Pratiques préjudiciables et droits humains
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Pratiques préjudiciables et droits humains
Pratiques préjudiciables et droits humains Harmful Practices and Human Rights 2 Pratiques préjudiciables et droits humains Harmful Practices and Human Rights 15e Séminaire de l’IDE 10 au 13 octobre 2010 3 Déjà parus dans la même collection IDE : - Droits de l’enfant et SIDA : du tabou aux stratégies d’intervention. The Rights of the Child and HIV/AIDS: from Taboos to Intervention Strategies. Juin 2004. - Trafics d’enfants : une fatalité ? De la réalité du terrain aux meilleures pratiques. Child Trafficking: a Fatality? From Field Reality to better practices. Mai 2005. - Droit à l’éducation : solution à tous les problèmes ou problème sans solution ? Right to Education: Solution to all Problems or Problem without Solution? Mai 2006. - Droit des enfants en situation de handicap. Right of Children living with Disabilities. Mai 2007. - Enfants en situations de rue. Prévention, interventions, respect des droits. Children in Street Situations. Prevention, Interventions, Rights-Based Approach. Mai 2008. - Enfants victimes et témoins. Une question de justice… et de droits. Children as Victims and Witnesses. A Question of Law… and of Rights. Mai 2009. - Enfan’phare : 20 ans de la Convention des droits de l’enfant Juin 2010 - La Convention des droits de l’Enfant, vingt ans plus tard… Essai d’un bilan Juin 2010 Ces ouvrages peuvent être obtenus à l’IDE. Mai 2011. Tous droits réservés. Reproduction, même partielle, interdite sous quelque forme ou sur quelque support que ce soit sans l’accord écrit de l’éditeur. Editeur Institut international des Droits de l’Enfant Case postale 4176 - 1950 Sion 4 - Suisse Tél +41 (0) 27 205 73 03 - Fax +41 (0) 27 205 73 02 E-mail : [email protected] - Web: http://www.childsrights.org Comité de rédaction Jean Zermatten, éditeur responsable Paola Riva Gapany Geneviève Lévine – Patricia Roduit – Alexandra Prince Marina Stoffel – Gabriel Rey (traductions) 4 5 INSTITUT INTERNATIONAL DES DROITS DE L’ENFANT www.childsrights.org L’Institut international des Droits de l’Enfant a organisé son 15e séminaire « Pratiques préjudiciables et droits humain » du 10 au 13 octobre 2010. Il a bénéficié de l’aide et du soutien de : La Direction du Développement et de la Coopération (DDC), Suisse La Loterie Romande La Ville de Sion Distribution Suisse UNICEF Il remercie ces institutions de leur contribution. 6 TABLE DES MATIÈRES Préface Paola RIVA GAPANY 8 Allocutions d’ouverture Christophe DARBELLAY Nafissatou J. DIOP Agnes Akosua AIDOO Violeta NEUBAUER 11 14 18 24 PREMIÈRE PARTIE PRATIQUES TRADITONNELLES ET INSTRUMENTS DES DROITS DE L’HOMME Jane CONNORS Evolution and Definition of the Concept of Harmful Traditional Practices 30 Marta MAURÁS PÉREZ Harmful Traditional Practices - UN Committee on the Rights of the Child 41 Dubravka ŠIMONOVIĆ Harmful discriminatory Practices: Reality, Practice and Jurisprudence of the CEDAW Committee 49 Christiane BRISSON Pratiques préjudiciables traditionnelles et justiciabilité 61 DEUXIÈME PARTIE PERSPECTIVES ACTUELLES SUR TRADITIONNELLES PREJUDICIABLES LES Pierrette HEZBERGER-FOFANA Du rôle des exciseuses ou matrones africaines dans les mutilations sexuelles féminines : le cas du Sénégal PRATIQUES 80 7 Berhane RAS-WORK The Status of Women and Harmful Traditional Practices - FGM 102 Abdoulaye Doro SOW La contre argumentation culturelle comme stratégie de lutte contre les pratiques traditionnelles néfastes 111 Kamel FILALI Perspectives actuelles aux pratiques traditionnelles préjudiciables 128 Paola RIVA GAPANY Lutte contre les mutilations génitales féminines : quelques réflexions après huit ans d’actions en Suisse 148 Elise JOHANSEN Preventing Health-Care Providers from Performing Female Genital Mutilation 159 Nafissatou J. DIOP Acceleration of FGM/c Abandonment: what works? 173 Archana MEHENDALE How to abandon Harmful Traditional Practices? 188 Sylvia LOPEZ-EKRA Addressing Female Genital Mutilation in the Context of Migration 193 El Hadji Gorgui Wade NDOYE Rôle et place des medias dans l’éradication des pratiques néfastes 199 Mustafa HASSAN How to abandon FGM? The Contemporary Campaign to abandon FGM: a Look at the Sudanese Experience 220 Richard BEDDOCK Pratiques traditionnelles préjudiciables : le point de vue du médecin 232 8 TROISIEME PARTIE CONCLUSIONS Rapport des ateliers et Recommandations 238 Renate WINTER Closing Remarks 252 9 PRÉFACE PAOLA RIVA GAPANY Sous-directrice, Institut international des Droits de l’Enfant, Sion Dans son livre de 1975, Ainsi soit-elle1, la femme de lettres et féministe engagée Benoîte Groult qualifiait l’excision féminine de secret le mieux gardé au monde. A l’époque, ce roman fit grand bruit: en pleine période soixante-huitarde, les mouvements féministes luttaient contre l’asservissement masculin, la liberté sexuelle féminine se revendiquait haut et fort et l’universalisme des droits humains se fracassait contre leur culturalisme2. Ainsi, s’il était de bon ton de partager le sort de ses sœurs noires, aucune femme n’osait s’offusquer de les savoir excisées, mutilées, mariées de force, gavées, brûlées avec leur conjoint défunt, voir même vitriolées. Aucune femme ne s’élevait pour dénoncer la tradition, qui faisait passer l’honneur familial par le comportement sexuel de leurs sœurs 3. Cela faisait partie de leur culture, de leurs traditions, voir de leur identité. Au nom de cette identité, certaines femmes noires américaines allèrent même jusqu’à se rendre au Nigéria ou au Sierra Leone pour elles aussi endurer la tradition et se faire exciser. Ainsi, elles étaient d’authentiques femmes noires, fières de l’être, et orgueilleuses de leur origine. Question d’honneur familial ou d’identité culturelle, le secret était bien gardé, de part et d’autre… Et c’était un secret de femmes. Certaines eurent certes le courage de parler : au mieux, furent-elles poliment écoutées, avant d’être oubliées; au pire, furent-elles traitées de filles ingrates, trahissant leurs origines, avant d’être bannies. C’est que l’adversaire était de taille : lutter contre l’Histoire relevait en effet de la mission impossible. Toutes les pratiques préjudiciable relèvent de la coutume; et la coutume, pour avoir force de loi, doit être respectée et appliquée sans discontinuité pendant un certain laps de temps. Des siècles pour certaines pratiques. Interrogés sur l’origine de leurs coutumes, les Vieux Sages estimaient même qu’elles appartenaient à l’univers, et qu’elles étaient nées trouvées4, d’où leur qualification de coutume depuis depuis5. Les remettre en question, ne pouvait apporter que désordre, chaos et maladies au sein des familles et de la communauté. Dès lors, les respecter ne se contestait pas. 1 2 3 4 5 Groult Benoîte, Ainsi soit-elle, Le Livre de Poche, 1975 Awa Thiam, grande féministe sénégalaise, a rappelé les premiers combats, où Benoîte Groult se faisait insulter pour « manque de respect aux cultures traditionnelles (euro-centrisme, racisme, etc.) » Awa T., La Parole Aux Négresses, Edition Denoel-Gonthier, 1978 Lange Benoît, Cicatrice, Un village et l’excision, Lausanne 2004, 23 Lange B., supra, 18 10 Combien de décès ? Combien de morts inutiles au nom de la coutume ? Combien de vies fracassées ? Combien de sentiments honteux gardés au plus profond de soi ? Personne ne le sait et personne ne souhaite articuler de chiffres. Il s’agit d’un secret bien gardé. Et qui profite à tous. En effet, le pays d’accueil, qui pourtant intervient manu militari lorsque la société est mise en danger par les migrants, se garde bien d’agir auprès des communautés qui respectent la tradition. Le secret pourtant commence à s’émousser. Les temps changent, la société évolue. Le féminisme devient humanitaire tout comme le droit d’ingérence. Se taire n’est plus de mise. D’ailleurs, la communication et l’information galopent au son d’Internet et de facebook. Les populations se déplacent et rentrent en contact les unes avec les autres; certaines s’établissent même dans des pays dits d’accueil et en acquièrent la nationalité. La question de l’intégration se pose alors avec son lot d’interrogations identitaires, culturelles, communautaires, linguistiques. Dans ce contexte, comment justifier le respect de la tradition née trouvée, qui entaille non seulement l’intégrité psychiques et physiques des enfants, mais viole leurs droits les plus fondamentaux, à savoir la liberté et l’égalité ? Lors de la 4e conférence mondiale sur les femmes en 1995 à Beijing, un slogan fut de mise : « Respect des cultures, d’accord. Respect des femmes d’abord ! »6 Choisir son conjoint librement, sans aucune pression, échapper aux traditions mutilatrices et dégradantes, s’épanouir pleinement dans son corps et son esprit, voilà ce que veulent les jeunes. Et ils y ont droit. Tous les pays, à l’exception de la Somalie et des Etats-Unis ont ratifié la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant (CDE). La Convention pour l’élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard de la femme (CEDEF) est quant à elle ratifiée par 186 pays. Régionalement, les pratiques traditionnelles néfastes à la santé sont assimilées à des traitements dégradants, voir à de la torture7. Nationalement, les Etats ont adopté des lois pour interdire les pratiques traditionnelles néfastes à la santé, par exemple les MGF8, les mariages forcés, les tests de virginité9. Mais la législation doit être appliquée, et elle doit être accompagnée par la prévention pour ne pas rester lettre morte. Un des principaux objectifs du 15e séminaire international de Sion, organisé par l’Institut international des Droits de l’Enfant, fut de réunir des experts de la 6 7 8 9 http://www.un.org/womenwatch/daw/beijing/tue12.htm Art. 3 Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH); arts. 3 et 26 Charte africaine des Droits et du Bien-être de l’Enfant. Législations en vigueur dans plusieurs pays du monde : http://www.ipu.or/wmn-f/fgm-prov-d.htm Afrique du Sud : interdiction des pratiques zouloues des tests de virginité; cf. http://cat.inist.fr/?aModele=afficheN&cpsidt=17549534; http://myplace.forumactif.com/t695-l-afrique-du-sudveut-interdire-le-test-de-virginite 11 question, - hommes et femmes-, des praticiens du terrain, -hommes et femmes-, des étudiants en droits de l’enfant,- hommes et femmes -et des journalistes engagés, - hommes et femmes-. Les deux comités de l’ONU concernés, à savoir le comité des droits de l’enfant et le comité contre les discriminations à l’encontre de la femme, travaillaient en parallèle afin de rédiger une recommandation commune pour lutter et interdire les pratiques traditionnelles néfastes; une grande première dans les activités de l’ONU ! Ce groupe de travail interdisciplinaire et mixte, grâce à sa diversité représentait parfaitement bien, la société actuelle, dans toute sa complexité, qu’elle soit d’origine ou d’accueil. Mais aussi dans toute sa richesse. Pas étonnant dès lors qu’au terme de trois jours de travail intensif, un projet de résolution fut adopté; que les divergences formelles furent rapidement éliminées; que les interrogations quant aux diverses méthodes de prévention furent toutes réglées, que la discussion ne s’arrêta jamais à la diversité culturelle et identitaire et que, par conséquent une étape historique fut franchie en vue d’abolir concrètement les pratiques traditionnelles néfastes. Le combat appartient désormais à tous, et non pas uniquement à toutes. Quelque soit son origine, son niveau social, sa croyance, il est devenu universel. C’est un petit pas pour l’Homme, et un grand pas pour l’Humanité ! « Il faut que les femmes crient aujourd’hui (...) qui n’est pas un cri de haine (...) mais un cri de vie ». Benoîte GROULT, Ainsi soit-elle, 1975, p.220. ALLOCUTIONS D’OUVERTURE CHRISTOPHE DARBELLAY Président, Institut international des Droits de l’Enfant, Sion Mesdames et Messieurs, les membres et experts des comités de lutte contre les discriminations à l’encontre de la femme et des droits de l’enfant, Mesdames et Messieurs les juges, Mesdames et Messieurs représentants les divers organismes onusiens qui ont collaboré à la tenue de ce séminaire, ainsi que les représentants des diverses ONG Mesdames et Messieurs les participants, cher public, En ma qualité de Président de l’Institut international des Droits de l’Enfant (IDE), je suis particulièrement sensible au thème du 15e séminaire international de Sion; les pratiques préjudiciables à l’enfant sont un des sujets prioritaires de l’IDE, qui s’est illustré en Suisse par sa lutte contre les mutilations génitales féminines et les mariages forcés : ce combat a pris diverses formes- production de documentaires que vous avez découverts hier soir, formation, sensibilisation, lobbying- et a visé plusieurs publics, des professionnels de la santé, aux profanes tout en passant par les membres des diverses communautés concernées. L’IDE est membre de la commission nationale des experts de lutte contre les MGF en Suisse, coordonné par Caritas Suisse et pour la Romandie, participe avec le canton du Valais au projet mené par le COSM (Service de la Cohésion de multiculturelle du canton de Neuchâtel) pour lutter contre les mariages forcés grâce à la prévention notamment. Il est à souligner, que l’IDE actif à l’étranger également, traite des questions préjudiciables à la santé, dans ses programmes de formation, en Afrique de l’Ouest, en Chine, et au Népal. L’IDE agit donc avec une vision internationale et interdisciplinaire en donnant la parole aux premiers concernés, à savoir les enfants malheureusement déjà victimes, ou susceptibles de le devenir. En ma qualité de Conseiller national au Parlement fédéral, je suis heureux de voir que la Suisse a emboîté le pas à bon nombre de pays européens en adoptant plusieurs motions parlementaires qui deviendront des lois applicables sur notre sol. Ainsi, dans le domaine de la lutte contre les mutilations génitales féminines, plusieurs motions ont été adoptées par le Parlement fédéral (Motion Gadient 00.3365, Motions Roth – Bernasconi 05.3235 et 05.404). En janvier 2011, devrait entrer en vigueur un nouvel article du code pénal, relatif à l’intégrité corporelle, et 13 qui réprimerait expressément l’excision, quelle que soit le lieu de commission de l’acte. Ainsi la fillette habitant en Suisse et envoyée dans son pays d’origine durant les vacances afin de se faire exciser, pourrait obtenir une condamnation des auteurs et complices de l’acte en Suisse, même si son pays d’origine n’incrimine pas les mutilations génitales féminines. Le rapport Zapfl-Helbing, les postulats et motions Heberlein et Tschümperlin ont demandé au législateur de faire du mariage forcé un article spécifique et non plus une seule contrainte (art 180 code pénal) et de réviser les lois concernant la conclusion et la reconnaissance du mariage du code civil afin de ne plus reconnaître en Suisse des mariage d’enfants conclus à l’étranger selon la loi du pays d’origine. Cependant, la punissabilité des actes, resterait lettre morte si elle n’était pas précédée par la prévention des actes incriminés. La prévention est essentielle et primordiale, surtout dans le domaine des pratiques préjudiciables que les pays du Nord ne connaissent pas ou plus. Ainsi, la motion Roth-Benasconi 05.3235 s’intitulait « Mutilations sexuelles féminines. Mesures de sensibilisation et de prévention ». A l’été 2010, l’Assemblée fédérale a adopté la motion Tschümperlin n° 09.4229 « Aider efficacement les victimes de mariages forcés » et a ainsi demandé au Conseil fédéral de faire établir un rapport sur les formes, les causes et la distribution de ce phénomène ainsi que sur la répartition des victimes potentielles et effectives. Cette étude doit aussi indiquer où des mesures de lutte ont déjà été prises et quelle est leur portée. Enfin, elle doit montrer par quelles mesures ciblées supplémentaires la prévention et la protection peuvent être renforcées et étendues. L’intérêt en Suisse pour les pratiques préjudiciables s’est manifesté suite à quelques malheureux « Faits divers » qui ont secoué l’opinion publique et médiatique comme par exemple deux cas d’excision jugés Zurich et à Fribourg, et à Bellinzone, le Tribunal Fédéral a condamné un père pour l’assassinat de sa fille car celle-ci avait refusé de se marier1. De par la migration, des pratiques inconnues, peu connues, voir abandonnées (mariages forcés) deviennent réalité chez nous : je pense par exemple au repassage des seins, à l’extraction des dents de lait, et aux enfants sorciers ou albinos. Ces pratiques sont d’autant plus inacceptables, qu’elles visent des enfants, sujets de droit à part entière, mais très vulnérables. Chaque année des millions d’enfants sont encore les victimes de pratiques traditionnelles occasionnant des conséquences diverses sur leur santé ou leur développement. Les filles sont les plus à risques, de par la question de la discrimination à leur encontre, et surtout de par le manque d’éducation. Aux yeux du droit international public et de la protection 1 V. ATF 127 IV 10. 14 internationale des droits humains il n’existe pas de justification valable à de telles pratiques (religion, coutume, culture…). Le président de l’IDE et le parlementaire que je suis est donc doublement heureux de constater que le thème des pratiques traditionnelles néfastes à la santé des enfants, sera à la préoccupation principale des ces quelques jours de séminaire passé en terre valaisanne. Je suis convaincu que les recommandations rédigées par les experts des comités avec l’apport des participants, porteront ses fruits et contribueront ainsi à l’éradication totale de ces coutumes pour le bien de tous les enfants, en particulier des filles. Mesdames et Messieurs, je vous souhaite un excellent colloque ainsi que des débats fructueux pour des recommandations pertinentes. 