hyotonie, confusion Troubles digestifs Prise de poids Céphalées, Troubles menstruels Chute des cheveux, tremblements Rares thrombopénies Syndrome de Lyell (++ avec lamotrigine) Carbamazépinémie supérieure à 12 ug/mL Signes : agitation motrice, tremblements, ataxie, troubles conscience, troubles cardiovasculaires Interactions Associations AINS, IEC, Diurétiques, Médicamente Neuroleptiques (augmentation médicamenteuses +++ Diminution activité des lithiémie) uses contraceptifs oraux, Carbamazépine (neurotoA éviter anticoagulants, xicité) corticoïdes, clonazépam, ciclosporine. Risque surdosage avec : vérapamil, diltiazem, IRS, érythromycine, isoniazide. Augmentation Carbamazépinémie avec dextropropoxiphène, valproate, valpromide Risque neurotoxicité en association avec lithium BH Bilan NFS, plaquettes NFS, plaquettes Ionogramme sang. préthéraBHCG, clairance créatinine, ECG peutique BHCG protéinurie TSHus ECG, EEG Surveillance Lithiémies 1/mois 1ère année BH, NFS, Carbamazépinémie / 3 à 6 mois puis 1 / trimestre ttt Dosage: 0,7 à 1 mmol/L Bilan rénal, thyroïdien 1 fois/ an Tégrétol LP® à 200 et Téralithe® 250 mg Formes 400mg Téralithe LP® 400mg Tégrétol ® 200mg Neurolithium® amp de 5 et Tégrétol® suspension 10 mmol 100mg/mes Posologies : 900 à 2100 mg/j +/- 300 600 à 1400 mg/j +/- 200 Surdosage dosages sanguins : Surdosage : Lithiémie supérieure à 1,2 meq/L Tremblements,troubles digestifs, confusion, coma, risque de séquelles cérébelleuses 0,5 à 0,8meq/L pour formes à 5 à 10 ug/mL libération immédiate 0,8 à 1,2meq/L pour forme LP Lithiémie globulaire : 0,2 à 0,4 meq/L Acide valproïque supérieur à 120 ug/mL Signes : coma calme, hypotonie, hyporéflexie Potentialise les psychotropes et l’alcool Diminution seuil épileptogène avec tricycliques BH NFS, plaquettes BHCG NFS et BH réguliers Valpromide : Dépamide® Divalproate : Dépakote® Valpromide : 600 à 1200 mg/ j Divalproate : 750 à 2750 mg/j Acide valproïque : 59 à 120 ug/mL 47 Tableau n° V : Traitements de première intention dans le trouble bipolaire : (24) Manie euphorique ou hypomanie Etat mixte ou manie dysphorique Manie avec signes psychotiques Dépression modérée Dépression sévère Manie ou dépression dans un cycle rapide Lithium ou divalproate Divalproate Divalproate ou lithium et antipsychotique (atypique ou conventionnel) Lithium Lithium ou divalproate et antidépresseurs +/- antipsychotique si délire Divalproate Tableau n° VI : Traitement au long cours du trouble bipolaire et niveaux de preuve (19) Niveau de preuve Options validées Preuves venant de nombreuses études contrôlées (niveau de preuve élevé) Possible efficacité, utilisation large en pratique clinique, niveau de preuve limité Faible niveau de preuve Expérimental en monothérapie Niveau de preuve limité en traitement adjuvant Options thérapeutiques Sels de lithium Carbamazépine Acide valproïque Antagonistes calciques Anticonvulsivants : lamotrigine, gabapentine, topiramate Hormones thyroïdiennes Neuroleptiques atypiques : clozapine, olanzapine, risperidone Figure n° 2 :Traitement de la manie en phase aiguë selon consensus de l’APA (2000) (23,24) Traitement de la manie Euphorique Mixte Dysphorique Li ou Dvp Dvp Psychotique Dvp ou Li + Aap ou Cap Ajout BZD Ajout Aap Change Ap ou ajout BZD Dvp ou Li Dvp + Li CR (manie) Dvp Ajout Li ou Cbz Ajout AAp Dvp+Li+Cbz Changer Aap changer Ap ou Aap + CAp Dvp + Li + Cbz * Clz * Lmg ECT * Gbp Symptômes Résiduels atténués Symptômes résiduels sévères ECT Gbp ou Tpr Dvp + Li + Cbz ou ajout Clz * Gbp ou Tpr * ECT * Tpr ou T4 ou inhib. chaines De calcium Clz ou Gbp Ou Tpr Légende : Aap neuroleptique atypique Ad antidépresseur Ap neuroleptique Bzd benzodiazépine CZp neuroleptique conventionnel Cbz carbamazépine Clz clozapine Dvp divalproate ECT électroconvulsivothérapie Gbp gabapentine Lmg lamtrigine Li lithium T3 triiodothronine T4 L-thyroxine Tpr topiramate * L’association Cbz / Clz est à éviter. Lorsqu’un traitement de deuxième intention est associé, il convient d’interrompre au moins l’une des médications précédentes. Remarque : Dans l’hypomanie, les recommandations sont les mêmes que dans la manie avec euphorie. L’utilisation des antipsychotiques y est cependant moins fondée. Figure n°3 : Traitement de la dépression bipolaire en phase aiguë selon consensus de l’APA (2000) (23,24) Traitement de la dépression bipolaire En dehors de cycle rapide et D psychotique*, au moins 1 épisode maniaque 1er épisode dépressif pas de traitement Cycle rapide épisode dépressif Récidive dépressive Dvp Modéré Sévère Li Li + Ad Sous Li Sous Dvp Li + Dvp + Ad Optim. Li Optim. Dvp Ajout Li si sous Dvp Ajout Dvp ou Lmg ou Ad Ajout Li Ajout Ad ou Lmg Ajout ou change Ad Ajout Li ou Cbz ou Lmg Ajout Ad Aug. cycles arrêt ou Changer Ad T4 ou AAp Réponse partielle Ajout Dvp Ou Lmg Changer Ad T3 ou T4 ou AAp Pas de réponse Change Ad Ajout Dvp ou Lmg Change Ad Persistance Dépression Proposer ECT Si sévère T3 Autres thymorégulateurs AAp Clz, photothérapie ou stimulant * Pour les dépression psychotiques, ajouter Aap au traitement initial Gbp ou Clz Gbp ou Clz ou photothérapie Proposer ECT 50 DEUXIEME PARTIE : LA PLACE DES NEUROLEPTIQUES DANS LE TRAITEMENT D’ENTRETIEN DU TROUBLE BIPOLAIRE. REVUE DE LITTERATURE. 51 Introduction : Avant l’introduction du lithium, les neuroleptiques étaient l’un des principaux agents disponibles dans le traitement de l’accès maniaque et le traitement d’entretien du trouble bipolaire (25). Les autres agents utilisés étaient les antidépresseurs, les barbituriques, et l’électroconvulsivothérapie (26). Aujourd’hui, comme on l’a vu dans le chapitre précédent, les guidelines réservent leur utilisation aux accès aigus de la maladie et aux formes résistantes, en privilégiant les neuroleptiques atypiques du fait des moindres effets indésirables. Cependant, dans la pratique, les traitements neuroleptiques sont souvent prolongés bien au-delà des phases aiguës (26). Nous nous proposons de voir dans ce chapitre : - Quelle est la place en pratique des neuroleptiques dans le traitement d’entretien du trouble bipolaire, - Quels sont les éléments qui expliquent leur prescription au long cours, - Quel est l’intérêt thérapeutique et quels sont les inconvénients des neuroleptiques conventionnels et des antipsychotiques dans cette indication, d’après les études récentes. I- La place des neuroleptiques dans le trouble bipolaire , en pratique clinique : 1- Une fréquence élevée d’utilisation (27,28,29,30,31) Plusieurs études, menées par des équipes différentes et dans des pays différents, ont retrouvé des taux élevés de prescription de neuroleptiques en traitement au long cours de patients bipolaires. Les études ont toutes été conduites avant l’arrivée des antipsychotiques (ou 52 de leur utilisation plus large) et portent donc essentiellement sur les neuroleptiques conventionnels. Les taux de prescription de ces molécules varient de 37% à 95% selon les études (cf. tableau n° VII). ► Tohen et al (32) ont publié en 2001 une méta-analyse de 16 études conduites entre 1980 et 1997 regroupant au total 2378 patients bipolaires (cf. tableau n°7). Parmi ceux-ci, 84,7 % recevaient un traitement par neuroleptiques conventionnels (95% IC : 83,5-86%). Le pourcentage de patients recevant des neuroleptiques seuls ou en association avec un thymorégulateur était sensiblement équivalent (53,8% versus 47,4%). Le pourcentage était plus élevé chez les patients hospitalisés que chez ceux suivis en ambulatoire (90,7% contre 65,3%). Ces résultats élevés étaient attendus chez les patients hospitalisés du fait de la fréquence des accès maniaques sévères, par contre, chez les patients suivis en ambulatoire, le taux de 65,3 % est apparu surprenant. Les auteurs émettaient l’hypothèse qu’en plus de l’intolérance ou de l’inefficacité du lithium, cette prescription élevée de neuroleptiques pouvaient correspondre à la poursuite inappropriée du traitement efficace au-delà de la phase aiguë. L’association fréquente des neuroleptiques aux thymorégulateurs semble suggérer que la monothérapie par lithium est parfois inadaptée ou insuffisante pour beaucoup de patients. Enfin, la durée minimale moyenne de traitement était de 2,5 mois, ce qui suggère que les neuroleptiques sont fréquemment utilisés au-delà de la phase aiguë. ► Serniak et al (30), dans une étude menée en 1997, ont montré que, même à distance d’une hospitalisation (le critère d’inclusion des patients étant l’absence d’hospitalisation dans l’année précédant l’étude), le taux de prescription restait élevé (67%). 53 Tableau n° VII : Fréquence d’utilisation des neuroleptiques en traitement d’entretien du trouble bipolaire (25,26,27,28,29,30,31) Etude Année Tohen (26) Sachs (28) Serniak (27) Verdoux (29) 1990 1990 1994 1996 Nombre de patients 75 215 40 222 Keck, Mc Elroy (25) Serniak (30) 1996 77 1997 49 Denicoff et al (31) Tohen (32) 2000 70 2001 Méta analyse de 16 études entre 1980 et 1997 N = 2378 Durée 4 ans 6 mois Echantillon de patients ambulatoires 6 mois N’ayant pas eu d’hospitalisation depuis 1 an Durée moyenne = 3,9 ans Pourcentage de neuroleptiques 46% à 4ans 37% 95% 67% 66% 67% 64,3% 84,7% 2- Les facteurs associés à la prescription de neuroleptiques au long cours : Plusieurs auteurs ont tenté de déterminer les facteurs associés à une prescription plus fréquente de neuroleptiques dans le traitement d’entretien du trouble bipolaire. ► Keck et al (25) ont identifié plusieurs facteurs associés au maintien du traitement neuroleptique après un épisode aigu maniaque ou mixte : - La non observance du traitement durant le mois précédent l’hospitalisation, - Une symptomatologie maniaque plus grave, - La prescription de neuroleptique à la sortie d’hospitalisation, - Le sexe masculin. 54 Leur étude retrouvait par ailleurs une augmentation significative de l’observance thérapeutique après 6 mois de suivi chez les patients recevant des neuroleptiques par rapport à ceux qui n’en recevaient pas. ► Denicoff et al (31) ont retrouvé que les facteurs associés à la prescription de neuroleptiques chez des patients suivis en ambulatoire étaient: - Le trouble bipolaire de type I par rapport au trouble bipolaire de type II - Un nombre plus élevé d’hospitalisations pour accès maniaque avant l’étude - Une prescription déjà plus importante des neuroleptiques avant l’étude Ces facteurs étaient également associés à des doses plus fortes et des durées plus longues de traitement. ► Enfin, Verdoux et al (29) ont retrouvé que la « sur-prescription » de neuroleptiques dans le traitement d’entretien du trouble bipolaire ne se faisait pas de manière aléatoire. Les paramètres cliniques associés à leur plus grande fréquence de prescription étaient : - La présence de symptômes psychotiques au cours de l’évolution de la maladie, - Un âge de début précoce (avant 25 ans), - Un niveau d’étude bas. L’importance de prescription des neuroleptiques semblait donc associée dans cette étude à des caractéristiques cliniques sévères de la maladie et à un pronostic défavorable. Au total, la prescription de neuroleptiques au long cours dans le trouble bipolaire semble donc être une pratique courante. Quelques études ont montré que cette prescription était associée à un certain nombre de facteurs. On peut retenir en particulier, et bien que les résultats ne se recoupent pas toujours : - Les facteurs de gravité clinique (présence de symptômes psychotiques, accès maniaques plus sévères ou plus nombreux), 55 II- - La non observance thérapeutique, - La poursuite (inappropriée) du traitement prescrit en phase aiguë. Les neuroleptiques conventionnels : 1- Une efficacité non démontrée dans le traitement d’entretien du trouble bipolaire : Les neuroleptiques conventionnels ont démontré leur efficacité dans le contrôle des symptômes psychotiques et de l’agitation psychomotrice, souvent présents dans les phases aiguës de la maladie. En plus de leurs propriétés antipsychotiques, les études leur suggèrent un rôle antimaniaque. De plus, leur délai d’action est plus rapide que celui du lithium. Cependant, aucune étude n’a prouvé leur efficacité dans le traitement prophylactique du trouble (26).Les études évaluant les effets thérapeutiques des neuroleptiques dans le trouble bipolaire sont essentiellement des études ouvertes (33). Il n’existe qu’une étude en double aveugle menée par Esparon et al en 1986 (cf tableau n°VIII). Au total, les données scientifiques concernant l’intérêt des neuroleptiques dans le traitement d’entretien du trouble bipolaire sont rares et contradictoires. On peut retenir de ces études (25,34,35,36) : 1- Quelques études ouvertes suggèrent une efficacité des neuroleptiques injectables dans la prévention des rechutes (Naylor et Scott, 1980 ; Lowe, 1985 ; Littlejohn (34), 1994). Cet effet préventif serait plus marqué pour les phases maniaques (Ahlfors et al, 1981) et chez les patients présentant des cycles rapides (Lowe, 1985), 56 2- Les neuroleptiques étudiés sont tous sous forme injectable. Les auteurs soulignent que l’apparente plus grande efficacité de ces traitements retard peut être attribuée à une mauvaise observance du traitement précédant l’étude, 3- Enfin, les deux études prospectives et comparatives évaluant le flupenthixol décanoate (Ahlfors et al, 1981 ; Esparon et al, 1986) n’ont pas retrouvé de bénéfice thérapeutique significatif. 57 Tableau n° VIII : Etudes évaluant l’efficacité des neuroleptiques au long cours dans le trouble bipolaire : (25,33,36,37) Auteurs Année, type d’étude Molécule, dose Naylor et Scott (33) 1980 rapport de cas Flupenthixol IM 20mg/2sem ou fluphénazine 12,5mg/2sem Soit flupenthixol déc. 20mg/3sem Soit lithium Ahlfors et al 1981 étude ouverte, (25) randomisée, comparative et multicentrique Ahlfors et al 1981 étude (25) comparative Lowe et al (33) 1985 rapport de cas Flupenthixol 20mg/3sem N = 93 bipolaires réfractaires ou intolérants au lithium Durée : 18 mois Haldol décanoas® 100 à 400mg/mois N = 5 bipolaires cycles rapides résistants aux neuroleptiques per os et au lithium N = 15 bipolaires traités par lithium + neuroleptiques pendant 1 an puis lithium + placebo injectable pendant 1 an Flupenthixol Esparon et al 1986 étude en double 20mg/mois (25) aveugle (la seule) Littlejohn et 1994 étude ouverte al (34) Nombre et caractéristiques des patients N = 5, résistants au lithium +/- association au lithium N = 33 Durée : 18 mois NLP injectables N = 18 Durée moyenne : (Flupenthixol, 8,2 ans halopéridol, zuclopenthixol) Résultats Absence de réhospitalisation dans les 5 cas, rechute à l’arrêt dans 4 cas Pas d’amélioration significative entre la période avec neuroleptiques et la période antérieure Pas d’amélioration globale sur fréquence et durée des rechutes entre période sans et période avec neuroleptiques Moins d’accès maniaques sous neuroleptiques mais plus d’accès dépressifs Pas de ré-hospitalisation sur 36 mois Diminution du nombre de jours d’hospitalisation durant les 2 ans de l’essai / 2 ans précédents Sans différence significative entre période avec et sans neuroleptiques Diminution significative du temps d’hospitalisation pour manie, dépression et état mixte 58 2- Effets indésirables des neuroleptiques conventionnels : (37) Les neuroleptiques classiques induisent de nombreux effets secondaires, en particulier du fait de leur effet antidopaminergique par blocage des récepteurs D2. a)- Effets secondaires neurologiques : (37) - Les dyskinésies aiguës, mouvements involontaires, paroxystiques, souvent impressionnants et angoissants pour le patient. Ils intéressent la tête et l’axe du corps : crise oculogyre avec plafonnement du regard, protraction de la langue, trismus, torticolis spasmodique, spasmes de la musculature axiale. Elles apparaissent le plus souvent dans les premiers jours de traitement avec des doses souvent minimes. Elles nécessitent l’injection en urgence d’un antiparkinsonien. - Le syndrome d’imprégnation neuroleptique : il s’agit d’un tableau fréquent de type parkinsonien, responsable de la présentation caractéristique d’un certain nombre de patients. Il comporte un tremblement des extrémités gênant l’exécution des gestes fins, une akinésie avec inexpressivité de la mimique, un ralentissement gestuel global, une hypertonie mise en évidence par la recherche d’une roue dentée, et parfois des manifestations hyperkinétiques : impatiences motrices, akathisie (impossibilité de rester couché ou assis), tasikinésie (besoin impérieux de mouvement). Des accidents neurologiques tardifs peuvent également survenir au cours de traitements neuroleptiques prolongés : dyskinésies de la région buccofaciale, de la musculature axiale et des membres inférieurs. Les dyskinésies tardives et les effets indésirables parkinsoniens semblent plus fréquents chez les patients bipolaires traités par neuroleptiques que chez les patients schizophrènes. 59 b)- Les effets neuropsychiques : - Somnolence diurne, - Création possible d’un état d’indifférence psychomotrice avec retard de réponse aux stimulations extérieures, diminution de l’initiative et des préoccupations. Ce « syndrome de passivité » s’intrique chez les schizophrènes au repli autistique, ou peut mimer une symptomatologie de repli autistique chez des patients bipolaires et donc fausser le diagnostic. Ces effets secondaires cognitifs et moteurs sont particulièrement mal vécus chez des patients qui, entre les accès, sont le plus souvent indemnes de toute symptomatologie, - Effet dépressiogène : déjà noté chez les patients schizophrènes, l’utilisation prolongée des neuroleptiques conventionnels pourrait également précipiter, chez le patient bipolaire, la survenue de symptômes dépressifs après épisode maniaque et augmenter la fréquence des épisodes dépressifs sur le long terme (26,39). c)- Autres effets indésirables : - Hypotension orthostatique, - Effets endocriniens avec prise de poids, aménorrhée, galactorrhée, - Troubles sexuels avec diminution de la libido, impuissance, - Photosensibilisation, - Syndrome malin des neuroleptiques, exceptionnel mais grave, imposant des mesures de réanimation et l’arrêt du traitement, - Leucopénie, - Troubles de la conduction cardiaque. 