Button, la renaissance

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Button, la renaissance
FORMULE 1
Notre sélection
Le Journal de l’Île
Il aura attendu sa dixième saison de F1 pour devenir
leader du Championnat du monde des pilotes. Mais ça ne
gâche la joie de Jenson Button, après sa victoire en Malaisie.
Button, la renaissance
IL Y A UN MOIS, le Britannique était condamné à une retraite anticipée. Il est désormais en course pour le titre.
Avec tous les coups qu’il a pris,
il devrait avoir la gueule toute
cabossée. Mais son visage, celui
d’un jeune premier malgré ses
vingt-neuf ans, reste lisse. Son
sourire est plus naturel que jamais, ses yeux plus pétillants
qu’autrefois, maintenant qu’il a,
en huit jours, triplé son total de
victoires, série en cours.
Il faut dire que Button a mis du
temps à concrétiser les espoirs
placés en lui. L’Anglais n’était jamais au bon endroit au bon moment. De Williams à BAR, il ne
pilotait jamais la bonne voiture,
passant dans la bonne écurie ou
trop tôt ou trop tard. Alors, il fal-
lut attendre, longtemps attendre, pour que Jenson confirme
enfin ses prometteurs débuts en
2000. Podium, pole et victoire
arrivent bien tard pour une
presse britannique très – trop ?
– impatiente. «J’étais un héros et
je suis soudain devenu un loser»,
se souvenait-il en novembre dernier, au matin du sacre d’un Anglais... Lewis Hamilton.
Destins croisés entre les deux
hommes, tous deux passés par le
McLaren Junior Team. La première victoire de Button, à Budapest (2006), est d’ailleurs signée le jour d’une triste
déconvenue du désormais
champion du monde en titre,
alors en quête de la couronne en
GP 2. Celui-ci avait raté le vendredi ses qualifications, incapable de faire un tour sur une piste
humide ; celui-là triomphe le di-
Mais l’éclair ne dura pas. Et
l’étoile de Jenson pâlit vite derrière le nouvel astre Lewis.
Jusqu’à l’éclipse totale de l’an
dernier (Hamilton champion,
Button dix-huitième). On oublie
Button : «Je ne suis pas là
pour être le meilleur Britannique»
manche sous le déluge. Ce jour
d’août 2006, Button avait récupéré un peu de la gloire britannique. «Vous allez maintenant me
laisser tranquille après cette victoire», lâchait-il à ses compatriotes, en savourant son succès.
ses amours avec la délicieuse
Louise, chanteuse de la Star Ac’
britannique, et l’on se passionne
pour l’idylle entre Hamilton et
Nicole Scherzinger, leader des
Pussycat Dolls. Condamné au
fond de grille, au volant d’une
Honda erratique et cacochyme,
il serre les dents et passe ses nerfs
sur sa nouvelle passion qu’est le
triathlon, accroché à la certitude
que Ross Brawn, fraîchement débarqué, va lui concocter une voiture compétitive pour 2009. Cet
hiver, alors qu’il vient de prolonger son contrat chez Honda,
l’écurie annonce son retrait de
la F 1. De nouveau, l’Anglais est
la cible des quolibets : toujours
au mauvais endroit au mauvais
moment.
Mais cette fois, Button a tout
bon. Après avoir revu son salaire
à la baisse (on parle d’une réduction de moitié), le voilà en tête
L’orage couve chez Ferrari
POUR LA SCUDERIA, qui ne compte aucun point, ce début de saison
tourne au cauchemar. La faute à qui ?
Pas sûr qu’il fasse bon être du côté de Maranello,
aujourd’hui ou demain, lorsque l’équipe piste débarquera à l’usine, de retour de Malaisie. Autour de
la table, le débriefing de cette première quinzaine
de course risque d’être musclé. Très musclé. Mais
très rapide, aussi. Car, pour Ferrari, le bilan des deux
premiers Grands Prix de la saison se résume facilement. C’est tout rond et c’est un zéro pointé !
La Scuderia est tout simplement dernière du
Championnat, sans avoir inscrit aucun point. Elle
est même derrière Force India ! «Il est sûr qu’on ne
peut pas franchement se réjouir, résumait son patron
Stefano Domenicali dimanche soir. Nous ne sommes
pas dans le coup !» «Nous devons repartir de zéro,
confirmait Massa, qui échoue (9e) à la porte des
points. C’est sûr, il y a un problème.» Il y en aurait
même plusieurs si on listait la série noire de la Scuderia. Après les deux abandons de Melbourne dimanche dernier, Ferrari a brillé ce week-end par une
incroyable multiplication d’erreurs et de contre-performances.