15 NAFISSATOU J. DIOP Coordinatrice UNFPA-UNICEF Programme conjoint pour l’accélération de l’abandon des MGF/E, New York, USA C’est un privilège aujourd’hui d’être parmi vous et je tiens à remercier l’Institut international des Droits de l’Enfant pour m’avoir invitée à participer à ces trois jours de réflexion sur les pratiques néfastes à la santé des femmes et des filles. C’est également un plaisir de retrouver parmi cette audience beaucoup de personnes avec lesquelles j’ai eu à travailler que ce soit au niveau de l’Afrique ou au niveau international et que je reconnais comme étant des personnes très dévouées à la cause du respect des droits des femmes et des enfants. Je vais axer mon intervention sur le sujet sur lequel je travaille depuis 12 bonnes années qui est la question des mutilations génitales féminines (MGF) ou excision. Les MGF ou l’excision sont bien entendu une question qui réellement est une préoccupation aujourd’hui pour la plupart des pays africains, mais aussi pour la communauté internationale. Nous avons aujourd’hui une bonne documentation scientifique sur l’impact des MGF/excision sur la santé, sur l’épanouissement, sur la stabilité psychologique des femmes et des enfants. Nous avons aussi appris avec l’étude de l’OMS (2006) que cette pratique a des répercussions même sur la génération suivante qui est celle des enfants qui sont nés de femmes qui ont subit les MGF/E. Cette pratique aujourd’hui est une pratique je crois que l’on peut appeler globale parce qu’elle est peut-être partie d’Afrique, avec environ 28 pays qui la pratique, mais elle s’est aujourd’hui étendue à l’Europe, à l’Amérique et également donc à d’autres parties du monde comme la Nouvelle Zélande, l’Australie et autres à travers des mouvements de migrations. Nous avons pu voir hier un film vraiment très intéressant et qui a été tourné en Suisse et qui montrait comment une pratique qui a été faite il y a plusieurs décennies en Afrique peut aujourd’hui influer sur les programmes de santé et sur l’épanouissement de jeunes femmes suisses. Ce qui est aujourd’hui intéressant c’est que l’on voit énormément de progrès et je voudrais donc m’étendre un petit peu sur les réalisations qui ont pu être faite particulièrement dans ce domaine. Depuis 50 ans, il y a énormément d’institutions, que ce soit des institutions religieuses, des missionnaires, que ce soit des institutions locales de femmes, que ce soit des institutions beaucoup plus structurées donc sous forme d’ONG, ou sous forme d’institutions internationales, d’institutions de recherches, qui ont eu à travailler sur ce sujet. Ces institutions ont réussies à porter ce sujet à l’attention de la communauté internationale. Ce travail, très courageux de certains activistes, de chercheurs, des communautés commence à porter leurs fruits 16 On peut voir aujourd’hui par exemple que sur 28 pays en Afrique, il y en a 17 qui ont passé des lois interdisant la pratique de l’excision. Nous allons donc nous concentrer sur les 17 positifs au lieu de se concentrer sur ceux qui n’ont pas encore passé de loi. Même ceux qui n’ont pas de loi spécifiques sur les MGF/E ont des dispositifs pénaux ou d’autres instruments juridiques, qui permettent la condamnation de personnes pratiquant ces MGF/E. On peut reconnaître également qu’à travers l’Afrique, quand on regarde les dernières données d’enquêtes, que le niveau de connaissance de l’aspect néfaste de cette pratique est largement connu par les communautés et particulièrement pas les femmes. Nous avons donc réussi à augmenter le niveau de connaissance des effets néfastes des MGF/E. On peut voir également avec les dernières enquêtes qu’il y a plusieurs pays où la prévalence nationale de l’excision a significativement diminué. Je crois que l’on peut citer l’Egypte, le Kenya, le Sénégal, la Côte d’Ivoire, l’Ethiopie. D’autres pays ont des enquêtes localisées qui montrent le recul de la pratique Il y a tout un mouvement de déclaration d’abandon de l’excision qui a démarré, a partir du Sénégal et qui s’étend aujourd’hui a travers l’Afrique. Le film hier sur la Casamance avec des interventions que mène l’ONG Tostan montre comment ce mouvement s’accélère puisque l’on a compris avec beaucoup de recherche que l’excision est une norme sociale et que son abandon doit être collectif. L’information sur la volonté de changer cette norme d’excision doit toucher le plus d’individus possible et qu’un consensus se crée dans des communautés avoisinantes qui partagent des pratiques équivalentes. Pour que l’abandon de l’excision soit réellement efficace, il faudrait que ce soit une collectivité qui s’entende et qui ai ce consensus de laisser cette pratique néfaste et de lui tourner le dos et de promouvoir des pratiques beaucoup plus positives pour la santé et les droits des femmes et des enfants. Nous avons à travers l’Afrique particulièrement et aussi à travers le monde, des réseaux qui se sont développés. Que ce soit des réseaux de leaders religieux, des médias qui se font le relais et qui aide dans cette campagne de lutte contre les MGF/E, de jeunes, des réseaux de parlementaires et autres. Nous avons aussi beaucoup d’ONGs qui essayaient de travailler très courageusement, mais souvent sans moyens sur cette pratique, ont aujourd’hui des interventions beaucoup plus structurées avec le gouvernement à la tête d’un comité de coordination. Je vais terminer ce bilan positif avec l’intervention des Nations Unies et ici je crois qu’il faudrait saluer l’année 2007 ou 10 organisations onusiennes se sont réunies sous le leadership de l’OMS pour réellement écrire un document très important dans lequel la question des MGF/E a été de nouveau condamnée. Ce document propose aussi des stratégies pour mettre en œuvre des interventions plus efficaces pour l’élimination de ces MGF. Il a été lancé par l’adjoint du Secrétaire 17 Général des Nations Unies en 2008 lors de la Convention pour le statut des femmes. Depuis lors, le partenariat des agences onusiennes s’est renforcé avec un programme conjoint dont vous avez entendu parler ici, mais qui n’est pas limité au fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA) ou au Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF). L’OMS fait partie de certains éléments de ce programme dès qu’il s’agit de travailler avec les professionnels de la santé. Les autres agences des Nations Unies que ce soit ONU Sida, UNESCO et autres sont également partie prenantes et cherchent à faire tout ce qu’elles peuvent pour amener leur avantage comparatif dans le travail qui est fait pour l’abandon des MGF/E. On a aujourd’hui une approche beaucoup plus articulée au niveau des agences onusiennes qui permettent effectivement de parler d’une seule voix au niveau des pays et qui permet de supporter le mouvement dans lequel, en général, le gouvernement prend le leadership, un mouvement qui permet d’aller vers l’accélération de l’abandon des MGF/E. Je dois quand même vous dire que malgré tous ces éléments positifs, nous avons quand même jusqu’à présent, 3 millions de filles qui sont encore à risque d’être excisées chaque année. Donc la tâche est encore lourde, il y a encore beaucoup de chemin à parcourir et nous voyons qu’il y a quand même beaucoup de défis qui se posent à nous. L’un des défis que je vais mentionner ici, parce qu’hier dans les films nous avons vu également le Ministère de la Santé et les prestataires de santé qui étaient très au devant de la scène, un des défis que nous avons au niveau de l’Afrique c’est effectivement la médicalisation de cette pratique. Nous avons vu cette jeune fille suisse qui a témoigné que son excision avait été faite à l’hôpital et qu’il y avait une queue de petites filles qui attendaient de passer sur une table d’opération avec du personnel de santé qui allait pratiquer cette opération si difficile. C’est une tendance que nous avons vue aujourd’hui, nous avons comptabilisé 18% des femmes et des filles qui ont pu être excisées par du personnel de santé. Dans certains pays comme l’Egypte cela peut atteindre jusqu’à 74% de filles qui sont excisées par un personnel de santé. Vous serez d’accord avec moi que c’est tout à fait inacceptable et que nous avons là un défi très important à relever. Nous avons également un autre défi que nous avons pu voir hier à travers ce film tourné en Suisse, c’était les complications qui peuvent découler de cette pratique. Et cela veut dire pour nous que nous avons le devoir aussi, non pas seulement de promouvoir l’abandon de la pratique de l’excision, mais de prendre en charge d’une manière efficace les femmes et les filles qui peuvent avoir des conséquences physiques, mais aussi psychologique parce qu’elles ont subit cette pratique des MGF/E. Donc c’est tout un domaine de prise en charge et de protection des femmes et filles excisées qu’il va falloir aussi gérer. 18 La mise en œuvre des lois est un autre défi. Dix sept pays ont légiférés spécifiquement sur cette question mais l’application de ces lois dans des communautés où le soutien pour cette pratique est encore fort pose problème. Cependant il est important que des lois soient passées, même si nous savons que les lois toutes seules ne vont pas pouvoir résoudre ce problème parce que les communautés, l’éducation des communautés, l’éducation des leaders, le support pour la pratique doit aussi aller de pair avec la mise en place de tout un dispositif législatif pour appliquer quelque part ces lois et décourager cette pratique des MGF/E. Toutes les mesures sociales qui doivent accompagner ces lois sont également très importantes à prendre en considération par les gouvernements et par les législateurs. Je pense que le dernier élément sur lequel je vais insister c’est le financement. Pour avoir travailler pendant 12 ans de ce domaine, je dois reconnaître que souvent on peut être découragé quand on est une ONG avec une vision, avec un courage et que l’on veut travailler au niveau d’un village et que l’on n’a pas de financement pour le faire. Il y a, malgré la bonne volonté, un minimum de ressources financières qui sont nécessaires. Il faut mobiliser des financement régulier des interventions qui peuvent être porteuses de changements au niveau particulièrement de l’Afrique, mais aussi au niveau des pays européens où les populations sont également touchées par cette pratique de l’excision. Il y a encore beaucoup de choses à faire en termes de renforcement des capacités, au niveau du plaidoyer, de la mobilisation des communautés, de l’éducation et du renforcement du pouvoir des femmes et des filles. Pour cela on a besoin réellement de ressources financière et de ressources humaines pour assurer donc ce changement. Je vais terminer en disant que nous avons besoin de tous nous donner la main pour arriver réellement à changer, en une génération. Nous savons que cela est possible de le faire, et d’éliminer complètement cette pratique des MGF/E. Les informations scientifiques existent, la société civile, les gouvernements, les organisations internationales sont également mobilisées pour mettre en œuvre des programmes cohérents. Il faut avoir des actions communes plus concrètes qui vont pouvoir réellement restaurer la dignité des filles et des femmes à travers le monde. 19 AGNES AKOSUA AIDOO Dr, Vice Chairperson, Committee on the Rights of the Child, Ghana It is a distinct honour for me to speak at this opening session of our International Seminar on Harmful Practices and Human Rights. I bring you the best wishes of the Committee on the Rights of the Child and its Chairperson, Prof. Yanghee Lee, who cannot be here today because she is attending the UN General Assembly in New York to present the Committee’s biennial report. The Committee on the Rights of the Child values its growing cooperation with the sister Committee on the Elimination of All Forms of Discrimination against Women. The CRC and CEDAW Committees have intrinsically common issues concerning the human rights of the biggest majorities of the human population, namely, children and women. In recent years the two Committees have used more and more each other’s concluding observations and recommendations on issues of common concern. One such common issue is the persistence of practices and behaviour, largely based on age and gender discrimination, which violate the rights of children, adolescents and women and patently harm their health, education and overall social status and development. It is therefore a unique opportunity for members of the CRC and CEDAW Committees to retreat to the pleasant surroundings of Sion, and especially of the International Institute for the Rights of the Child (IDE), to reflect on this issue with so many experts, advocates and professionals from civil society, private sector, the legal, medical and social science fields as well as UN organizations. For this opportunity, we are truly grateful to the sponsors including especially the Swiss Agency for Development and Cooperation of the Federal Department of Foreign Affairs and the City of Sion as well as to the organizers, IDE, UNICEF and UNFPA. The Convention on the Rights of the Child is the only human rights treaty that explicitly discourages harmful traditional practices and calls for their abolition. This is done mainly in the context of the right to health under Article 24 (3) which says that “States Parties shall take all effective and appropriate measures with a view to abolishing traditional practices prejudicial to the health of children.” However, the Convention does not specify these practices. This has been left to the expert Committee which has elaborated them in its Concluding Observations, recommendations and General Comments. The Committee includes female genital mutilation (FGM), early or forced child marriages, selective 20 abortion and infanticide, inadequate or forced feeding among these harmful practices. The detailed examination of these practices is found particularly in the Committee’s General Comment No 4 on Adolescent Health and Development (2003) and General Comment No 7 on Implementing Child Rights in Early Childhood (2005). As the Convention is a comprehensive and holistic text, the Committee also approaches harmful practices broadly from the general principles of the Convention, especially those of non-discrimination (art. 2) and right to life, survival and development (art. 6). Article 2 enables the Committee to look at discrimination from many perspectives and examine all forms of discrimination against all children within the jurisdiction of States parties, including discrimination based on sex, religion, ethnic or social origin, birth or other status (art. 2.1). Paragraph 2 of the article stresses that: “States Parties shall take all appropriate measures to ensure that the child is protected against all forms of discrimination or punishment on the basis of the status, activities, expressed opinions, or beliefs of the child’s parents, legal guardians or family members.” Article 2 of the CRC is very important as it gives the opportunity to apply the non-discrimination principle not only to harmful practices but also to issues of unequal treatment between girl children and boy children, for example, in matters of dowry, property and inheritance. The various forms of harmful practices implying discrimination ultimately restrict the capacity of young girls and adolescents to contribute positively to society. Discriminatory attitudes also lay the foundation for impunity. Therefore, the CRC Committee makes strong recommendations on prohibiting discrimination and other violations and bringing the perpetrators to justice. The principle of the right to life, survival and development found in article 6 of the Convention is fully applicable to harmful practices, For example, infanticide and honour killings violate the right to life, while harmful nutritional taboos and feeding practices undermine the child’s survival and optimal development. FGM and early or forced marriages adversely affect the girl child’s life, health and development to her full human potential especially where her education is curtailed. The wide scope of the Convention enables the Committee to extend its concern on harmful practices to immigrant communities that continue the practices. Thus the Committee makes concrete recommendations to host and asylum countries in the industrialised world and elsewhere to prohibit the practices by law, sensitize the relevant communities in cooperation with their leaders and 21 civil society and establish extraterritorial jurisdiction through bilateral and multilateral agreements. Harmful practices are a form of violence and abuse of children. The CRC was the first human rights treaty to explicitly recognize violence and abuse of children in the home, community, school and care and other institutions as international human rights violations. Article 19 (1) obliges States Parties to “take all appropriate legislative, administrative, social and educational measures to protect the child from all forms of physical or mental violence, injury or abuse… maltreatment or exploitation, including sexual abuse, while in the care of parent(s), legal guardian(s) or any other person who has the care of the child.” Article 34 provides that: “States Parties undertake to protect the child from all forms of sexual exploitation and sexual abuse.” The Committee is currently developing a General Comment on article 19 and related articles. Distinguished participants may be aware that it was the CRC Committee that recommended that the Secretary General of the UN undertake a global study on violence against children. This was successfully carried out under Prof. Paulo Pinheiro of Brazil and the subsequent World Report on Violence against Children (2006) identified FGM as a form of violence against girls and saw the serious risks of physical, sexual and psychological violence against girls in early or forced marriage. Since the publication of the report, the CRC Committee includes a specific recommendation in all its Concluding Observations for all States parties to follow up on the study’s recommendations. The Committee was also influential in the appointment of the Special Representative of the Secretary General on Violence against Children, and collaborates closely with the SRSG and regularly recommends cooperation of States Parties with that office. I believe that the CRC Committee’s recent focus on violence that is based both on age and gender brings its work closer to that of the CEDAW Committee which emphasizes harmful practices mainly as a form of gender-based violence. The cooperation of the two Committees should also enable us to focus attention at the beginning of the violations of girls’ human rights from early childhood since gender stereotyping starts in the early years and is consolidated in adolescence and adulthood of women. Thus the Committees can take a strong life cycle approach to promoting the ending of the various harmful practices at the appropriate stages of the lives of girls and women. 