60 Au total : Ainsi, bien que très souvent prescrits dans le traitement d’entretien du trouble bipolaire, les neuroleptiques conventionnels n’ont pas apporté la preuve réelle de leur efficacité sur le long terme. De plus, ces traitements possèdent des effets secondaires non négligeables, gênant la qualité de vie et les compétences sociales des patients. Il apparaît de plus que le risque de dyskinésies tardives et de syndrome parkinsonien, deux des effets indésirables particulièrement invalidants, sont plus fréquents chez les patients bipolaires traités par neuroleptiques conventionnels que chez les patients schizophrènes. Tous les auteurs s’accordent actuellement pour dire que l’utilisation de ces neuroleptiques classiques dans le trouble bipolaire doit être limitée. Les nouveaux antipsychotiques, qui entraînent moins d’effets indésirables, pourraient constituer une alternative. III- Neuroleptiques atypiques : 1- Présentation : (40) Les antipsychotiques de nouvelle génération diffèrent des neuroleptiques classiques par leur plus grande affinité pour les récepteurs sérotoninergiques de type 2 (5HT2) que pour les récepteur D2. Ils occupent moins de 80% des récepteurs D2 du striatum, mais plus de 80% des récepteurs 5HT2 du cortex. Ce rapport d’affinité élevé 5-HT2 / D2 a l’avantage de diminuer le risque d’effets indésirables de type parkinsonien. Par opposition aux neuroleptiques conventionnels qui perturbent la fonction motrice aux doses efficaces, les neuroleptiques « atypiques » entraînent moins d’effets indésirables extrapyramidaux et moins de dyskinésies tardives. Ils ont prouvé leur efficacité dans le traitement 61 des symptômes positifs et négatifs de la schizophrénie, mais semblent également efficaces sur certains troubles affectifs (dépression) dans cette maladie. Une autre propriété importante des antipsychotiques est qu’ils n’entraînent pas de trouble de la cognition, ce qui permettrait une meilleure tolérance du traitement sur le long terme par rapport aux neuroleptiques conventionnels. Chez les patients schizophrènes, il semble même exister une amélioration de la mémoire, de l’attention et de l’apprentissage verbal (40). Depuis l’introduction de ces molécules, de nombreuses études ont évalué leur efficacité dans le trouble bipolaire. Cependant, la plupart sont des études ouvertes ou portant sur les accès aigus du trouble. Il n’existe que peu d’études sur le long terme, et une seule en double aveugle évaluant l’efficacité prophylactique. Les molécules actuellement disponibles sont la clozapine (Léponex®), et ses apparentés, la rispéridone (Risperdal®) et l’olanzapine (Zyprexa®). D’autres molécules sont en cours d’évaluation : la quietapine, la ziprasidone,… 2- Evaluation de l’efficacité en fonction des molécules : a)- Clozapine (Léponex®): L’intérêt de la clozapine dans le traitement des troubles thymiques a été signalé dès les années soixante dix (41). Elle a été réintroduite depuis une dizaine d’années. Frye et al (42), dans leur revue de littérature, mentionnent plusieurs études rétrospectives, ouvertes ou des rapports de cas évaluant son efficacité. Les résultats suggèrent : 1) Une meilleure réponse à la clozapine des patients bipolaires et schizoaffectifs que schizophrènes, 2) Une efficacité en monothérapie dans les épisodes aigus du trouble bipolaire, en particuliers maniaques et résistants aux autres traitements, 62 3) Un effet stabilisateur de l’humeur et préventif des accès maniaques et dépressifs chez les patients résistants aux autres traitements. Les doses optimales pour les patients bipolaires n’ont pas été établies. La posologie moyenne dans les différentes études est de 315 mg/j. ► Suppes et al (43) ont comparé, dans un essai ouvert randomisé, l’efficacité de la clozapine en tant que traitement adjuvant au traitement habituel (thymorégulateurs et neuroleptiques classiques). Cette étude concernait 38 patients bipolaires ou schizoaffectifs résistants au traitement, tous avec des antécédents d’accès maniaque. Après un an de suivi, une amélioration significative a été observée chez les patients recevant en plus de leur traitement habituel de la clozapine. Au total : Malgré l’absence d’études contrôlées, l’efficacité de la clozapine dans les troubles bipolaires résistants aux autres traitements paraît incontestable. Cependant, le risque d’agranulocytose (de 0,8%) (44) et la nécessité d’une surveillance biologique rapprochée limite son utilisation. La clozapine ne possède pas, à ce jour, l’AMM en France dans le trouble bipolaire. b)- Rispéridone (Risperdal®) : (cf. tableau n° IX) Dans les accès aigus: ► Plusieurs études en double aveugle (1 en monothérapie et 2 en association avec thymorégulateur) suggèrent l’efficacité de la risperidone dans le traitement de l’accès maniaque, avec ou sans symptômes psychotiques (45). La rispéridone s’est montrée aussi efficace en monothérapie que le lithium ou l’haloperidol chez 45 patients présentant un accès maniaque dans l’étude de Segal et al en 1998 (45). 63 ► Deux autres études en double aveugle de 3 semaines comparant la rispéridone ou l’halopéridol au placebo en tant que médicaments adjuvants au traitement habituel sont disponibles. Dans le premier essai (Yatham, 2000), le traitement habituel était soit le lithium, soit le valproate ou la carbamazépine. Le changement de score à l’échelle YMRS, entre le moment de référence et le terme de l’essai, ne diffère pas de façon significative entre le groupe de la rispéridone et le groupe du placebo (- 14,5 versus - 10 ,5 ; p=0,098). Ceci pourrait s’expliquer selon les auteurs par la diminution des concentrations sériques de rispéridone chez les patients recevant également de la carbamazépine. Le nombre de patients ayant répondu au traitement (score YMRS diminuant de 50% entre le moment de référence et le terme de l’étude) est beaucoup plus élevé dans le groupe de la rispéridone que dans le groupe du placebo (58,8% versus 41,7% ; p inférieur à 0,05). Dans le second essai clinique (46) comparant la rispéridone, l’halopéridol et le placebo en tant que médicaments adjuvants à un thymorégulateur (lithium ou divalproate), il a été retrouvé une amélioration significative des scores YMRS et du nombre de patients répondeurs avec la rispéridone ou l’halopéridol, ceci dès la première semaine de traitement. Dans le traitement d’entretien : ► Il n’existe pas d’études contrôlées évaluant l’efficacité et la tolérance de la rispéridone sur le long terme. ► Vieta et al (47) ont suivi sur 6 mois 541 patients bipolaires ou schizoaffectifs, présentant une décompensation maniaque, hypomaniaque, mixte ou dépressive dans une étude ouverte multicentrique. La rispéridone était ajoutée au traitement thymorégulateur antérieur. Elle a permis une amélioration significative des symptômes maniaques dès la première semaine de l’étude (échelle YMRS : 25,6 à 2,4 à 6 mois), et une amélioration significative des symptômes dépressifs dès la 1ère semaine (HAM-D de 12,8 à 4,1 à 6 mois). Elle est bien tolérée : pas d’augmentation des effets secondaires parkinsoniens et des dyskinésies tardives, pas d’exacerbation des symptômes maniaques ou dépressifs (contrairement à certains antidépresseurs et certains neuroleptiques). 64 La rispéridone pourrait donc avoir des propriétés thymorégulatrices, mais d’autres études sont nécessaires pour confirmer ces résultats. De plus, la rispéridone présenterait un avantage sur la qualité de vie par rapport aux neuroleptiques conventionnels. Les effets secondaires retrouvés sont : - Une prise de poids modérée (en moyenne de 4 kg), comparable à celle des neuroleptiques classiques. Le risque d’induire un diabète de type 2 est inférieur à celui de l’olanzapine et de la clozapine (40), - Un risque d’augmentation de la prolactinémie supérieur à celui des autres neuroleptiques atypiques et quasi comparable à celui des neuroleptiques conventionnels, - Les autres effets indésirables notés sont peu nombreux (47) : somnolence, dysarthrie, risque de virage maniaque évoqué, mais non confirmé par les études récentes sur le long terme. Au total : La rispéridone semble aussi efficace, en monothérapie, que l’halopéridol ou que le lithium dans l’accès maniaque aigu et a une action rapide (inférieure à une semaine). En tant que traitement d’appoint en association avec un thymorégulateur, elle semble plus efficace que le placebo. Cependant, des études randomisées en double aveugle sur le long terme sont nécessaires afin d’évaluer son efficacité et sa tolérance dans le traitement d’entretien du trouble bipolaire. Un essai ouvert suggère néanmoins de possibles propriétés antidépressives et un effet protecteur sur les symptômes maniaques et dépressifs. 65 Enfin, cette molécule est facile d’utilisation et présente peu d’effets indésirables, en particuliers neurologiques à des doses inférieures à 5 mg/j. La rispéridone ne possède pas, à ce jour, d’AMM dans le trouble bipolaire. 66 Tableau n° IX: des études concernant l’efficacité de la risperidone dans le trouble bipolaire : (45,46,47) Auteurs Année, Type d’étude Molécule, dose 1998 étude double aveugle Yatham 2000 étude double aveugle .Rispéridone 6mg/j comparée à halopéridol ou lithium, en monothérapie .Rispéridone ou placebo + TR 2000 étude double aveugle Rispéridone ou Halopéridol ou placebo + TR Segal, Berk (45) Sachs (46) Vieta et 2001 essai ouvert al (47) R : Rispéridone Risperidone à dose moy de 3,9 mg/j Ajoutée au traitement TR antérieur H : Halopéridol Durée Nombre et Résultats caractéristique des patients 4 semaines N = 45, accès .R. aussi efficace maniaque que Li ou H. en monoth. : YMRS -16,2 pour R. -14,6 pour H. -12,7 pour Li .Amélioration 3 semaines N = 150, significative du maniaques + 10 score YMRS avec avec ou sans semaines rispéridone, en d’extension symptômes excluant patients psychotiques en essai sous carbamazépine ouvert qui diminue concentration en rispéridone .Amélioration dès la 1ère semaine Amélioration 3 semaines N = 150 significative du suivie 10 score YMRS avec semaines rispéridone et d’extension halopéridol en essai ouvert .Efficacité dans le 6 mois N = 541, traitement et la patients prévention des bipolaires et schizoaffectifs symptômes maniaques et de type dépressifs sur 6 mois bipolaires, ayant épisode .25% de rechute sous rispéridone maniaque, hypomaniaque, .Pas de dyskinésie tardive mixte ou 2% d’exacerbation dépressif maniaque 67 c)- Olanzapine (Zyprexa®): (45) Dans les accès aigus : (cf. tableau n° X) ► L’olanzapine est le 1er antipsychotique ayant l’AMM en France dans le traitement de l’accès maniaque. De nombreuses études ont évalué son efficacité. ► C’est le seul antipsychotique ayant été comparé à un placebo dans l’accès maniaque aigu, dans deux essais cliniques en double aveugle, menés par le même groupe (48,49). Dans ces deux études, l’olanzapine apportait une amélioration significative dans le score YMRS, ceci à la fois dans les accès maniaques psychotiques et non psychotiques et dans les accès mixtes. Quant aux effets indésirables parkinsoniens, aucun écart n’était constaté entre les groupes de l’olanzapine et du placebo. ► L’efficacité de l’olanzapine en monothérapie a également été comparée au lithium (étude de Berk) et au divalproate (50), dans l’accès maniaque aigu. Dans l’étude de Berk, l’olanzapine et le lithium sont d’efficacité comparable. Dans l’étude de Tohen, comparé au divalproate, l’amélioration des symptômes maniaques a été significativement supérieure avec l’olanzapine et a permis d’obtenir une rémission chez une proportion significativement supérieure de patients. La prise de poids (2,5 kg vs 0,9), la sécheresse de bouche, l’augmentation de l’appétit et la somnolence ont été significativement plus fréquents sous olanzapine, tandis que les nausées ont été plus fréquentes sous divalproate. Les deux produits ont été bien tolérés et il n’existait pas de différence significative de survenue d’effets indésirables extra-pyramidaux entre les deux produits. ► Enfin, comparativement à une monothérapie par divalproate ou lithium, l’adjonction d’olanzapine a permis d’augmenter l’efficacité du traitement des épisodes maniaques et mixtes dans le trouble bipolaire (51). Dans le traitement d’entretien : (cf. tableau n° X) En ce qui concerne le long terme, là encore, les études sont peu nombreuses. 68 ► Une des études en double aveugle comparant l’olanzapine au placebo (45,44) a été prolongée par un essai ouvert sur 49 semaines. Parmi les 113 patients de l’essai, 41% ont reçu l’olanzapine en monothérapie. Bien que non comparative, cette étude suggère l’efficacité de l’olanzapine, soit en monothérapie, soit en association au lithium et/ou à la fluoxétine, dans la prévention des accès maniaques et dépressifs. De plus, cette étude suggère une bonne tolérance du produit, avec en particulier l’absence de dyskinésie tardive et l’amélioration de la cognition, ce qui est un avantage par rapport aux autres traitements actuels (lithium et neuroleptiques conventionnels). ► Enfin, l’olanzapine est la seule molécule antipsychotique ayant fait l’objet d’une étude en double aveugle dans la prévention des rechutes (52). Son efficacité et sa tolérance ont été comparées au lithium chez des patients bipolaires de type I. Un traitement associant lithium (à dose moyenne de 1003 mg/j) et olanzapine (dose moyenne de 13,3 mg/j) a été prescrit chez 543 patients présentant un épisode maniaque ou mixte (score YMRS supérieur ou égal à 20), sur une période de 6 à 12 semaines. Parmi ceux ci, 431 patients ont eu une rémission de leurs symptômes (YMRS inférieur à 12 et HAM-D 21 inférieur à 8) et ont été randomisés en deux groupes : l’un recevant de l’olanzapine en monothérapie (dose moyenne de 11,9 mg/j, N = 217), l’autre du lithium (dose moyenne de 1102,7 mg/j, niveau sérique moyen de 0,76meq/L, N = 214). La durée totale de l’étude a été de 52 semaines. Les résultats retrouvés sont les suivants : - Significativement plus de patients sous olanzapine (46,5%) ont complété les 52 semaines de l’étude que ceux sous lithium (32,7%, p =0,004), - Significativement moins de rechute sous olanzapine que sous lithium (30% versus 38,8%, p = 0,055), - Significativement moins de rechute maniaque sous olanzapine (14,3 versus 28%, p inférieur à 0,001), - Pas de différence significative sur la prévention des rechutes dépressives (16,1% versus 15,4%, p = 0,895), - Taux d’arrêt du traitement pour effets indésirables est de 18,9% pour le groupe olanzapine contre 25,7% pour le groupe lithium. La prise de poids est 69 significativement plus élevée pour le groupe olanzapine (1,76kg versus –1,38, p inférieur à 0,001). Dans cette étude, l’olanzapine s’est montrée plus efficace que le lithium dans le traitement préventif du trouble bipolaire de type I. Son action préventive semble plus efficace sur les accès maniaques que dépressifs (alors que les taux de récidives dépressives étaient semblables, les taux de récidives maniaques étaient moitié moins fréquents sous olanzapine). Les effets indésirables : - La prise de poids est l’effet indésirable majeur de cette molécule. Elle débute immédiatement et est maximale les 12 premières semaines de traitement et est en moyenne de 6,5 kg. Elle semble plus importante avec l’olanzapine qu’avec les autres neurolpetiques atypiques (40). Dans l’étude de Guille et al (53) comparant la tolérance de la clozapine, de la risperidone et de l’olanzapine chez des patients bipolaires, la différence majeure entre ces molécules était la prise de poids qui était significativement plus importante avec l’olanzapine ( + 7,2 +/- 2 kg contre 3,5 +/- 5 kg avec la risperidone, p= 0,03). Les auteurs notaient que cette prise de poids pouvait être majorée par l’association aux thymorégulateurs, en particulier le divalproate. Un régime alimentaire et la pratique d’une activité physique sont recommandés. Les complications possibles sont le diabète de type 2 et l’augmentation du risque cardiovasculaire. Enfin, cette prise de poids peut être un motif important de non observance thérapeutique. - Parmi les autres effets indésirables, on note une somnolence. L’olanzapine est contreindiquée en cas de glaucome à angle fermé. 70 Au total : En monothérapie, l’olanzapine semble plus efficace que le placebo et au moins aussi efficace que le lithium ou le divalproate dans les accès maniaques aigus. Elle semble également supérieure au lithium Dans le traitement d’entretien du trouble bipolaire de type 1, une étude en double aveugle suggère une efficacité supérieure au lithium dans la prévention des rechutes, en particulier maniaques. L’olanzapine est bien tolérée en particulier sur le plan neurologique, mais elle entraîne une prise de poids supérieure aux autres antipsychotiques, et parfois importante. Cet effet secondaire peut être source d’arrêt du traitement par les patients. Elle possède l’AMM dans le traitement de l’accès maniaque. 71 Tableau n° X : Etudes évaluant l’efficacité de l’olanzapine dans le trouble bipolaire Auteurs Année, type D’étude Tohen, Sanger (48) Tohen, Jacobs (49) Tohen, Sanger (44) V- Berk VI- Tohen (50) Tohen, Zarate (51) Tohen, Calabreze (52) Durée Nombre et caractéristiques des patients Olanzapine 3 sem N = 139, accès 1999 maniaque avec ou versus étude en sans symptôme double aveugle placebo psychotique Olanzapine 4 sem N = 110 2000 versus étude en double aveugle placebo N =113, BP1 Olanzapine 49 2001 sem +/essai ouvert extension étude associée à Li ou en double fluoxetine aveugle de 3 41% sem olanzapine seule Patients en accès 1999, double Olanzapine maniaque aveugle comparée à lithium Patients en accès 2001, double Olanzapine maniaque aveugle comparée à divalproate Olanzapine 3 sem N = 125 sous 2002, double olanzapine (5 à 20 aveugle, N = 123 sous mg/j) randomisée divalproate versus divalproate Molécule, dose 2002, 1ère étude olanzapine 52 sem comparative en double aveugle sur le long terme N = 543, BPI, ayant accès maniaque ou mixte avec score YMRS sup à 20 1ère phase de traitement par Li + olanzapine pendant 6 à 12 semaines puis N = 217 olanzapine N = 214 sous Li Résultats Efficacité sur les symptômes maniaques Efficacité sur les symptômes maniaques .88% de rémission des symptômes maniaques .25% de récidive .Amélioration des symptômes dépressifs .Pas de dyskinésie tardive Même efficacité Même efficacité .54,4% des patients sous olanzapine ont répondu au traitement versus 42,3% sous divalproate .47,2% des patients sous olanzapine versus 34,1% sous divalproate ont eu une rémission des symptômes maniaques Olanzapine supérieure au lithium dans la prévention des récidives maniaques 72 Conclusion : Les neuroleptiques de nouvelle génération ont montré une efficacité dans le traitement de l’accès maniaque aigu chez les patients bipolaires, ainsi qu’une rapidité d’action (inférieure à une semaine). Cependant, à ce jour, l’information disponible est trop peu abondante pour tirer des conclusions valables sur l’utilisation des antipsychotiques dans le traitement prophylactique de la maladie. Les neuroleptiques atypiques apportent un gain sensible en terme d’acceptabilité par rapport aux neuroleptiques conventionnels car ils entraînent moins d’effets indésirables moteurs et neuropsychologiques. De plus, ils respectent les fonctions mnésiques à long terme. Cependant leur utilisation dans le trouble bipolaire est limitée par le risque de prise de poids, de sédation, de troubles sexuels, qui peuvent souvent conduire à une non-observance. Des études contrôlées sur le long terme évaluant l’efficacité et la tolérance en particulier restent nécessaires. 73 TROISIEME PARTIE: PLACE DES NEUROLEPTIQUES DANS LE TRAITEMENT D’ENTRETIEN DU TROUBLE BIPOLAIRE, DANS LA PRATIQUE D’UN SERVICE DE PSYCHIATRIE ADULTE. OBSERVATIONS CLINIQUES 74 I- Méthodologie : Introduction : Les objectifs de cette étude de dossiers étaient de connaître la fréquence d’utilisation des neuroleptiques au long cours dans un échantillon de patients bipolaires et de repérer les raisons de leur prescription. L’enquête s’est déroulée dans un secteur de psychiatrie adulte. Nous avons inclus dans l’étude les patients diagnostiqués « bipolaires » par les psychiatres qui les suivent actuellement. Le diagnostic de bipolarité a été établi en fonction des critères de la CIM-10. Nous avons retenu 13 dossiers parmi les patients bipolaires suivis par les psychiatres du service : - 7 étaient hospitalisés au début de l’étude en hôpital complet ou en hôpital de jour ou avaient été hospitalisés dans l’année précédente ( c’est-à-dire avant avril 2002) - 6 étaient, au début de l’étude, suivis en ambulatoire au centre médicopsychologique du secteur. 