l`experience cailleau pneus - profil +

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l`experience cailleau pneus - profil +
L'EXPERIENCE CAILLEAU PNEUS - PROFIL +
Une démarche compétence qui s’intègre
dans la stratégie de l’entreprise
))))))) CAILLEAU PNEUS – PROFIL + )))))))
Secteur : Equipements automobiles
Activité : Pièces détachées et accessoires auto (vente, pose, réparation)
Effectifs : 66 salariés
Département : Maine-et-Loire
Pour faire face à une concurrence importante, l’entreprise Cailleau Pneus - Profil + a
souhaité mettre en place une organisation différente misant sur la responsabilisation et
les compétences de ses salariés. Un projet porté par la direction qui vise à développer le
service à la clientèle (conseil et accompagnement) tout en améliorant le
fonctionnement interne de l’entreprise.
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L’entreprise, les marchés, sa stratégie
Société familiale inscrite depuis les années 30 dans le négoce du pneumatique, « Cailleau pneus - Profil
plus » mène une stratégie offensive dans un contexte très concurrentiel. Cela l’a conduit à développer
son organisation et à initier une démarche compétence.
Son chiffre d‘affaires dépasse depuis 2003 les 8 millions d‘euros avec une nette progression - 15% en 4
ans - due en particulier à la branche industrie. Celle-ci contribue désormais à près de 70% du CA.
Les effectifs ont progressivement évolué depuis 5 ans. Elle est passée de 48 salariés en 2000 à 66 en
2008. L’essentiel du personnel est situé dans la catégorie des employés/ouvriers. La population des
cadres est formée des responsables d’agences, des commerciaux et des responsables de service. Il n’y a
pas d’agent de maîtrise.
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Une stratégie offensive
Positionnée entre le réseau commercial des fabricants de pneumatiques et les enseignes de la grande
distribution, l’entreprise met l’accent sur la qualité de service et la diversification.
Prenant appui sur une forte identité au sein de la région, elle entend renforcer son rôle de conseil et
d’accompagnement tant pour les particuliers que pour la clientèle « industrielle ».
Ce rôle d’accompagnateur du conducteur, exercé et reconnu, permet à Cailleau pneus/Profil plus de se
différencier. Pour donner encore plus d’impact à cette « compétence clé », l’entreprise a choisi de
participer au développement d’un réseau, « Profil + ». Celui-ci lui permet de conserver son
indépendance de gestion et de fonctionnement et de mener une politique commerciale parfaitement
cohérente pour des clients d’envergure nationale. (Pratiques commerciales communes, tarifications,
centralisation des factures des grands comptes, dépannage sur toute la France…).
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Une organisation plus étoffée
Afin de passer du statut de garage de proximité à celui d’entreprise de services élargis, la direction a
progressivement enrichi la structure en multipliant les activités et en introduisant des niveaux
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hiérarchiques. Avec un siège à Angers et quatre agences opérationnelles (Angers, Cholet, Laval,
Château-Gontier), l’entreprise dispose d’un enracinement régional fort. Mais cela complexifie aussi les
problématiques de management.
Sur le site d’Angers, la distinction :
- Clientèle particulier, agence « tourisme »,
- Clientèle professionnelle, agence « industrie »
permet une spécialisation des postes dans l’atelier.
Son niveau d’activité - et la présence d’une station service - permet aussi de dédier certains postes à
l’accueil, au commercial ou à l’administratif.
Sur les sites « décentralisés », les ateliers et donc les opérateurs qui y travaillent sont plus polyvalents
car ils sont amenés à répondre à des clientèles différentes : agriculteurs, industriels, entreprises de génie
civil et tourisme.
Si l’ambiance est considérée comme conviviale et que les plus anciens ont un fort sentiment
d’appartenance, on constate cependant quelques difficultés :
- La direction générale reste l’épicentre de la communication interne.
- L’organigramme formalisé ne correspond pas toujours à la réalité des relations fonctionnelles et
hiérarchiques.
- Le contenu du poste paraît différent de sa description officielle.
- Les délégations de pouvoir semblent rester floues et ne favorisent pas l’affirmation managériale
des responsables d’agence.
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La démarche compétence
Mise en œuvre pour répondre à des exigences professionnelles, la démarche compétence a su tirer
partie d’opportunités locales. Elle se traduit aujourd’hui par une série d’actions, reflets de la forte
implication de la direction.
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Les exigences
Elles concernent d’abord les monteurs/mécanos, dont la professionnalisation est apparue comme une
nécessité. Désormais, pour reprendre un propos, « on ne demande plus seulement des bras, car le
monteur est le premier représentant de la société », il faut donc développer ses compétences.
Cet enrichissement répond à un besoin de polyvalence : il faut être capable de réaliser l’entretien global
d’une voiture, de suivre la gestion d’un parc de camions chez les transporteurs, d’avoir des
connaissances au-delà du pneumatique.
