Interview d`Evelyne Rival Parlez-nous d`Anne

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Interview d`Evelyne Rival Parlez-nous d`Anne
Interview d’Evelyne Rival
Parlez-nous d’Anne-Laurence
Anne-Laurence était ma fille unique, mon bonheur, ma vie. Difficile pour moi de vous
parler d’elle en restant objective… Je peux quand même dire, car c'est une opinion
partagée, que c'était un être intelligent, sensible, chaleureux, énergique. C'était une
« battante », douée d'un grand charisme. Elle avait une vraie facilité de contact, servie
par un sourire lumineux. Son évidente joie de vivre alternait pourtant avec un fond
d'anxiété qu'elle s'efforçait de maîtriser. L'humour étant à cet égard l'une de ses armes.
Comment est-elle passée du journalisme économique aux contes pour enfants ?
La récidive de sa maladie et le retour aux traitements pénibles l'ayant contrainte à
quitter la vie professionnelle, elle s'est tournée vers l'écriture personnelle et y a pris
goût. Cela a d'abord été une suite de textes courts mêlant joie et angoisse, rires et
larmes, ce qui était le reflet d’elle-même. Ce « journal d'une cancéreuse » a été
partiellement publié en blog, la totalité des textes étant réunis sous le titre « A Fleur de
larmes ». On se souvient sûrement d'elle à Curie où elle allait suivre son traitement
ordinateur sur les genoux !
Son regard amical sur les autres malades, son admiration pour le personnel soignant, la
conscience d'être relativement privilégiée quant à l'accès aux soins, l'ont amenée peu
après, a créer un site Internet (www.la-maison-du-cancer.com) dans lequel elle a investi
toute son énergie et ses compétences. Et puis, vint en 2011 une période de rémission.
L'occasion de retourner au bonheur d'écrire en imaginant des histoires poétiques et
joyeuses destinées aux enfants, et surtout aux enfants malades, tels ceux dont l'état lui
serrait le cœur lorsqu'elle les croisait à l'hôpital. Ainsi sont nés Les Contes de la Plume
Blanche.
A-t-elle mené son projet jusqu’à la réalisation finale ?
Elle en a fait l'essentiel. Une fois les contes écrits, elle a travaillé avec Marc Laforet sur
l'idée d'illustration musicale et ils ont choisi ensemble les morceaux musicaux
s'accordant avec le thème de chacun des contes.
Elle a, par ailleurs, été très exigeante pour le choix des illustrations et a recherché avec
soin l'artiste correspondant à ce qu'elle voulait. C’est elle qui a déniché sur Internet
après beaucoup d'explorations, l'illustratrice Anja Klauss. Et si elles n'ont jamais eu que
des échanges téléphoniques ou électroniques, je dois dire qu'elles se sont pleinement
comprises dès le premier échange et ont travaillé en pleine osmose. Anne-Laurence a
beaucoup aimé, au fil de leur création, les magnifiques peintures et la mise en page
proposées par Anja Klauss. Et si elle n'a pas vu le résultat final, il est sans conteste tout à
fait conforme à ce qu'elle souhaitait : un équilibre harmonieux entre textes, musiques et
images.
Qu’est-ce qui vous a marqué au moment de la remise du livret aux enfants dans les
hôpitaux ?
Ma première rencontre a eu lieu en novembre 2013 avec les enfants de Curie. Cela a été
évidemment pour moi un moment d’émotion totale : à la fois poignant, douloureux et, en
même temps, je me disais « mission accomplie ». Elle serait fière de ce qui se déroule
sous mes yeux et je le suis pour elle. J'ai éprouvé aussi beaucoup d'admiration pour le
personnel médical et pour les bénévoles des associations qui font tous preuve de
grandes qualités humaines. Quant aux parents des enfants très malades qui m'ont
chaque fois fait part de leur gratitude, ils m’ont aussi fortement impressionnée : ils sont
dignes, aimants, naturels, des héros en quelque sorte.
J'ai éprouvé les mêmes sentiments partout où je suis allée et notamment à l'hôpital
Necker où le personnel soignant lit des contes aux enfants avant et pendant un examen
invasif comme moyen de faire oublier l'appréhension ou la douleur. Bref, le projet valait
vraiment la peine d'être réalisé.
Quel message vous a-t-elle laissé ?
« La seule chose qui compte, c’est l’amour ».