L`apprentissage de la propreté : Des conseils axés sur l`enfant

Transcription

L`apprentissage de la propreté : Des conseils axés sur l`enfant
Document de principes
L’apprentissage de la propreté :
Des conseils axés sur l’enfant
T Clifford, FP Gorodzinsky; Société canadienne de pédiatrie
Comité de la pédiatrie communautaire
Paediatr Child Health 2000;5(6):342-4
Affichage : le 1 septembre 2000 Reconduit : le 1 février 2016
Les parents demandent souvent aux pédiatres quel est
le meilleur moment et la meilleure méthode pour
l’apprentissage de la propreté. À l’instar de
nombreuses questions de comportement, il n’existe
pas de réponses concrètes à une telle question. Il peut
être difficile pour l’enfant comme pour les parents
d’atteindre cette étape du développement. Pour
faciliter l’apprentissage de la propreté, les médecins
devraient informer les parents de la démarche «axée
sur l’enfant» avant le début du processus, et ils
devraient être prêts à offrir des conseils aux parents
pendant que l’enfant apprend à devenir propre.
Le bon moment
L’âge auquel les parents entreprennent l’apprentissage
de la propreté avec l’enfant et l’âge auquel il est jugé
pertinent que l’enfant devienne propre ont changé
avec le temps. L’attitude de relatif laissez-faire du
début des années 1900 a été remplacée par une
démarche plus rigide, axée sur les parents, pendant
les années 1920 et 1930 [1]. Cette conduite a ensuite
été rejetée en faveur de la démarche axée sur l’enfant
prônée par Spock [2] et Brazelton [3], qui est devenue la
norme des conseils offerts par les médecins [4][5][6][7][8][9]
[10][11][12]. Grâce à ce changement de point de vue, il est
devenu plus acceptable que l’enfant atteigne cette
étape de développement plus tard.
Il existe d’importantes différences culturelles entre les
méthodes utilisées pour apprendre à l’enfant à devenir
propre [13][14]. La plupart des enfants des pays
occidentaux contrôlent leur vessie et leurs intestins
entre 24 mois et 48 mois [3][8][15]-[24]. Les filles ont
tendance à y parvenir un peu plus jeunes que les
garçons [17]-[19][25][26]. La période moyenne entre
l’initiation de l’apprentissage de la propreté et la
propreté réelle oscille entre trois mois et six mois [22].
Le contrôle de la vessie ne coïncide pas toujours avec
celui des intestins, et la continence urinaire nocturne
peut concorder avec la continence diurne ou se
produire plusieurs mois ou même plusieurs années
[3][8][16][17][19][20][25][26].
plus
tard
Le
processus
d’apprentissage est très hétérogène, et il n’y a pas
d’âge précis pour le commencer.
L’évaluation de la récéptivité de l'enfant à
devenir propre
La réceptivité à devenir propre ne devrait pas être
dictée par l’âge de l’enfant. Comme le prône la
démarche axée sur l’enfant, celui-ci doit plutôt être
physiologiquement et psychologiquement prêt. Les
parents devraient être disponibles pour se montrer
attentifs et patients dans cette tâche tous les jours,
pendant plusieurs mois.
Pour l’enfant, la réceptivité physiologique précède la
réceptivité psychologique. À 18 mois, le réflexe du
contrôle sphinctérien est mature, et la myélination du
système extrapyramidal s’est produite. Les deux
processus sont nécessaires pour parvenir au contrôle
de la vessie et des intestins, et ils ne peuvent être
accélérés [25][26]. La maturation psychologique ne
concorde toutefois pas nécessairement avec la
maturation physiologique.
Au moment d’évaluer la réceptivité de l’enfant à
devenir propre, le médecin doit tenir compte de ses
capacités motrices, langagières et sociales, de même
que du comportement et de la relation de l’enfant avec
ses parents [2][3][7]-[11][27]. Une liste des éléments
permettant d’établir la réceptivité de l’enfant à
l’apprentissage de la propreté est dressée au tableau
1.
COMITÉ DE LA PÉDIATRIE COMMUNAUTAIRE, SOCIÉTÉ CANADIENNE DE PÉDIATRIE |
1
TABLEAU 1
Les signes de la réceptivité de l’enfant à l’apprentissage de la propreté
• Capacité de marcher jusqu’au petit pot (ou au siège de toilette adapté).
• Stabilité une fois assis sur le petit pot (ou sur le siège de toilette adapté).
• Capacité de rester sec plusieurs heures.
• Capacités de langage dans son versant réceptif permettant à l’enfant de
suivre des directives simples (une ou deux directives).