22 I am pleased to inform the Seminar that the Committee on the Rights of the Child has recently taken a strategic step to establish a formal working relationship and cooperation with the African Committee of Experts on the Rights and Welfare of the Child. A Joint Working Group was inaugurated in Addis Ababa in March this year. As distinguished participants may be aware, Africa is the only region to have adopted a comprehensive regional treaty on the rights of the child, namely, the African Charter on the Rights and Welfare of the Child which came into force in 1999. Cooperation between the CRC Committee and the African Committee provides an important opportunity to work together on concrete issues of regional significance. The issue of harmful practices lends itself to such joint action since the African region still has the highest incidence of FGM and a high prevalence of early marriage and other practices. While the African Charter on the Rights and Welfare of the Child is very clear and firm about the importance of preserving and strengthening positive African traditional values and cultures (arts. 11c and 31d), it insists in the very first article that any custom, tradition, cultural or religious practice that is inconsistent with the rights of the child and obligations of States Parties shall be discouraged (art. 1.3). Thus, the Charter devotes a full article specifically to removing harmful social and cultural practices. Article 21 calls on African States Parties to “take all appropriate measures to eliminate harmful social and cultural practices affecting the welfare, dignity, normal growth and development of the child.” It highlights practices that are discriminatory and prejudicial to the health and life of the child and specifically states that: “Child marriage and the betrothal of girls and boys shall be prohibited and effective action, including legislation, shall be taken to specify the minimum age of marriage to be 18 years and make registration of all marriages in an official registry compulsory” (art. 21c). It is noteworthy that the above call of the African Charter for the elimination and prohibition of harmful practices is stronger than is found in article 24 (3) of the CRC. The call for the compulsory official registration of marriages is also the same as found in CEDAW article 16 (2). Additionally, the Protocol to The African Charter on Human and Peoples’ Rights on the Rights of Women in Africa (the Maputo Protocol) that entered into force in 2005 also reiterates the calls to end harmful practices including FGM and early marriage in two specific articles 5 and 6. Thus I believe that the working together of the CRC, CEDAW and African Committees in a certain regional approach, where relevant, could help to strengthen and accelerate the pace of ending these practices in Africa and changing the attitudes that perpetuate them. 23 Another important strategy is for the Committees to strengthen their work with national and regional NGOs and CSOs. In this regard, please allow me to recognize the presence and contribution of an eminent African woman who has devoted singular attention to the issue of harmful practices. This is Mrs Berhane Ras-Work, Executive Director of the Inter-African Committee on Traditional Practices affecting the Health of Women and Children. Berhane has worked tirelessly for nearly three decades especially with the Organization of African Union (OAU), now the African Union, to ensure political commitment, and has helped to establish national committees in the affected countries to fight against the harmful practices and help change attitudes in Africa. Finally, I would like to underscore that the change of societal attitudes and the ending of harmful practices that we all seek involve deep social changes. And it is important to recognise that fundamental and long lasting social change relates to and often depends on economic change and both relate to political change. The three are intertwined and their positive and progressive relationships will contribute to the sustainability of human rights girls and women. This is why the Committee on the Rights of the Child constantly raises issues of the underlying factors to the violations of children’s rights with States Parties and makes recommendations on them. One such factor identified by the Committee in all regions is the lack of adequate and appropriate knowledge of children’s rights, especially the rights provided in the Convention, by families, children, community and religious leaders, officials and the public at large. Another underlying factor is the inadequate standard of living of very many children, including the deprivations of child poverty. The Committee usually raises this issue with States under article 27 and urges solutions to such critical underlying socio-economic factors in the abuse, violence and gross violations of the rights children. At a more basic level, are the issues of how decisions are taken on matters affecting children and the children’s general lack of participation in this process at home, in school or the community as well as in legal, administrative and judicial matters, as CRC article 12 requires. The Committee has elaborated on the important right of the child to be heard, in its most recent General Comment N o 12 of 2009. The CEDAW Committee’s strong focus on economic empowerment of women and their right to political participation and decision making complements the broad approach of the CRC Committee. The two Committees can therefore help to bring the issues of social change, economic change and political change together as they apply, appropriately, from early childhood of girls through adolescence to adult womanhood. Such an approach can create an essential platform for the prevention as well as the ending of harmful practices against girls and women and assure a sustainable fulfilment of their human rights. 24 I sincerely hope that this Seminar will help to delineate these and other important elements that will strengthen the efforts of our two Committees to develop a Joint General Comment and Recommendation to enhance the human rights of children, girls and women through the ending of the harmful practices they face everywhere. 25 VIOLETA NEUBAUER CEDAW Committee member, Slovenia I am honoured to address the participants at the opening of the International Seminar on Harmful Practices and Human Rights. I want to begin by congratulating the International Institute for the Rights of the Child for organizing this important colloquium as a contribution to the elaboration of a joint General Comment/Recommendation by the CEDAW and CRC Committee on the issue of practices harmful to girls and women. On behalf of the CEDAW Committee I thank the organizers and the supporters and sponsors of this seminar for making a participation of broad range of experts possible and providing an avenue for a confrontation of legal framework, theory and practice, reality in the field and lessons learned. Unfortunately, the seminar overlaps with the second week of the 47th session of the CEDAW Committee; therefore it was not possible to ensure attendance of more than two CEDAW Committee experts. CEDAW CONVENTION The CEDAW Convention brought the women’s human rights and the obstacles to achieving their full enjoyment of human rights on a basis of equality with men at the centre of international human rights law. The Convention guarantees the non-discrimination and equality to women in all fields of their lives and throughout their lifespan. The definition of the non-discrimination principle in Article 1 relates discrimination to the curtailment and restriction of women in the enjoyment of their human rights and fundamental freedoms on an equal basis with men. The Convention’s normative features of substantive (de facto) equality imposes that any act that has the effect of denying women to exercise their rights and freedoms can be considered discrimination under article 1. The CEDAW Convention does not only recall the inalienable rights of women which are already embodied in other international human rights treaties and declarations, but it goes further by recognizing the significant impact of culture and tradition in shaping the thinking and behaviour of women and men and the critical role they play in restricting the exercise of rights and fundamental freedoms by women. Article 2(f) of the CEDAW Convention sets out obligations of the States Parties “to take all appropriate measures, including legislation, to modify or abolish existing laws, regulations, customs and practices which constitute discrimination against women”. Article 5 is a very fundamental provision with regard to many traditional forms of discrimination against girls and women. It 26 obliges States parties to modify social and cultural patterns of conduct of women and men, with a view to achieving the elimination of prejudices and customary and all other practices which are based on the idea of the inferiority or the superiority of either of the sexes or on stereotyped roles of women and men. In matters related to marriage and family relations article 16 of the Convention preclude States parties from permitting or giving validity to a betrothal or marriage between persons who have not attained their majority. Within the mining of article 1 of the Convention States Parties are required to eliminate all forms of violence against women, although the right to life free of gender-based violence is not explicitly mentioned in the Convention. Female genital mutilation and other practices harmful to women have been addressed by the Committee as acts of violence and discrimination against women. GENERAL RECOMMENDATIONS COMMITTEE OF THE CEDAW In carrying out its mandate the CEDAW Committee adopted several general recommendations to interpret the nature and scope of the Convention’s provisions which oblige the State Parties to address either all forms of harmful practices or one or few particular discriminatory harmful practices. Twenty years ago (in 1990) the Committee adopted General Recommendation No 14 on Female circumcision, which is the only treaty body general recommendation entirely and explicitly focused on a harmful practice. It recognizes the cultural, traditional, and economic factors that perpetuate the practice of female genital mutilation, and recommends measures to encourage the collection and dissemination of data on the practice, that support women’s organizations working to bring an end to the practice and that encourage politicians, professionals, religious and community leaders at all levels, including the media and the arts, to co-operate in influencing attitudes towards the eradication of the practice. The Committee’s by now famous General Recommendation No 19 adopted in 1991, took gender-based violence out of the private realm into the public arena of international human rights where it engages State responsibility and obliges State Parties to prevent violence against women, to investigate acts of such violence, prosecute and punish perpetrators and ensure access to remedies, as well as provide support and services to victims. This General recommendation notes that some States maintain traditional practices perpetuated by culture and tradition that are harmful to the health of women and children, such as dietary restrictions for pregnant women, preference for male children and FGM/C, thus clearly categorizing these as forms of violence against women and girls. It further notes 27 that widespread practices involving violence or coercion, such as family violence and abuse, forced marriage, dowry deaths, acid attacks and female circumcision are perpetuated by traditional attitudes by which women are regarded as subordinate to men or as having stereotyped roles. It recommends legislative measures to address cases of family violence as well as legislation to remove the defence of honour in regard to the assault or murder of a female family member but does not mention legislation for other harmful practices. As with General Recommendation No 14, the Committee recognizes the deep cultural roots of these practices within the society, but emphasizes the discriminatory attitudes that underlie them and consequently calls on State parties to take effective measures to overcome these, including through education and public information programmes to help eliminate prejudices that hinder women’s equality. The 1994 General Recommendations No 21 on equality in marriage and family relations and the 1999 General Recommendation No 24 on women and health also address specific forms of harmful traditional practice, with the former explicitly setting out that the minimum age for marriage should be 18 years for both women and men, noting that earlier marriage can adversely affect women’s health, impede their education and limit the development of their skills and independence, and the latter stressing the harm caused by practices such as female genital mutilation. It also makes clear that harmful traditional practices, such as FGM, polygamy, as well as marital rape, may also expose girls and women to the risk of contracting HIV/AIDS and other sexually transmitted diseases. Placing greater attention to legislative measures than previous recommendations, it calls on State parties to enact and effectively enforce laws that prohibit female genital mutilation and marriage of girl children. CONCLUDING OBSERVATIONS The CEDAW Committee has also consistently identified and expressed concern, and sometimes grave concern, at various traditional practices that are discriminatory to women in its concluding observations. As in the case of its general recommendations these have evolved from a predominant focus on awareness-raising, educational activities and support for the work of social groups, including through the collection and dissemination of data on harmful practices, to an approach which clearly defines these practices as discrimination and violations of women’s rights requiring legislation to prohibit them. Thus, where female genital mutilation is concerned, the CEDAW Committee has been calling on States parties to adopt strategies, such as education and awareness-raising campaigns to change individual behavior and social norms, supported by criminal laws. In 28 relation to child and forced marriage, the Committee has frequently recommended that legislation be implemented, reviewed and amended, or enforced to eliminate these practices. It has also recognized that legal changes alone will not suffice, and has recommended public awareness campaigns designed specifically to change attitudes toward women and girls, The Committee has pointed out the negative effects of early marriage on women’s enjoyment of their human rights, especially the rights to health and education, and called State parties to address their cultural underpinnings. Other harmful practices addressed in the Committee’s concluding observations include dowry, virginity testing and forced pregnancy, female infanticide and son preference, killings in the name of honor, polygamy, marital rape, widowhood practices and the denial of ownership or inheritance. CONCLUSION To conclude I would like to make the following observations: First, I think that some caution is required not to be “seduced” by focusing merely on abandonment of traditional harmful practices as the ultimate objective of the future joint CRC/CEDAW general recommendation. The objective defined should be with respect for the rights of girls and women in the CEDAW Convention and obligations of the States Parties to which States agreed by ratifying or acceding to the Convention. Second, it has been noted in the discussions among the CEDAW Committee experts that one of common characteristics of practices harmful to women is that their origin and persistence is almost exclusively within non-Western cultural traditions. To avoid somehow problematic use of the term “traditional” which tends to suggest that in Western societies practices harmful to girls and women are not practiced or even that the existence tends to be overlooked by the treaty bodies, the CEDAW Committee would like to encourage a thorough discussion on terminology in order to find the most appropriate response to such concerns. For the CEDAW Committee a term discriminatory harmful practices would be in line with the article 2 of the Convention. Last but not least, for the CEDAW Committee it is of critical importance to adequately address factors that generate the continuous demand for such practices. Gender inequality is certainly the one which is inextricably linked to it. The Convention on the Elimination of All Forms of Discrimination against Women and the Convention on the Rights of the Child contain mutually reinforcing principles which should ensure protection and fulfilment of the rights of girls and women and eliminate all forms of sex and gender-based discrimination, including those manifested in harmful practices. I am certain that 29 the three days discussion at this seminar will contribute importantly to an everexpanding understanding of how to effectively protect girls and women from being victims of discriminatory harmful practices. 