1- Protocole : Pour chaque patient, nous avons établi une fiche de recueil de données comprenant 3 parties : - Les données administratives avec en particulier le régime de sécurité sociale et l’existence ou non d’une mesure de protection. - Les éléments permettant de déterminer l’évolutivité de la maladie et de l’insertion socioprofessionnelle ainsi que les facteurs de gravité du trouble. Cette partie est ellemême divisée en 3 sous-parties : 75 o Eléments biographiques, comprenant les antécédents familiaux, les antécédents personnels pouvant interférer dans l’évolution de la maladie (facteurs précipitants ou de résistance aux traitements, contre-indication thérapeutiques…) et l’évolution de l’insertion socioprofessionnelle. o L’histoire de la maladie, comprenant le délai diagnostic, les premiers diagnostics évoqués, le traitement et le mode de suivi actuel. o Les facteurs de gravité, réunis en 7 critères (cf. fiche). Ces critères sont ceux retenus par Verdoux et Bourgeois (14), c’est-à-dire : l’âge de début précoce, la comorbidité, la présence de symptômes psychotiques, l’existence de troubles de la personnalité et la notion de gravité d’épisodes antérieurs. Nous avons regroupé dans cette dernière catégorie en 2 items qui nous semblaient indicateurs de la gravité d’un épisode thymique : la fréquence des hospitalisations et les passages à l’acte. Enfin, nous y avons ajouté la qualité de l’observance thérapeutique, sachant que ce paramètre, souvent sous évalué, a un rôle pronostic non négligeable. - L’évolution globale du traitement et la place des neuroleptiques au long cours. Dans l’étude, le terme « au long cours » définit une durée de prescription des neuroleptiques supérieure ou égale à 6 mois. Cette durée a été choisie en fonction des recommandations établis par les experts. Le suivi du patient a été divisé en plusieurs grandes parties en fonction des traitements institués et des différentes phases évolutives de la maladie (phase de rémission, accélérations des cycles, modifications des diagnostics posés par les médecins prescripteurs…) Nous avons mis en avant, dans ce tableau, la place des neuroleptiques et des thymorégulateurs. Nous avons précisé pour chaque traitement son mode d’administration (per os ou injectable) ainsi que sa durée, sans préciser les doses. La rubrique « autres traitements » regroupe les traitements associés : antidépresseurs, correcteurs, anxiolytiques… Enfin, pour chaque patient, nous avons tenté de retrouver les raisons de prescription de neuroleptiques au long cours : - soit en interrogeant les psychiatres prescripteurs 76 - soit par le recueil des données consignées dans les dossiers lorsque les motifs de prescription étaient précisés - soit en rapprochant les données cliniques et les prescriptions établies. 2- Les difficultés rencontrées : - L’ancienneté de certains dossiers. Certains patients ont été suivis sur de longues périodes de temps (la plus grande durée de suivi: 45 ans), ce qui entraîne des difficultés pour récupérer les motifs de prescription : changements de médecins, le médecin prescripteur à certaines périodes du suivi n’étant pas le psychiatre actuel ; périodes d’abandon du suivi où le patient a pu consulté ou être hospitalisé dans d’autres établissements ; les modifications des « habitudes » thérapeutiques au cours du temps. - L’existence de motifs de prescription multiples pour certains patients, rendant leur interprétation difficile. - L’importance dans certains dossiers du « doute » diagnostique, en particulier entre trouble bipolaire et psychose dysthymique. Certains patients, considérés comme « bipolaires » par les médecins prescripteurs actuels ont longtemps été diagnostiqués psychotiques auparavant, ce qui souligne la difficulté de ce diagnostic différentiel. Nous avons décidé, dans ces cas « litigieux », de donner priorité au diagnostic actuellement retenu. Ces dossiers n’ont pas été écartés de l’étude parce que nous avons considéré que, dans la pratique clinique, ces difficultés diagnostiques étaient fréquentes et pouvaient intervenir dans les choix thérapeutiques. 77 Figure n°4 : Fiche de recueil de données : 1)- Données administratives Nom : Prénom : Née-le : Age actuel : Sexe : Niveau d’étude : Profession : Mesure de protection : Régime SS : 2)- Evolutivité de la maladie et de l’insertion socioprofessionnelle : Eléments biographiques : Antécédents familiaux Antécédents somatiques Situation familiale Situation professionnelle Facteurs de stress psychosociaux Histoire de la maladie : Diagnostic principal Premiers symptômes et diagnostic évoqué Délai diagnostic Suivi actuel Traitement actuel Facteurs de gravité : Age de début Fréquence et durée des hospitalisations Actes médico-légaux Symptômes psychotiques Abus de substance Trouble de la personnalité Qualité de l’observance thérapeutique 3)- Evolution globale du traitement et place des neuroleptique au long cours : Dates Fréq. des Etat clinique et Neuroleptique hospit. et diagnostic incisif durée évoqué 4)- Conclusion et commentaire Neuroleptique sédatif TR associé Autre traitement Commentaire 78 II- Observations cliniques : 1- Fiche n°1 : Mme BOU 1)- Données administratives : Nom : BOU. Prénom : Huguette Née le : 10/05/1930 Age actuel : 73 ans Sexe : F Niveau d’étude : Non précisé Profession : sans Revenus : non précisé Mesure de protection : aucune Régime SS : ALD 2)- Evolutivité de la maladie et de l’insertion socioprofessionnelle : Eléments biographiques : Antécédents familiaux Antécédents somatiques Situation familiale Situation professionnelle Facteurs de stress psychosociaux Aucuns. Parents décédés en 1975. -HTA (1984) ; trouble du rythme cardiaque depuis mai 2002 ; diabète - Mari décédé d’un IDM à domicile en déc. 1998 ; bonnes relations avec ses 3 enfants N’a jamais exercé de profession. Bonne situation sociale. Accès hypomaniaques suite à accouchement en 1957 ; EDM suite au décès de sa mère en 1975 et à vente d’un terrain en 1981 Histoire de la maladie : Début du suivi Diagnostic principal Premiers symptômes et diagnostic évoqué Délai diagnostic Suivi actuel Traitement actuel 1958 (soit 45 ans) TB de type I Accès maniaque en 1958 (28 ans) Diag. PMD dès 1958, mais notion d’hypomanie antérieurement Suivi régulier CMP Téralithe LP® 400, zoloft®, témesta® Profil évolutif : Age de début Fréquence et durée des hospitalisations Passages à l’acte Symptômes psychotiques Abus de substance Trouble de la personnalité Qualité de l’observance thérapeutique 28 ans Peu fréquentes Pas de nouvelles hospit. depuis 1981 Aucun Idées délirantes non congruentes à l’humeur lors d’un accès maniaque en 1977 (idées de persécution) Non Personnalité « sthénique » (hyperthymique ?) Bonne 79 3)- Evolution globale du traitement et place des neuroleptiques au long cours : Dates Fréq. des hospit. et durée De décembre -2 hospitalisations 1958 à 1972 de 3 sem. (1958) et 1 mois (1968), la dernière étant en HDT Etat clinique et diagnostic évoqué -Accès maniaque typique en 1958 et 1968, sans délire -Notion d’hypomanie à domicile Neuroleptique incisif -aucun -aucun - 4 EDM en 1975, 1978, juin 1981 et sept 1981 - 1 accès maniaque en 1977 avec délire non congruent - alternance EDM et hypomanie sans hospit. entre 1978 et 1981. -aucun -Récidives De septembre -Pas de nouvelle dépressives 1981 à 2003 hospitalisation -Suivi ambulatoire régressant après ajustement du régulier traitement antidépresseur -Relative normothymie depuis 1999. De 1972 à Septembre 1981 -5 hospitalisations en 9 ans, d’une durée moyenne de 2 sem. ½ chacune Neuroleptique sédatif -Nozinan® instauré en traitement aigu puis poursuivi au long cours après le 2è accès maniaque -Nozinan® jusqu’en octobre 1979 -aucun TR associé -aucun -Téralithe® 250mg introduit en 1972 -Arrêt temporaire du lithium de février à septembre 1981 pour altération fonction rénale (reprise après avis néphrologique) Autre Traitement -ATD instauré ponctuellement (TCA) -ATD lors des accès dépressifs (tricycliques) -Téralithe® 250 mg - Tricycliques puis LP 400 depuis jusqu’en mai 2002 puis IRS sept. 2000 (PB cardiaque) Commentaire Diagnostic de PMD d’évolutivité faible porté en 1968. -Bonne observance thérapeutique du traitement vérifiée sur les lithiémies -Amélioration clinique à partir de oct. 1979 -Modification de la posologie pour forme téralithe LP® en septembre 2000 -Bonne observance 80 4)- Conclusion et commentaires : Trouble bipolaire de type I diagnostiqué lors du 1er accès maniaque (typique) en 1958. Considérée de faible évolutivité en 1968 en raison de l’intervalle libre de 10 ans et l’absence de facteur de gravité : bonne insertion sociale, pas de passage à l’acte, bonne observance thérapeutique. Traitement par lithium débuté en 1972, dès les débuts de son utilisation dans les troubles bipolaires. D’emblée, l’observance thérapeutique a été bonne. La stabilité clinique actuelle semble liée à l’adaptation optimale du lithium. Traitement par Nozynan® sur une durée de 10 ans (de 1968 à 1979), institué lors d’un accès maniaque. L’utilisation d’un neuroleptique sédatif dans les premières années de la maladie semble liée à la poursuite du traitement de première intention (avant la mise sous lithium) et à la persistance d’une hypomanie. Son arrêt est corrélé à la plus grande stabilité clinique. 81 2- Fiche n°2 : Mme CHEV. 1)- Données administratives : Nom : CHEV. Huguette Née le : 29/12/60 Age actuel : 42 ans Nationalité : française Sexe : F Revenus : AAH Mesure de protection : Non précisé Régime SS : ALD 2)- Evolutivité de la maladie et de l’insertion socioprofessionnelle : Eléments biographiques : Antécédents familiaux Antécédents somatiques Situation familiale Situation socioprofessionnelle Facteurs de stress psychosociaux Alcoolisme et notion de dépression chez le père Fausse couche en 1988 (28 ans) Mariée depuis juin 94 5 enfants (dont 1 placé ?) Actuellement bien insérée, perçoit AAH, n’a jamais travaillé Suspicion de relations incestueuses de la part du père motivant plusieurs décompensations jusqu’en 1987 ; décompensation suite à accouchement en 1987 Histoire de la maladie : Début du suivi Diagnostic principal Premiers symptômes et diagnostic évoqué Délai diagnostic Suivi actuel Traitement actuel 1977 (soit 26 ans) Trouble bipolaire de l’humeur BDA en 1977 (16 ans)- diagnostic de psychose dissociative dysthymique En 1992 : 15 ans (à l’âge de 32 ans) Ambulatoire, état stable Dépamide®, séropram®, xanax® Profil évolutif : Age de début Fréquence et durée des hospitalisations Passage à l’acte Symptômes psychotiques Abus de substance Trouble de la personnalité Qualité de l’observance thérapeutique 16 ans 20 hospit. en 17 ans, dont 17 entre 1977 et 1987 6 TS (médicamenteuses , défénestration et pendaison) Présents, non congruent à l’humeur (délire de persécution) Consommation alcool intermittente Non Médiocre au départ, bonne actuellement 82 3)- Evolution globale du traitement et place des neuroleptiques au long cours : Fréquence des hospitalisations et durée -17 hospitalisations en 10 ans, d’une durée moyenne de 3 sem. chacune Etat clinique et diagnostic évoqué Neuroleptique incisif -Alternance excitation / dépression (avec TS graves) + idées délirantes de persécution -Diagnostic de psychose dysthymique -Nozinan® -aucun -NLP incisif ponctuellement injectable : Fluanxol® de 1977 à 1982 puis modecate® jusqu’en février 1984 et reprise fluanxol® jusqu’en 0ctobre 1986 (arrêt pour grossesse) -2 hospit. en 1987 puis1 en 1992 et en 1994 (dernière en HDT) -Durée : 1 sem à 1 mois -aucun -Arrêt du suivi entre 1988 et 1992 (soit 7 ans) - TS par pendaison en 1993 et accès maniaque difficile à équilibrer en 1994 -Suivi ambulatoire régulier depuis 9 ans -Pas d’hospit. depuis juin 1994 -Oscillations thymiques modérées et états mixtes -diagnostic de TB en 1997 Neuroleptique sédatif TR associé -Tercian® -Tégrétol® de ponctuellement 1993 à juin 1994 - Fluanxol® IM de -Tercian* de juin 1994 à mars 1995 1994 à septembre 1996 Autre traitement Commentaire -Antiparkin- -NLP injectables en sonien continu pendant 10 ans, avec périodes d’arrêt pour grossesse ou maladies -Notion de rechute après arrêt -Mauvaise observance thérapeutique -ATD de juin 1992 à juin 1994 -Téralithe® de juin -ATD au long cours 1994 à mai 1995, arrêt pour refus (grossesse en 1998) -Dépamide® depuis avril 2001 -Arrêt suivi de 1988 à 1992 -Pas de NLP incisifs pendant cette période -Mise en route TR Diag. de PMD porté en 1994 -NLP injectable repris lors d’un accès difficile à équilibrer -Arrêt du NLP retard après stabilisation sous TR 83 4)- Conclusion et commentaires : Trouble bipolaire de l’humeur à début précoce (16 ans), d’abord diagnostiqué comme psychose dysthymique en raison de l’importance des symptômes psychotiques. Présence de signes de gravité (âge de début précoce, symptômes psychotiques non congruents à l’humeur, tentatives de suicides graves, alcoolisations). Perturbation de la vie professionnelle (mise en invalidité), sociale et conjugale. Traitement par neuroleptique injectable sur une période de 9 ans (de 1977 à 1986), institué lors d’une bouffée délirante aiguë. Période sans neuroleptique de 1987 à 1994, l’arrêt ayant été motivé par une grossesse, puis reprise en traitement injectable adjuvant pendant 9 mois. Les raisons retrouvées sont : - Le diagnostic de psychose dysthymique retenu au départ - La mauvaise observance thérapeutique (bien que la forme injectable ait été instaurée d’emblée) - La prévention des récidives - L’efficacité insuffisante du thymorégulateur à l’occasion d’une décompensation maniaque. La mise en place du traitement thymorégulateur (Théralithe® dans un premier temps, arrêté pour désir de grossesse, puis dépamide®) est associée à une réduction de la fréquence des hospitalisations et à des oscillations thymiques plus modérée. 84 3- Fiche Mme COL. Jacqueline : 1)- Données administratives : Nom : COL. Prénom : Jacqueline Née-le : 6/07/1931 Domicile : stable, personnel Sexe : F Age actuel : 72 ans Niveau d’étude : Non précisé Revenus : retraitée Mesure de protection : aucune Régime SS : ALD 2)- Evolutivité de la maladie et de l’insertion socioprofessionnelle : Eléments biographiques : Antécédents familiaux Antécédents somatiques Situation familiale Situation socioprofessionnelle Facteurs de stress psychosociaux Aucun ou non connus Hystérectomie en 1986 (55ans), photosensibilisation au nozinan® Veuve depuis janv. 1997 (66 ans), notion d’éthylisme chez le mari, décédé à domicile. Pas d’enfant. a travaillé jusqu’à 55 ans. Licenciement économique. Bonne insertion sociale Décompensation mélancolique liée à hystérectomie en 1986 et au décès d’un proche en 1990 Histoire de la maladie : Début du suivi Diagnostic principal Premiers symptômes et diagnostic évoqué Délai diagnostic Etat actuel et suivi Traitement actuel 1993 (10 ans) Trouble bipolaire EDM au décours d’une hystérectomie en 1986 (55 ans) mais dépressions récurrentes auparavant 5 ans ?(en 1991, âge de 60 ans) Suivi ambulatoire régulier au CMP Tercian®, Tégrétol®, tricycliques Profil évolutif : Age de début Fréquence et durée des hospitalisations Passages à l’acte Symptômes psychotiques Abus de substance Trouble de la personnalité Qualité de l’observance thérapeutique 55 ans (supposé) Rares : 2 hospitalisations depuis 1986 Aucun Non Non Non Bonne 85 3)- Evolution globale du traitement et place des neuroleptiques au long cours : Dates De 1985 A 1993 Etat clinique Fréquence et diagnostic des Hospitévoqué talisations et durée -1 hospit. en -EDM de type mélancolique 1986 en 1986, au décours d’une hystérectomie, et en 1990, suite à décès famille proche De 1993 -1 hospit. en à 1997 1995, en HL -Durée : 3 sem. De 1997 -Aucune à avril 2003 Neurolepti Neuroleptique sédatif que incisif TR associé -aucun -aucun -aucun -En 1993, état mixte sous TCA, au décours d’un accès mélancolique -En 1995, mélancolie puis virage hypomaniaque au décours -Entre 1995 et 1997 : alternance d’hypomanie et de rechutes dépressives -Normothymie -aucun -aucun -nozinan® de mars à juin 1993 -Tercian® de mars 1995 à aujourd’hui Autre traitement Commentaire -ATD -Notion de PMD ancienne (anafranil®) depuis 1991 (suivi ambulatoire) -Cependant, pas de TR -PMD peu évolutive -Tégrétol® institué au -Tégrétol® -ATD de décours d’un état mixte depuis mars type tricycliques sous tricycliques 1995 -Nozinan® arrêté pour photosensibilisation -Tercian® repris au cours d’un état mixte -Tercian® depuis -Tégrétol® -ATD mars 1995 depuis mars 1995 -Bonne tolérance du traitement et bonne observance Relative stabilité clinique -Poursuite du tercian® pour trouble du sommeil 86 4)- Conclusion et commentaires : Trouble bipolaire de type II dont on ignore la date exacte du diagnostic. Faible évolutivité : pas de passage à l’acte, peu d’hospitalisation, pas de symptômes psychotiques, bonne insertion socioprofessionnelle. Traitement thymorégulateur institué lors d’un état mixte probablement déclenché par un antidépresseur. L’association avec un neuroleptique sédatif et un antidépresseur au long cours semble avoir permis la stabilisation de l’état clinique. Le maintien de faibles doses de neuroleptiques est justifiée par des troubles du sommeil. 87 4- Fiche n° 4 : Mme DAH. 1)- Données administratives : Nom : DAH. Prénom : Nathalie Née-le : 12/4/1964 Age actuel :39 ans Sexe : F Niveau d’étude : supérieur Profession : aide soignante Mesure de protection : aucune Régime SS : ALD 2)- Evolutivité de la maladie et de l’insertion professionnelle : Eléments biographiques : Antécédents familiaux Antécédents somatiques Situation familiale Situation professionnelle Facteurs de stress psychosociaux Notion d’éthylisme et de dépression chez le père Diabète gestationnel lors de la dernière grossesse Mariée, 4 enfants (dernier né en 1998) Congé longue maladie Non précisé Histoire de la maladie : Début du suivi Diagnostic principal Premiers symptômes et diagnostic évoqué Délai diagnostic Suivi actuel Traitement actuel 1990 (soit 13 ans) TB à cycle rapide Dépression récurrente sur personnalité hystérique Diagnostic évoqué en 1990 (26 ans), refusé par la patiente Reprise du suivi en 2001 délais =10 ans CMP + hôpital de jour Dépakote®, séroplex®, anafranil® tranxène® Profil évolutif : Age de début Fréquence et durée des hospitalisations Passages à l’acte Symptômes psychotiques Abus de substance Trouble de la personnalité Qualité de l’observance thérapeutique 1990 (26 ans) : 1ère hospit. 1 hospit. en 1990, puis 5 hospit. depuis 2002 de longue durée (2 à 4 mois) TS médicamenteuses + fugues Notion d’hallucinations auditives lors d’une hospit. et d’épisode de dépersonnalisation… Non. Trouble des conduites alimentaires, achats compulsifs De type hystérique Mauvaise au début (rupture de soin de 10 ans), bonne actuellement 88 3)- Evolution globale du traitement et place des neuroleptiques au long cours : Dates Avril 1990à juin 2001 Juin 2001 à avril 2003 Fréq. des hospit. et durée -2 hospit. de 15 jours Etat clinique et Diagnostic évoqué Neuroleptique incisif Neuroleptique TR associé sédatif Autre traitement Commentaire -hospit. pour EDM avec épisode de déréalisation et dépersonnalisation sur personnalité hystérique -Puis alternance d’EDM et d’hypomanie -Aucun -Aucun -ATD (laroxyl® puis prozac®) -anxiolytique -Diagnostique de TB évoqué -Refus de soin et déni de la maladie pendant 10 ans -7 hospit. -durée moyenne : 2 mois -hospit. pour TS graves ou EDM sévère avec périodes d’instabilité thymique majeure, états mixtes, accélération des cycles -Aucun -Solian® en janv. 2002 (pour hallucinations auditives) -Puis Risperdal® de février à juillet 2002 -Solian® de juillet à octobre 2002 (arrêt pour syndrome parkinsonien) -Aucun -ATD -Téralithe® institué en juin (norset® puis 2001 (durée ?) anafranil®) -Tégrétol® de nov. 2001 à mai 2002 -Téralithe® de mai juillet 2002 -Dépakote® depuis juillet 2002 -Reprise de contact avec les soins suite à TS médicamenteuse -Diagnostic de TB à cycles rapides, résistant au traitement -Hospitalisations longues, absences de phases de rémission -Vie sociale et familiale très perturbée 89 4)- Conclusion et commentaire : Trouble bipolaire de type II, dont le diagnostic a été refusé au départ par la patiente. Pendant 10 ans : pas de suivi médical régulier, Mme D. poursuit son travail et a 2 enfants. Elle alterne cependant des épisodes dépressifs et hypomaniaques venant perturber sa vie familiale et son travail. La reprise de contact avec les soins se fait par l’intermédiaire d’un état dépressif majeur avec tentatives de suicide médicamenteuse grave. Le trouble bipolaire de type 2 s’est alors aggravé en trouble bipolaire à cycles rapides (rôle possible des antidépresseurs pendant cette période de 10 ans ?). L’existence d’un trouble de personnalité de type hystérique a pu entraîner des errances diagnostiques. Les formes à cycles rapides sont plus résistantes aux traitements, ce qui explique les changements fréquents de thymorégulateurs depuis 2001. Les neuroleptiques sont justifiés par la forme résistante du trouble et l’instabilité thymique. A noter qu’ils ont été prescrits au départ pour « hallucinations auditives ». Ils ont dû être arrêtés en raison d’effets indésirables extra-pyramidaux. 