• Capacités de langage dans son versant expressif permettant à l’enfant de
communiquer le besoin d’utiliser le petit pot (ou le siège de toilette adapté)
avec des mots ou des gestes reproductibles.
• Désir de plaire fondé sur une relation positive avec les éducateurs.
• Désir d’indépendance et contrôle de la vessie et des intestins.
Des techniques d'apprentissage de la propreté
axées sur l'enfant
Les attentes des parents au sujet de l’apprentissage
de la propreté devraient être évaluées par le médecin
à la visite de l’enfant à un an. C’est l’occasion de
donner des conseils, parce que la plupart des parents
sous-estiment le temps nécessaire pour parvenir à la
propreté [18]. La démarche axée sur l’enfant (expliquée
ci-dessous) devrait être abordée aux visites
ultérieures, et le médecin devrait souligner que l’âge
d’apprentissage est flexible. Lorsque l’enfant a environ
18 mois, la réceptivité des parents et de l’enfant peut
être évaluée, en tenant compte des différences
culturelles. Les parents et les éducateurs devraient
être prêts à consacrer du temps au processus
d’apprentissage de la propreté et à prendre des
dispositions qui conviennent à toute la famille. Ce
processus ne devrait pas être entrepris à un moment
stressant de la vie de l’enfant (p. ex., après un
déménagement ou à la naissance d’un nouveau
bébé), et les parents devraient être émotionnellement
prêts pour les accidents inévitables qui se produiront
avant l’atteinte de la propreté. Les parents devraient
être encouragés à respecter les indices de leur enfant
avant de passer d’une étape à l’autre, comme l’indique
le tableau 2 [2][3][6]-[11][27]. D’autres visites au médecin
peuvent permettre d’évaluer les progrès et de discuter
des questions soulevées.
TABLEAU 2
Comment les parents peuvent faciliter l’apprentissage de la propreté de leur enfant
• Choisir le vocabulaire à utiliser.
• S’assurer que le petit pot et que l’endroit choisi sont facilement accessibles. Permettre à l’enfant de regarder ses parents utiliser la toilette.
• Si une toilette ordinaire est utilisée, utiliser un siège adapté et un tabouret pour les pieds.
• Encourager l’enfant à avertir un parent lorsqu’il a besoin de se soulager. Louanger les succès même si l’enfant avertit les parents trop tard. Apprendre à
reconnaître les indices comportementaux de l’enfant lorsqu’il est sur le point d’uriner ou de déféquer.
• Encourager l’enfant par des louanges. Ne pas s’attendre à des résultats immédiats. S’attendre à des accidents. Éviter les punitions ou le renforcement négatif.
• S’assurer de la collaboration de tous les éducateurs afin de garantir une démarche cohérente.
• Après des succès répétés, suggérer l’usage d’une culotte de coton ou de propreté. Faire de ce moment un événement spécial.
Il est recommandé d’utiliser le petit pot plutôt que la
toilette pendant les premières étapes, parce que
l’enfant s’y sent plus en sécurité et plus stable. Le petit
pot permet également à l’enfant d’adopter la meilleure
posture biomécanique.
Au départ, on encourage l’enfant à s’asseoir tout
habillé sur le petit pot. Ensuite, il peut s’asseoir sur le
pot une fois la couche mouillée enlevée. Il peut être
utile de placer la couche souillée dans le pot pour
démontrer la fonction du pot. Plus tard, l’enfant peut
être conduit au petit pot plusieurs fois par jour et être
2 | L’APPRENTISSAGE DE LA PROPRETÉ : DES CONSEILS AXÉS SUR L’ENFANT
invité à s’y asseoir quelques minutes, sans couche.
Enfin, on le fait asseoir sur le petit pot à des heures
établies pendant la journée (p. ex., après le réveil,
après les repas ou les collations et avant les siestes et
le coucher) afin d’établir une routine. Grâce à cette
méthode, l’enfant peut apprendre à contrôler sa vessie
et ses intestins en quelques semaines.
L’enfant a besoin d’être louangé dès qu’il exprime son
intérêt à s’asseoir sur le petit pot. Le renforcement
positif peut être utilisé, mais les récompenses
matérielles sont à éviter. L’encouragement et le
soutien représentent les techniques de renforcement
les plus pertinentes.
Un examen plus complet du traitement de la
constipation dépasse la portée du présent document.
Lorsque l’enfant a bien utilisé le petit pot pendant une
semaine ou plus, il peut être prêt à porter une culotte
de propreté ou de coton. Les accidents sont toutefois
inévitables, et les parents doivent faire preuve de
soutien et de patience. L’enfant qui vit une série
d’accidents peu après avoir commencé à porter une
culotte de propreté ou de coton devrait pouvoir
recommencer à porter une couche, sans honte et sans
punition.