30 PREMIÈRE PARTIE PRATIQUES TRADITONNELLES ET INSTRUMENTS DES DROITS L’HOMME DE 31 EVOLUTION AND DEFINITION OF THE CONCEPT OF HARMFUL TRADITIONAL PRACTICES JANE CONNORS Chief, Special Procedures Branch, Office of the High Commissioner for Human Rights, Geneva Résumé Les Nations Unies se sont préoccupées dès leurs jeunes années des pratiques traditionnelles préjudiciables (PTP). Ainsi, en 1954, l’Assemblée Générale attira l’attention sur des « coutumes, anciennes lois et pratiques liées au mariage et à la famille, incompatibles avec les principes de la Déclaration Universelle ». En 1988, la Commission des Droits de l’Homme a nommé le premier Rapporteur sur les pratiques traditionnelles préjudiciables. 1994 fut l’année d’adoption d’un Plan d’action au sein de ce même organe. Le travail d’identification de la violence à l’encontre des femmes, effectué par le CEDAW, aborda les PTP sous cet angle. C’est pourquoi la Déclaration sur la Violence à l’encontre des femmes (Assemblée Générale, 1993) les différentes résolutions émises dès 1998, ainsi que la plateforme de Beijing, ont toutes traité des MGF et du mariage forcé, introduisant également de manière progressive les crimes d’honneur. En parallèle, la nomination d’un Rapporteur Spécial sur la Violence à l’encontre des Femmes (1994) a amené un changement de paradigme dans la manière de traiter les discours culturels. Finalement, la base de données du Secrétaire-Général sur la violence à l’encontre des femmes (2002) fournit un cadre pour le partage et l’adoption des bonnes pratiques. Zusammenfassung Die Vereinten Nationen haben sich seit ihrem Anfang mit schädlichen traditionellen Praktiken (STP) auseinandergesetzt. So hat die Generalversammlung im Jahr 1954 die Aufmerksamkeit auf bestimmte „Bräuche, alte Gesetze und Gepflogenheiten in Bezug auf Ehe und Familie, die unvereinbar mit den Grundsätzen der Allgemeinen Erklärung der Menschenrechte sind" gelenkt. Im Jahr 1988 setzte die Menschenrechtskommission erstmals einen Berichterstatter über die schädlichen traditionellen Praktiken ein und im Jahr 1994 wurde von demselben Organ ein Aktionsplan verabschiedet. Das CEDAW beschäftigte sich 32 im Rahmen der Ermittlung von Gewalt gegen Frauen mit schädlichen traditionellen Praktiken. Aus diesen Gründen behandeln sowohl die Erklärung über die Beseitigung der Gewalt gegen Frauen (Generalversammlung, 1993), die verschiedenen Resolutionen seit 1998 wie auch die Pekinger Aktionsplattform die Themen WGV und Zwangsheirat und nach und nach wurden auch Ehrenmorde aufgegriffen. Gleichzeitig hat die Ernennung eines Sonderberichterstatters über Gewalt gegen Frauen (1994) zu einem Paradigmenwechsel im interkulturellen Diskurs geführt. Schlussendlich bietet auch die Datenbank des Generalsekretärs über Gewalt gegen Frauen (2002) einen Rahmen für den Austausch und die Umsetzung der guten Praxis. Resumen Las Naciones Unidas se preocuparon desde sus jóvenes años de las prácticas tradicionales dañinas (PTP). Así, en 1954, la Asamblea general llamó la atención sobre “costumbres, antiguas leyes y practicas relacionadas al matrimonio y a la familia, incompatibles con los principios de la Declaración Universal”. En 1988, la Comisión de los Derechos humanos nombró al primer Ponente sobre las prácticas tradicionales dañinas. 1994 fue el año de adopción de un Plan de acción en el seno de ese mismo órgano. El trabajó de identificación de la violencia en contra de las mujeres, efectuado por el CEDAW, abordó las PTP desde esa perspectiva. Esas son las razones por las cuales la Declaración sobre la Violencia en contra de las mujeres (Asamblea general, 1993), las distintas resoluciones emitidas a partir de 1998, así como la plataforma de Beijing, trataron todas de las MGF y del matrimonio forzado, introduciendo también de manera progresiva los crímenes de honor. En paralelo, la nominación de un Ponente Especial sobre la Violencia en contra de las Mujeres (1994) trajo un cambio de paradigma en la manera de tratar los discursos culturales. Finalmente, la base de datos del Secretario-General sobre la violencia en contra de las mujeres (2002) da un marco para el reparto y la adopción de las buenas prácticas. Summary Harmful traditional practices have been addressed since the early years of the United Nations. In 1954, the General Assembly drew attention to “customs, ancient laws and practices relating to marriage and the family’ inconsistent with the principles of the Universal Declaration”. In 1988, the Commission on Human Rights appointed the first Special Rapporteur on harmful traditional practices. 1994 was the year of adoption of a Plan of Action within the same body. The work of identification of violence against women carried out by CEDAW highlighted HTP in this perspective. Therefore, the 1993 General Assembly Declaration on Violence Against Women, the various resolutions issued as of 1998, as well as the 2005 33 Beijing platform all came to deal with FGM and forced marriage, by and by mentioning honour killings as well. In parallel, the appointment in 1994 of a Special Rapporteur on Violence against Women has initiated a paradigm shift in the way cultural discourses are addressed. Finally, the Secretary-General’s database on violence against women (2002) provides a framework for sharing and adoption of best practices. * * * 34 I am honoured to have this opportunity to address this important seminar on the subject of the evolution and definition of the concept of harmful traditional practices. I would like warmly to thank the organizers for convening this seminar, and particularly acknowledge my friend Jean Zermatten for his contribution in this regard, and for welcoming us with his usual Valaisan hospitality. The strength of the seminar is that it brings together members of two committees to focus on a substantive issue which concerns them both, and where they may craft a joint general recommendation/comment. We at OHCHR are very pleased to see this collaboration which builds on the excellent meeting of the Committees last January. This demonstrates that the human rights treaty bodies constitute a system whose impact is greater through working together. I understand there have been even further developments in this area, as the Committees on the Elimination of Discrimination against Women (CEDAW), the Rights of the Child (CRC) and the Rights of Persons with Disabilities (CRPD) last week took advantage of the fact that each body was meeting simultaneously in Geneva to begin discussions on areas of potential cooperation. Harmful traditional practices have been addressed since the early years of the United Nations. In 1954, the General Assembly in its resolution 843 (IX) drew attention to ‘customs, ancient laws and practices relating to marriage and the family’ inconsistent with the principles of the Universal Declaration. The Assembly called on all States to abolish such customs, laws and practices by ensuring freedom in the choice of one’s spouse; abolition of the practice of brideprice; guaranteeing the right of widows to custody of their children and freedom to remarry; eliminating child marriages and the betrothal of girls before puberty, including through appropriate penalties. In 1958 and 1961, the United Nations Economic and Social Council invited the World Health Organization (WHO) to study the persistence of subjecting girls to ritual operations and the medical aspects of operations based on customs. In 1979, the WHO Seminar in Khartoum on traditional practices affecting the health of women and children recommended, when and where appropriate, the enactment of legislation prohibiting female circumcision and to stop childhood marriage. In the 1980s, the issue was taken up by the Sub-Commission of the Commission on Human Rights on Prevention of Discrimination and Protection of Minorities and its Working Group on Traditional Practices Affecting the Health of Women and Children, a body composed of experts designated by the SubCommission, UNICEF, UNESCO and concerned NGOs. The Working Group drew up a list of harmful traditional practices requiring study, identifying female circumcision to be taken up first. In 1988, the Sub-Commission appointed Ms. Halima Warzazi as the first Special Rapporteur on harmful traditional practices. Her reports focused predominantly on female circumcision or genital mutilation, 35 although later reports touched on other issues including crimes of honour. A Plan of Action for the Elimination of Harmful Traditional Practices affecting the Health of Women and Children was adopted by the Subcommission in August 1994 and adopted by the Commission on Human Rights the following year. The initial emphasis of United Nations bodies on traditional practices was on the effects of these practices on the health of women and children, and the importance of marriage being based on the full and free consent of the intending spouse, an issue addressed by article 16 of the Universal Declaration of Human Rights which declares that no marriage shall be entered into unless it is with the full and free consent of both parties, and in treaty form in the Convention on Consent to Marriage, Minimum Age for Marriage and Registration of Marriage of 1962. With the recognition of all forms of violence against women irrespective of the settings in which they occurred as human rights violations, much as the result of the efforts of non-governmental organizations within United Nations forums, in particular the cycle of world conferences, harmful traditional practices have been defined as a matter of human rights, and more and more as violence against women and children. This new emphasis, underscored by the work of the Committees on the Elimination of Discrimination against Women and the Rights of the Child, provided the context for the development of international policy in this area which has been taken forward by the Secretary-General’s studies on violence against women and violence against children both released in 2006. In my remarks this morning, I will describe the policy framework developed by the United Nations political bodies in relation to this issue, including that of the Human Rights Council (the successor body to the Commission on Human Rights), also in the context of its universal periodic review mechanism (UPR) and the Commission on the Status of Women. I will then draw attention to the contribution of the special procedures of the Human Rights Council. We are fortunate to have with us representatives of CEDAW and CRC who will outline the approach of their committees to the issue. I would, however, like to acknowledge the significant contribution of CEDAW to the identification of violence against women and girls, including harmful traditional practices, as discrimination against women and violations of human rights. I would like to make clear that I am familiar with the controversies surrounding discussions of this topic, not least of which relates to the terminology to be used in this context, with some arguing that the term ‘harmful practices’ preserves the notion that all cultural and traditional practices are positive, and that the term harmful traditional practices perhaps being more appropriate. Let me turn now to the international policy framework. During the 1980s, United Nations Member States began to address violence against women and began to appreciate the multiple manifestations of this violence and the settings in 36 which it occurred, and United Nations bodies such as the Economic and Social Council adopted several resolutions on domestic violence. In 1993, the General Assembly adopted the Declaration on Violence against Women, which had been negotiated in the Commission on the Status of Women. This was the first United Nations instrument to define violence against women, and to indicate that it included female genital mutilation and other traditional practices harmful to women. The Declaration required Member States to develop penal, civil, labour and administrative sanctions in domestic legislation to punish and redress the wrongs caused to victims of harmful practices and provide access for them to judicial mechanisms. It also made clear that Member States must condemn such violence and not invoke any custom, tradition or religious consideration to avoid their obligations to eliminate it. The Vienna World Conference on Human Rights which took place in June 1993 had encouraged the Assembly to adopt the Declaration and had welcomed the fact that consideration was being given to the creation of the first gender-specific special procedure of the Commission on Human Rights, the Special Rapporteur on Violence against Women. The Conference also made clear that violence against women was a violation of human rights and deserving of effective and serious response from all parts of the United Nations. The following year, the Cairo Programme of Action adopted at the International Conference on Population and Development urged Governments to prohibit genital mutilation wherever it exists, and create a socio-economic environment conducive to the elimination of all child marriages. In 1995, the Beijing Declaration and Platform for Action, the outcome of the Fourth World Conference on Women also called on Governments to enact and enforce legislation against the perpetrators of practices and acts of violence against women, such as female genital mutilation, female infanticide, prenatal sex selection and dowryrelated violence. Since 1998 resolutions of the General Assembly have addressed harmful traditional and customary practices, initially only delineating female genital mutilation as falling within this rubric, but later expanding this to include early and forced marriage. The five-year review of the implementation of the Beijing Declaration in 2000 by twenty-third session of the General Assembly added ‘so called honour crimes’ to this list of harmful customary or traditional practices, describing these as violations of the human rights of women and girls and obstacles to the full enjoyment by women of their human rights and fundamental freedoms. In March 2000, also the Commission on Human Rights in its resolution 2000/31 on extrajudicial summary or arbitrary executions noted the large number of cases reported by the Special Rapporteur on this issue of killings committed in the name of passion or in the name of honour, and called on Governments to investigate such killings promptly and thoroughly, bring those responsible to justice and ensure that 37 those killings were neither condoned nor sanctioned.1 Following suit, but not without initially difficulty, from 2000 to 2004 the General Assembly adopted resolutions on ‘so-called honour crimes.’ The 2006 Secretary-General’s in-depth study on violence against women identified female infanticide, prenatal sex selection, early marriage, dowry-related violence, female genital mutilation/cutting, crimes committed against women in the name of ‘honour’ and maltreatment of widows, including inciting widows to commit suicide as forms of violence against women which are considered harmful traditional practices.2 Similarly, the World Report on Violence against Children, prepared by the Special Representative of the Secretary-General on this issue described female genital mutilation, child marriage, dedication of children to priests and shrines and stigmatizing children as sorcerers as meeting this definition.3 The Commission on the Status of Women has also adopted resolutions directed to protecting women and girls from female genital mutilation and forced marriage,4 while its agreed conclusions on the elimination of all forms of discrimination and violence against the girl child of 2007, which will be reviewed in 2011, call for the elimination of the root causes of son preference, which results in harmful and unethical practices including female infanticide and prenatal sex selection. Special procedures mandate holders of the Human Rights Council (and formerly the Commission on Human Rights) have also dealt with this issue. At the forefront has been the mandate of the Special Rapporteur on Violence against Women, its causes and consequences, which for the past 16 years had to bring about a paradigm shift in the way cultural discourses are addressed and considered within a human rights framework. The mandate’s report on ‘Cultural Practices in the Family that are Violent towards Women’5 documents a number of culturally derived forms of violence against women in the family, which violate women’s human rights to bodily integrity and expression, as well as undermine essential values of equality and dignity. These are female genital mutilation, honour killings, early marriage, son preference, witch hunting, nutritional and health care practices discriminatory to girls, practices that violate women’s sexual and reproductive rights which are sanctioned and perpetuated by dominant ideologies and structures within societies that consider that women’s freedom should be curtailed and regulated. Cultural practices that involve pain and suffering and violation of physical integrity are regarded as amounting to torture under customary international law. The mandate’s report on “Intersections between Culture and 1 2 3 4 5 E/CN.4/RES/2000/31. Ending Violence against Women: From Words to Action, p. 45 World Report, p. 88-90 Resolutions 51/2 and 3 of 2007 See Radhika Commaramy’s report on “Cultural Practices in the Family that are Violent towards Women”. E/CN.4/2002/83 38 Violence against Women”6 addresses cultural discourses from the standpoint of inequalities and subjectivities within culture and cultural groups, so as to promote empowerment, agency and contestation by women within the domain of culture. It acknowledges the biases and shortcomings of the “traditional cultural practices” approach in terms of “othering” Southern cultures, essentializing them as being harmful to women, and projecting women from traditional cultures as being uniformly victimized, while treating violence in non-Southern