Intervention du CEDAET dans le cadre d`un projet de

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Intervention du CEDAET dans le cadre d`un projet de
Intervention du CEDAET dans le cadre d’un projet de déménagement
I. Le déménagement : un projet important
Un déménagement est un « projet important » au sens du Code du travail. En effet, un
déménagement comporte plusieurs changements qui sont susceptibles de modifier les
conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail :
 Une nouvelle localisation géographique du lieu de travail.




Un nouvel environnement
De nouveaux locaux de travail.
Un nouvel aménagement des espaces de travail.
Un projet organisationnel.
II. Des changements : quels risques ?
1.
Une nouvelle localisation géographique du lieu de travail
Cette nouvelle localisation est susceptible d’entraîner un accroissement de la durée du
trajet domicile-travail. Cet accroissement, qui peut être significatif, combiné à l’évolution des
conditions de transport et de déplacement qu’il entraîne, a des incidences multiples :
 Sur la santé : une augmentation sensible de la fatigue physique et de la tension
nerveuse (accumulation de modes de transport différents, augmentation du nombre de
correspondances en transports en commun, etc.) ; un accroissement de l’amplitude
horaire et un raccourcissement du temps de sommeil ; la mise en œuvre de régulations
défavorables pour la santé pour limiter cet accroissement telle que la réduction des
temps de pause pendant la journée de travail.
 Sur la sécurité : une augmentation du risque routier qui concerne les salariés utilisant un
véhicule, dont la distance ou le temps de trajet va augmenter, et/ou dont le déplacement
vers le nouveau site contraint à emprunter des axes routiers dangereux.
 Sur l’équilibre entre le travail et la vie privée : l’augmentation du temps de trajet peut
rompre cet équilibre déterminant dans la construction de la santé s’il entraîne une
ingérence du travail dans la vie privée et une réduction de la disponibilité pour la vie
familiale et sociale.

Sur l’activité de travail et les relations de travail : un désajustement des pratiques
horaires qui fragilise le collectif de travail et pénalise l’organisation. Dans une activité
caractérisée par l’interdépendance des salariés dans un process de production et où les
liens de coopération sont essentiels, les incidences peuvent être majeures tant du point
de vue de la santé (dégradation des relations, rigidification de la prescription, reports de
charge et intensification du travail, etc.) que de la performance.
Fiches pratiques CEDAET - 07/07/15
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
En termes économiques et d’emploi : il s’agit des surcoûts relatifs au transport et/ou à la
garde d’enfant, ainsi que du coût relatif à un déménagement si cette option était retenue
pour se rapprocher du lieu de travail. Par ailleurs, le temps de trajet pouvant devenir
rédhibitoire, la question du départ de l’entreprise est posée, non sans provoquer des
tensions pour le salarié devant opérer cet arbitrage.
Lorsque l’activité se caractérise par une fréquence élevée de déplacements professionnels,
d’autres problématiques et risques peuvent émerger. En effet, une nouvelle localisation du
site qui contraindrait ces déplacements et en augmenterait la durée (éloignement,
accessibilité complexe en transports en commun, etc.) ne serait pas sans effets sur la
charge de travail individuelle, les possibilités de régulation de la charge collective, et
l’intégration au sein du collectif de travail.
2.
Un nouvel environnement
Le nouvel environnement peut présenter plusieurs risques :

Le secteur peut être affecté par exemple par un classement au PPRI (Plan de
Prévention des Risques d’Inondation). Il sera donc nécessaire d’évaluer les risques
d’inondations et de vérifier le respect des dispositions réglementaires prises dans le
plan.

Les axes de communication proches du site (lignes de trains, lignes à hautes tensions,
axes routiers, etc.) peuvent induire des nuisances sonores et vibratoires pour
l’ensemble du secteur. La réalisation de bureaux proches de ces axes devra donc
prendre en compte ces nuisances et ces risques afin de les limiter.

Le site peut mettre en œuvre des produits dangereux ou présentant des risques
notables d’incendie, d’explosion ou de dissémination de substances toxiques (pollution
des sols, liés notamment aux anciennes activités industrielles éventuellement présentes
sur le site). En effet, la taille, la nature et parfois le lieu d’implantation des unités
industrielles de fabrication ou de stockage de produits dangereux ou toxiques
conditionnent les effets potentiels d’un éventuel accident. Les cas de figure sont divers :
du site classé Seveso à la proximité par exemple d’une usine d’incinération.
Le nouveau site d’implantation est par ailleurs un nouvel environnement socio-économique
qui soulève les principales problématiques suivantes :

Celle des conditions de vie pendant la journée de travail et des possibilités de régulation
de la tension travail/hors travail (possibilités de restauration, de pauses à l’extérieur du
lieu de travail, d’accès à une offre médicale, etc.).

Celle de l’adaptation de l’environnement aux besoins professionnels.

Celle de l’isolement du site et de l’appréhension du risque d’agression.
3.
De nouveaux locaux de travail
Un déménagement représente toujours une nouvelle configuration des espaces de travail.
L’analyse des nouveaux locaux de travail est complexe car elle doit porter de façon
simultanée sur plusieurs paramètres afin d’aboutir à des arbitrages favorables à
l’amélioration des conditions de travail, à la préservation de la santé des salariés et à la
prévention des risques professionnels. Il s’agit notamment des paramètres fonctionnels
(exigences de l’activité de travail), techniques (hygiène sécurité), organisationnels
Intervention du CEDAET dans le cadre d’un projet de déménagement
(organisation du travail), et économiques (équilibre du projet de déménagement). L’analyse
s’attachera ainsi à :

Vérifier si les nouveaux locaux respectent les règles d’hygiène de sécurité et des
conditions de travail (ambiances physiques, accès, circulation, sanitaires, etc.).