La faute à Schumacher ?
Vendredi, premier souci pour le KERS de Räikkönen. Samedi, Massa rate sa qualification parce que
tout le monde est persuadé que son chrono sera suffisant pour passer. Et, dimanche, le Finlandais, alors
cinquième, est soudain rappelé aux stands pour
chausser des pneus extrêmes. «Nous avions des informations qui annonçaient une forte pluie, se justifiait
Domenicali. Les premières gouttes commençaient à
tomber. Alors...» Räikkönen se retrouve donc sur une
piste sèche avec des gommes inadaptées, totalement
à la dérive, incapable de suivre le rythme.
L’averse arrivera trop tard pour le Finlandais, doublement condamné par un nouveau problème de
KERS qui le contraint à l’abandon au plus fort du déluge. La presse italienne est déjà à la recherche de
coupables car, en plus de ces erreurs, la F 60 est loin
d’être dans le rythme des meilleures. «On ne devient
pas soudainement stupides, défendait Massa, pourtant
une nouvelle fois victime des erreurs de son équipe.
On était bons avant. Cela va revenir. Mais nous n’avons
pas besoin d’une révolution. Il faut juste réagir. Ensemble et vite.» Et surtout savoir qui fait quoi...
Michael Schumacher est depuis le début de la saison très présent, sans que l’on connaisse son rôle.
Certains le disent envoyé par Luca Di Montezemolo,
le patron de Fiat, pour surveiller la Scuderia. D’autres le voient comme un possible successeur de Domenicali. Avant-hier, il était au pied de la murette à
guetter ces gouttes qui ne venaient pas alors que
Räikkönen vivait, en piste, son calvaire. Et quand
on posa la question de savoir ce que faisait le septuple champion du monde, c’est d’une pirouette amusée que Domenicali s’en sortit : «Je n’ai pas envie de
répondre à cette question. J’ai l’habitude de régler mes
problèmes en privé. Nous sommes une équipe et nous allons tirer cela au clair. Il y a des responsables et il leur
faudra prendre leurs responsabilités !» Pas sûr que chez
Ferrari, on goûte cet après-midi à la douceur du printemps de l’Émilie-Romagne. Certains risquent même
de regretter la terrible mousson de dimanche...
Frédéric Ferret
IAprès l'orage, l'explication de texte. En privée chez Ferrari.
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du Championnat. «On s’habitue
vite à ce genre de sensation, glissait-il vendredi, ravi de ce pied
de nez au destin. On écrivait que
j’étais un pilote fini, lâchait-il la
semaine dernière à Melbourne.
Mais à Brackley, les gens me
connaissent depuis longtemps. Ils
savaient ce que je valais !» La
preuve : le parcours du pilote est
sans faute, avec un meilleur tour
en course, deux poles et deux
victoires en (presque) deux courses.
«Je n’ai pas envie de penser à une
quelconque revanche, se défendait
Button, il y a neuf jours, après sa
première victoire de la saison.
Certaines personnes ont toujours
cru en moi, d’autres pas, mais je
m’en fous. Je suis juste heureux et
je peux dire que j’ai bossé dur pour
en arriver là.»
Samedi, il se ravissait pourtant
du retour vers lui des journalistes britanniques, qui cherchaient à connaître son avis sur
son nouveau statut d’idole au
pays. «Quelle amusante question,
se délectait-il, je ne suis pas là
pour être le meilleur pilote britannique.»
Éclairé par le soleil couchant
de Melbourne ou par les spots
au cœur de la nuit malaise, sa
belle gueule n’est plus seulement celle d’un play-boy, désormais accroché à Jessica Michibata,
un
mannequin
nippo-argentin. Les coups reçus
lui ont donné le visage d’un
vainqueur. Un vrai. «Notre but à
tous est d’être le meilleur en F 1,
assurait-il samedi. Et le mien est
d’être champion du monde !»
Cette fois, Jenson Button ne
veut plus louper sa chance. Le
numéro 22 de sa monoplace,
c’était celui d’un certain Hamilton, l’an dernier...
Frédéric Ferret

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