cultures as individualized aberrations. To uphold universally agreed values, the report suggests general guidelines for an effective strategy to counter and transform culture-based discourses that hinder the implementation of women’s human rights. These include: a) problematizing culture as historically constructed and representing diverse subject positions and interests; b) applying a political- economy perspective to understanding cultural practices; and c) approaching all forms of violence against women as a continuum and intersectional with other forms of inequality and ensuring that diverse women’s voices within specific communities are heard and that the claim for a right to a life free of violence is not sacrificed in the name of culture. Several of the mandate’s other thematic reports, as well as country mission reports also focus on cases of violence committed in the name of culture, while the mandate has also been vigilant in addressing harmful traditional practices through communications. In this context, honour killings, child marriages, female genital mutilation, or discriminatory laws which provide for the application of physical punishments based on prejudices, customary practices or other practices which are based on stereotyped gender roles and the idea of inferiority of women have been addressed.7 The Special Rapporteur on the Independence of Judges and Lawyers, the Special Rapporteur on Freedom of Religion and Belief and the Special Rapporteur on Extrajudicial, Summary or Arbitrary Executions, have also discussed harmful practices. The Independent Expert on Cultural Rights – a mandate created by the Human Rights Council in 2009-, has noted that, considering the fact that some cultural practices may be particular detrimental to the rights of women and girls, 6 7 See Yakin Ertürk’s report on “Intersections between Culture and Violence against Women”, A/HRC/4/34 See, for instance, the last two communications report by the mandate: A/HRC/14/22/Add.1 and A/HRC/11/6/Add. 2 39 due attention will be paid to the need to implement cultural rights in a way that is fully respectful of the rights of women and girls not to be discriminated against8. The universal periodic review procedure (UPR) of the Council has also taken up harmful practices. This procedure, whereby the human rights record of each of the 192 Member States of the United Nations is considered by its peers on a periodic basis is based on a national report provided by the State under review; and two reports prepared by the Office of the High Commissioner, the first compiling information contained in the reports of special procedures, treaty bodies, and other UN entities; and the second information from other stakeholders including nongovernmental organizations and national human rights institutions. Recommendations directed at the State under review have included those to Burundi in December 2008 ‘to take effective measures to eliminate all forms of discrimination against women, beginning with harmful cultural practices,’ and Afghanistan in 2009 ‘to enact legislation and take effective measures to protect and promote women’s rights, especially with regard to forced marriages, honour killings and access to education for all girls.’ In February 2009, Cameroon accepted a recommendation to raise awareness on the issue of female genital mutilation and adopt adequate legislation prohibiting the practice of FGM and other discriminatory cultural practices, in line with CEDAW recommendations, and continue to implement effective programmes to sensitize the population about the harmful effects caused by such practices. Similar commitments to combat FGM and other traditional practices have been made by Djibouti and the Central African Republic in 2009 and Egypt in February 2010. Harmful practices against women and girls accused of witchcraft were considered during the review of the Democratic Republic of the Congo in December 2009, with the DRC accepting recommendations to criminalize acts of violence against children accused of witchcraft and organize a national awareness-raising campaign on this issue, and promote and adopt legislative and administrative measures to prevent and punish attacks and persecution of children accused of witchcraft. The survey I have presented indicates that the concept of harmful traditional practices within the United Nations has expanded from female genital mutilation, to include early and forced marriage, crimes against women committed in the name of honour, maltreatment of widows, and other practices such as female infanticide and dowry-related violence. Other forms of violence against women and girls, such as virginity testing and forced pregnancy, son preference, honour killings, polygamy, jhuma9 and widowhood practices such as levirate,10 sororate11 and sati12 8 9 10 11 See Farida Shaheed’s first thematic report to the Human Rights Council (A/HRC/14/36) Jhuma is the practice of compelling second sisters to remain unmarried and spend their lives in a monastery. Levirate is the practice of a husband inheriting his brother’s widow as wife Sororate is the practice of a husband inheriting his deceased wife’s sister as wife 40 have also been identified by States themselves, treaty bodies and special rapporteurs as fulfilling this definition. The survey has also shown that these practices are located squarely within the context of human rights, and although multi-pronged strategies are recommended to ensure their elimination, violence and discrimination. In this regard, it is notable also, that in 2008, the Special Court of Sierra Leone recognized forced marriage as a crime against humanity, describing this crime as “a situation in which the perpetrator through his words or conduct, or those of someone for whose actions he is responsible, compels a person by force, threat of force, or coercion to serve as a conjugal partner resulting in severe suffering, mental or psychological injury to the victim.”13 In 2009, the Special Court convicted three senior leaders of the Revolutionary Front of participating in a joint criminal enterprise to force young girls and women to marry revel soldiers or command responsibility for forced marriages.14 I am fortunate that the topic of my presentation does not call for recommendations to eliminate the harmful traditional practices that it catalogues. That will be the task of this seminar. Before I close, however, I would like to point out that OHCHR is itself involved in activities to address these practices. In October 2009, for instance, the Office organized a landmark conference on “honor crimes” in Ramallah, in the occupied Palestinian territory. At the conclusion of the Conference, a Task Force was established under the leadership of the Ministry of Women’s Affairs mandated to address the phenomenon of crimes committed in the name of “honour” in the occupied Palestinian territory. The High Commissioner’s statement on the International Women’s Day on 8 March 2010 focused on domestic violence and honor killings, and underlined the fact that these crimes are exacerbated in a number of countries by domestic legal systems, including by discriminatory laws that still fully or partially exempt individuals guilty of honour killings from punishment, and by state institutions that fail the victims and perpetuate a culture of impunity for the perpetrators. The High Commissioner also stressed the clear State responsibility under international laws and standards to uphold women’s rights and ensure freedom from discrimination, which includes the responsibility to prevent, protect and provide redress – regardless of sex, and 12 13 14 Sati is the practice of widows voluntarily committing suicide Prosecutor v Alex Tamba Brima and Ors (2008), para 195 Prosecutor vs Foday Saybana Sanko and Ors. 41 regardless of a person’s status in the family.15 The broader UN system is also heavily engaged in ending these practices, in particular through the SecretaryGeneral’s Campaign to UNITE to End Violence against Women, launched in 2008. He has targeted 2015 as the deadline for the adoption of national laws to address and punish all forms of violence against women and girls as one of the key outcomes of this campaign. In 2009, also, the Deputy Secretary-General launched the Secretary-General’s database on violence against women. This provides a framework for sharing and adoption of best practices. It is through initiatives such as these that the disturbing practices this seminar will discuss can be ended and the human rights of women and girls truly guaranteed and respected. 15 See statement by Navi Pillay, UN High Commissioner for Human http://www.ohchr.org/EN/NewsEvents/Pages/DisplayNews.aspx?NewsID=9869&LangID=E Rights at: 42 HARMFUL TRADITIONAL PRACTICES UN COMMITTEE ON THE RIGHTS OF THE CHILD1 MARTA MAURÁS PÉREZ Independent consultant in social policy, human rights and international relations, Member of the UN Committee on the Rights of the Child, Chile Résumé Dans son travail, le Comité des Droits de l’Enfant aborde le sujet des PTP par les articles 43, 6 (1&2), 34 et 2 de la CDE. L’Observation générale N° 4 de 2003 sur la santé et le développement de l’adolescent exige des Etats parties d’agir sur les rôles sexuels et les stéréotypes, afin de combattre les crimes d’honneur, le mariage précoce et les MGF. L’Observation générale de 2005 sur la mise en œuvre des droits de l’enfant dans la petite enfance dénonce les discriminations subies par les filles. Ces dix dernières années, les Observations finales du Comité sur les rapports d’application soumis, relèvent l’ancrage fort de ces pratiques dans la culture, le manque de connaissances/compréhension des droits humains, et l’absence de recherche scientifique sur les conséquences des MGF, du mariage précoce et autres PTP. Dans toutes ses Observations finales récentes, le Comité a inclus une section spécifique sur le suivi des recommandations du Rapport sur la violence contre les enfants (ONU 2006). Zusammenfassung Das Komitee für Kinderrechte behandelt das Thema der schädlichen traditionellen Praktiken in den Artikeln 43, 6 (1&2), 34 und 2 der KRK. Die Allgemeine Bemerkung (Observation générale) Nr.4 aus dem Jahr 2003 über die Gesundheit und die Entwicklung des Jugendlichen verlangt von den Mitgliedsstaaten, dass sie Geschlechterrollen und Stereotypen beeinflussen, mit dem Ziel Ehrenmorde, frühes Heiraten und WGV zu bekämpfen. Die Allgemeine Bemerkung aus dem Jahr 2005 über die Umsetzung der Kinderrechte während der frühen Kindheit kritisiert die Diskriminierung der Mädchen. Das Komitee zeigt in seinen abschließenden Bemerkungen (Observations finales) zu den 1 This is an edited version of a PowerPoint presentation given in October 2010 at the IDE conference “Harmful Practices and Human Rights”. The two main bodies concerned with HTPs are the Committee on the Rights of the Child and the Committee on the Elimination of Discrimination against Women (CEDAW). 43 Anwendungsberichten der letzten zehn Jahre auf, wie tief diese Praktiken in den Kulturen verwurzelt sind, dass es an Kenntnis oder Verständnis der Menschenrechte mangelt und dass es keinerlei wissenschaftliche Recherchen über die Folgen von WGV, früher Heirat oder anderen STP gibt. In allen jüngst veröffentlichten abschließenden Bemerkungen hat das Komitee dem Follow-Up der Empfehlungen des Berichts über die Gewalt gegen Kinder (Rapport sur la violence contre les enfants, UNO 2006) einen eigenen Teil gewidmet. Resumen En su trabajo, el Comité de los Derechos del niño aborda el asunto de las PTP por los artículos 43, 6 (1&2), 34 y 2 de la CDN. La Observación general N°4 de 2003 sobre la salud y el desarrollo del adolescente exige de los Estados partes de actuar sobre los papeles sexuales y los estereotipos, con el fin de combatir los crímenes de honor, el matrimonio precoz y las MGF. La Observación general de 2005 sobre la aplicación de los derechos del niño en la pequeña infancia denuncia las discriminaciones sufridas por las niñas. Estos diez últimos años, las Observaciones finales del Comité sobre los informes de aplicación presentados, destacan el fuerte anclaje de esas prácticas en la cultura, la falta de conocimientos/comprensión de los derechos humanos, y la ausencia de investigación científica sobre las consecuencias de las MGF, del matrimonio precoz y otras PTP. En todas sus recientes Observaciones finales, el Comité ha incluido una sección específica sobre el seguimiento de las recomendaciones del Informe sobre la violencia contra los niños (ONU 2006). Summary In its work, the Committee on the Rights of the Child tackles the issue of HTP’s through article 43, 6 (1&2), 34 and 2 CRC. The 2003 General Comment No. 4 on Adolescent Health and Development requires state Parties to address gender roles and stereotypes in order to curb honour killings, early marriage and FGM. The 2005 General Comment on Implementing Child Rights in Early Childhood points out the discrimination suffered by girl children. Over the last decade, the Committee’s Concluding Observations on implementation reports point out the strong cultural basis of the practices, the lack of knowledge/understanding of human rights, and the lack of research on the consequences of FGM, early marriage and other HTP’s. In all recent Concluding Observations of the Committee have included a specific section on follow-up to the recommendations of the Study on Violence against Children (UN, 2006). 44 * * * 45 APPROACH OF THE COMMITTEE The Committee’s main approach to Harmful Traditional Practices (HTPs) is through the article of the Convention on the Rights of the Child (CRC) relating to health. Article 24(3): States Parties shall take all effective and appropriate measures with a view to abolishing traditional practices prejudicial to the health of children. This concerns in particular female genital mutilation (FGM), with reference to the injuries caused to girls/women; and early or forced marriages, in view of the negative impacts on health (physical violence, rape, development problems, mental health). The Convention, being a holistic treaty, offers other possibilities: Article 6(1) States Parties recognize that every child has the inherent right to life. This applies, for example, to ‘honour killings’. Article 6(2) States Parties shall ensure to the maximum extent possible the survival and development of the child. Many forms of HTP can be considered prejudicial to the development of children, e.g. nutritional taboos and detrimental feeding practices. Article 34 States Parties undertake to protect the child from all forms of sexual exploitation and sexual abuse for example through forced marriages and temporary or "pleasure" marriages. Article 2 (non-discrimination) States Parties shall respect and ensure the rights in the present Convention to each child within their jurisdiction without discrimination of any kind… Article 2(1) .....on the basis of race, colour, sex, language, religion, political or other opinion, national, ethnic or social origin, property, disability, birth or other status. Article 2(2) …..on the basis of the status, activities, expressed opinions, or beliefs of the child’s parents, legal guardians, or family members. Article 2 is generally used in relation to unequal and detrimental treatment of girls (e.g. dowry, property, inheritance) which could be considered as HTPs. 46 GENERAL COMMENTS BY THE COMMITTEE The Committee’s approach has been further elucidated by General Comments. For example, in General Comment No. 4 on Adolescent Health and Development 20032, the Committee requests States Parties: to take all effective measures to eliminate all acts and activities which threaten the right to life of adolescents, including honour killings. to develop and implement awareness-raising campaigns, education programmes and legislation aimed at changing prevailing attitudes, and address gender roles and stereotypes that contribute to harmful traditional practices. to facilitate the establishment of multidisciplinary information and advice centres regarding the harmful aspects of some traditional practices, including early marriage and female genital mutilation. And, in dealing with early marriage3: the Committee is concerned at the number of early marriages and pregnancies and that both the legal minimum age and actual age of marriage, particularly for girls, are still very low in several States Parties. This has negative health consequences and, furthermore, children who marry, especially girls, are often obliged to leave the education system and are marginalized from social activities. the Committee strongly recommends that States Parties review and, where necessary, reform their legislation and practice to increase the minimum age for marriage with and without parental consent to 18 years, for both girls and boys. the Committee also makes reference to a similar recommendation from the Committee on the Elimination of Discrimination against Women (CEDAW)4. The 2005 General Comment on Implementing Child Rights in Early Childhood5 states: 2 3 4 5 CRC/C/GC/2003/4 para. 24 ibid para. 20 General recommendation No. 21 of 1994 CRC/c/GC/2005/7, Para 10 (b[i]) 47 discrimination against girl children is a serious violation of rights, affecting their survival and all areas of their young lives… ...as well as restricting their capacity to contribute positively to society; girls may be victims of selective abortion, genital mutilation, neglect and infanticide, possibly through inadequate feeding in infancy. The following paragraph from the Committee’s Day of General Discussion on the Girl Child6 is also important: States had identified persistent traditions and prejudices as a main difficulty affecting the enjoyment of girls’ fundamental rights and mentioned early and forced marriages and female circumcision and identified consequences—the risks of violence, sexual abuse within the family and early pregnancies. CONCLUDING OBSERVATIONS BY THE COMMITTEE Over the last decade, the Committee’s concluding observations on States Parties’ reports 7 that are relevant to HTPs have indicated that: the practices have a very strong cultural basis; there is a belief that the practice is « in the interest » of the child; there is strong social pressure (parents, community...); the justifications advanced for FGM are that it ensures a girl’s chastity, beauty or proper marriage; justifications put forward for early marriage are that it protects the honour of the family, protects the girl, releases the family from an economic burden and ensures the girl and her family’s economic future; there is lack of knowledge/understanding of human rights and child rights; there is little research or knowledge on the consequences of FGM, early marriages and other HTPs; and the measures taken by States are mostly legislative. 