90 5- Fiche n°5 : Melle DES. 1)- Données administratives : Nom : Danie DES. Née-le : 24/12/1961 Age actuel : 42ans Domicile : appartement – Le Mans Nationalité : Française Sexe : F Revenus : travaille en CAT Mesure de protection : aucune Régime SS : ALD 2)- Evolutivité de la maladie et de l’insertion socioprofessionnelle : Eléments biographiques : Antécédents familiaux Antécédents somatiques Situation familiale Situation professionnelle Facteurs de stress psychosociaux TB chez le père. ATCD de troubles de l’humeur atypiques chez le frère, décès par suicide en 1982 (29 ans) aucun Ami, pas d’enfant Travail en CAT depuis 82 / 83 Plusieurs décompensations liées à conflits avec père puis ami Histoire de la maladie : Début du suivi Diagnostic principal Premiers symptômes et diagnostic évoqué Délai diagnostic Etat actuel et suivi Traitement actuel Profil évolutif : Age de début Fréquence et durée des hospitalisations Passages à l’acte Symptômes psychotiques Abus de substance Trouble de la personnalité Qualité de l’observance thérapeutique 1971 (soit 32 ans) schizophrénie dysthymique 1ére consultation pour troubles du caractère (agressivité) en 1971(10 ans). 1ère hospit. en déc. 1976 (15 ans) pour épisode confusodélirant. Evocation de processus psychotique psychose : 5 ans après début suivi (15 ans) schizophrénie dysthymique : 10 ans (26 ans) Stabilisation de l’état thymique et psychotique. Suivi régulier CMP. Risperdal®, téralithe®, anafranil® 10 ans 28 hospitalisations de 1971 à 1999 Pas d’hospitalisation depuis mars 1999 TS médicamenteuse, défénestration en 1984, agitation psychomotrice Présents, délire de type paranoïde non Non précisé Mauvaise au début, bonne actuellement 91 3)- Evolution globale du traitement et place des neuroleptiques au long cours : Dates Fréquence des hospitalisations et durée -3 hospitalisations De 1971 en pédopsychiatrie, à oct. de 15 jours 1977 Etat clinique et diagnostic évoqué -Dépression atypique -Symptômes psychotiques : délire hallucinatoire, transformation corporelle ; -Insomnie rebelle -Psychose schizophrénique avec délire paranoïde et troubles de l’humeur associés (dépressif ou mixte avec logorrhée et agitation) De oct. 1977 à déc. 1987 14 hospitalisations en 10 ans, d’une durée moyenne de 1,8 mois par hospitalisation De 1988 à 1999 11 hospitalisations sur 12 ans, avec durée moyenne de 15 jours par hospitalisation De mars 1999 à avril 2003 -1 hospitalisation de -Stabilisation de l’état thymique et psychotique 15 jours -Suivi régulier CMP -1 décompensation psychotique en Octobre 2002 -Psychose dysthymique -2 TS médicamenteuses en avril et décembre 88 Neuroleptique incisif Piportil® puis dogmatil® per os Autre Neuroleptique TR associé Commentaires sédatif traitement -aucun -aucun -Contexte de conflit avec père ponctuellement -Diagnostic de (tercian®) psychose porté en février 1976 -utilisation en continue avec des changements fréquents : neuleptil® , haldol®, puis moditen® per os depuis mai 1980 -Modecate® injectable de janv. 1988 à fév. 1999, arrêté car rapport bénéfice/risque défavorable -Risperdal® depuis mars 1999 -En continu : tercian® ou nozinan® -aucun -aucun Téralithe® -ATD -Non-observance -ATD thérapeutique, à -Antiparkinsoniens l’origine de décompensations -Raptus suicidaire avec défénestration en mai 84 (lors d’une hospitalisation) -Bonne observance -Nozinan® de Téralithe® -ATD traitement, vérifiée par -Antipardepuis janv. 1988 à janv. 1988 kinsoniens lithiémies juillet 1997 plasmatiques -Bonne observance traitement Stabilisation de la maladie 92 4)- Conclusion et commentaires : Psychose chronique dont le diagnostic a été porté précocement (à l’âge de 15 ans), s’accompagnant de troubles de l’humeur atypiques. Mauvaise observance thérapeutique au début du trouble, facteur de décompensation. Les neuroleptiques incisifs et sédatifs sont institués en première intention et poursuivi en continue de 1971 à aujourd’hui (avril 2003), soit sur une période de 32 ans. Les raisons sont : - Prescription en première intention du fait du diagnostic de psychose retenu au départ - Non-observance thérapeutique, nécessitant l’introduction de neuroleptiques injectables pendant 11 ans (de 1988 à 1999), en association aux thymorégulateurs - Neuroleptiques sédatifs pendant 9 ans (de 1988 à 1997) pour agressivité, instabilité thymique, arrêt depuis l’amélioration clinique - Actuellement, maintien du traitement efficace La mise en route d’un traitement neuroleptique injectable (évitant la nonobservance thérapeutique) et d’un thymorégulateur est associé à une diminution de la fréquence et de la durée des hospitalisations. Le traitement thymorégulateur a été bien suivi dès sa mise en route. Depuis le remplacement du neuroleptique injectable par un neuroleptique atypique, la stabilité clinique persiste, et il semble y avoir moins d’effets indésirables (arrêt des antiparkinsoniens en particulier). L’observance thérapeutique est bonne actuellement, ainsi que l’insertion socioprofessionnelle. Montre l’intérêt de traiter en priorité le trouble de l’humeur lorsque symptômes thymiques et psychotiques sont associés. 93 6- Fiche n°6 : Mme DUP. 1)- Données administratives : Nom : DUP. Prénom : Micheline Née-le : 1/05/1958 Age actuel : 45 ans Sexe : F Niveau d’étude : Non précisé Profession : sans Mesure de protection : aucune Régime SS : ALD 2)- Evolutivité de la maladie et de l’insertion socioprofessionnelle : Eléments biographiques : Antécédents familiaux Antécédents somatiques Situation familiale Situation professionnelle Facteurs de stress psychosociaux Parents sans antécédents psychiatriques 1 frère exerçant l’activité de « médium » aucun Mariée, mère de 3 enfants nés en 1979, 1981 et 1983 (avait 21 ans pour son 1er enfant) N’a jamais travaillé Un accès suite à départ de sa fille du domicile, un autre suite au décès de sa sœur (accès Maniaque) Histoire de la maladie : Durée du suivi Diagnostic principal Premiers symptômes et diagnostic évoqué Délai diagnostic Suivi actuel Traitement actuel 1989 (soit 14 ans) TB de type1 à prédominance d’accès M. BDA en 1988 (30 ans) Diagnostic de psychose paranoïaque Diagnostic de psychose dysthymique en 1989 et de TB en 2001 Suivi régulier au CMP Dépakote®, risperdal®, parkinane® Profil évolutif : Age de début Fréquence et durée des hospitalisations Passages à l’acte Symptômes psychotiques Abus de substance Trouble de la personnalité Qualité de l’observance thérapeutique 30 ans 6 hospit. entre 1988 et 2002, d’environ 15 jours chacune TS médicamenteuse en 1995 Présents lors des accès maniaques, congruents ou non congruents à l’humeur en fonction des accès Non Non précisé Médiocre 94 3)- Evolution globale du traitement et place des neuroleptiques au long cours : Dates Fréq. des hospit. et durée De 1988 -2 hospit à juillet en HL en 2 ans 1990 De juillet 1990 à janvier 2001 -3 hospit. en 1990, en 1994 et en 1995 -2 hospit. De en janvier janvier 2001 à 2001 et en avril 2002 mars 2003 Etat clinique et diagnostic évoqué Neuroleptique incisif Neuroleptique sédatif -Haldol® de 1988 -Nozinan® de -En 1988 : délire à juillet 1990 1988 à juillet paranoïaque 1990 -En 1989 : BDA avec délire mégalomaniaque, critique au décours -Expansion de l’humeur et idées délirantes congruentes à l’humeur (voyance…) ou non (persécution) avec hallucinations auditives lors des hospit -Dans l’intervalle : alternance de normothymie(rare), d’hypomanie avec idées délirantes ou d’états mixtes -1 TS en 1995 -Hospit. pour accès maniaque avec idées délirante polymorphes ou de persécution -Normothymie depuis mai 2002 (1 an) TR associé Autre traitement Commentaire -Téralithe® -Antiparinstitué de kinsoniens 1989 à juillet 1990 -2ème décompensation survenue 15 jours après arrêt du traitement -Téralithe® institué pour psychose pulmonaire -Antipar-Adhésion chaotique au kinsoniens suivi et au traitement -Intervalle entre les hospit. marqué par hypomanie résiduelle + /- symptômes psychotiques -En 1994, diag. de psychose dysthymique -Haldol décanoas® / 4 sem. de juillet 1990 à janv. 2001 -Nozinan®, ponctuellement lors des hospit. -aucun -Risperdal® à partir de janvier 2001, en diminution depuis oct 2002 -Tercian® ponctuellement lors des accès aigus (arrêt en octobre 2002) -Dépamide® -Antiparkkinsoniens en janvier 2001 ; arrêt ? -Dépakote* depuis avril 2002 -1 décompensation liée à décès d’une sœur (en 2002) et à arrêt du suivi -Bonne observance depuis avril 2002 mais veut arrêter le suivi -Diagnostic de TB de type I en 2001 95 4)- Conclusion et commentaires : Il s’agit d’un trouble bipolaire de type I caractérisé par des accès essentiellement maniaques avec symptômes psychotiques congruents et non congruents à l’humeur. On retrouve également un accès dépressif avec tentative de suicide médicamenteuse et des états mixtes. Le diagnostic différentiel s’est posé (et se pose) avec une psychose dysthymique du fait de l’importance des symptômes psychotiques et de l’absence, au début du trouble, d’intervalle normothymique. La mise sous thymorégulateur a permis d’obtenir environ 1 an de stabilité clinique, ce qui semble plutôt en faveur d’un trouble bipolaire. L’évolutivité du trouble est relativement faible (fréquence des hospitalisations peu élevée, rémission rapide sous traitement, peu de conséquences sociales…). Cependant, il existe des signes de gravité : la mauvaise adhésion aux soins (expliquant la plupart des décompensations), les symptômes psychotiques. Traitement neuroleptique en continu depuis 1988 jusqu’à aujourd’hui, soit sur 15 ans. Forme retard de 1990 à 2001 puis neuroleptiques atypiques depuis 2001, en association avec thymorégulateur. Les raisons retrouvées sont : - Diagnostic de psychose dysthymique retenu au départ - La mauvaise observance thérapeutique - Symptômes résiduels entre les accès (hypomanie ou idées délirantes) - Reprise d’un neuroleptique atypique en 20011, lors d’un accès maniaque avec symptômes psychotiques. Poursuite depuis du traitement efficace avec réduction progressive des doses Le traitement neuroleptique, même s’il a globalement diminué le nombre d’hospitalisations, n’a pas permis d’obtenir de normothymie pendant les inter crises. L’épisode dépressif est survenu pendant cette période. L’introduction du thymorégulateur a permis d’obtenir une stabilité clinique (normothymie et disparition des symptômes psychotiques) et est actuellement bien suivi. 96 Fiche n°7: Mr GAR. 1)- Données administratives: Nom: GAR. Prénom: Jean Paul Né-le : 4/09/55 Domicile : Le Mans – Domicile fixe Sexe : M Age : 47 ans Niveau d’étude : Bac Revenus : RMI + travail au noir Mesure de protection : Sauvegarde de justice Régime SS : ALD 2)- Evolutivité de la maladie et de l’insertion socioprofessionnelle : Eléments biographiques : Antécédents familiaux Antécédents somatiques Situation familiale Situation professionnelle Facteurs de stress psychosociaux Suicide par pendaison du grand-père maternel + alcoolisme Aucun Marié en 1984 (31 ans), divorcé en 1989 (36 ans) ; 3 enfants dont 2 qu’il ne voit plus Touche actuellement le RMI + travail « au noir » +/- trafic de stupéfiants, expulsion logement en 2001 Non précisés Histoire de la maladie : Début du suivi Diagnostic principal Premiers symptômes et diagnostic évoqué Délai diagnostic Etat actuel et suivi Traitement actuel 1987 (soit 16 ans) TB de type I EDM sévères TS grave en 1996, soit 9 ans (40 ans) Hospitalisation en HO avec sortie d’essai Haldol décanoas®, nozinan®, dépamide® Profil évolutif : Age de début Fréquence et durée des hospitalisations Passages à l’acte Symptômes psychotiques Abus de substance Trouble de la personnalité Qualité de l’observance thérapeutique En 1987, 1ère hospitalisation (32 ans) Depuis 1995, 8 hospitalisations (sur 8 ans), prolongées (de 15 j à 9 mois), plusieurs HO TS médicamenteuses graves, hétéro agressivité ; notion de dangerosité, pour les autres et lui-même Présents, non congruents à l’humeur Alcoolisations aiguës De type psychopathique Mauvaise 97 3)- Evolution globale du traitement et place des neuroleptiques au long cours Dates Avril 1987 à août 1995 Fréquence des hospitalisation s et durée -1 hospit de 5 jours en HL -Sortie contre avis médical Etat clinique et diagnostic évoqué -EDM avec TS grave -aucun (gardénal®) -accès maniaque inaugurale en août 1995 avec idées délirantes non congruentes à l’humeur (persécution) et hallucinations -Alcoolisations aiguës -Puis alternance d’états d’agitation délirante, d’hypomanie et d’EDM -Alternance d’accès -5 Nov. 1998 à hospitalisation maniaque avec éléments délirants et ce jour s, dont 2 en HO, durée de 1 accès mélancoliques -Hétéro agressivité et à 9 mois TS médicamenteuses Août 1995 à nov. 1998 -3 hospit., dont 2 en HO -durée moyenne de 6 mois 1/2 Neuroleptique incisif Neuroleptiqu TR associé e sédatif Autre traitement -aucun -ATD -en continue depuis août -Nozinan® de 1995 à 1995 : haldol®, 1996 clopixol AP®, loxapac® -également en continue, avec de nombreux changement de molécules : NLP injectables, atypiques -Haldol décanoas® depuis déc. 2002 -Nozinan®, contre l’agressivité de novembre 1998 à avril 2003 -aucun -aucun -Tégrétol® (nov.1998 à septembre 2001) -dépakote® (septembre 2001 à mai 2002) -Dépamide® (juin 2002 à ce jour) Commentaire -EDM grave et nonadhésion aux soins -intervalle libre de 8 ans (divorce, « petits métiers ») -Diagnostic de PMD -ATD -Antipar- porté en 1996 kinsoniens -Comportement antisocial, hétéro agressivité, mauvaise adhésion aux soins et présence de symptômes psychotiques justifiant le traitement NLP -Difficultés d’équilibration du traitement nécessitant de nombreux changements -ATD -Difficultés sociales aggraver le trouble -Actuellement bonne compliance au traitement injectable 98 4)- Conclusion et commentaires : Trouble bipolaire avec présence de signes psychotiques non congruents à l’humeur, posant le problème du diagnostic différentiel avec une psychose dysthymique. Met en évidence la difficulté de classer certains patients dans des cadres nosographiques précis. D’autres paramètres viennent interférer avec le diagnostic principal et confèrent un pronostic péjoratif à la maladie: trouble de la personnalité sous jacent, conduites addictives et antisociales, mauvaise adhésion aux soins, absence de normothymie entre les accès, tentatives de suicide graves, résistance aux traitements… Les neuroleptiques incisifs sont introduits dès 1995, date à laquelle le diagnostic de psychose maniaco-dépressive est posé. La raison de leur prescription en première intention (par rapport aux thymorégulateurs) semble être : - La présence de symptômes psychotiques et d’états d’agitation sévères lors des accès maniaques, nécessitant un traitement rapide et antidélirant. - Le trouble de personnalité avec conduite antisociale Les raisons de leur maintien au long cours semblent être liées : - à la mauvaise observance thérapeutique (neuroleptiques retard), - la résistance aux traitements et - le diagnostic différentiel avec la psychose dysthymique. A noter que depuis 1995, il y a eu 7 changements de molécules en ce qui concerne les neuroleptiques incisifs. Toutes les formes ont été essayées : action prolongée, atypiques, conventionnels. Les raisons de leur changement: - Syndrome parkinsonien - Inefficacité thérapeutique Les thymorégulateurs n’ont été introduits qu’en 1998, 3 ans après le diagnostic. Un bilan pré-lithium a été fait en 1996, mais le lithium ne semble pas avoir été introduit, peutêtre du fait du risque de non-observance ou de tentatives de suicide graves. Le traitement thymorégulateur a également souvent été modifié depuis 1998, ce qui confirme la résistance du trouble au traitement. 99 8- Fiche n°8: Mr GAS. 1)- Données administratives: Nom: GAS. Daniel Né-le : 1/02/55 Age actuel : 47 ans Nationalité : française Sexe : M Revenus : magasinier Mesure de protection : aucune Régime SS : ALD 2)- Evolutivité de la maladie et de l’insertion socioprofessionnelle : Eléments biographiques : Antécédents familiaux Antécédents somatiques Situation familiale Situation professionnelle Facteurs de stress psychosociaux inconnus aucun 1er divorce en 1975 Remariage en 1978, puis 2éme divorce en 2002 ; 2 enfants Encore en activité ( ?) ; arrêts maladie nombreux Décompensations dépressives lors de ses divorces en 1975 et en 2002 Histoire de la maladie : Début du suivi Diagnostic principal Premiers symptômes et diagnostic évoqué Délai diagnostic Etat actuel et suivi Traitement actuel 1999 (soit 4 ans) TB de type II En 1989 (34 ans), dépressions récurrentes (suivi par généraliste) 10 ans (à l’âge de 44 ans), suite à hospitalisation pour TS grave Suivi ambulatoire. EDM récurrent Dépamide®, Effexor®, Tranxène® Profil évolutif : Age de début Fréquence et durée des hospitalisations Passage à l’acte Symptômes psychotiques Abus de substance Trouble de la personnalité Qualité de l’observance thérapeutique 34 ans (date imprécise) 10 hospitalisations en 3 ans (1999 à 2002) Durée : 15 j en moyenne 3 HDT 5 TS graves (pendaison, médicamenteuse) ;2 crises d’agitation « clastiques » ;dangerosité pour lui-même Absents Alcoolisations ponctuelles De type obsessionnel A priori bonne ? 100 3)- Evolution globale du traitement et place des neuroleptiques au long cours : Dates Fréquences des Hospitalisations et durée Mai 1999 -5 hospitalisations de 1 mois, en 1 an à novembre ½ HL 2000 Novembre 2000 à octobre 2002 -5 hospitalisations d’une durée moyenne de 15 jours chacune, en 2 ans -Dont 3 en HDT Etat clinique et NLP NLP sédatif incisif diagnostic évoqué -Etat dépressif sévère -TS médicamenteuse grave -Etats dépressifs majeur -TS graves -Alcoolisations et états d’hétéro agressivité Autre traitement associé Tricycliques aucun Nozinan® ou Téralithe® tercian® de juin 250mg en juin +/- IRS 1999 à 1999. Arrêt ? novembre 2000 aucun -aucun de octobre 2000 à juillet 2002 -nozinan® de juillet à octobre 2002 TR associé -Dépamide® de ATD octobre 2000 à août 2002 -Tégrétol® de août à octobre 2002 -Reprise dépamide® depuis Commentaire -Dépression résistante justifiant téralithe® en traitement adjuvant -Idées obsessionnelles de suicide justifiant NLP sédatifs -Thymorégulateur justifié par des petits signes de bipolarité entre les hospitalisations pour EDM -Période de normothymie de 1 an de janvier 2001 à janvier 2002 -Reprise des hospitalisations en 2002 correspondant à procédure de divorce 101 4)- Conclusion et commentaires : - Etats dépressifs majeurs sévères, récurrents et résistants aux antidépresseurs. Il existe, à l’interrogatoire, des petits signes de bipolarité : brefs passages en hypomanie, en dehors des périodes d’hospitalisation. Le patient ne s’en plaint pas spontanément. On peut penser qu’il s’agit d’un trouble bipolaire de type II. Cela montre l’importance de rechercher ces « petits signes » de bipolarité devant des états dépressifs récurrents et résistants. - Retentissement important sur la vie sociale : arrêts de travail fréquents, divorce et rupture de contact avec les enfants. - Les neuroleptiques sont prescrits sur de courtes périodes dans un but sédatif : lutte contre les idées obsédantes de suicide, agressivité. Le traitement thymorégulateur est institué à partir d’octobre 2000. Il ne semble pas avoir réduit le nombre d’hospitalisations ni la gravité des états dépressifs. On note cependant une période de normothymie de 1 an, décompensée en janvier 2002 suite à une procédure de divorce. Les neuroleptiques sont arrêtés après la mise en route du traitement thymorégulateur. 