L’enfant ayant des besoins spéciaux
Certains enfants hésitent à déféquer dans le petit pot
ou dans la toilette, surtout s’ils n’ont pas un bon
soutien pour les pieds. Il est essentiel de leur
permettre d’aller à la selle dans une couche afin de
prévenir la constipation et, par conséquent, les
mouvements péristaltiques intestinaux douloureux qui
retarderont l’apprentissage de la propreté.
Le refus de la propreté
Les causes organiques d’échec dans l’apprentissage
de la propreté sont peu fréquentes. L’explication la
plus plausible d’échec, c’est que l’enfant n’est pas
prêt. Dans ce cas, les tentatives des parents pour le
rendre propre seront futiles. Les parents devraient être
avisés de ne pas se lancer dans des «batailles pour la
propreté», qui détériorent la relation avec l’enfant et
l’image personnelle de l’enfant et qui peuvent retarder
la progression vers cet apprentissage[5][28][29].
Si un enfant refuse la propreté, il est préférable
d’interrompre le processus pendant un à trois mois.
Ainsi, la confiance et la collaboration peuvent être
rétablies entre le parent et l’enfant. La plupart des
enfants sont ensuite prêts à entreprendre
l’apprentissage de la propreté. Cependant, si des
tentatives répétées échouent ou si l’enfant a plus de
quatre ans, il peut être nécessaire de consulter un
pédiatre généraliste ou du développement. Cette
consultation peut permettre d’explorer les aspects de
la relation entre les parents et l’enfant et d’écarter les
anomalies physiques ou neurodéveloppementales [28][31].
La constipation peut compliquer la réceptivité de
l’enfant à l’apprentissage de la propreté. L’enfant peut
associer les selles avec la douleur et tenter d’éviter
l’expérience le plus possible. Des modifications à
l’alimentation représentent la première étape pour
atténuer le problème, et le recours à des laxatifs ou à
des émollients fécaux peut également être envisagé.
Le dépistage du meilleur moment d’apprendre la
propreté à l’enfant ayant des besoins spéciaux
s’impose tout autant qu’avec les autres enfants. Bien
que les étapes de réceptivité à la propreté soient
identiques pour tous les enfants, le médecin doit
évaluer à quel point l’enfant ayant des besoins
spéciaux est ralenti dans son apprentissage (p. ex.,
par des retards sociaux et d’adaptation ou par des
médicaments) et le moment auquel les parents sont
prêts à commencer le processus [32][33]. Une étude
approfondie
de
ce
sujet
d’importance
est
recommandée pour les médecins qui participent aux
soins des enfants ayant des besoins spéciaux.
Conclusions
Le processus d’apprentissage de la propreté a
beaucoup changé au fil des ans et au sein des
diverses cultures. Dans la culture occidentale, il est
recommandé d’adopter une démarche axée sur
l’enfant, qui individualise le plus possible le moment de
l’apprentissage et la méthode privilégiée.
Références
1. Stendler C. Psychologic aspects of pediatrics – sixty
years of child training practices. J Pediatr
1950;36:122-34.
2. Spock B. The Common Sense Book of Baby & Child
Care, 1st edn. New York: Duess, Sloan and Pearce,
1946.
3. Brazelton TB. A child-oriented approach to toilet training.
Pediatrics 1962;29:121-8.
4. Martin JA, King DR, Maccoby EE, Jacklin CN. Secular
trends and individual differences in toilet-training
progress. J Pediatr Psychol 1984;9:457-67.
5. Schmitt BD. Toilet training refusal: Avoid the battle and
win the war. Contemp Ped 1987;Dec:32-50.
6. Robson WL, Leung AK. Advising parents on toilet
training. Am Fam Physician 1991;44:1263-8.
7. Spock B, Parker SJ. Dr. Spock’s Baby and Child Care,
7th edn. New York: Pocket Books-Simon & Schuster,
1998.
8. Brazelton TB, Christophersen ER, Frauman AC, et al.
Instruction, timeliness, and medical influences affecting
toilet training. Pediatrics 1999;103:1353-8.
9. Toilet training guidelines: Parents – The role of parents
in toilet training. Pediatrics 1999;103:1362-3.
10. Toilet training guidelines: Clinicians – The role of the
clinician in toilet training. Pediatrics 1999;103:1364-6.
11. Toilet training guidelines: Day care providers – The role
of the day care provider in toilet training. Pediatrics
1999;103:1367-8.
COMITÉ DE LA PÉDIATRIE COMMUNAUTAIRE, SOCIÉTÉ CANADIENNE DE PÉDIATRIE |
3
12. Stadtler AC, Gorski PA, Brazelton TB. Toilet training
methods, clinical interventions and recommendations.