Identifier les limites et les inconvénients des locaux sur le plan technique
(cloisonnement limité pour des raisons de désenfumage, etc.).

Examiner la fonctionnalité des locaux au regard des exigences de l’activité individuelle
et collective de travail (besoins de concentration, de communication, de confidentialité,
de travail en groupe, etc.).

Identifier les facteurs de dégradation des conditions de travail (réduction des surfaces
exploitables, augmentation des bureaux collectifs et de leur densité, réduction des
locaux supports et des lieux de détente, etc.).
Enfin, il est à noter que des locaux neufs ou rénovés suscitent des problématiques
différentes qui ne sont pas sans conséquences sur les arbitrages qui concernent le choix
même du bâtiment.
4.
Un nouvel aménagement des espaces de travail
L’analyse d’un projet de déménagement concerne donc le bâtiment et ses caractéristiques
d’un point de vue global mais aussi l’aménagement des locaux prévus pour accueillir
l’activité et les salariés concernés. Le projet d’aménagement comprend plusieurs étapes
(macro-zoning, micro-zoning et implantation détaillée et nominatives des postes de travail).
L’analyse de cet aménagement s’attachera principalement à :

Examiner l’adéquation des affectations spatiales des unités de travail avec la
hiérarchisation des relations fonctionnelles (besoins de proximité, éloignement, etc.).

Vérifier si, au-delà des contraintes techniques et/ou financières, les arbitrages effectués
par l’entreprise intègrent les réalités du travail et les besoins des salariés
(organisationnels, techniques, matériels, etc.).

Examiner le projet d’aménagement sous l’angle des situations de travail et pas
seulement sous l’angle des postes de travail (l’environnement, les moyens, la nature de
l’activité, l’organisation et les caractéristiques de la population).

Vérifier si l’aménagement prend en compte les besoins spécifiques relatifs à l’activité
(impressions, plans de travail supplémentaires, outils spécifiques, etc.) mais aussi ceux
relatifs aux individus (travailleurs en situation de handicap, maladies professionnels,
etc.).

Examiner la prise en compte des principes réglementaires et des normes ergonomiques
dans l’aménagement des situations et des postes de travail.
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5.
Un projet organisationnel
Un projet de déménagement est très souvent aussi un projet organisationnel. En effet,
transformer l’organisation spatiale, opter pour des implantations spécifiques, prévoir ou non
un nombre de postes de travail supérieur à l’effectif actuel, n’est pas neutre. Les
transformations sont repérables sur plusieurs niveaux parmi lesquels :

La mutualisation de certaines activités et/ou outils de travail dans les fonctions support
mais aussi de plus en plus souvent dans certaines activités de production.

L’externalisation de certaines activités qui tendent à inclure des activités considérées
jusqu’à lors comme relevant du « cœur de métier » de l’entreprise.

La mise en place de nouvelles procédures telle que la dématérialisation.

L’évolution des postes de travail et donc des effectifs pour certaines unités de travail.

Des changements d’horaires, de compositions d’équipes, de périmètres d’activités…
L’étalement de la consultation des instances représentatives du personnel et du recours à
l’expertise est nécessaire pour repérer et analyser le projet organisationnel que sous-tend
un projet de déménagement. Il y a là un enjeu majeur.
III. Méthodologie du CEDAET
Pour l’analyse du projet de déménagement, le CEDAET met en œuvre des grilles d’analyse
architecturale, technique, ergonomique et sociologique, chacune combinant approches
quantitative et qualitative. Ainsi, parmi les outils méthodologiques que le CEDAET met en
œuvre :
 Une analyse documentaire et technique : documents transverses de l’entreprise (bilans
sociaux, rapports de la médecine du travail, etc.) ; documents relatifs au projet (plans
d’aménagements, CCTP, Descriptifs techniques, etc.) ; documents relatifs aux risques
environnementaux (rapports d’évaluation des risques sanitaires, carte situant les locaux
par rapport aux zones de servitude des sites Seveso, etc.).
 Des entretiens avec la direction de l’entreprise, l’équipe projet et les acteurs externes
(Maîtrise d’œuvre, Maîtrise d’Ouvrage, Assistance à la Maîtrise d’Ouvrage).
 Des entretiens avec les représentants du personnel et les acteurs santé et prévention
des risques professionnels (médecin du travail, ingénieur sécurité, etc.).
 Une étude quantitative des temps de trajet : analyse critique de la modélisation réalisée
par l’employeur et production de nouveaux indicateurs (évolution des temps médian,
minimum et maximum ; écarts à l’allongement moyen et répartition de l’effectif par
tranche d’allongement ; dépassements du seuil de tolérance ; etc.).
 Des entretiens individuels et/ou collectifs avec un échantillon représentatif de salariés
concernés par le projet.
 La passation d’un questionnaire pour le recueil systématique d’indicateurs nécessaires
à l’analyse des conséquences du projet (temps réels de trajet et nature des aléas ;
fréquence, modalités et difficultés des déplacements professionnels, etc.).
 Des observations de situations de travail réel et une métrologie ergonomique des
ambiances physiques (sonores, lumineuses, thermiques).
 Des relevés d’occupation réelle des locaux avant le déménagement et examen des
locaux cibles.