6 7 CRC /C/38 para 286, 23 January 1995 Niger, 2002 (CRC/C/15/Add.l79) Niger 2009 (CRC/C/NER/CO/2) Pakistan 2003 (CRC/C/l5/Add.2l7) Pakistan 2009 (CRC/C/PAK/CO/3-4) Pakistan 2009 (crc/c/pak/co/s-a) Ireland 2006 (CRC/c/lRL/co/2) Angola 2010 (CRC/C/ANG/CO) 48 The Committee made corresponding recommendations to these countries8. UN STUDY ON VIOLENCE AGAINST CHILDREN Chapter 3 of the 2006 UN World Study on Violence against Children states: FGM is a form of violence against girls—a table9 describes the prevalence of FGM among women and their daughters; bringing an end to FGM requires clear prohibition, education and awareness-raising within families and communities, and community mobilisation; early marriage of girls... has significant negative consequences on girls’ health, development and rights. Girls under 18 face significant risk of physical, sexual and psychological violence at the hands of their husbands. The study also mentions other forms of HTP—son preference, sorcery, etc. The Committee and the UN Special Representative on Violence against Children, Marta Santos Pais [a member of our Association—Ed], are working in close collaboration to move this agenda forward. All recent Concluding Observations of the Committee have included a specific section on follow-up to the Study’s recommendations and on cooperation with the Special Representative. SUMMARY The Committee’s approach to HTPs is based on their negative impact: on life, development and health in general; on discrimination; on education; and on social activities. 8 9 Niger 2002 (CRC/C/15/Add.l79) Pakistan 2009 (CRC/C/PAK/CO/3-4) Ireland 2006 (CRC/C/lRL/CO/2) Angola 2010 (CRC/C/ANG/CO) on p.62 of the English version 49 The Committee takes HTP to cover female genital mutilation, early and forced marriages, gender selection abortion, discrimination and violence related to dowry, property or inheritance, detrimental feeding practices, honour killings and other inhumane and cruel customs and rituals- burning, acid attacks, breast ironing, etc. It does not include corporal punishment. The Committee also identifies risks- violence, sexual abuse, infanticide, HIV/AIDS and other sexual diseases, and lack of education. While it points to girls as the main victims, the Committee has not explicitly used a gender approach. Over recent years one can see that the approach of the Committee has evolved: from urging States to pass laws to urging States to implement and apply legislation, including prosecution of victimizers; to placing strong emphasis on awareness-raising and sensitisation; to continue working with traditional leaders; to appealing to best practices and for better education; to giving a clearer gender focus, empowering girls to decide and protecting both girls and boys; to finding ways of targeting specific regions and groups; and to promoting better data collection which could lead to more research and the design of evidence-based policies and programmes. 50 HARMFUL DISCRIMINATORY PRACTICES: REALITY, PRACTICE AND JURISPRUDENCE OF THE CEDAW COMMITTEE DUBRAVKA ŠIMONOVIĆ Dr. Sc. Jur, CEDAW Committee Member, Croatia Résumé Les pratiques néfastes constituant une discrimination à l’encontre des femmes sont une marque persistante des sociétés patriarcales dans le monde. L’auteur examine les articles-clés de la Convention sur l’élimination des discriminations à l’encontre des femmes (CEDAW), le seul traité des droits humains portant sur le genre. Partant des articles 1 & 2 traitant de lois et de pratiques, elle passe aussi en revue les articles 5, 12 et 16 qui mettent en lumière des normes additionnelles pour l’éradication des PTP. Les Recommandations générales du comité CEDAW, notamment le CG de 1990 sur « les mutilations génitales féminines et autres pratiques néfastes à la santé des femmes », ont montré un souci constant de combattre ces pratiques. L’article se termine avec des extraits des Observations finales concernant les rapports du Yémen, de la Jordanie, de l’Inde et de la Slovaquie. Zusammenfassung Schädliche, traditionelle Praktiken diskriminieren Frauen und symbolisieren weltweit patriarchalische Gesellschaften. Die Autorin untersucht die Schlüsselartikel der Konvention zur Beseitigung jeder Form von Diskriminierung der Frau (CEDAW), dem einzigen Menschenrechtsvertrag zu diesem Thema. Dabei geht sie von den Artikeln 5, 6 und 10 aus, die zusätzliche Normen mit dem Ziel enthalten, schädliche traditionelle Praktiken zu beseitigen. Die allgemeinen Empfehlungen des CEDAW-Komitees, insbesondere der allgemeine Kommentar aus dem Jahr 1990 über weibliche Genitalverstümmelung und andere Praktiken, die der Gesundheit von Frauen schaden, haben das ständige Bestreben aufgezeigt, diese Praktiken zu bekämpfen. Der Autor zitiert am Ende des Artikels Auszüge aus den abschliessenden Bemerkungen über die Berichte von Jemen, Jordanien, Indien und der Slowakei. 51 Resumen Las prácticas dañinas que constituyen una discriminación contra las mujeres son una marca persistente de las sociedades patriarcales en el mundo. El autor examina los artículos-clave del Convenio sobre la eliminación de las discriminaciones contra las mujeres (CEDAW), el único Tratado de los derechos humanos referente al género. A partir de los artículos 1 y 2 que tratan de leyes y prácticas, la Sra. Simonovic examina también los artículos 5, 12 y 16 que destacan normas adicionales para la erradicación de las PTP. Las Recomendaciones generales del Comité CEDAW, en particular el CG de 1990 sobre “las mutilaciones genitales femeninas y otras prácticas dañinas a la salud de las mujeres”, mostraron una preocupación constante de combatir estas prácticas. El artículo se termina con extractos de las Observaciones finales relativas a los informes de Yemen, Jordania, la India y Eslovaquia. Summary Harmful practices that constitute discrimination against women are a persistent mark of patriarchal societies across the world. The author examines the key articles of the Convention on the Elimination of Discrimination against Women (CEDAW), the only gender specific human rights treaty. Starting with articles 1 § 2 dealing with laws and practices, she goes on to articles 5, 12 and 16 enhancing additional standards aimed at the elimination of HTPs. The General Recommendations of the CEDAW Committee, notably the 1990 GR “on female genital mutilation and other practices harmful to the health of women”, have had a constant concern for curbing these practices. The article ends with highlights from Concluding observations about reports from Yemen, Jordan, India and Slovakia. * * * 52 Harmful practices that constitute discrimination against women are a persistent mark of patriarchal societies across the world. The list of such practices is open ended, with some examples being female genital mutilation, early and forced marriage, so called “honour killings”, prenatal sex selection and so on. In this text I will use the term ‘traditional practices’, that seems to be more inclusive than “harmful traditional practices”, particularly of some newer harmful practices like prenatal sex selection. Such harmful practices are often seen as a private matter of families and such societies and are usually based on harmful gender stereotypes and discriminatory attitudes towards women and their roles in families and societies. States have often used the argument of cultural relativism to justify their inaction to address and abolish such practices. This situation is slowly changing and international human rights law is playing an important role in recognition of harmful practices as human rights violations and gender based violence against women. With respect to women’s rights the key instrument is the Convention on the Elimination of All Forms of Discrimination against Women (CEDAW Convention) adopted in 19791. During the past 30 years of its existence this Convention has been accepted by 186 States. It is the only human rights treaty that is gender specific and it covers women through their lifespan, including girls. It is also the only legally binding international instrument to set forth human rights standards for women in the full range of civil, political, economic, social and cultural areas, and covering both public and private life. It established the Committee on the Elimination of Discrimination against women (CEDAW) as an expert body to monitor implementation of the CEDAW Convention at the national level by the State parties based on State parties’ reports. Implementation of the Convention was strengthened by the adoption of its Optional Protocol (OP) which now has 100 States parties2. Under it the Committee considers communications submitted by or on behalf of individuals or groups of individuals who claim to be victims of a violation of rights in the Convention and inquires into grave or systematic violations of the Convention’s provisions. KEY ARTICLES OF THE CONVENTION Although the whole Convention is relevant for the prevention and elimination of various harmful practices against women, I will start by highlighting the key articles that prohibit harmful practices against women and will then reflect on the 1 2 http://www2.ohchr.org/english/law/cedaw.htm http://www2.ohchr.org/english/law/cedaw-one.htm 53 Committee’s approach and practice in their application to the protection of the girl child/women as reflected in the Committee’s general recommendations, concluding comments and views under the OP. The CEDAW Convention is based in the principle of non discrimination against women and the principle of equality of women and man. The Convention contains several articles that call for specific actions against discrimination directly related to the abolition or elimination of harmful practices. Article 1 and 2 are providing for an obligation to modify or abolish laws, regulations, customs and practices which constitute discrimination against women. Article 1 of the Convention provides a broad definition of discrimination against women that addresses both direct and indirect forms of discrimination against women and makes it a unique instrument in international law for the achievement of genuine (both formal and substantive) equality between men and women: “[...] any distinction, exclusion or restriction made on the basis of sex which has the effect or purpose of impairing or nullifying the recognition, enjoyment or exercise by women, irrespective of their marital status, on a basis of equality of men and women, of human rights and fundamental freedoms in the political, economic, social, cultural, civil or any other field.” Article 2 of the Convention focuses on the rights of all women to be free from discrimination, and States parties’ obligation to work without delay for the elimination of all forms of discrimination against women and to ensure the practical realization of the principle of the equality of women and men, as stated in Article 2 of the Convention. It further explicitly specifies in para f) the obligation of States to: “take all appropriate measures, including legislation, to modify or abolish existing laws, regulations, customs and practices which constitute discrimination against women”. Articles 5, 12 and 16 provide additional standards aimed at the elimination of some harmful traditional practices. Article 5 of the Convention requires modification of social and cultural patterns of conduct of women and men, and the elimination of practices based on the idea of sex role stereotyping or the inferiority or superiority of either of the sexes. Article 12 of the Convention addresses discrimination against women in the field of health and also focuses on reproductive health and services related to pregnancy, confinement and the post natal period. Article 16, paragraph 2 of the Convention specifically prohibits marriage of a child, and also requires that a minimum age for marriage be specified, including in legislation. 54 However, provisions of the CEDAW Convention are not static. The Convention is a living women’s human rights instrument which evolves over time through activity of the CEDAW Committee. Regarding harmful practises it has been playing an important role in providing its authoritative interpretation of the obligations of the State parties to eliminate certain harmful practices based on their obligations assumed under the CEDAW Convention. GENERAL RECOMMENDATIONS COMMITTEE OF THE CEDAW The CEDAW Committee has adopted several General recommendations (GR) relevant for interpretation of States parties’ obligations to abolish harmful traditional practices based on their responsibilities under articles 1, 2, 5, 12 and 16. The CEDAW Committee was the first one that addressed female genital mutilation and during its 9th session it adopted the General recommendation 14 (GR 14) of 1990 on female circumcision and other traditional practices harmful to the health of women.3 It requires States to adopt effective measures with a view to eradicate harmful practices and calls for: (i) the collection and dissemination of basic data about such traditional practices; (ii) The support of women’s organizations at the national and local levels working on the elimination of female circumcision and harmful practices (iii) The encouragement of politicians, professionals, religious and community leaders at all levels, including the media and the arts, to co-operate in influencing attitudes towards the eradication of female circumcision;(iv) The introduction of appropriate educational and training programmes and seminars based on research. GR 14 also called States to “Include in their national health policies appropriate strategies aimed at eradicating female circumcision in public health care. Such strategies could include the special responsibility of health personnel, including traditional birth attendants, to explain the harmful effects of female circumcision.” From today’s practice of the Committee and subsequent General recommendation that also addressed harmful practices we can observe that the formerly used term “female circumcision” was later changed into “female genital mutilation” and that focus on harm done to women by such practices to women’s health was later elaborated as gender-based violence and human rights violation. This approach was elaborated in the Committee’s General Recommendation 19 (GR 19) of 1992 3 See at http://www2.ohchr.org/english/bodies/cedaw/comments.htm 55 on Violence against Women.4 It clearly explains interconnections of discrimination against women and gender-based violence. It provides understanding of genderbased violence against women as a form of discrimination against women and violations of human rights and fundamental freedoms. It clarifies that the definition of discrimination against women in article 1 of the Convention includes violence against women, defined as “gender-based violence against women is, violence that is directed against a woman because she is a woman or that affects women disproportionately. It includes acts that inflict physical, mental or sexual harm or suffering, threats of such acts, coercion and other deprivations of liberty.” Gender-based violence, which impairs or nullifies the enjoyment by women of human rights and fundamental freedoms, is discrimination within the meaning of article 1 of the Convention. As specified in the GR 19 these rights and freedoms include: (a) The right to life; (b) The right not to be subject to torture or to cruel, inhuman or degrading treatment or punishment; (c) The right to equal protection according to humanitarian norms in time of international or internal armed conflict; (d) The right to liberty and security of person; (e) The right to equal protection under the law; (f) The right to equality in the family; (g) The right to the highest standard attainable of physical and mental health. This GR 19 specifically addresses traditional attitudes and violence against women such as family violence and abuse, forced marriage, dowry deaths, acid attacks and female circumcision. The effect of such violence on the physical and mental integrity of women is to deprive them of equal enjoyment, exercise and knowledge of human rights and fundamental freedoms. GR 19 furthermore points out that traditional practices perpetuated by culture and tradition are harmful to the health of women and children. These practices include dietary restrictions for pregnant women, preference for male children and female circumcision or genital mutilation. It clearly recognizes harmful traditional practices as a gender-based violence and a form of discrimination against women. Another crucial contribution 4 Ibid. 56 of GR 19 was that it spelled out the due diligence principle in order to elaborate States obligation with respect to violence again women done by private persons. It clearly explained that under general international law and specific human rights covenants, States may also be responsible for private acts if they fail to act with due diligence to prevent violations of rights or to investigate and punish acts of violence, and for providing compensation. With respect to early marriage as a harmful traditional practice the CEDAW Committee adopted the General Recommendation 21 on Equality in Marriage and Family relations of (GR 21) of 19945. It also elaborates that polygamous marriage contravenes a woman’s right to equality with men, and can have such serious emotional and financial consequences for her and her dependents that such marriages ought to be discouraged and prohibited. It furthermore explains that a woman’s right to choose a spouse and enter freely into marriage is central to her life and to her dignity and equality as a human being. In this GR the Committee recognized that “some countries provide for different ages for marriage for men and women. As such provisions assume incorrectly that women have a different rate of intellectual development from men, or that their stage of physical and intellectual development at marriage is immaterial”, the Committee concluded that these provisions should be abolished. In its practice the Committee consistently addresses situations where the minimum legal age for marriage for girls is below 18 years. It probes into legislative exceptions that allow girls to marry before the legal age of 18 years, and looks at the percentage and circumstances of such marriages, and differences between men and women. The Committee without exception requests that States rise the minimum legal age of marriage for girls in order to bring it into line with Article 1 of the Convention on the Rights of the Child, and with Article 16, paragraph 2, of the Convention on the Elimination of All Forms of Discrimination against Women, and the Committee’s general recommendation 21. With respect to female genital mutilation and early marriage the General Recommendation 24 on Women and health (GR 24) of 1999 specifically calls States parties to ensure the enactment and effective enforcement of laws that prohibit female genital mutilation and marriage of girl children. 