Pediatrics 1999;103:1359-68.
13. deVries MW, deVries MR. Cultural relativity of toilet
training readiness: A perspective from East Africa.
Pediatrics 1977;60:170-7.
14. Richards CG. Ready, steady, hiss. Arch Dis Child
1991;66:172.
15. Roberts KE, Schoellkopf JA. Eating, sleeping and
elimination practices of a group of two-and-one-halfyear-old children. J Dis Child 1951;82:137.
16. Oppel WC, Harper PA, Rider RV. The age of attaining
bladder control. Pediatrics 1968;42:614-26.
17. Klackenberg G. A prospective longitudinal study of
children. Data on psychic health and development up to
8 years of age. Acta Paediatr Scan 1971;224(Suppl):
1-239.
18. Stephens JA, Silber DL. Parental expectations vs
outcome in toilet training. Pediatrics 1974;54:493-5.
19. Largo RH, Stutzle W. Longitudinal study of bowel and
bladder control by day and at night in the first six years
of life. I: Epidemiology and interrelations between bowel
and bladder control. Dev Med Child Neurol
1977;19:598-606.
20. Largo RH, Stutzle W. Longitudinal study of bowel and
bladder control by day and at night in the first six years
of life. II: The role of potty training and the child’s
initiative. Dev Med Child Neurol 1977; 19:607-13.
21. Takahashi E. Investigation of the age of release from the
diaper environment. Pediatrician 1987;14(Suppl 1):
48-52.
22. Stenhouse G. Toilet training in children. N Z Med J
1988;101:150-1.
23. Bloom DA, Seeley WW, Ritchey ML, McGuire EJ. Toilet
habits and continence in children: An opportunity
sampling in search of normal parameters. J Urol
1993;149:1087-90.
24. Seim HC. Toilet training in first children. J Fam Pract
1989;29:633-6.
25. Largo RH, Molinari L, von Siebenthal K, Wolfensberger
U. Does a profound change in toilet-training affect
development of bowel and bladder control? Dev Med
Child Neurol 1996;38:1106-16.
26. Largo RH, Molinari L, von Siebenthal K, Wolfensberger
U. Development of bladder and bowel control:
Significance of prematurity, perinatal risk factors,
psychomotor development and gender. Eur J Pediatr
1999;158:115-22.
27. Michel RS. Toilet Training. Pediatr Rev 1999;20:240-5.
28. Luxem M, Christophersen E. Behavioral toilet training in
early childhood: Research, practice and implications. J
Dev Behav Pediatr 1994;15:370-8.
29. Luxem MC, Christophersen ER, Purvis PC, Baer DM.
Behavioral- medical treatment of pediatric toileting
refusal. J Dev Behav Pediatr 1997;18:34-41.
30. Howe AC, Walker CE. Behavioral management of toilet
training, enuresis and encopresis. Pediatr Clin North Am
1992;39:413-32.
31. Taubman B. Toilet Training and toileting refusal for stool
only: A prospective study. Pediatrics 1997;99:54-8.
32. Doleys DM, Dolce JJ. Toilet training and enuresis.
Pediatr Clin North Am 1982;29:297-313.
33. Frauman AC, Brandon DH. Toilet training for the child
with chronic illness. Pediatr Nurs 1996;22:469-72.
COMITÉ DE LA PÉDIATRIE COMMUNAUTAIRE
Membres : Cecilia Baxter MD; Fabian P Gorodzinsky
MD; Denis Leduc MD (président); Paul Munk MD
(administrateur responsable); Peter Noonan MD;
Sandra Woods MD
Représentant : Joseph Telch MD, section de la
pédiatrie générale, Société canadienne de pédiatrie
Auteurs principaux : Tammy Clifford; Fabian P
Gorodzinsky MD
Aussi disponible à www.cps.ca/fr
© Société canadienne de pédiatrie 2017
La Société canadienne de pédiatrie autorise l’impression d’exemplaires uniques de ce document à partir
de4son| site
L’APPRENTISSAGE
Web. Pour obtenirDE
la LA
permission
PROPRETÉ
d’imprimer
: DES ou
CONSEILS
de photocopier
AXÉS des
SURexemplaires
L’ENFANT multiples,
consultez notre politique sur les droits d'auteurs.
Avertissement : Les recommandations du présent document de principes ne
constituent pas une démarche ou un mode de traitement exclusif. Des
variations tenant compte de la situation du patient peuvent se révéler
pertinentes. Les adresses Internet sont à jour au moment de la publication.

Documents pareils