102 9- Fiche n°9 : Mme GIL. 1)- Données administratives Nom : GIL. Prénom :Yolande Née-le :17/02/1956 Age actuel :47 ans Sexe :F Niveau d’étude : supérieur Profession : aide soignante Mesure de protection : curatelle Régime SS : ALD 2)- Evolutivité de la maladie et de l’insertion socioprofessionnelle : Eléments biographiques : Antécédents familiaux Antécédents somatiques Situation familiale Situation professionnelle Facteurs de stress psychosociaux Père alcoolique et violent ; 1 frère décédé par suicide ; 2 frères atteints de PMD Intervention cardiaque en 1990 (CIV) Séparée ; 1 fils Congé longue maladie 1ère décompensation (TS) suite à intervention chir. en 1990 ; décompensations suite à décès du frère et conflit au travail Histoire de la maladie : Début du suivi Diagnostic principal Premiers symptômes et diagnostic évoqué Délai diagnostic Suivi actuel Traitement actuel 1998 (5 ans) TB à cycles courts EDM avec notion de TS en 1990 (34 ans) ? 8 ans (1998) Hôpital de jour depuis déc. 2002 Zyprexa10®, tégrétol®, séropram®, tranxène® Facteurs de gravité : Age de début Fréquence et durée des hospitalisations Passages à l’acte Symptômes psychotiques Abus de substance Trouble de la personnalité Qualité de l’observance thérapeutique Supposé à 34 ans 7 hospitalisations depuis 1998 et actuellement hôpital de jour TS en 1990 Non Non De type hystérique Mauvaise 103 3)- Evolution globale du traitement et place des neuroleptique au long cours : Dates Fréq. des hospit. et durée -2 hospit. en Avril 1998 à HL en avril et novembre nov. 1998 2000 Etat clinique et Neuroleptique diagnostic évoqué incisif -aucun -Etat mixte avec fluctuation ++ de l’humeur Novembre -5 hospit. 2000 à complètes et avril 2003 hôpital de jour depuis déc. 2002 -Instabilité thymique importante avec alternance d’états dépressifs et d’états d’excitation Pas de stabilisation nette de l’humeur -Zyprexa® introduit en nov. 2000 et maintenu depuis Neuroleptique sédatif -Tercian® en avril 1998, arrêté pour intolérance -aucun TR associé Autre traitement -athymil® -Téralithe® de avril 1998 à -BZD nov. 2000 Commentaire -Diagnostic de PMD à cycles rapides -Intolérance au tercian®, virage maniaque sous tricyclique -Dépamide® Séropram® -Inefficacité du lithium, remplacé par dépamide® de nov. 2000 -BZD et zyprexa® en avril 2001 novembre . 2000 -Tégrétol® de permettant amélioration sept. 2001 à temporaire avril 2003 -Changement de TR en sept. 2001 et augmentation du zyprexa® pour résistance au traitement -Mauvaise observance du traitement venant aggraver cette résistance 104 4)- Conclusion et commentaires : Trouble bipolaire à cycles rapides suivi dans le service depuis 5 ans (1998). Pas d’information sur la symptomatologie antérieure. En dehors de la forme clinique (à cycles rapides) classiquement résistante aux traitements, il existe une mauvaise observance thérapeutique qui vient aggraver la situation. Cette résistance explique les changements de thymorégulateurs et la mise en place d’un traitement neuroleptique au long cours en association (à noter un essai de traitement neuroleptique en monothérapie de 5 mois d’avril à septembre 2001, ne permettant pas d’amélioration symptomatique). Le choix du neuroleptique atypique peut se justifier par la notion d’une mauvaise tolérance aux neuroleptiques classiques (en 1998). 105 10- Fiche n°10 : Mme LED. 1)- Données générales : Nom :LED. Prénom : Danielle Née-le : 27 / 1947 Age : 56 ans Niveau d’étude : supérieur Revenus :Non précisé Mesure de protection : tutelle Régime SS : ALD Sexe : F 2)- Evolutivité de la maladie et de l’insertion professionnelle : VII- Eléments biographiques : Antécédents familiaux Antécédents somatiques Situation familiale Situation socioprofessionnelle Facteurs de stress psychosociaux Mère porteuse d’une PMD, diagnostiquée en 1979 (retard diagnostic) AVC ischémique en juin 1995, épilepsie séquellaire diagnostiquée en oct. 2000, cardiopathie avec trouble de conduction ventriculaire. Mariée en 1973, un fils en 1974 qu’elle ne voit plus, divorce en 1980 institutrice, à priori mise en invalidité suite à son AVC en Juin 1995.. Un accès suite à décès d’un proche en mai 1996, à un AVC en 1995 VIII- Histoire de la maladie : Début du suivi Diagnostic principal Premiers symptômes et diagnostic évoqué Délai diagnostic Etat actuel et suivi Traitement actuel IXProfil évolutif de la maladie : Age de début Fréquence et durée des hospitalisations Passages à l’acte Symptômes psychotiques Abus de substance Trouble de la personnalité Qualité de l’observance thérapeutique 1969 (soit 34 ans) TB de type I à cycles rapides BDA 10 ans (1979) hospitalisée en HO depuis février 1997 (6 ans) Zyprexa®, nozinan®, dépakote® 21 ans 14 hospit. au total dont 5 entre 1995 et 1997 et hospit. actuelle depuis février 1997 TS par noyade, hétéroagressivité; dangerosité pour elle-même et autrui Présents, non congruent à l’humeur Amphétamine au début du trouble De type paranoïaque Mauvaise au début du trouble 106 3)- Evolution globale du traitement et place des neuroleptiques au long cours : des ée obre pit. en HL, en 1969 à 1969 et 1970 septem79 inique et ostic évoqué leptique leptique f en 1969 avec délire à ol® en phase nan® en thème de grandeur et de aiguë phases persécution aiguës au décours avec TS par noyade ntervalle libre de 10 ans ptempit. de 1 mois s maniaque puis ol® en phase nan® en 79 à juin environ entre mélancolique au aiguë phase cate® retard 1995 1979 et 1981, en décours avec aiguë injectable de oct. HL symptômes 1979 à mai 1981 pit. en 1991, en psychotiques echute maniaque en 1991 HDT régulier jusqu’en après intervalle libre de 10 ans 1983 ération des cycles, n 1995 à pit de 1 mois til® IM puis per nan® en avril environ, de sept. apparition d’états mixtes os de fév. 1997 à continu 2003 1995 à février tance aux traitements avril 1998 depuis 1997, dont 2 en rition des phases inter exa® depuis mars 1995 critiques HDT, 1 en HO 2000 suivies de fugue asymptomatiques t. en HO depuis février 1997 socié mentaire ment n anil® de schizophrénie pendant dysthymique de rémission de 10 ans phase dépressive pendant laquelle Mme L. se mari, a 1 enfant et poursuit son travail mide® ponctuellement mil®anafran de PMD de « mauvais en 1979 il® pronostic » en 1979 he® de mai 1981 à mai ute maniaque en août 1991, repris en 1991 secondaire à août1991 non-observance thérapeutique ithe® jusqu’à octobre 2000 tol® en association de juin 1996 à octobre 2000 puis seul jusqu’en octobre 2001 kote® depuis octobre 2001 avation de la maladie après AVC en juin 1995 ge à l’acte médicolégal en 1997 (HO depuis) lithium en raison de problèmes somatiques 107 4)- Conclusion et commentaires : Trouble bipolaire de type 1 à début précoce (21 ans), débutant par une bouffée délirante aiguë. Le premier diagnostic évoqué est celui d’une schizophrénie dysthymique. Le diagnostic de psychose maniaco-dépressive est posé 10 ans plus tard à l’occasion d’un nouvel accès maniaque. Il existe d’emblée des signes de gravité : début précoce, symptômes psychotiques non congruents à l’humeur, actes médico-légaux. L’aggravation du trouble (accélération des cycles et augmentation de la gravité des accès) semble corrélée à l’accident vasculaire cérébral ischémique, par le biais probable d’une résistance aux traitements. Sur le plan thérapeutique, le traitement de première intention est un neuroleptique injectable. Le lithium est institué en 1981. Les neuroleptiques incisifs sont arrêtés à cette période. Depuis 1995, l’aggravation du trouble et la résistance aux traitements a nécessité la reprise au long cours des neuroleptiques et des modifications fréquentes de traitement. Les raisons de la prescription de neuroleptique au long cours sont : - Le diagnostic de psychose dysthymique retenu au départ - La mauvaise observance thérapeutique, avec institution d’un traitement retard pendant 2 ans (de 1979 à 1981). Arrêt secondaire à rupture de suivi - La notion de psychose maniaco-dépressive de mauvais pronostic (en 1979) - Résistance au traitement (du fait de l’évolution sous forme de cycle rapide) et absence de phases de rémission entre les accès, justifiant la reprise des neuroleptiques en 1997, sur une période de 1 an ½ - Résistance aux thymorégulateurs et contre-indication secondaire au lithium, justifiant la reprise d’un neuroleptique atypique depuis mars 2000 108 11- Fiche n°11 : Mme LES. 1)- Données administratives : Nom : LES. Prénom : Mireille Née-le : 21/02/1961 Age actuel : 42 ans Sexe : F Profession : ouvrier qualifié Revenus : salariée Mesure de protection : aucune Régime de SS : ALD 2)- Evolutivité de la maladie et de l’insertion socioprofessionnelle : Eléments biographiques : Antécédents familiaux Antécédents somatiques Situation familiale Situation socioprofessionnelle Facteurs de stress psychosociaux Mère suivie en psychiatrie pour PMD Aucun Mariée, 3 enfants. Notion de relation extraconjugale pendant 2 ans (en 1998). Travaille dans le nettoyage industriel. Nombreux arrêts de travail. Mari au chômage depuis 1999. Pas de facteurs déclenchant aux décompensations Histoire de la maladie : Début du suivi Diagnostic principal Premiers symptômes et diagnostic évoqué Délai diagnostic Suivi actuel Traitement actuel 1998 (soit 5 ans) Dépression unipolaire avec antécédents familiaux de PMD Dépressions récurrentes Difficile à déterminer Suivi régulier au CMP Effexor®, tranxène® Profil évolutif : Age de début Fréquence et durée des hospitalisations Passages à l’acte Symptômes psychotiques Abus de substance Trouble de la personnalité Qualité de l’observance thérapeutique inconnu Peu fréquentes : 2 hospitalisations au total aucun Présents lors des décompensations mélancoliques sous forme d’idées délirantes congruentes à l’humeur Non. Notion d’éthylisme chez le mari Non précisé Bonne globalement (sauf Solian®) 109 3)- Evolution globale du traitement et place des neuroleptiques : Dates Fréquences des Hospitalisations et durée -2 hospit. de 15 Déc. jours et 1998 1 mois en 1998 à déc.2000 et en février 2000 Déc. 2000 à nov. 2002 -Pas d’hospit. -Suivi Nov. 2002 à ce ambulatoire jour Etat clinique Et diagnostic évoqué Neurolepti Neuroleptiq TR Autre Commentaire que ue associé traitement incisif sédatif -hospit. pour accès mélancolique avec idées délirantes de culpabilité et idéations suicidaires -Puis succession de récidives dépressives -aucun -Rechutes dépressives -aucun -Solian® 100mg/j de décembre 2000 à novembre 2002 -aucun -aucun -Persistance de rechutes dépressives -Tercian® ponctuellement -aucun -ATD -BZD -aucun -ATD -BZD -aucun -ATD -BZD -Notion de risque de récidive ou de virage maniaque lors de la 1ère hospit. du fait du tableau clinique et des ATCD familiaux -Bilan pré-lithium fait lors de la 2ème hospit. -Solian® instauré dans un but psychostimulant et de prévention des rechutes -Réticence au traitement NLP du fait de la prise de poids. D’où arrêt en novembre 2002 -Rechutes dépressives fréquentes mais se redressant sous ATD 110 4)- Conclusion et commentaires : Trouble unipolaire, sans notion de virage maniaque ni hypomaniaque dans les antécédents et le suivi. Mais antécédent familial de trouble bipolaire. Il existe peu de signes de gravité : pas de passage à l’acte, hospitalisations peu fréquentes, pas de retentissement socioéconomique. On note cependant lors des deux seules hospitalisations des idées délirantes congruentes à l’humeur. L’état clinique est relativement stabilisé par un traitement antidépresseur au long cours. Un traitement thymorégulateur par lithium a été discuté (lors de la 2ème décompensation mélancolique en février 2002) mais n’a finalement pas été mis en place, peut-être du fait de la faible évolutivité du trouble. Le traitement neuroleptique (Solian® à faible dose) a été utilisé à visée désinhibitrice, et en prévention des rechutes, le traitement antidépresseur seul au long cours ne permettant pas une diminution de la fréquence des accès dépressifs. Ce traitement ne semble pas avoir permis de réelle amélioration, et surtout a suscité beaucoup de réticence (+/mauvaise observance) de la part de la patiente du fait de la crainte de prise de poids. 111 11- Fiche n°11 : Mme PAR. 1)- Données administratives : Nom : PAR. Prénom : Annie Née-le : 7/02/1958 Age actuel : 44 ans Sexe : F Revenus : assistante école maternelle Mesure de protection : aucune Régime SS : ALD 2)- Evolutivité de la maladie et de l’insertion socioprofessionnelle : Eléments biographiques : Antécédents familiaux Antécédents somatiques Situation familiale Situation socioprofessionnelle Facteurs de stress psychosociaux Frère alcoolique chronique ; mère dépressive Maladie de Bouveret Mariée depuis 1982, 2 enfants Assistante maternelle, actuellement en congé longue durée Non précisé Histoire de la maladie : Début du suivi Diagnostic principal Premiers symptômes et diagnostic évoqué Délai diagnostic Etat actuel et suivi Traitement actuel 2000 (soit 3 ans) TB de type I Agitation psychomotrice avec idées délirantes Pas de diagnostic évoqué, en juin 2000(42 ans) 2 ans (octobre 2002) Stabilité clinique ; suivi ambulatoire au CMP Effexor®, athymil®, tranxène®, zyprexa 5®, dépamide® Profil évolutif : Age de début Fréquence et durée des hospitalisations Passages à l’acte Symptômes psychotiques Abus de substance Trouble de la personnalité Qualité de l’observance thérapeutique 42 ans (juin 2000), tardif 3 hospit. en 2 ans , de 3 sem. à 2 mois Aucuns Présents congruents et non congruents à l’humeur Non Hystérique Bonne 112 3)- Evolutivité du traitement et place des neuroleptiques au long cours : Dates Fréq. des hospit. et durée -2 hospit. de 3 Juin 2000à sem. et 2 mois octobre en HL 2002 Octobr e 2002 à avril 2003 -1 hospit de 3 sem. suivie d’1 mois ½ d’hôpital de jour Etat clinique et diagnostic évoqué Neuroleptiqu TR associé e sédatif -aucun -Risperdal® en -Tercian® -1er juin 2000 : agitation psychomotrice avec idées juin 2000, arrêté en phase délirantes de persécution, pour « allergie » aiguë, la 2è fois arrêté déstructuration du champ -puis Solian® pour de la conscience (BDA ?), de mi-juin à Syndrome juillet 2000, angoisse extraarrêté lors de -30 juin 2000 : EDM de pyramidal l’EDM type mélancolique Neuroleptique incisif -Zyprexa® -Accès maniaque avec depuis octobre idées délirantes non 2002 congruentes à l’humeur -Actuellement, humeur relativement stable, plutôt dépressive. -Aucun Autre traitement Commentaire -ATD : seropram® et athymil® -BZD -1er accès inaugural, brutal, d’aspect atypique, mais se rapprochant d’une BDA -A noter, le début tardif à 42 ans -2è accès : EDM de type mélancolique, sans idées délirantes -intervalle libre entre août 2000 et octobre 2002 -Confirmation du diagnostic de PMD et mise en place d’un TR Dépamide® -ATD : IRS depuis + athymil® octobre 2002 -BZD 113 4)- Conclusion et commentaires : Trouble bipolaire de type I à début tardif et atypique (agitation psychomotrice évoquant une bouffée délirante aiguë). Il existe des signes de gravité : éléments psychotiques non congruents à l’humeur. Mais le traitement est bien suivi, les accès peu fréquents et la vie sociale est préservée. Le traitement thymorégulateur est institué dès le diagnostic confirmé, c’est-à-dire lors du 3è accès thymique. Les neuroleptiques ont été prescrits en première intention lors d’un accès aigu, difficilement « étiquetable », associant symptômes maniaques et psychotiques non congruents à l’humeur. A noter qu’un antipsychotique a été choisi en première intention. Son maintien se justifie, en association avec un thymorégulateur, par la poursuite du traitement efficace et la persistance de troubles thymiques entre les accès (dépressifs ou mixtes). 114 13- Fiche n°13 : Mme RIO. 1)- Données administratives : Nom : RIO Prénom : Renée Née le : 12/12/1930 Domicile : individuel, Le Mans Sexe : F Age actuel : 73 ans Niveau d’étude : Non précisé Revenus : Non précisé Mesure de protection : aucune Régime SS : ALD 2)- Evolutivité de la maladie et de l’insertion professionnelle : Eléments biographiques : Antécédents familiaux Antécédents somatiques Situation familiale Situation professionnelle Facteurs de stress psychosociaux Non connus HTA, hypercholestérolémie, insuffisance coronarienne avec angioplastie et pose de stent en 1990 Mariée, enfants( ?), 1 enfant décédé en bas âge Bonne insertion sociale Non précisés Histoire de la maladie : Durée du suivi Diagnostic principal Premiers symptômes et diagnostic évoqué Délai diagnostic Suivi actuel Traitement actuel 1995 (soit 8 ans) TB de type 2 EDM en automne 1995 (hospit. de 15 jours) Suivi ambulatoire au CMP Déroxat®, xanax®, photothérapie Profil évolutif : Age de début Fréquence et durée des hospitalisations Passages à l’acte Symptômes psychotiques Abus de substance Trouble de la personnalité Qualité de l’observance thérapeutique Inconnu 1 hospit. en automne 1995 Non Non Non De type phobique Bonne 115 3)- Evolution du traitement et place des neuroleptiques au long cours : Dates Fréq. des hospit. et durée De oct. -1 hospit. en 1995 à automne 1995 avril 2003 Etat clinique et diagnostic évoqué Neuroleptique incisif -aucun -EDM récurrents avec périodicité saisonnière, prédominance matinale -virage hypomaniaque en été 1996 -Troubles phobiques Autre Neurolepti TR associé traitement que sédatif -aucun -aucun -ATD de type tricycliques (anafranil®) jusqu’en juin 1996 puis IRS -photothérapie Commentaire -Petits signes de bipolarité : périodicité saisonnière, présence de signes d’endogénicité (angoisse matinale) et virage hypomaniaque bref 116 4)- Conclusion et commentaires : Il s’agit d’un trouble dépressif récurrent avec des petits signes de bipolarité (périodicité matinale et saisonnière, et petit virage hypomaniaque) faisant suspecter un trouble bipolaire de type II. Il n’existe pas de facteur de gravité et l’évolution sociale est normale. Le traitement consiste en un antidépresseur au long cours et de la photothérapie lors des décompensations aiguës, ce qui semble bien équilibrer la symptomatologie de cette patiente. Les thymorégulateurs n’ont pas été prescrits en première intention. Les neuroleptiques ne semblent pas nécessaires à la prise en charge. 117 III- Analyse des résultats : Dans cette étude qualitative, nous avons donc répertorié pour chacun des patients bipolaires l’évolution des symptômes cliniques et des traitements institués, en focalisant notre attention sur les thymorégulateurs et les neuroleptiques. Nous nous proposons maintenant, dans ce chapitre, de comparer les résultats obtenus avec les données de la littérature et les stratégies thérapeutiques préconisées dans les consensus. 1- Profil des patients : (cf. annexe n° 5 ) a)- Sexe : Dans l’échantillon, 11 dossiers sur 13 concernent des femmes, ce qui confirme la prédominance féminine de cette maladie. b)- Age de début des troubles : L’âge moyen de début des troubles est de 29,7 ans. Cependant, il ne correspond pas forcément ici à l’âge des premiers symptômes, mais à l’âge de la première consultation ou de la première hospitalisation. Ce chiffre est légèrement plus élevé que dans l’étude Egeland et al (54) où la première hospitalisation se fait en moyenne à l’âge de 25,5 ans. Trois patients ont eu un début précoce (inférieur ou égal à 20 ans) et deux, un début tardif (55 et 42 ans). L’âge de début des troubles est difficile à chiffrer avec exactitude car les hospitalisations antérieures en dehors du centre hospitalier d’Allonnes ne sont pas toujours précisées dans les dossiers. De plus, les patients ont pu présenter des symptômes « à minima » qui n’ont pas nécessité d’hospitalisation ou de consultation en milieu psychiatrique et ne sont donc pas précisés dans les dossiers. 