5 Ibid. 57 CONCLUDING COMMITTEE OBSERVATIONS OF THE CEDAW Based on relevant articles of the Convention and its general recommendations applied on a specific country situation the CEDAW Committee adopts country specific Concluding observations. Through a few examples I will highlight the evolving practice of the CEDAW Committee with respect to particular harmful practices. Female genital mutilation Concluding Observations for Yemen 6 34. While welcoming the 2001 Decree of the Ministry of Health banning the practice of female genital mutilation in all private and public health facilities or by public health servants, the Committee is concerned that female genital mutilation remains legal and, as expressed in its previous concluding observations, about its high incidence, especially in the coastal and rural areas, as well as with the State party’s reluctance to adopt measures aiming at eradicating this persistent harmful practice. The Committee also notes with concern the serious health complications for girls and women arising out of this practice which, in some cases, may lead to death, as well as with the impunity of perpetrators. 35. In light of its general recommendations 14 and 19, as an act of violence against women inflicting physical, mental or sexual harm or suffering, the Committee reiterates the recommendation that the State party adopt urgently legislation criminalizing female genital mutilation, and recommends the State party to enforce its prohibition through the prosecution and adequate punishment of offenders. It also recommends that the State party strengthen its awareness-raising and education efforts, targeted at both men and women, with the support of civil society organizations and religious authorities, in order to completely eliminate this practice and its underlying cultural justifications. Child /Forced Marriage Concluding Observations for Yemen 7 6 7 CEDAW/C/YEM/CO/6 ( 2009) CEDAW/C/YEM/CO/6 (2009) 58 30. The Committee is extremely concerned at the amendment to the Personal Status Law No. 20 of 1992 by Law No. 24 of 1999 and its negative consequences, which legalized the marriage of girl children below 15 years of age, with the consent of their guardian, which is a clear setback for the women’s rights and the implementation of the provisions of the Convention in the State party and a serious violation of the State party’s obligations under the Convention. The Committee remains deeply concerned at the “legality” of such early marriages of girl children, some as young as eight years of age, which amounts to violence against them, create a serious health risk for those girls and also prevents them from completing their education. 31. The Committee urges the State party, reiterating its previous recommendations, to take urgent legislative measures to raise the minimum age of marriage for girls, in line with article 1 of the Convention on the Rights of the Child, which defines a child as being below the age of 18, and the provision on child marriage in article 16, paragraph 2, of the Convention, and stipulate that child marriages have no legal effects. The Committee also urges the State party to enforce the requirement to register all marriages in order to monitor their legality and the strict prohibition of early marriages as well as to prosecute the perpetrators violating such provisions. The Committee recommends that the State party develop awareness-raising campaigns, with the support of civil society organizations and religious authorities, on the negative effects of early marriage on the wellbeing, health and education of girls. “Honour Crimes” / Rape Concluding Observations for Jordan8 23. While noting that article 340 of the Penal Code has been revised so that it no longer exonerates perpetrators of crimes committed in the name of honour, or “honour” crimes, the Committee is concerned that perpetrators of such crimes get lenient sentences under the amended article 340 (which reduces penalties for murders that are viewed as “honour” crimes), article 98 (which reduces penalties for murders committed in a fit of fury) and article 99 (which halves a perpetrator’s sentence when he is excused by the victim’s family), and that “honour” crimes continue to be treated differently from other violent crimes in terms of investigation and prosecution, as well as prevention efforts. The Committee is also concerned that rapists may be exempt from punishment by marrying their 8 CEDAW/C/JOR/CO/4 (CEDAW, 2007) 59 victims. It is further concerned that virginity tests, which perpetuate stereotypes, may be carried out without the full and free consent of women and the results of such tests may be used to their detriment. 24. The Committee calls upon the State party to amend, without delay, applicable provisions of the Penal Code to ensure that perpetrators of “honour” crimes do not benefit from a reduction of penalty under article 340; that perpetrators of premeditated “honour” crimes do not benefit from a reduction of penalty under article 98; and that article 99 is not applicable to “honour” crimes or other cases where the victim is related to the perpetrator. The Committee also urges the State party to ensure that “honour” crimes are treated as seriously as other violent crimes in regard to investigation and prosecution, and that effective prevention efforts are put in place. It further calls upon the State party to ensure that a rapist does not escape punishment by marrying his victim. It recommends that the State party eliminate the use of virginity tests or ensure that such tests are carried out only with the full and free consent of the woman and the results are not used to her detriment. Prenatal sex selection Concluding Observations for India 9 38. The Committee is concerned about the continuing deterioration in the ratio of females to males despite the Pre-conception and Prenatal Diagnostic Technique (Prohibition of Sex Selection) Act, as amended in 2003. The Committee is further concerned that this Act may result in criminalization of women who are pressured into seeking sex-selective abortions. 39. The Committee calls upon the State party to ensure that adequate mechanisms and procedures for effective implementation and monitoring of the Pre-conception and Prenatal Diagnostic Technique (Prohibition of Sex Selection) Act be established, including safeguards to prevent criminalization of women who are pressurized into seeking sex-selective abortions. Compulsory sterilization Concluding observations for Slovakia 10 9 10 CEDAW/C/IND/CO/3 (CEDAW, 2007) CEDAW/C/SVK/CO/4 (CEDAW, 2009) 60 30.....while acknowledging the explanations given by the delegation on the alleged coerced sterilization of Roma women, and noting the recently adopted legislation on sterilization, the Committee remains concerned at information received in respect of Roma women who report to have been sterilized without prior and informed consent . VIEWS UNDER THE OPTIONAL PROTOCOL Under its Views under the Optional Protocol in concrete individual cases with respect to the concrete victims, the CEDAW Committee is providing further interpretation and understanding of the obligation of States to eliminate discrimination against women, including harmful traditional practices. In the Communication No. 4/ 2004 A.S v Hungary the CEDAW Committee addressed the reproductive rights of a woman and held the State responsible for failing to provide a minority Roma woman with necessary information and failure to obtain full consent for reproductive health procedures. In this case upon going into labor, Ms. A.S., a member of the Roma community, needed an emergency Caesarian section. Immediately before the surgery, a doctor asked Ms. A.S. to sign consent forms on which the doctor had hand-written a statement that Ms. A.S. consented to a sterilization procedure. Ms. A.S. did not understand the statement or that she had been sterilized until after the operation took place. Her claim of civil rights violations and negligent sterilization was rejected at the local level. The Committee held that Ms. A.S.’s rights were violated when a doctor in a public hospital performed a forced sterilization procedure without providing adequate information regarding the sterilization procedure. The doctor failed to obtain Ms. A.S.’s free and informed consent and violated her right to decide the number and spacing of children as well as the right to access sexual and reproductive health education and family planning information. Hungary was found to have violated Ms. A.S.’s rights under the CEDAW Convention under Article 12 as the sterilization was performed without her fully and informed consent to medical procedures. The Committee recommended that Hungary compensate Ms. A.S. and take measures to make sure health officials give information to patients and obtain informed consent. In 2008, Hungary amended the Public Health Act to ensure that women received proper information regarding sterilization procedures. Finally, the compensation has been paid to Ms. A.S. CONCLUSION 61 From the practice of the CEDAW Committees it can be observed that harmful practices are still a reality for women and girls around the world and that the eradication process is very slow. Harmful traditional practices were addressed early on by the CEDAW Committee as practices harmful to women’s health but it took some time for their recognition as a form of gender based violence and a form of human right violation. Today the Committee uses both terms: “harmful traditional practices” and “harmful practices”. They are seen as a form of discrimination against women and gender-based violence that violate woman’s human rights and fundamental freedoms. Recommendations in the Committee’s concluding observations are strong and clear with respect to the States’ obligation for their legal and practical abolition. However, it is their implementation that remains slow or unfulfilled. A joint initiative of the CEDAW Committee and the Committee on the Rights of the Child to use both of the Conventions and their work on the implementation of these Conventions for elaboration of a new Joint general recommendation on harmful practices could be an important step to accelerate the process of their full eradication. 62 PRATIQUES TRADITIONNELLES JUSTICIABILITE1 PREJUDICIABLES ET CHRISTIANE BRISSON Juriste, Cour européenne des droits de l’Homme, Strasbourg, France Résumé Toute personne dispose du droit de ne pas subir de pratiques préjudiciables et de faire réparer le préjudice subi en cas de mauvais traitements quel que soit le fondement juridique adéquat. La Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée en 1950, complétée par 14 protocoles, est un outil déterminant dans la protection des droits et libertés énoncés dans ce texte. L’essence même de la Convention est le respect de la dignité et de la liberté humaine. Au travers d’exemples concrets d’affaires jugées par la CEDH, l’auteur illustre une typologie des actes pouvant être à l’origine d’un traitement préjudiciable, qu’ils soient d’ordre physique ou psychologique. La nécessaire conciliation des différents droits est rappelée, de même que le devoir de mise en œuvre par les Etats d’obligations positives. Zusammenfassung Alle Menschen haben das Recht, frei von schädlichen traditionellen Praktiken zu leben sowie das Recht auf Wiedergutmachung des erlittenen Schadens bei Misshandlung, welche Rechtsgrundlage auch immer anwendbar sei. Die Konvention zum Schutz der Menschenrechte und Grundfreiheiten wurde im Jahr 1950 unterzeichnet und durch 14 Zusatzprotokolle ergänzt. Sie ist massgebend für den im Text genannten Schutz der Rechte und Grundfreiheiten. Die Konvention gründet auf der Achtung der Menschenwürde und der Freiheit. Die Autorin verdeutlicht anhand konkreter Beispiele – vom EGMR entschiedene Rechtssachen - die Art der Akte, die einer schädlichen Behandlung, physisch oder psychisch, zugrunde liegen können. Es wird daran erinnert, dass es notwendig ist, die verschiedenen Rechte in Einklang zu bringen, sowie dass die staatlichen Schutzpflichten von den einzelnen Staaten umgesetzt werden müssen. 1 Le rédacteur s’exprime à titre personnel sans aucun engagement de la Cour 63 Resumen Toda persona dispone del derecho a no sufrir prácticas perjudiciales y a hacer reparar el perjuicio sufrido en caso de malos tratamientos cual que sea el fundamento jurídico adecuado. La Convención europea de protección de los derechos humanos y de las libertades fundamentales, firmada en 1950, completada por 14 protocolos, es una herramienta determinante en la protección de los derechos y libertades enunciados en este texto. La esencia de la Convención es el respeto de la dignidad y la libertad humana. A través de ejemplos concretos de casos juzgados por la CEDH, el autor ilustra una tipología de los actos pudiendo ser al origen de un tratamiento perjudicial, que sean de carácter físico o psicológico. Se recuerda la necesaria conciliación de los distintos derechos, así como el deber de aplicación por los Estados de obligaciones positivas. Summary Every person is entitled the right not to suffer harmful practices, and to obtain redress for the harm in case of abuse, whatever the relevant legal basis. The 1950 European Convention for the Protection of Human Rights and Fundamental Freedoms, with its 14 Protocols, is definitely a milestone in the protection of enounced rights and freedoms. The very essence of the Convention is respect for human dignity and freedom. Through concrete examples of ECHR processed cases, the author outlines a typology of deeds possibly amounting to harmful treatment, be they physical or psychological. The necessary conciliation of the various rights is reminded, along with the duty for States to implement positive obligation. * * * 64 Mutilations féminines, mariages précoces… des pratiques que l’on pourrait croire d’un autre temps mais dont force est de constater qu’elles perdurent, de manière significative, en de nombreux endroits. Eu égard aux conséquences dramatiques qui en résultent non seulement pour les personnes qui en sont directement victimes mais également pour leurs proches, contemporains ou générations suivantes, nul ne saurait rester indifférent. L’intervention des acteurs susceptibles d’agir dans le domaine des droits humains, quelle que soit la forme de leur action, s’avère plus que jamais nécessaire pour contribuer à l’éradication de ces fléaux. A cet égard, la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée en 1950 et complétée par 14 protocoles, constitue un outil déterminant dans la protection des droits et libertés énoncés dans ce texte adopté aujourd’hui par les 47 Etats-membres du Conseil de l’Europe qui se sont obligés à en respecter les dispositions et à assurer des recours efficaces lorsqu’une violation est alléguée. La Cour européenne constitue une juridiction internationale et ayant pour vocation de régler les litiges afférents à la méconnaissance par les Etats-membres des droits et libertés énoncés dans la Convention, elle contribue à leur conférer un caractère effectif. Liminairement, il peut être rappelé que la Cour peut être saisie par toute personne mettant en cause l’une des parties contractantes à laquelle il est fait grief de ne pas avoir respecté les engagements souscrits2. S’agissant de la recevabilité des requêtes qui lui sont soumises, 3 points peuvent être mis en exergue : en 1er lieu, la saisine de la Cour ne peut, notamment, intervenir qu’après épuisement des voies de recours internes, en effet, le droit conventionnel doit être appliqué d’abord par le juge national; en 2e lieu, un délai de 6 mois après que cette dernière décision est devenue définitive doit être respecté et enfin, les affaires manifestement mal fondées sont rejetées pour irrecevabilité. Si la Cour conclut à une violation, l’Etat a l’obligation juridique d’exécuter l’arrêt (par l’adoption de mesures individuelles permettant de réintégrer la personne dans ses droits, par la révision des procédures et/ou des décisions nationales afin de remédier aux violations commises ou par le paiement d’une réparation pécuniaire). La Cour adopte une démarche qui est à la fois téléologique