Ce professionnalisme correspond aussi à un dépassement de l’approche purement technique pour
développer une approche plus relationnelle avec les clients. Il s’agit alors pour les monteurs de
développer des qualités d’écoute et de conseil, de faire preuve de politesse….
Enfin, ce souci de professionnalisation prend en compte la complexité accrue de certains postes, qui
deviennent véritablement stratégiques. Il faut penser aux possibilités de remplacement sur certains
postes, comme celui de « régleur train avant ».
Ces exigences en matière de compétences concernent aussi les cadres et les commerciaux. Le besoin
d’un élargissement de leurs responsabilités pour faire face au développement de l’entreprise est
manifeste.
Les responsables d’agence doivent assumer des missions managériales diversifiées (accompagnement
du personnel, développement commercial…).
Les chefs de services, proches de la direction, doivent assumer des tâches de conception et de
coordination. Enfin, les commerciaux doivent devenir des technico-commerciaux (forte dimension
d’analyse des besoins et de conseil chez les clients).
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Les opportunités locales
Le rôle du dirigeant est dans ce domaine décisif. La fonction ressources humaines se consacrant à la
dimension juridico-administrative, c’est au DG de prendre en main les éléments plus stratégiques. Chez
Cailleau pneus- Profil plus, cela s’est traduit par :
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La participation du dirigeant à un groupe d’échange de chefs d’entreprises, impulsé par la CCI
et axé sur la problématique de la GPEC.
Une réflexion sur la compétence comme point d’ancrage du développement de la
professionnalisation des salariés (formation plus adaptée aux besoins réels, reconnaissance
possible des savoir-faire et des degrés d’engagement…).
L’intervention d’une consultante pour réaliser un référentiel de compétences intégrant une
progression par niveaux.
Une série d’outils et d’actions en interne
Les outils sont classiques, on retrouve la fiche de poste revue et
affinée, l’entretien annuel avec son rituel et son support, ainsi que
les différents dispositifs de communication qui peuvent y être liés.
Dans l’entreprise, la définition des compétences s’est faite d’un
côté en face à face pour les métiers administratifs, de l’autre en
équipe pour les postes d’atelier. Les compétences n’ont pas été
décrétées d’en haut et la construction « participative » des référentiels a permis de concrétiser le
concept et de l’associer aux activités réelles des salariés de l’entreprise.
La mise en place des entretiens annuels a été précédée d’une formation des responsables d’agence à la
conduite des entretiens.
Un support d’entretien, avec grille d’évaluation des compétences décrivant plusieurs niveaux, a été
élaboré. S’y ajoutent, entre autres, la réalisation d’un organigramme, la remise d’un livret d’accueil aux
nouveaux arrivants, la réalisation et la diffusion d’un catalogue pour le DIF.
Les actions qui en découlent donnent plus d’importance au pilotage interne des compétences et les
ressources humaines internes sont privilégiées sur les recrutements extérieurs. C’est « une entreprise qui
laisse sa chance aux jeunes, s’ils sont compétents ». Ainsi, une série de promotions permettent à des
opérateurs de devenir commerciaux. Les structures s’enrichissent grâce à la détection de potentiels :
c‘est l’identification de compétences détenues par un collaborateur et peu utilisées dans son poste, qui
a incité et permis la création d’un poste de coordinateur.
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Une forte implication de la direction
La direction garde le cap dans la démarche compétence. Tout naturellement des limites ont été
constatées, mais l’entreprise souhaite avancer.
Manifestement, la démarche a été appréciée, mais a en même temps suscité des attentes.
Les entretiens sont bien acceptés par le personnel. « On se pose des questions sur soi même » ou « cela
permet de se rassurer sur la manière dont on est perçu dans l’entreprise ».
Chacun étant amené à préparer son entretien, on note peu de distorsion entre l’auto évaluation des
salariés et l’évaluation faite par les responsables.
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En révélant des attentes, la démarche a pu susciter des insatisfactions. Les responsables se sont sentis
mal préparés à cette situation de face à face et la formation à la conduite des entretiens a été perçue
par certains comme peu adaptée.
Ils ont ressenti des difficultés pour donner suite aux demandes exprimées lors des premiers entretiens.
Celles-ci concernent les besoins en formation et les possibilités d’évolution ; demandes qui ne sont pas
suivies de réponse de la part de la direction.
Cela a entraîné des déceptions parmi le personnel mais aussi chez les cadres. Certains aujourd’hui
« traînent les pieds » pour engager la deuxième série d’entretiens.
La direction de l’entreprise analyse la situation et entend faire rebondir la démarche. Pour se faire, elle
renforce le rôle de la DUP (délégation unique de représentation du personnel) qui se trouve mieux
associée à la démarche et crée un poste d’assistante RH, chargé de faire une synthèse des entretiens et
de procéder à une revue de personnel pour identifier les demandes d’évolution.