118 On peut noter également une durée de suivi élevée, dans cet échantillon, puisqu’elle est en moyenne de 17 ans. La durée de suivi la plus longue a été de 45 ans. Bien que ces suivis soient souvent entrecoupés d’intervalles libres où le patient a été perdu de vue, ceci illustre que le trouble bipolaire est bien une maladie chronique, nécessitant une prise en charge et un traitement au long cours. b)- Errance et délai diagnostiques : Le délai diagnostique est en moyenne de 8,2 ans, ce qui correspond aux données de la littérature (8 ans, entre la première consultation et le diagnostic selon F. Rouillon, (9)). Dans l’échantillon, le diagnostic de départ a été modifié au cours du suivi des patients dans 12 dossiers sur 13. Dans 5 dossiers, le premier diagnostic évoqué était celui de psychose ou de psychose dysthymique, dans les 7 autres dossiers, le premier diagnostic évoqué était celui de dépression récurrente. Globalement, le diagnostic de dépression récurrente a été plus souvent évoqué dans le trouble bipolaire de type II, tandis que celui de psychose a été à chaque fois évoqué dans le trouble bipolaire de type II. Les symptômes psychotiques sont retrouvés dans 61% des cas (8 dossiers sur 13) et accompagnent plus fréquemment les accès maniaques des troubles bipolaires de type I. Il existe peut-être un biais de recrutement étant donné que la plupart des patients de cette étude ont nécessité, à un moment, une hospitalisation en milieu psychiatrique (les accès délirants étant plus sévères et nécessitant plus fréquemment une hospitalisation). La présence de ces symptômes psychotiques entraîne fréquemment un doute diagnostique avec un trouble psychotique. c)- Comorbidité : Dans cet échantillon, la comorbidité alcoolique n’est que de 23% (3 dossiers sur 13), ce qui est plus bas que les chiffres retrouvés dans la littérature (35% selon Goodwin et Jamison). 119 Un trouble de la personnalité a été retrouvé dans plus de la moitié des cas (7 dossiers sur 13). Par ordre décroissant de fréquence, il s’agissait de trouble de personnalité de type hystérique (3 cas), phobique (2 cas), psychopathique (1 cas) et paranoïaque (1 cas). Pour certains patients, ce trouble de personnalité a pu masquer le diagnostic. C’est le cas en particulier dans les dossiers 4 et 7 (Mme DAH. et Mme GIL) où l’instabilité thymique et les accès hypomaniaques ont longtemps été mis sur le compte d’une personnalité hystérique, ce qui explique sans doute en partie le retard diagnostique. d)- Fréquence de la mauvaise observance : Elle concerne, à un moment donné de l’évolution du trouble, 7 patients sur 13, ce qui montre son importance. Elle est probablement sous-évaluée. On peut noter également que, pour certains patients, elle varie au cours du suivi. C’est le cas notamment dans le dossier 5 (Melle DES.) : l’introduction du lithium a permis une meilleure adhésion au traitement et aux soins, alors qu’antérieurement la patiente avait été traitée par neuroleptiques d’action prolongée du fait d’une mauvaise observance. L’amélioration symptomatique ressentie par la patiente a pu influencer favorablement l’adhésion aux soins et de même, la meilleure observance a sans doute permis la stabilisation de l’état clinique. On peut également supposer que la relation thérapeutique et la psychothérapie ont également un rôle important dans cette adhésion aux soins. e)- Le retentissement social : Un retentissement social marqué à modéré a été retrouvé chez 61% des patients (8 dossiers sur 13). Ce sont les répercussions professionnelles qui sont les plus importantes (ou les plus visibles): alors qu’au début de leur maladie, tous les patients sauf deux (1 ayant toujours exercé des « petits métiers » et une patiente dont le trouble a débuté dans l’enfance) avaient une profession stable, lors de l’étude, 5 patients étaient en congé longue 120 maladie, 1 patient présentait une désinsertion sociale et 3 patients recevaient une allocation adulte handicapé. Les conséquences sociales concernent également la vie conjugale (4 cas de divorce). Ces résultats correspondent aux données de la littérature et confirment que le trouble bipolaire est une pathologie grave entraînant des perturbations psychosociales souvent sévères, pouvant aller jusqu’à l’invalidité et l’institutionnalisation de longue durée. 2- La place des neuroleptiques dans le traitement d’entretien : a)- Fréquence et modalité de prescription : (cf. annexe n° 6 et tableau n°XI ) Dans cette étude, la prescription d’un neuroleptique au long cours (c’est-à-dire, par définition, sur une période supérieure à 6 mois) dans le traitement d’entretien du trouble bipolaire a été fréquente. Elle a concerné 12 patients sur 13, à un moment donné de l’évolution de leur maladie. La durée moyenne de prescription de neuroleptiques pour ces 12 patients est de 8,3 ans sur une durée moyenne de suivi de 17 ans. Mais ces durées sont extrêmement variables d’un patient à l’autre, la durée maximale étant de 32 ans (sur un suivi de 32 ans). Ces résultats élevés correspondent aux données de la littérature. Contrairement aux recommandations, il semble que la prescription des neuroleptiques soit souvent prolongée bien au-delà des phases aiguës de la maladie. Nous pouvons faire trois remarques à propos des modalités de prescription de ces molécules : ► Tout d’abord, ces traitements sont souvent prescrits en première intention. Dans 7 dossiers sur 13 de l’étude (cf. annexe n° 6 et tableau n° XI ), les neuroleptiques ont été institués avant la mise en place d’un thymorégulateur, le plus 121 souvent lors d’une décompensation aiguë ou d’un premier accès. Plusieurs facteurs viennent expliquer cette attitude thérapeutique: - La nécessité de contrôler rapidement une agitation ou un délire, - La présence de symptômes psychotiques au premier plan et le doute diagnostique avec une décompensation schizophrénique ou une bouffée délirante aiguë, - Le délai d’action des thymorégulateurs. Ainsi, la prescription d’un thymorégulateur en première intention devant un premier accès thymique, comme cela est préconisé dans les consensus, apparaît parfois difficile en pratique quotidienne. Si les neuroleptiques classiques sont efficaces et plus rapides que les thymorégulateurs dans le contrôle des symptômes psychotiques, de l’agitation psychomotrice et de l’agressivité dans l’accès maniaque, ils risquent d’entraîner des effets indésirables psychomoteurs et n’ont pas prouvé leur efficacité sur le long terme dans la prévention des rechutes. ► La deuxième remarque est que les neuroleptiques sont souvent prescrits en association avec les thymorégulateurs. Cette association thérapeutique a été retrouvée dans 10 dossiers sur 12 dans l’étude réalisée (cf. annexe n° 6 et tableau n° XI). Ceci semble indiquer que pour de nombreux patients bipolaires la monothérapie par thymorégulateur recommandée dans les consensus n’est pas suffisante pour contrôler la maladie. ► La troisième remarque concerne le type de molécule prescrit et la place grandissante des neuroleptiques atypiques: 122 La majorité des patients de cette étude est suivie depuis de nombreuses années, bien avant l’utilisation des neuroleptiques atypiques. Ce qui explique que la majorité d’entre eux ont reçu, lorsque des neuroleptiques étaient prescrits, des neuroleptiques classiques soit sous forme orale, soit sous forme à action prolongée. Depuis l’arrivée des antipsychotiques et bien que ceux-ci ne possèdent pas l’AMM dans le traitement au long cours, on observe qu’ils sont souvent prescrits en première intention par rapport aux neuroleptiques classiques (lors du premier accès, comme pour le dossier n°12), ou en remplacement de ces derniers. Ainsi, dans notre étude, ils ont été prescrits chez 8 patients, et 4 n’ont reçu, comme neuroleptiques, que des atypiques. Sur les 13 patients de l’échantillon, 7 sont encore actuellement sous neuroleptiques. Parmi eux, 5 ont un neuroleptique atypique, contre seulement 2 un neuroleptique classique (dont un sous forme injectable retard du fait d’une noncompliance aux soins). Cette tendance correspond bien aux recommandations actuelles des consensus d’experts qui préconisent l’utilisation préférentielle des antipsychotiques à la place des neuroleptiques classiques lorsqu’un neuroleptique est nécessaire. Il semble, de plus, que la prescription d’un neuroleptique atypique a pu apporter un bénéfice (normothymie et meilleure tolérance) chez au moins deux patientes antérieurement mal stabilisées avec des neuroleptiques classiques (Mme DUP. et Mme DES.). ► La quatrième remarque concerne la prescription concomitante de deux neuroleptiques. Cette attitude thérapeutique a concerné 4 patients sur des durées de prescription allant de 9 mois à 9 ans. A chaque fois ces prescriptions étaient justifiées par un contrôle insuffisant de l’agitation et de l’agressivité avec un seul neuroleptique. 123 Tableau n°XI : modalité de prescription des neuroleptiques dans l’échantillon de 13 patients Nombre de patients Pourcentage Patients sous NLP à un moment de l’évolution 12 92 de la maladie NLP classiques sédatifs 7 53,8 69 NLP non sédatifs -classiques -atypiques -action prolongée Association de 2 NLP 9 4 8 5 3 Durée de suivi 17 ans Durée moyenne NLP sédatif 3 ans Durée moyenne NLP à visée non sédative Durée moyenne de prescription de 2 NLP 6 ans Prescription en 1ère intention En association à TR 7 53,8 10 77 23 1,5 ans b)- Les raisons de prescription : (cf. tableau n°XII) Les motifs de prescription retrouvés dans cette étude sont globalement comparables à ceux retrouvés dans la littérature : - Insuffisance ou inefficacité des thymorégulateurs en « monothérapie », ce qui confirme le fait que de nombreux patients bipolaires nécessitent une poly-médication dans laquelle les neuroleptiques occupent une place de choix. - Non-observance du traitement, associée, en particulier, à la prescription de neuroleptiques d’action prolongée. 124 - L’ « hésitation » à modifier un traitement qui semble efficace (qui semble avoir stabilisé un patient) après un accès thymique. C’est ce que Serniak (30) avait nommé « poursuite inappropriée » du traitement. Ce paramètre est peut être d’autant plus important qu’il existe un certain « flou » dans les consensus au sujet de la durée de prescription des neuroleptiques et de l’identification des patients nécessitant ce type de traitement au long cours. - La gravité des épisodes, puisque la prescription est plus fréquente après des accès thymiques sévères (en particulier lorsqu’il existe des symptômes psychotiques). Cette plus grande fréquence de prescription peut être expliquée à la fois par la plus large utilisation des neuroleptiques en phase aiguë lorsque les accès sont sévères, mais aussi par le doute diagnostique qui peut alors exister entre psychose et trouble bipolaire de type I. C’est également dans ces cas de figure que la prescription de neuroleptique est la plus prolongée. - La persistance d’une symptomatologie thymique ou psychotique entre les accès, ce qui semble relativement fréquent, contrairement à l’image que l’on se fait du trouble bipolaire. D’autres motifs sont également fréquemment apparus dans l’échantillon, alors qu’ils sont peu mentionnés dans les différentes études: - La présence de troubles du sommeil, d’une agressivité ou d’un trouble de personnalité, souvent associés à la prescription de neuroleptiques à visée sédative. Cette prescription est loin d’être négligeable. De plus, les neuroleptiques ayant des propriétés sédatives sont essentiellement des neuroleptiques classiques, avec 125 tous les effets indésirables neurologiques et neurovégétatifs que ces molécules peuvent entraîner. Cependant, ces troubles du sommeil ou cette agressivité doivent-ils être traités de manière symptomatique ou bien peut-on les considérer comme des symptômes résiduels d’un trouble de l’humeur ? Dans ce cas, le traitement s’orienterait vers des antidépresseurs ou des thymorégulateurs, plus que vers des neuroleptiques à visée sédative. Tableau n°XII : Principales raisons de prescription des neuroleptiques dans l’échantillon de 13 patients : Mauvaise observance Nombre de patients 5à6 Persistance symptomatologie maniaque ou psychotique entre les accès 5 Doute diagnostique avec psychose Dysthymique 5 Efficacité insuffisante* ou résistance aux thymorégulateurs 5 Poursuite traitement efficace après épisode 4 maniaque sévère Angoisse/trouble du sommeil 3 Agressivité 3 Contre indication aux thymorégulateurs 1 Traitement d’appoint dans les dépressions récurrentes 1 * Dans « Efficacité insuffisante des thymorégulateurs », on retrouve 3 cas de cycles rapides 126 Au total, dans cet échantillon de patients bipolaires, la prescription au long cours de neuroleptiques, à un moment de l’évolution de la maladie, a été fréquente. La monothérapie par thymorégulateur en première intention lors d’un accès thymique ou en traitement d’entretien ne semble pas être l’attitude la plus courante des médecins prescripteurs, tant dans le passé qu’actuellement. Il existe donc bien un net décalage entre les recommandations et la pratique clinique. Cette prescription de neuroleptiques au long cours semble principalement expliquée par la poursuite des traitements efficaces lors des accès aigus en particulier maniaques sévères (et peut-être une certaine hésitation à modifier un traitement efficace), la résistance ou l’insuffisance des thymorégulateurs et le doute diagnostique entre trouble bipolaire et trouble psychotique. Les neuroleptiques atypiques semblent supplanter actuellement les neuroleptiques classiques. Même si cette pratique semble habituelle, il est légitime de se poser la question de son intérêt réel et des risques qu’elle induit. Nous y reviendrons dans la discussion. IV- Discussion : Le contraste entre recommandations et pratique clinique retrouvé dans cette étude nous conduit à porter un regard critique à la fois sur nos attitudes, et quelques fois nos « habitudes » thérapeutiques, et sur les consensus thérapeutiques qui ne sont pas toujours applicables à la réalité quotidienne. Dans ce chapitre, nous aborderons les difficultés faisant obstacle à l’application des consensus et les risques liés à nos attitudes pratiques. 127 1-En quoi l’application des consensus est-elle difficile : a)- Les difficultés diagnostiques : Ce qui ressort de cette enquête, c’est que le diagnostic de trouble bipolaire est souvent difficile à faire, et cela pour plusieurs raisons que l’on a déjà abordées : ► Ces difficultés sont importantes lorsque les symptômes thymiques sont associés aux symptômes psychotiques dans un accès aigu. Il est alors parfois difficile de faire la différence entre une bouffée délirante aiguë, une décompensation psychotique ou schizoaffective ou un accès maniaque. C’est souvent alors l’évolution de la maladie, la symptomatologie présentée entre les accès, la recherche des antécédents familiaux qui vont venir secondairement confirmer ou orienter le diagnostic. Certains patients, cependant, ne peuvent être « classés » dans des cadres nosologiques précis, parce qu’ils présentent une symptomatologie « à mi-chemin » entre troubles bipolaires et schizophrénie. Ces cas ont déjà été signalés depuis longtemps dans la littérature. Kraepelin, par exemple, notait qu’il existait probablement « une zone de recouvrement » entre ces deux pathologies. De plus, il existe de possibles passages d’une psychose maniaco-dépressive vers une schizophrénie, et inversement. Les études de suivi réalisées par Chen et al (12) montrent que, sur 7 ans, 29% des patients bipolaires étaient re-diagnostiqués schizophrènes et 16% des patients schizophrènes étaient re-diagnostiqués bipolaires. ► Un deuxième paramètre peut venir interférer sur la clinique du trouble bipolaire : la comorbidité avec un trouble de la personnalité, qui semble fréquente dans cette pathologie. En effet, il n’est pas toujours facile de différencier les symptômes qui appartiennent au trouble bipolaire et ceux qui appartiennent au trouble de personnalité. Ce dernier peut venir modifier l’expression clinique des accès thymiques et, dans certains 128 cas, « masquer » le diagnostic réel. Enfin, le trouble de personnalité peut venir influencer le cours évolutif de la maladie en conditionnant, en particulier, l’observance thérapeutique. Pour certains auteurs comme Akiskal, ils pourraient même être considérés comme une forme sub-syndromique du trouble bipolaire. ► Enfin, le 3ème paramètre, on l’a déjà vu, concerne la difficulté, devant des accès dépressifs récurrents, de retrouver, dans l’histoire des patients, des arguments en faveur d’une bipolarité. Ceci explique que le délai diagnostique moyen, dans notre enquête comme dans les données de la littérature, entre la première consultation et le diagnostic est de 8 ans et le délai entre l’apparition des premiers symptômes et la mise en route du traitement est de 10 ans (9). Ces difficultés diagnostiques ont des conséquences directes sur le plan thérapeutique, avec en particulier le retard à l’instauration d’un thymorégulateur. Les stratégies thérapeutiques décrites dans les consensus ne peuvent pas prendre en compte toute la complexité de la clinique. Elles se basent sur une description typique de la maladie, or cette symptomatologie typique n’est pas le cas le plus fréquent dans la pratique. Cela montre aussi toute l’importance pour les cliniciens de penser plus souvent au diagnostic de trouble bipolaire devant des épisodes dépressifs récurrents ou devant des troubles qualifiés de « schizoaffectifs », de rechercher dans l’histoire des patients et leurs antécédents les arguments en faveur de cette maladie. Pour certains patients présentant à la fois des symptômes thymiques et psychotiques, il semble préférable de traiter en priorité les troubles de l’humeur. Enfin, les études de suivi montrant la fréquence des passages d’un trouble bipolaire vers une schizophrénie et inversement doit nous inciter à remettre en cause 129 régulièrement nos diagnostics, lorsque les patients présentent des décompensations aiguës. Cette attitude pourrait permettre de diminuer les retards diagnostiques et, par voie de conséquence, les retards à la mise en route du traitement le plus adapté. b)- L’insuffisance des thymorégulateurs : Malgré l’efficacité du lithium sur les rechutes et le risque suicidaire, et le développement de nouvelles molécules, les thymorégulateurs semblent encore insuffisants ou inefficaces chez beaucoup de patients bipolaires. Ces patients réfractaires aux normothymiques présentent des formes sévères de la maladie avec une plus forte proportion de symptômes psychotiques, de cycles rapides, d’états mixtes, de non observance thérapeutique, de comorbidités alcoolique ou toxique associées. On peut y ajouter d’autres facteurs comme les retards diagnostiques et la prescription inadaptée de certains traitements, en particulier antidépresseurs qui peuvent entraîner une évolution vers un cycle rapide et l’élargissement du spectre des troubles bipolaires. Ainsi, comme l’avait retrouvé l’étude de H. Verdoux (33), la prescription de neuroleptiques au long cours semble corrélée avec les formes sévères de la maladie. Si ces prescriptions de neuroleptiques semblent « ne pas se faire au hasard » (33), on constate que ces pratiques n’ont pas fait l’objet d’une évaluation sur le long cours par études comparatives. Ces études permettraient de mieux définir les patients réfractaires susceptibles de bénéficier de ces traitements et de mieux définir également les molécules, les doses et les durées optimales. 