La longue route des essais vaccinaux

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La longue route des essais vaccinaux
La longue route des essais vaccinaux
Revue critique
de l'actualité scientifique internationale
sur le VIH
et les virus des hépatites
n°110 - septembre 2003
2e CONFERENCE DE L'IAS
La longue route des essais vaccinaux
Gilles Pialoux
Hôpital Tenon (Paris)
Dans l'immense auditorium du Palais des Congrès de la Porte
Maillot - où d'aucuns ont plus l'habitude d'écouter SergeLama
et Charles Aznavour... -, Christine Katlama et Giuseppe
Pantaleo ont ouvert, mardi 15 juillet, la session qui se
proposait de faire le point sur les nouvelles molécules
antirétrovirales d'une part et sur l'état de la recherche
vaccinale contre le VIH d'autre part. De ces deux rendez-vous
importants, nous nous arrêterons sur le second, non sans noter
l'élégance avec laquelle notre collègue française avait, de sa
place de "chairman", repris l'expression de Nelson Mandela
"there is no excuses for delay" (Il n'y a pas d'excuses au
retard) dans une intervention très politique.
La lorgnette nord-américaine
La communication de Lawrence Corey1 (Larry Corey pour le
milieu vaccinal), de son côté, a reproduit l'exercice de style
qu'avait exécuté avec talent Scott Hammer à la 10e
Conférence sur les rétrovirus et les infections opportunistes
(CROI) en février : établir une revue exhaustive de la
recherche... mais quasi uniquement vue par la lorgnette nordaméricaine en matière de recherche vaccinale contre le VIH.
Pour sa part, L. Corey a dressé une liste assez complète des
51 essais nord-américains menés entre 1988 et 2001 avec
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3189 volontaires inclus : aucune toxicité auto-immune et
aucune toxicité réelle de grade 3 ou 4 n'est à noter, ce qui,
pour des essais de phase I, est déjà une bonne nouvelle en soi.
Côté "liste de bonnes nouvelles", L. Corey a aussi annoncé les
9 nouveaux essais vaccinaux de phase I projetés aux EtatsUnis, les 2 essais de phase II et les 2 essais de phase III en
cours.
Essais de phase III
A ce titre-là, mais dans la rubrique "bad news", L. Corey est
revenu longuement sur les premiers résultats des essais de
phase III. Rappelons que les deux essais de phase III conduits
en 2003 utilisent un candidat vaccin de première génération :
une gp120 recombinante exprimant 2 souches virales,
Aidsvax B/B en Europe et aux Etats-Unis, et Aidsvax B/E en
Thaïlande.
Les premiers résultats, publiés par voie de presse en février,
ont concerné le modèle Aidsvax B/B (sous-type B) dans un
essai sur 5009 volontaires à haut risque d'infection dans 59
sites en Amérique du Nord, à Porto Rico et aux Pays-Bas. Le
taux d'infection observé n'est pas différent dans le bras
placebo (5,8%) et dans le bras de volontaires ayant reçu
Aidsvax B/B. Ces résultats ont conduit à annoncer l'échec du
premier essai de phase III de vaccin anti-VIH.
Des sous-études - a priori menées... a posteriori - ont montré
une importante protection vaccinale dans des sous-groupes de
volontaires selon l'ethnie. Ainsi, dans les "minorités"
asiatiques et noires, l'efficacité vaccinale est de 66,8% (IC
95% : 30,2-84,2 ; p<0,01). Dans le sous-groupe "black
volunteers", cette efficacité est même de 78,3% de diminution
de la prélavence attendue (IC 95% : 29,0-93,3 ; p < 0,002)
sans que l'on puisse dire si cette "efficacité vaccinale" vis-àvis de sous-populations de l'essai est liée à des éléments sociocomportementaux ou à des mécanismes génétiques (HLA) ou
immunologiques (taux plus élevé d'anticorps neutralisants ?).
Nouvelles approches
Parmi les approches novatrices, L. Corey a souligné l'intérêt
de certains modèles vaccinaux tels que les adénovirus
replicons, les nouveaux pox virus, les alpha-virus-replicons,
sans compter les résultats très encourageants de l'équipe de
Emini et Shiver avec le modèle Merck d'adénovirus (MRK
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A5 vaccine). Chez 63 volontaires, on observe une réponse
Elispot entre 65% et 93,7% selon le sous-type (clade) de virus
concerné.
Une approche "multi-clades" utilisant un candidat-vaccin de
type adénovirus est au cœur d'un essai HVTN 052
commençant en septembre 2003. Parmi les approches
privilégiées en termes d'induction-rappel (prime/boost), les
recherches américaines semblent s'orienter soit vers un vaccin
de type ADN préparant la réponse vaccinale et un rappel par
un adénovirus, soit vers l'association adénovirus + canarypox.
Parmi les approches les plus novatrices, un essai HVTN 040
concernant 96 volontaires (48 aux Etats-Unis et 48 en Afrique
du Sud) teste une préparation vaccinale reposant sur un
vecteur alpha-virus (VEE-semiliki).
Le retour des anticorps neutralisants
Par ailleurs, L. Corey a confirmé le retour en force de
l'hypothèse anticorps neutralisants et son rôle dans la
protection vaccinale.
Sur ce plan des stratégies vaccinales, il est possible d'essayer
soit avec un vaccin multivalent induisant une réponse
anticorps neutralisante pour plusieurs types d'isolats
primaires, soit avec une approche vaccinale monovalente, où
le site antigénique retenu est suffisamment conservé pour
permettre l'induction d'une réponse neutralisante à large
spectre.
1 - Corey L
"HIV vaccine research : the state of the science"
107, session 21
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