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Le point de vue des acteurs
Le diagnostic effectué porte à la fois sur le contenu et sur le contexte managérial de la démarche. Il
émane des collaborateurs et des managers de l’entreprise.
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Le point de vue des collaborateurs
Les limites liées au contenu de la démarche concernent les outils et leur utilisation. Ainsi, les
référentiels sont considérés comme un peu complexes et le lien entre performance et compétences
pour les commerciaux, pas bien clarifié. D’une manière plus générale il y a peu de reconnaissance
symbolique et « on ne nous dit pas quand ça va bien ».
C’est l’utilisation qui en est faite qui pose plus problème. Beaucoup s’étonnent, « on ne sait pas trop à
quoi ça sert puisque il n’y a pas de lien avec les salaires, la formation et les promotions » .
Le mode d’intéressement des commerciaux reste peu attractif. L’accès à la formation semble
inégalement réparti. L’organisation de la phase d’intégration reste inchangée et n’a pas bénéficié de la
démarche.
Les limites liées au contexte managérial concernent essentiellement des problèmes de communication.
Ainsi, le personnel des agences souhaiterait avoir plus de lien au sein de l’entreprise. (organisation de
réunions communes / visite plus fréquente du DG). La stratégie de l’entreprise ne semble pas connue ni
comprise par les salariés qui souhaiteraient être plus informés. Plus quotidiennement une meilleure
circulation de l’information est demandée : mettre « au courant » ceux qui sont concernés.
Quant à la politique salariale elle semble constituer un frein à l’engagement des salariés.
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Le point de vue des managers
Les limites perçues ont trait d’abord à la mise en œuvre de la démarche. Favoriser les compétences
c’est d’abord pouvoir en « posséder ». Or, les responsables d’agence rencontrent des difficultés pour
recruter des monteurs (pas de formation initiale, métier qui s’apprend sur le tas…) et pour fidéliser les
salariés. S’inscrire dans la démarche, c’est aussi pouvoir développer les compétences. La formation des
responsables d’agence au management et tout particulièrement à l’accompagnement du
développement des compétences, semble limitée. Ils disposent de peu de leviers pour accroître le
professionnalisme de leurs équipes en particulier pour ce qui concerne la relation client (accueil,
politesse, initiative…).
Plus globalement le contexte managérial vient relativiser l’impact de la démarche. Les problèmes de
positionnement hiérarchique et de communication sont les plus souvent évoqués. Les responsables
voudraient « mieux faire », mais ne se sentent pas toujours légitimes. Ils font plusieurs constats :
• Manque de communication entre les agences et le siège.
• Peu de cohérence dans les méthodes de travail entre les agences.
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Réunions mensuelles des responsables d’agence pas toujours satisfaisantes.
Communication au sein des agences souvent informelle (pas de réunion de travail,
ajustement mutuel).
Les responsables d’agence se sentent un peu livrés à eux-mêmes par la direction. Les objectifs ne
semblent pas appropriés. Il semble y avoir des « accès » à la Direction Générale différents selon les
responsables d’agence.
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Bilan et perspectives
La direction a effectué un certain nombre de constats qui sont autant de pistes d’amélioration.Tout
naturellement des éléments du dispositif sont à modifier. Pour la description des postes, il est
nécessaire de réduire le décalage entre ce qui est décrit et ce qui est réalisé, intégrer des tâches
n’apparaissent pas et repréciser le contour des postes d’encadrement. C’est un des éléments qui
permettra de conforter leur situation.
Pour le référentiel de compétences, qui se veut exhaustif, il est important d’afficher ce qui est requis contenu et niveau - pour chacun des métiers.
Les liens entre les entretiens et les autres dispositifs de GRH sont en voie d’être précisés.
- Les suites à donner : que dire, que faire ?
- La constitution de filières professionnelles
- La mise en évidence à partir des compétences détenues, d’opportunités pour l’entreprise.
Autant d’éléments qui démontrent la volonté de la direction de faire progresser la démarche et de ne
pas la laisser au « milieu du gué ».
Auteurs :
Bruno Henriet : Enseignant-chercheur en gestion à l’Université de Nantes. Spécialisé en gestion des
ressources humaines
Eric Melchior : Consultant au Conservatoire National des Arts et Métiers (CNAM des Pays de la Loire).
Ce retour d’expérience a été réalisé dans le courant de l’année 2008 par l’entreprise Cailleau Pneus – Profil +
avec l’appui de deux chercheurs. Ces derniers ont rencontré une vingtaine de personnes : PDG, encadrement,
représentants des salariés Cette analyse a été présentée et validée par la direction et les salariés interviewés.
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