130 Les antipsychotiques, par leurs avantages en terme de tolérance, peuvent être une alternative intéressante aux neuroleptiques classiques. L’une des causes majeure d’aggravation de la maladie est la non observance thérapeutique. Le trouble bipolaire est, en effet, une maladie chronique et nécessite une prise en charge au long cours. Le traitement, pour être bien accepté par le patient, doit également être bien toléré et doit entraîner le minimum d’effets indésirables gênant sa qualité de vie. Ceci est d’autant plus important que la maladie est caractérisée par l’existence, entre les décompensations, d’intervalles libres de tout symptôme. Les thymorégulateurs, comme tout traitement, ont des effets indésirables et des contre-indications qui peuvent limiter leur utilisation. On peut citer à titre d’exemple : la lenteur d’idéation, les tremblements des extrémités et la nécessité d’un suivi biologique régulier avec le lithium, la contre-indication du lithium en cas de grossesse et les limites de son utilisation chez la femme en âge de procréer, l’effet inducteur enzymatique de la carbamazépine en particulier avec les contraceptifs oraux, etc… Ces effets indésirables sont importants à prendre en compte dans le choix du traitement et doivent être expliqués au patient. Ainsi, le traitement médicamenteux nécessite d’être adapté à chaque cas particulier que représente le patient, en terme de symptomatologie, mais aussi de vécu, d’acceptation de sa maladie et des traitements prescrits antérieurement, de son histoire personnelle et familiale. Il s’intègre dans une prise en charge plus globale où la relation médecin / patient joue un rôle central. 2- Nos pratiques nécessitent d’être évaluées : Si les consensus thérapeutiques ne sont pas toujours applicables et nécessitent d’être adaptés, nos pratiques et nos habitudes thérapeutiques nécessitent aussi d’être évaluées. 131 a)- Dans les accès aigus : Les études cliniques et notre enquête montrent que les décompensations aiguës, en particulier maniaques, sont souvent traitées par neuroleptiques. Ceci pour plusieurs raisons qui ont déjà été évoquées. L’une des raisons principales est le délai d’action des thymorégulateurs et la nécessité d’un contrôle rapide de l’agitation. Si l’utilisation des neuroleptiques s’avère nécessaire lorsque l’agitation est majeure ou les symptômes psychotiques au premier plan, leur recours systématique peut être discuté lorsque ces symptômes sont plus modérés. Peut-être faudrait-il définir plus précisément la population de patients pour laquelle les neuroleptiques sont nécessaires en phase aiguë afin d’éviter leur prescription trop systématique et plus basée sur des « habitudes » thérapeutiques que sur une réelle nécessité. Tolérer une agitation modérée pourrait permettre d’éviter la prescription de traitements ayant potentiellement des effets neurologiques mal tolérés par les patients. Les consensus thérapeutiques sont imprécis sur ce sujet, notant que les neuroleptiques sont utiles dans les manies avec symptômes psychotiques associés et « éventuellement dans d’autres formes de manie », sans que ces autres formes, notamment sévères, soient clairement définies. b)- Dans le traitement au long cours : Certains auteurs (28) ont émis l’hypothèse que la prescription de neuroleptiques au long cours dans le trouble bipolaire pouvait être liée à la poursuite inappropriée de ces traitements. Dans notre étude, on a pu constater également que les neuroleptiques étaient parfois maintenus au-delà de la phase aiguë parce que les médecins, et parfois aussi les patients eux-mêmes, étaient hésitant à modifier un traitement efficace ayant stabilisé un accès aigu. 132 Ainsi, certaines prescriptions de neuroleptiques, instituées lors d’un accès aigu, sont poursuivies « indéfiniment » sans que l’intérêt de ce maintien ait été réévalué. Cette attitude comporte un certain nombre de risques : - Le maintien inutile de traitements ayant des effets indésirables sur la qualité de vie du patient, - Et le retard à la mise en route du traitement le plus efficace. Ces deux paramètres peuvent venir aggraver le pronostic de la maladie. Les effets indésirables moteurs et neuropsychiques induits par les neuroleptiques peuvent ressembler aux symptômes d’une schizophrénie. Ils peuvent alors remettre en cause ou masquer le diagnostic de trouble bipolaire. Lorsque le diagnostic de départ est déjà incertain, le patient peut être considéré à tort comme psychotique et le traitement risque alors d’être poursuivi indéfiniment. De plus, ces traitements ont des répercussions sur la qualité de vie du patient et sur son insertion socioprofessionnelle. L’état d’indifférence psychomotrice qu’ils induisent peut être mal vécu, mais peut également contribuer à lui poser une « étiquette » de « patient psychiatrique » avec toutes les conséquences sociales que cela peut impliquer. Enfin, le retard diagnostique et donc le retard à l’instauration du traitement le plus adapté peut entraîner une aggravation de la maladie (les neuroleptiques classiques pouvant favoriser la survenue de dépressions). Ceci montre l’importance pour les médecins de réévaluer non seulement leur diagnostic initial lors de chaque décompensation, mais aussi leurs prescriptions afin de ne pas maintenir inutilement des traitements ayant potentiellement des effets indésirables invalidants pour la qualité de vie du patient. 133 c)- L’apport des neuroleptiques atypiques : Les neuroleptiques atypiques apparaissent intéressants dans le traitement du trouble bipolaire du fait de leur moindre risque d’effets indésirables de type parkinsonien, leur respect des capacités cognitives et leurs propriétés sur les symptômes thymiques. L’insuffisance et les limites des thymorégulateurs et le recours fréquent aux neuroleptiques dans la pratique clinique expliquent qu’on est toujours à la recherche de nouvelles molécules, si possibles bien tolérées, dans le traitement du trouble bipolaire. C’est pourquoi de nombreuses études récentes tentent d’évaluer l’intérêt des antipsychotiques en tant que traitement adjuvant ou en monothérapie dans les phases aiguës et dans la prophylaxie de la maladie. . Des indications se dégagent déjà : - Devant un premier accès maniaque ou mixte ( en particulier si le diagnostic reste incertain), les antipsychotiques pourraient être une bonne alternative aux neuroleptiques classiques puisqu’ils induisent moins d’effets indésirables neurologiques risquant de masquer l’évolution du trouble, - Dans les cas de résistance, en association avec un thymorégulateur. Pour certains, à la place de l’association de deux thymorégulateurs actuellement préconisée (et non démontrée), l’ajout de faibles doses de neuroleptiques pourrait être efficace tout en ayant peu d’effets indésirables, - En première intention par rapport aux neuroleptiques classiques, dès qu’un traitement neuroleptique est nécessaire. Dans les consensus les plus récents, l’olanzapine est indiquée en première intention dans les accès maniaques et des études tendent à prouver son efficacité sur le long terme en monothérapie et en traitement adjuvant. 134 Les neuroleptiques atypiques s’avèrent efficaces aussi bien dans les psychoses que dans les troubles de l’humeur. Même s’ils peuvent être aujourd’hui utilisés dans l’accès maniaque, le risque est de traiter toutes les décompensations aiguës, psychotiques, maniaques ou « atypiques » avec ces molécules, sans faire de distinction entre les pathologies. Enfin, si ces traitements sont possiblement une perspective d’avenir, leur rôle exacte reste encore à déterminer. Ils nécessitent une évaluation sur le long terme, en ce qui concerne leur efficacité, mais aussi leur tolérance. Ceci afin de déterminer des doses, des molécules, des indications et des durées précises de prescription. Les effets indésirables, comme la prise de poids qu’ils induisent fréquemment, peuvent être source d’arrêt du traitement par les patients et doivent être pris en compte par les prescripteurs et expliqués aux patients. 135 CONCLUSION : Le concept de psychose maniaco-dépressive n’a cessé d’évoluer au cours du temps. D’abord définie comme une entité unique s’opposant à la schizophrénie, elle a été secondairement divisée en trouble bipolaire d’un côté et trouble unipolaire de l’autre. Depuis les années quatre-vingt, le spectre du trouble bipolaire a tendance à s’élargir en intégrant des dépressions considérées auparavant comme unipolaires voire névrotiques mais aussi des formes cliniques auparavant rattachées aux troubles schizophréniques ou schizoaffectifs. Si le concept de trouble bipolaire a subi de nombreux remembrements, le traitement de la maladie s’est également affiné au cours de ces dernières décennies en particulier avec l’introduction du lithium puis de nouvelles molécules thymorégulatrices. Les consensus définis par les experts préconisent l’utilisation de ces traitements, de préférence en monothérapie, à tous les stades de la maladie. Cependant, on constate qu’il existe fréquemment un décalage entre ces stratégies thérapeutiques et la pratique quotidienne. Cette différence est flagrante en ce qui concerne la prescription des neuroleptiques : en théorie ils sont limités aux accès aigus de la maladie et à certaines formes résistantes alors qu’en pratique, ils sont largement utilisés, y compris au long cours. Aussi, nous avons cherché à savoir, en retraçant l’histoire clinique et thérapeutique de 13 patients bipolaires suivis sur plusieurs années dans un service de psychiatrie adulte, les raisons de ce décalage. Plusieurs éléments ressortent de cette étude : ► Tout d’abord, pour la quasi totalité des patients suivis, le diagnostic posé au départ a été secondairement modifié au cours du temps. En moyenne, le délai entre la première consultation et le diagnostic a été de 8 ans, ce qui pose question car le pronostic de la maladie dépend de la mise en route précoce d’un traitement de fond adapté. Ce délai 136 est le reflet de la complexité de la clinique dans la pratique quotidienne et des difficultés à faire la distinction entre le trouble bipolaire et ses deux diagnostics différentiels : la dépression unipolaire, voire « névrotique » et la psychose. Ces incertitudes diagnostiques ont des répercussions directes sur la prise en charge de la maladie : sur-prescription d’antidépresseurs et de neuroleptiques et sous-emploi de traitements à visée normothymique. Cela montre l’importance de réévaluer régulièrement nos diagnostics lors de chaque décompensation de la maladie afin de ne pas poursuivre inutilement des traitements potentiellement mal tolérés et de ne pas retarder la mise en route du traitement le plus adapté. Cette question est d’autant plus importante en ce qui concerne les neuroleptiques qui, par leurs effets indésirables neurologiques et cognitifs, peuvent altérer gravement la qualité de vie du patient et son insertion socioprofessionnelle. De plus, l’indifférence psychomotrice qu’ils induisent peut masquer le diagnostic de trouble bipolaire et faire croire, à tort, à un trouble psychotique. ► Deuxièmement, un certain nombre de patients bipolaires ne sont pas stabilisés avec les thymorégulateurs en monothérapie, en particulier lorsqu’il existe des signe de gravité de la maladie : troubles de la personnalité et conduites addictives associées, présence de symptômes psychotiques, mauvaise observance thérapeutique, etc… Des traitements adjuvants sont alors nécessaires, et en pratique, les neuroleptiques représentent un traitement de choix pour les prescripteurs. Paradoxalement, très peu d’études ont évalué leur efficacité sur le long terme, ce qui fait que ces pratiques restent encore « empiriques ». L’arrivée des antipsychotiques a donné un nouvel intérêt à la place des neuroleptiques dans le trouble bipolaire, par leur meilleure tolérance d’une part et d’autre part par la constatation qu’ils pouvaient avoir une action spécifique sur les symptômes thymiques. Ils sont de plus en plus souvent utilisés en première intention par les médecins par rapport aux neuroleptiques classiques, et l’un d’entre eux possède déjà une indication dans le traitement de l’accès maniaque aigu. Ils n’ont cependant pas encore prouvé leur 137 efficacité dans la prise en charge sur le long terme mais des études sont actuellement en cours pour définir leur rôle exact et leurs modalités de prescription. ► Troisièmement, le médecin se doit d’adapter les stratégies thérapeutiques au patient qu’il soigne, en prenant en compte d’éventuelles contre-indications médicamenteuses, mais aussi le vécu de la maladie et l’histoire personnelle et familiale de celui-ci. Le traitement s’inscrit ainsi dans une prise en charge plus globale où la relation médecin / patient tient une place importante. Cette relation a pour objectif de créer une alliance thérapeutique en aidant le patient à mieux comprendre sa maladie et à mieux accepter la nécessité d’un traitement au long cours et parfois à vie. Ainsi, la description clinique du trouble bipolaire va vers un élargissement de plus en plus important du concept, voire, pour certains, vers la notion d’un continuum allant des états dépressifs vers les psychoses schizophréniques. Parallèlement, on assiste à l’émergence de traitements (les antipsychotiques) qui tendent à prouver leur efficacité à la fois sur les symptômes thymiques et les symptômes psychotiques. Faut-il favoriser cette notion de continuum qui, pour certains auteurs, pourrait expliquer la large efficacité des neuroleptiques atypiques ou bien faut-il revenir à une description plus « classique » du trouble bipolaire répondant à un traitement plus spécifique? Ne risque t’on pas, à l’extrême, en favorisant l’élargissement de la maladie bipolaire, de ne plus faire de distinction entre les pathologies et de mettre tous les patients sous le même traitement ? 138 Bibliographie : 1- OLIE J.P., HARDY P., AKISKAL H., FELINE A., GOROG F., LOO H., POIRIER M.F.- Psychoses maniaco-dépressives- Editions techniques- Encyclopédie médico-chirurgicale, Psychiatrie, 37220A, 4-1990,32p 2- BOURGEOIS M-L., Evolution du concept du trouble maniaco-dépressif, dans Séminaire de psychiatrie biologique, 1999-2000, 1-21 3- ANGST J., Historical aspect of the dichotomy between manic-depressive disorders and schizophrenia, schizophrenia research, 2002; 57: 5-13 4- BOURGEOIS M., VERDOUX H., HENRY-DESMOTES-MAINARD Ch., Clinique des troubles bipolaires de l’humeur (le spectre bipolaire), dans les troubles bipolaires, T. LEMPERIERE,1996, chap. 2 : 21-57 5- BOURGEOIS M-L., VERDOUX H., indices et facteurs prédictifs de bipolarité dans les états dépressifs, Ann. Méd. 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Angst Tableau n°III : Les différents facteurs prédictifs pour les troubles bipolaires de type I, selon Akiskal et al (1983) Tableau n°IV : Les principaux thymorégulateurs Tableau n°V : Tableau des traitements de première intention dans le trouble bipolaire Tableau n°VI : Traitement au long cours du trouble bipolaire et niveaux de preuve Tableau n°VII : Fréquence d’utilisation des neuroleptiques en traitement d’entretien du trouble bipolaire Tableau n°VIII : Etudes évaluant l’efficacité des neuroleptiques au long cours dans le trouble bipolaire Tableau n°IX : Etudes concernant l’efficacité de la rispéridone dans le trouble bipolaire Tableau n°X : Etudes évaluant l’efficacité de l’olanzapine dans le trouble bipolaire Tableau n°XI : Modalité de prescription des neuroleptiques dans l’échantillon de 13 patients Tableau n°XII : Principales raisons de prescription des neuroleptiques dans l’échantillon de 13 patients 146 TABLE DES MATIERES INTRODUCTION………………………………………………………………....p 13 PREMIERE PARTIE :……………………………………………………….…..p 15 PRESENTATION DU TROUBLE BIPOLAIRE I- Evolution du concept de trouble bipolaire…………………….………….p 16 1- Historique du concept de trouble bipolaire……………………...….p 16 a)- Premières définitions………………………………………...….p 16 b)- La conception unificatrice de Kraepelin………………………..p 16 c)- Distinction des formes uni et bipolaires……………………...…p 17 d)- Elargissement du spectre bipolaire………………...……………p 19 2- Données épidémiologiques……………………………..…………..p 23 a)- Prévalence……………………………………………………….p 23 b)- Sex. Ratio….……………………………………………………p 24 c)- Age…………………………………………………………...…p 24 d)- Comorbidité…………………………………………………….p 24 3- Diagnostics différentiels…………………………………………....p 25 a)- Dépression unipolaire……………………………………..…….p 25 b)- Trouble bipolaire et symptômes psychotiques………………….p 27 147 II-Les facteurs de gravité…………………...………………………………...p 29 1- Facteurs de gravité liés au patient ou à la maladie………………….p 29 2- Facteurs de risque liés à la prise en charge…………………………p 31 III-Prise en charge du trouble bipolaire …………………………………....p 33 1- Les traitements disponibles…………………………………………p 33 a)- Les normothymiques……………………………………………p 33 b)- Les antidépresseurs……………………………………………..p 35 c)- Les neuroleptiques………………………………………………p 36 d)- Les benzodiazépines………………………………………….…p 37 e)- La sismothérapie………………………………………………...p 38 f)- Anxiolytiques et hypnotiques…………………………………...p 38 2- Les stratégies thérapeutiques……………………………………….p 38 a)- Traitement préventif…………………………………………….p 39 b)- Traitement de l’accès maniaque……………………………...…p 41 c)- Traitement de l’accès dépressif…………………………………p 42 d)- Prise en charge des cycles rapides………………………………p 43 DEUXIEME PARTIE : ………………………………………………………….p 50 148 LA PLACE DES NEUROLEPTIQUES DANS LE TRAITEMENT D’ENTRETIEN DU TROUBLE BIPOLAIRE. REVUE DE LITTERATURE I- Place des neuroleptiques dans le trouble bipolaire en pratique clinique …………………………………………………………p 51 1- Une fréquence élevée d’utilisation ………………………………...p 51 2- Les facteurs associés à la prescription des neuroleptiques au long cours………………………………………...……………..p 53 II- Les neuroleptiques conventionnels…………………………………..p 55 1- Une efficacité non démontrée dans le traitement d’entretien du trouble bipolaire…………………………………………………………….p 55 2- Effets indésirables des neuroleptiques conventionnels…………….p 58 a)- Effets secondaires neurologiques……………………………….p 58 b)- Effets neuropsychiques…………………………………………p 59 c)- Autres effets indésirables……………………………………….p 59 III- Les neuroleptiques atypiques…………………………………………p 60 1- Présentation…………………………………………………………p 60 2- Evaluation de l’efficacité des différentes molécules disponibles…..p 61 a)- Clozapine……………………………………………………….p 61 149 b)- Risperidone……………………………………………………..p 62 c)- Zyprexa…………………………………………………………p 67 TROISIEME PARTIE:……………………………………………………..……p 73 PLACE DES NEUROLEPTIQUES DANS LA PRATIQUE D’UN SERVICE DE PSYCHIATRIE ADULTE. OBSERVATIONS CLINIQUES. I- Méthodologie…………………………………………………………..p 74 1- Protocole……………………………………………………………p 74 2- Les difficultés rencontrées………………………………………….p 76 3- Fiche de recueil des données………………………………………..p 77 II- Observations a. Fiche de Mme BOU………………………………………………...p 78 b. Fiche de Mme CHE………………………………………………...p 81 c. Fiche de Mme COL………………………………………………...p 84 d. Fiche de Mme DAH………………………………………………...p 87 e. Fiche de Melle DES………………………………………………...p 90 f. Fiche de Mme DUP………………………………………………...p 93 g. Fiche de Mr GAR…………………………………………………..p 96 h. Fiche de Mr GAS…………………………………………………...p 99 i. Fiche de Mme GIL………………………………………………...p 102 j. Fiche de Mme LED………………………………………………..p 105 k. Fiche de Mme LES………………………………………………..p 108 l. Fiche de Mme PAR……………………………………………….p 111 m. Fiche de Mme RIO………………………………………………..p 114 150 III- Analyse des résultats………………………………………………...p 117 a. Profil des patients…………………………………………………p 117 a)- Sexe……………………………………………………………p 117 b)- Age de début des troubles……………………………………..p 117 c)- Errance et délai diagnostiques…………………………………p 118 d)- Comorbidité……………………………………………………p 118 e)- Importance de la mauvaise observance………………………..p 119 f)- Retentissement social…………………………………………..p 119 b. Place des neuroleptiques dans le traitement d’entretien…………..p 120 a)- Fréquence de prescription et modalités………………………..p 120 b)- Les raisons de prescription…………………………………….p 123 IV- Discussion…………………………………………………………….p 126 a. En quoi l’application des consensus est difficile………………….p 127 a)- Les difficultés diagnostiques……………………………….….p 127 b)- L’insuffisance des thymorégulateurs………………………….p 129 b. Nos pratiques nécessitent d’être évaluées…………………………p 130 a)- Dans la prise en charge des accès aigus……………………….p 131 b)- Dans la prise en charge au long cours…………………………p 131 c)- La place des neuroleptiques atypiques………………………...p 133 151 CONCLUSION……………………………………………………………………p 135 BIBLIOGRAPHIE………………………………………………………………..p 138 LISTE DES FIGURES……………………………………………………………p 144 LISTE DES TABLEAUX………………………………………………………..p 145 TABLE DES MATIERES……………………………………………………….p 146 ANNEXES………………………………………………………………………….p 152 I- Annexe n°1 : Définition des épisodes dépressifs, maniaques, mixtes et hypomaniaques selon le DSM-IV………………………….p 152 II- Annexe n°2 : Symptômes de premier rang de Schneider…………..p 158 III- Annexe n°3 : Les symptômes psychotiques associés aux épisodes maniaques et dépressifs selon la CIM-10 et le DSM-IV……………..p 159 IV- Annexe n°4 : Trouble schizo-affectif………………………………..p 161 V- Annexe n°5 : Profil des patients……………………………………...p 162 VI- Annexe n°6 : Fréquence et modalité de prescription des neuroleptiques au long cours dans l’échantillon de 13 patients……….p 164 152 ANNEXES 153 I- Annexe n°1 : Définition des épisodes dépressifs, maniaques, mixtes et hypomaniaques selon le DSM-IV Episode dépressif majeur : A . Au moins cinq des symptômes suivants doivent avoir été présents pendant une même période d’une durée de deux semaines et avoir représenté un changement par rapport au fonctionnement antérieur ; au moins un des symptômes est soit (1) une humeur dépressive, soit (2) une perte de plaisir ou d’intérêt. (1) Humeur dépressive présente pratiquement toute la journée, presque tous les jours, signalée par le sujet ou observée par les autres. NB : Eventuellement, irritabilité chez l’enfant et l’adolescent. (2) Diminution marquée de l’intérêt ou du plaisir pour toutes ou presque toutes les activités pratiquement toute la journée, presque tous les jours (signalée par le sujet ou observée par les autres). (3) Perte ou gain de poids significatif en l’absence de régime ou diminution ou augmentation de l’appétit presque tous les jours. NB : Chez l’enfant, prendre en compte l’absence d’augmentation de poids attendue. (4) Insomnie ou hypersomnie presque tous les jours. (5) Agitation ou ralentissement psychomoteur presque tous les jours (constaté par les autres, non limité à un sentiment subjectif de fébrilité ou de ralentissement intérieur). (6) Fatigue ou perte d’énergie presque tous les jours. (7) Sentiment de dévalorisation ou de culpabilité excessive ou inappropriée (qui peut être délirante) presque tous les jours (pas seulement se faire grief ou se sentir coupable d’être malade). Diminution de l’aptitude à se concentrer ou à penser ou indécision presque tous les jours (signalée parle sujet ou observée par les autres). 154 (8) Pensées de mort récurrentes (pas seulement une peur de mourir), idées suicidaires récurrentes sans plan précis ou tentative de suicide ou plan précis pour se suicider. B. Les symptômes ne répondent pas aux critères d’épisode mixte. C. Les symptômes induisent une souffrance cliniquement significative ou une altération du fonctionnement social, professionnel ou dans d’autres domaines importants. Episode maniaque : A. Une période nettement délimitée durant laquelle l’humeur est élevée de façon anormale et persistante, pendant au moins une semaine (ou toute autre durée si une hospitalisation est nécessaire). B. Au cours de cette période de perturbation de l’humeur, au moins 3 des symptômes suivants (4 si l’humeur est seulement irritable) ont persisté avec une intensité suffisante : (1) Augmentation de l’estime de soi ou idées de grandeur. (2) Réduction du besoin de sommeil (par exemple le sujet se sent reposé après seulement 3 heures de sommeil). (3) Plus grande communicabilité que d’habitude ou désir de parler constamment. (4) Fuite des idées ou sensation subjective que les pensées défilent. (5) Distractibilité (par exemple, l’attention est trop facilement attirée par des stimulus extérieur sans importance ou insignifiants). (6) Augmentation de l’activité orientée vers un but (social, professionnel, scolaire ou sexuel) ou agitation psychomotrice. (7) Engagement excessif dans des activités agréables, mais à potentiel élevé de conséquences dommageables (par exemple la personne se lance sans 155 retenue dans des achats inconsidérés, des conduites sexuelles inconséquentes ou des investissements commerciaux déraisonnables). C. Les symptômes ne répondent pas aux critères d’un épisode mixte. D. La perturbation de l’humeur est suffisamment sévère pour entraîner une altération marquée du fonctionnement professionnel, des activités sociales ou des relations interpersonnelles, ou pour nécessiter l’hospitalisation afin de prévenir des conséquences dommageables pour le sujet ou pour autrui, ou bien il existe des caractéristiques psychotiques. E. Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques d’une substance (par exemple d’une substance donnant lieu à abus, un médicament) ou d’une affection médicale généralisée (par exemple hyperthyroïdie). Episode hypomaniaque : A. Une période nettement délimitée durant laquelle l’humeur est élevée de façon persistante, expansive ou irritable, clairement différente de l’humeur non dépressive habituelle, et ce tous les jours pendant au moins 4 jours. B. Au cours de cette période de perturbation de l’humeur, au moins 3 des symptômes suivants (4 si l’humeur est seulement irritable) ont persisté avec une intensité significative : (1) Augmentation de l’estime de soi ou idées de grandeur. (2) Réduction du besoin de sommeil (par exemple le sujet se sent reposé après seulement 3 heures de sommeil). (3) Plus grande communicabilité que d’habitude ou désir de parler constamment. (4) Fuite des idées ou sensation subjective que les pensées défilent. 156 (5) Distractibilité (par exemple, l’attention est trop facilement attirée par des stimulus extérieur sans importance ou insignifiants). (6) Augmentation de l’activité orientée vers un but (social, professionnel, scolaire ou sexuel) ou agitation psychomotrice. (7) Engagement excessif dans des activités agréables, mais à potentiel élevé de conséquences dommageables (par exemple la personne se lance sans retenue dans des achats inconsidérés, des conduites sexuelles inconséquentes ou des investissements commerciaux déraisonnables). C. L’épisode s’accompagne fonctionnement, qui de diffère modifications de celui du indiscutables sujet hors du période symptomatique. D. La perturbation de l’humeur et la modification du fonctionnement est perceptible pour les autres. E. La sévérité de l’épisode n’est pas suffisante pour entraîner une altération marquée du fonctionnement professionnel ou social, ou pour nécessité l’hospitalisation, et il n’existe pas de caractéristiques psychotiques. F. Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques d’une substance (par exemple d’une substance donnant lieu à abus, un médicament) ou d’une affection médicale généralisée (par exemple hyperthyroïdie). Episode mixte : A. Les critères sont réunis à la fois pour un épisode maniaque et pour un épisode dépressif majeur (à l’exception des critères de durée), et cela presque tous les jours pendant au moins une semaine. 157 B. La perturbation de l’humeur est suffisamment sévère pour entraîner une altération marquée du fonctionnement professionnel, des activités sociales ou des relations interpersonnelles, ou pour nécessiter l’hospitalisation afin de prévenir des conséquences dommageables pour le sujet ou pour autrui, ou bien il existe des caractéristiques psychotiques. C. Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques d’une substance (par exemple d’une substance donnant lieu à abus, un médicament) ou d’une affection médicale généralisée (par exemple hyperthyroïdie). Trouble cyclothymique : A. Existence pendant au moins deux ans de nombreuses périodes pendant lesquelles des symptômes hypomaniaques sont présents et de nombreuses périodes pendant lesquelles des symptômes dépressifs sont présents sans que soient réunis les critères d’un épisode dépressif majeur. NB : Chez les enfants et adolescents, la durée doit être d’au moins un an. B. Durant la période de 2 ans décrite ci-dessus (1 an chez les enfants et adolescents), le sujet n’a pas connu de période de plus de 2 mois consécutifs sans les symptômes décrits au critère A. C. Aucun épisode dépressif majeur, épisode maniaque ou mixte n’est survenu au cours des 2 premières années du trouble. D. Les symptômes thymiques évoqués au critère A ne sont pas mieux expliqués par un trouble schizo-affectif et ils ne sont pas surajoutés à une schizophrénie, un trouble schizophréniforme, un trouble délirant, ou un trouble psychotique non spécifié. 158 E. Les symptômes thymiques évoqués au critère A ne sont pas dus aux effets physiologiques directs d’une substance (par ex . une substance donnant lieu à abus ou à un médicament) ou d’une affection médicale générale (par ex. une hypothyroïdie). F. Les symptômes entraînent une souffrance cliniquement significative ou une altération du fonctionnement social, professionnel ou dans d’autres domaines importants. II- Annexe n°2 : Symptômes de premier rang de Schneider (1950) : - énonciation ou écho de la pensée - hallucinations auditives dans lesquelles les voix conversent entre elle - hallucinations auditives dans lesquelles les voix commentent le comportement du sujet - sensations corporelles imposées - vol de la pensée - imposition de la pensée - divulgation de la pensée - perception délirante - sentiments imposés ou contrôlés - impulsions imposées ou contrôlées - volonté imposée ou contrôlée Symptômes de second rang : - autre trouble de la perception - intuition délirante - perplexité - variations de l’humeur : humeur dépressive ou humeur euphorique - appauvrissement affectif - « et encore bien d’autres symptômes » 159 II- Annexe n°3 : Les symptômes psychotiques associés aux épisodes maniaques et dépressifs selon la CIM-10 et le DSM-IV Manie avec symptômes psychotiques Episode dépressif sévère avec symptômes psychotiques Selon CIM-10 L’augmentation de l’estime de soi et les idées de grandeur peuvent atteindre un degré délirant L’irritabilité et la méfiance peuvent devenir des idées délirantes de persécution Dans les formes sévères : idées délirantes mégalomaniaques ou mystiques, à thème d’identité illustre ou de mission religieuse La fuite des idées peut rendre le discours incompréhensible On peut spécifier si besoin le caractère congruent ou non congruent à l’humeur des idées délirantes et des hallucinations. Les idées délirantes et les hallucinations non congruentes à l’humeur ne comportent pas de thèmes maniaques typiques : il peut s’agir de thème d’idées délirantes sans thème de grandeur ou de voix parlant directement au sujet sans charge affective majeure. Episode dépressif sévère s’accompagnant d’idées délirantes, d’hallucinations ou d’une stupeur dépressive. Les idées délirantes habituellement rencontrées sont des idées de culpabilité ou de péché, de ruine, de catastrophe imminente (dont le sujet peut s’attribuer la responsabilité). Les hallucinations auditives consistent habituellement en des voix diffamatoires ou accusatrices, et les hallucinations olfactives en des odeurs de putréfaction, d’immondice ou de décomposition. On peut si besoin spécifier le caractère congruent ou non congruent à l’humeur de ces idées délirantes. Les idées délirantes et les Selon DSM-IV Caractéristiques psychotiques congruentes à l’humeur : le contenu du délire et des hallucinations concorde entièrement avec les thèmes maniaques typiques de surestimation de sa valeur, de son pouvoir, de sa connaissance, de son identité ou de ses relations avec une personne célèbre ou une divinité. Caractéristiques psychotiques non congruentes à l’humeur : le contenu des idées délirantes et des hallucinations ne comporte pas les thèmes maniaques typiques. On retrouve des symptômes tels que des idées délirantes de persécution (non liées directement à des thèmes ou idées de grandeur), de pensées imposées ou des idées délirantes d’influence. Caractéristiques psychotiques congruentes à l’humeur : le contenu des idées délirantes et des hallucinations concorde avec les thèmes dépressifs typiques de dévalorisation, de culpabilité, de maladie, de mort, de nihilisme ou de punition méritée. Caractéristiques psychotiques non congruentes à l’humeur : le contenu des idées délirantes et des hallucinations ne comporte pas les thèmes dépressifs typiques de dévalorisation, de maladie, de mort, de nihilisme ou de punition méritée. On retrouve des symptômes tels que des idées délirantes de persécution (non liées directement à des thèmes dépressifs), de pensée imposée, de hallucinations non congruentes à diffusion de la pensée ou des idées l’humeur ne comportent pas de délirantes d’influence. thèmes typiquement dépressifs : il peut s’agir d’idées délirantes sans contenu de culpabilité ou de punition méritée, ou de voix parlant directement au sujet d’évènements sans charge affective particulière. 161 Annexe n°4 : Trouble schizo-affectif (selon critères du DSM-IV) A. Période ininterrompue de maladie caractérisée par la présence simultanée, à un moment donné, soit d’un épisode dépressif majeur, soit d’un épisode maniaque, soit d’un épisode mixte, et de symptômes répondant aux critères A de la schizophrénie (idées délirantes, hallucinations, discours désorganisé, comportement grossièrement désorganisé ou catatonique, symptômes négatifs, par ex. émoussement affectif, alogie ou perte de volonté). B. Au cours de la même période de la maladie, des idées délirantes ou des hallucinations ont été présentes pendant au moins 2 semaines, en l’absence de symptômes thymiques marqués. C. Les symptômes qui répondent aux critères d’un épisode thymique sont présents pendant une partie conséquente de la durée totale des périodes actives et résiduelles de la maladie. D. La perturbation n’est pas due aux effets physiologiques directs d’une substance (par ex. donnant lieu à abus, un médicament) ou d’une affection médicale générale. Spécification du sous-type : 0. Type bipolaire : si la perturbation comprend un épisode maniaque ou un épisode mixte (ou un épisode maniaque ou un épisode mixte et des épisodes dépressifs majeurs). 1. Type dépressif : si la perturbation comprend uniquement des épisodes dépressifs majeurs. 162 V- Annexe n° 5 : Profil des patients 163 Profil des patients : N°1 F N°2 F N°3 F 73 ans 28 ans 45 ans TB 1 42 ans 16 ans 26 ans TB 1 Symptômes psychotiques + NC Errance diagnostique Délai diagnostic Diag. évoqué au départ Comorbidité Tb personnalité Sexe Age actuel Age de début Durée suivi Type TB Mauvaise Observance Retentissement social Hosp dans l’année ou actuellement N°7 M N°8 M N°9 F 72 ans 39 ans 42 ans 45 ans 55 ans 26 ans 10 ans 30 ans 17 ans 13 ans 32 ans 15 ans TB 2 TB 2 TB 1 TB 1 CR ou PD 47 ans 47 ans 31 ans + NC - - + NC - + + + + - 5 ans - 15 ans PD DU 10 ans 10 ans 12 ans DU P PD - +/- - - - +/- - + hystér. + +/- - +/- - + - - - + NC : non congruent C : congruent PD : psychose dysthymique N°4 F N°5 F N°6 F N°11 F N°12 F 47 ans 56 ans Moyenne F: 11/13 Soit 84% 42 ans 44 ans 73 ans Moyenne : 51 ans 34 ans 34 ans 21 ans ? ans 42 ans ? ans Moyenne : 29,7 ans 16 ans 4 ans 5 ans 34 ans 5 ans 2 ans 8 ans Moyenne : 17 ans TB 1 TB 2 TB CR TB 1 TB 3? TB 1 TB 2 + NC - - + NC + C + NC - TB 1: 7/13 TB 2: 4/13 CR :3/13 Présents : 8/13, soit 61% + + + + + + + Présents 12/13 9 ans 10 ans 8 ans 10 ans ? ans 2 ans ? ans Moyenne : 8,2 ans DU DU DU PD DU P DU + + + psychop. + +/+ phob. ? + hystér. ++ + parano. + - + hyst. - + phob. - P / PD : 5/13 DU : 7/13 + : 3/12 + : 7/13 + - ++ ++ + ++ +/- - - Marqué : 6/13 - + + + + + - + - + :7/13 + C et NC + N°10 F CR : cycle rapide TB : trouble bipolaire N°13 F P : psychose 7/13 164 VI- Annexe n° 6: Fréquence et modalité de prescription des neuroleptiques au long cours dans l’échantillon de 13 patients. 165 Fréquence et modalité de prescription des neuroleptiques au long cours dans l’échantillon de 13 patients : NLP sédatif NLP non sédatif -classique per os -NAP NLP atypique 2 NLP associés Durée de suivi Périodes avec NLP sédatif Période avec NLP incisif Période avec 2 NLP 1ère intention En asso à TR N°1 + N°2 - N°3 + N°4 - N°5 + N°6 - N°7 + N°8 + N°9 - N°10 + N°11 N°12 - N°13 moyenne 6/13 - + - - + + + + + + - - + + - - - 4/13 5/13 45 ans 10 ans 26 ans 2 ans 17 ans 8 ans + 13 ans - + + 32 ans 9 ans + 15 ans - + + 34 ans 8 ans + 5 ans - + 2 ans - 8 ans - 8/13 3/13 17 ans 3 ans - 10 ans 9 mois - + + 17 ans 1 an 5 ans 10 mois 32 ans 13 ans 8 ans 4 ans 1 an1/2 + 5 ans - - 6 ans 9 mois - - 9 ans - - oui oui non non oui oui 1 an 5 ans oui 3 ans1/2 2 ans 2 ans 1 an1/2 1 an1/2 3 ans 3 ans - non non oui non oui non 7/13 oui oui non oui oui oui oui oui oui oui non oui non 10/13 1,5 ans Nom : GRAVIER Prénom: Sandrine Titre de la thèse : TRAITEMENT DU TROUBLE BIPOLAIRE : ENTRE THEORIE ET PRATIQUE (place des antipsychotiques) Résumé: Le trouble bipolaire reste une maladie grave avec un risque suicidaire élevé et des répercussions professionnelles et familiales non négligeables. Sa prise en charge thérapeutique repose sur les thymorégulateurs, de préférence en monothérapie. Les autres traitements (antidépresseurs, neuroleptiques,…) sont réservés aux phases aiguës de la maladie et à certaines formes résistantes. Or, en pratique, les patients reçoivent le plus souvent une polymédication dans laquelle les neuroleptiques occupent une place non négligeable. Ce décalage semble lié à plusieurs raisons : - L’existence d’un certain nombre de patients résistants aux thymorégulateurs, en particulier dans les formes graves de la maladie (cycles rapides) ou lorsque des troubles de la personnalité ou une comorbidité alcoolique sont associés, - Le doute diagnostique avec une schizophrénie lorsque les symptômes psychotiques sont au premier plan. Compte tenu des effets indésirables des neuroleptiques sur le plan neurologique et cognitif, il semble nécessaire de redéfinir avec précision quels patients peuvent bénéficier de ces traitements et d’évaluer leur efficacité réelle qui, jusqu’à présent, n’a pas été démontrée. Il semble nécessaire de réévaluer régulièrement, à l’occasion de chaque décompensation présentée par le patient, le diagnostic de départ ainsi que le traitement institué afin de ne pas retarder la mise en route du traitement le plus efficace et de ne pas poursuivre inutilement des traitements potentiellement mal tolérés. Les neuroleptiques atypiques présentent actuellement une alternative de choix lorsqu’un traitement neuroleptique est nécessaire et pourraient avoir un rôle plus spécifique sur les symptômes affectifs. Des études sur le long terme sont en cours afin d ‘évaluer leur efficacité et leur tolérance. Mots clefs : Trouble bipolaire - Stratégies thérapeutiques – Neuroleptiques classiques - Antipsychotiques Normothymiques - Contraste entre théorie et pratique - Qualité de vie