et pragmatique, contribuant à ce que la Convention soit et demeure un instrument vivant devant être apprécié à la lumière des conditions de vie actuelles3. Au moyen d’un examen particulièrement circonstancié de chacune des espèces qui lui est soumise, la Cour est amenée à porter une appréciation du ou des griefs invoqués au regard des règles 2 3 La Cour peut également être saisie par un Etat, mais cet usage reste marginal. Tyrer c. Royaume-Uni du 25 avril 1978, série A no 26, pp. 15-16, § 31 Vo c France, (GC) n° 53924/00 du 08/07/2004, § 84 Ocalan c Turquie (GC) n° 46221/99 du 12/05/2005, § 4-5 65 posées par la Convention mais aussi des normes dégagées par la jurisprudence. Ces dernières ne sauraient avoir de caractère figé; elles ont, au contraire, vocation à être précisées, à s’adapter à l’évolution normative nationale et/ou internationale, à prendre en considération les modifications du contexte sociologique et des aspirations à plus de justice. Un arrêt de la Cour sert non seulement à trancher le cas dont elle est saisie mais aussi à clarifier, sauvegarder et développer les normes de la Convention. Au fond, il convient tout d’abord de préciser que la notion de traitement préjudiciable traditionnel, au sens où cette notion est entendue dans le cadre du présent séminaire, n’est pas connue, en tant que telle, par la Cour européenne. Ceci ne fait toutefois pas obstacle à ce que ce concept puisse être approché au travers de différentes situations qui ont d’ores et déjà été rencontrées par la juridiction. En effet, les stipulations de la Convention, eu égard à l’étendue de leur champ d’application, permettent d’appréhender et de résoudre des litiges dans lesquels sont en cause des châtiments corporels, des violences conjugales ou familiales, des situations d’esclavagisme ou de servitude, de mutilations génitales, de stérilisation forcée… Du point de vue terminologique, nous comprendrons donc, dans le cadre du présent exposé, la notion de « pratique traditionnelle préjudiciable » comme : - un fait (et non comme une norme de comportement s’imposant socialement), - pouvant être observé de manière récurrente présentant une certaine permanence (permettant ainsi de le regarder comme revêtant un caractère traditionnel), - ayant pour objet ou pour effet de provoquer une violence de caractère physique et/ou psychologique compte tenu notamment des convictions des personnes, - qui est à l’origine d’un préjudice pour la personne qui en est destinataire. En conséquence, la notion de traitement préjudiciable est ici comprise dans un sens plus large que celui retenu par les termes de l’article 3 de la Convention qui prohibe la torture et les traitements inhumains et dégradants. Divers articles de la Convention sont, dès lors, susceptibles d’être invoqués à l’appui d’un recours dirigé contre un manquement lié à une pratique traditionnelle préjudiciable. Il en est ainsi de l’article 2 qui protège le droit à la vie, de l’article 3 sus-évoqué, de l’article 4 qui prohibe l’esclavage et le travail forcé, de l’article 6 § 1 relatif au droit à un procès équitable, de l’article 8 qui protège la vie privée et familiale, de l’article 9 relatif à la liberté religieuse, de l’article 12 qui prévoit le droit au 66 mariage, de l’article 2 du protocole n° 1 relatif au droit à l’éducation ou de l’article 14 qui impose l’absence de discrimination (en lien avec un autre article). I- TYPOLOGIE DES ACTES POUVANT ETRE A L’ORIGINE D’UN TRAITEMENT PREJUDICIABLE Sans prétendre à l’exhaustivité, nous tenterons de brosser un tableau de diverses pratiques préjudiciables, non encore éradiquées, ayant donné lieu à des décisions juridictionnelles émanant de la Cour européenne afin d’illustrer la démarche de cette dernière en la matière. L’appréciation portée par la Cour en vue de déterminer si le traitement en cause revêt un caractère préjudiciable dépendra des circonstances propres à chaque espèce c’est à dire de la nature et de la durée du fait en cause, des effets physiques et mentaux en découlant, de l’âge, du sexe, de l’état de santé de la victime… Les actes à caractère préjudiciable pourront découler soit d’actes physiques, ces actes s’étant effectivement produits ou risquant d’être commis, même si aucun commencement d’exécution ne peut être constaté, soit d’actes à caractère psychologique. A- Actes physiques préjudiciables 1) - fait qui s’est effectivement produit Le rapprochement de deux affaires de châtiments corporels illustre la démarche pragmatique de la Cour. Dans la 1ère, Tyrer c Royaume-Uni n° 5856/72 du 25/04/1978, un jeune de 15 ans avait été fustigé le jour même de la constatation des faits qui lui étaient reprochés. La punition a été administrée en présence de son père, d’un médecin et les coups ont été donnés, directement sur le corps de l’intéressé, par la police. La Cour estime que, même s’il n’est pas constaté de lésion physiologique grave ou durable, le châtiment consistant à traiter la personne en objet aux mains de la puissance publique a porté atteinte à la dignité et l’intégrité de la personne et des séquelles psychologiques ne sont pas à exclure; un sentiment d’humiliation et d’avilissement lié à l’exécution de la sanction n’a pu qu’être ressenti et la peine atteint une gravité conduisant à la qualifier de dégradante (violation article 3). En revanche, dans l’affaire Costello Roberts c Royaume-Uni du 25/03/93 (série A n° 247, p. 60), un élève de 7 ans s’était vu infliger des coups de chaussure (comportant une semelle de caoutchouc), par-dessus son short, trois jours après le fait reproché et sans témoin. Bien que le caractère automatique de la sanction et le 67 délai observé aient été regardés comme préoccupants par la Cour, celle-ci a considéré qu’il n’était pas établi que le traitement dénoncé ait produit des effets graves ou durables excédant les effets d’une mesure disciplinaire. Par suite, aucune violation de l’article 3 n’a été constatée, ni d’ailleurs de l’article 8. Des violences conjugales ou familiales peuvent revêtir le caractère de traitement préjudiciable. Le préjudice pourra être caractérisé par la constatation de la carence des autorités compétentes à prendre les mesures propres à faire cesser le traitement en cause. Ainsi, la défaillance des services sociaux à prendre en charge quatre enfants laissés à l’abandon, dans des conditions d’hygiène et de salubrité alarmantes, par leurs parents incapables de s’en occuper, malgré des signes de maltraitance physique, méconnaît la portée de l’article 3 de la Convention : Z c Royaume-Uni n° 29392/95 du 10/05/2001. Il en a été jugé de même s’agissant de la négligence des autorités à prendre des mesures de garde provisoire d’un enfant exposé à une situation de violences domestiques suscitées par le divorce de ses parents, à l’origine d’un grave litige lié à sa garde, et préjudiciable à son bien-être. Cette négligence constitue une violation de l’article 8 de la Convention (Bevacqua c Bulgarie n° 57179/00 du 12/06/2008). Dans l’affaire Opuz c Turquie n° 33401/02 du 09/09/2009 étaient en cause de multiples et graves actes de violence subis par une mère et sa fille de la part du mari de cette dernière (les violences allant jusqu’au meurtre de la belle-mère et à de graves blessures infligées à l’épouse). La Cour observe que, compte tenu du contexte de vulnérabilité dans laquelle se trouvait la requérante dans la région du pays où elle résidait et bien que la police n’ait pas été totalement passive, aucune mesure n’a suffi à dissuader l’intéressé de commettre de nouveaux actes de violence sur la personne de ses proches. En conséquence, le manquement des autorités de l’Etat à prendre des mesures de protection sous la forme d’une prévention efficace mettant l’épouse à l’abri des graves atteintes de son mari, constitue une violation de l’article 3. Des faits constitutifs de violence institutionnelle ont pu être constatés à diverses reprises : Ainsi l’absence d’interruption du placement d’enfants dans une institution pour jeunes dont 2 des principaux responsables ont été condamnés pour abus sexuels de personnes handicapées et alors que l’un des jeunes avait déjà été victime d’un pédophile méconnait l’article 8 de la convention : Scozzari et Giutta c Italie n° 39221/98 du 13/07/2000. En présence d’un enfant battu par les forces de police lors d’un interrogatoire et alors que la Cour a pu constater d’une part, que le mineur aurait du bénéficier d’une protection accrue compte tenu de sa vulnérabilité et d’autre part, que les policiers ont bénéficié d’une impunité de fait, le système pénal qui ne pouvait engendrer aucune force dissuasive susceptible d’assurer une prévention efficace 68 d’actes illégaux n’offre pas un redressement approprié de l’atteinte portée à la valeur consacrée à l’article 3. Il s’ensuit qu’une violation de cette stipulation doit être constatée : Okkali c Turquie n° 52067/99 du 17/10/2006. Lorsqu’une personne est placée en garde à vue, elle se trouve dans une situation de fragilité particulière exigeant, surtout lorsqu’elle est mineure, une vigilance particulière. Lorsque des sévices sont infligés intentionnellement à de jeunes détenus pendant une garde à vue, l’état de douleurs et d’angoisse liée à l’incertitude sur leur sort afin de leur extorquer des aveux ou des renseignements viole l’article 3 : Bati et autres c Turquie n° 33907/96 du 03/06/2004. En présence d’allégations de tortures sur un mineur en garde à vue présentant de nombreuses blessures non expliquées, l’Etat doit fournir des explications plausibles sur l’origine des lésions de l’intéressé et doit effectuer une enquête effective et officielle sur les faits en cause. De plus, dès lors que le mineur n’a pas bénéficié de la protection accrue qu’exige son jeune âge (en l’absence d’assistance d’un avocat, d’interrogation par le procureur), l’article 3 est méconnu : Alkes c Turquie n° 3044/04 du 16/02/2010. Le placement en détention se traduit souvent par l’administration de mauvais traitements. Tel est notamment le cas lorsque le détenu est placé à l’isolement cellulaire; la cour procède alors à une appréciation circonstanciée du degré de gravité de la situation afin d’apprécier si l’article 3 est méconnu. Une violation a été constatée s’agissant d’un détenu particulièrement surveillé faisant l’objet de séjours prolongés en isolement, de fouilles corporelles systématiques, de transfèrements multiples. Ces conditions de détention ne peuvent être regardées comme respectant les stipulations de l’article 3 : Khider c France n° 39364/05 du 09/07/2009. Il en a été de même s’agissant d’une personne condamnée à mort par un tribunal d’une entité non reconnue en droit international, placée en régime d’isolement extrême ayant des effets néfastes sur santé, assimilable à un acte de torture : Ilascu c Moldova et Russie, n°48787/99 du 08/07/2004. A l’inverse, aucune violation de l’article 3 n’est constatée lorsque l’intéressé fait l’objet d’un isolement partiel et relatif n’emportant pas de conséquences sur sa santé : Ramirez Sanchez n° 59450/00 du 04/07/2006. Les mauvaises conditions d’hygiène peuvent être constitutives des mauvais traitements. La Cour a ainsi constaté des violations de l’article 3 dans le fait de placer 4 détenus dans une cellule de 10 m2, ne disposant que d’un accès limité à la lumière, mal chauffée et aérée et de peu d’eau et d’électricité : Modarca c Moldova n° 14437/05 du 10/05/2007 ou lorsqu’un détenu atteint de plusieurs affections graves a dû partager pendant plusieurs mois une cellule ne comportant que 34 lits avec 110 à 120 codétenus : Florea c Roumanie n° 37186/03 du 14/09/2010. 69 Une attention particulière doit être portée à la santé des intéressés; l’Etat, à cet égard, doit adapter les conditions générales de détention aux situations particulières de santé des intéressés. Ainsi, en présence d’un détenu connaissant un état de santé préoccupant et soumis pour le reste de sa vie à la détention, l’absence de prise en compte de tous les éléments à la disposition des autorités est de nature à violer l’article 3 : Xiros c Grèce n° 1033/07 du 09/09/2010. Un délai de 5 mois pour rendre des lunettes à un détenu ayant une très mauvaise vue constitue une violation de l’article 3 : Slyusarev c Russie n° 60333/00 du 20/04/2010. A l’inverse, aucun manquement à l’obligation d’assistance médicale à un détenu malade n’est constaté dans l’absence de traitement contre la tuberculose administré à un détenu entre le diagnostic de sa pathologie et sa sortie de l’établissement pénitentiaire deux semaines plus tard : Gavrilita c Roumanie n° 10921/03 du 22/06/2010. S’agissant des mutilations génitales féminines, il peut être noté que la Cour n’a pas encore eu l’occasion de se prononcer au fond, sur de telles pratiques. Seules deux décisions d’irrecevabilité peuvent être évoquées en la matière. La 1 ère espèce est relative à la situation d’une ressortissante éthiopienne, demandeur d’asile en Roumanie qui alléguait avoir subi une excision pendant son enfance et avoir, de surcroît, été violée par un soldat à la suite de quoi un enfant est né. Devant la Cour, elle invoquait les risques de torture et de mauvais traitements en cas de retour en Ethiopie. La Cour a estimé qu’eu égard à la circonstance que la législation roumaine prévoit que les autorités de ce pays doivent délivrer un ordre de quitter le territoire afin de pouvoir procéder à l’éloignement d’un étranger et qu’un tel acte peut être contesté devant les tribunaux avec un caractère suspensif, l’intéressée, qui n’a pas été éloignée, ne peut être regardée comme victime d’un éloignement tant qu’elle n’a pas été destinataire d’un acte de caractère exécutoire. Par suite, sa requête a été rejetée pour irrecevabilité : Negusse Mekonen c Roumanie, décision d’irrecevabilité n° 19011/06 du 25/11/19984. Dans la 2d espèce, les requérantes, de nationalité nigériane, avaient demandé l’asile en Suède (la mère ayant subi une telle mutilation et la refusant pour sa fille). Elles invoquaient leur impossibilité de se soustraire à de telles pratiques et, en particulier, pour la mère, celle d’empêcher une telle pratique sur la personne de sa fille, la stigmatisation et le rejet, dans leur pays d’origine, des femmes ayant refusé de subir une mutilation génitale féminine bien que plusieurs Etats du Nigéria aient adopté une législation interdisant ces pratiques, ainsi que les difficultés pour s’installer dans une autre région. La Cour, après avoir rappelé que les Etats ont le droit de contrôler l’entrée et le séjour des étrangers et que leur responsabilité est engagée si la personne court des risques d’être exposée à un traitement contraire à 4 Cette affaire permet de rappeler que la protection des droits de l’homme doit être assurée en 1 er lieu par la juridiction nationale et que la Cour européenne ne peut intervenir que de manière subsidiaire. 70 l’article 3 en cas de retour dans son pays d’origine, estime, qu’en l’occurrence, rien ne montre que la requérante ne pourrait pas protéger sa fille : Collins et Akaziebe c Suède, décision d’irrecevabilité n° 23944/05 du 08/03/2007.5 Dans le domaine des atteintes corporelles à la personne, l’on peut également évoquer l’affaire KH et autres c Slovaquie n° 32881/04 du 28/04/2009. En effet, des femmes roms soupçonnaient le personnel médical d’avoir procédé à leur stérilisation à l’occasion de leurs grossesses ou accouchements. Le refus d’accès à leur dossier médical porte atteinte à leur droit d’accès aux documents renfermant des informations de caractère personnel et fait obstacle à une saisine pertinente de la justice; en conséquence, la Cour constate une violation des articles 8 et 6 § 1. 2) - menace ou risque d’acte préjudiciable Un traitement préjudiciable peut également être constaté lorsqu’un acte de cette nature risque de se produire en emportant des conséquences néfastes. Dans un contexte national particulier, si les élèves d’une école où l’on a recours à des punitions corporelles ne sont pas, du seul fait de risquer de devoir en subir, exposés à une humiliation ou un avilissement d’un degré particulier, il n’en demeure pas moins que le risque d’agissement prohibé par l’article 3 peut se heurter à cette disposition, s’il est suffisamment réel et immédiat. En l’espèce, nonobstant le fait qu’un lycéen a pu éprouver des sentiments d’appréhension ou d’inquiétude au moment où il faillit recevoir des coups de martinet, cela ne suffit pas à caractériser un traitement dégradant : Campbell et Cosans c RU n° 7511/76 du 25/02/1982. Des risques de graves sévices infligés aux femmes peuvent fonder le constat de violation de l’article 3. Ainsi, une ressortissante iranienne craignant d’être condamnée à mort par lapidation ou flagellation pour adultère, la loi islamique réprimant une telle infraction, est fondée à soutenir que l’article 3 de la Convention serait violé si elle devait être expulsée vers l’Iran : Jabari c Turquie n° 40035/98 du 11/07/2000. De même, le risque d’être soumise à une peine inhumaine contraire à l’article 3 en raison de l’atteinte à la dignité et l’intégrité de la personne a été reconnu comme réel à l’égard d’une personne condamnée par un tribunal islamique à 100 coups de fouet pour fornication. En effet, chaque fois qu’une personne a des motifs sérieux et avérés de croire qu’elle court un risque réel de subir un traitement inhumain et dégradant, comme les châtiments corporels judiciaires, la responsabilité de l’Etat est engagée en cas d’expulsion : D et autres c Turquie n 5 Dans le cadre d’une procédure contentieuse, tout requérant doit, dès le stade de la recevabilité, apporter à l’appui de ses allégations, des éléments ayant une substance suffisante pour que la Cour soit amenée à considérer qu’il y a lieu de procéder à l’examen, au fond, des griefs invoqués. 71 24245/03 du 22/06/2006. L’affaire N c Suède n° 23505/09 du 20/07/20106 peut être citée. La requérante, afghane, est arrivée en Suède avec son mari et a demandé l’asile en raison des persécutions subies du fait de l’engagement politique de son époux. Au cours de l’instruction de sa demande, elle a demandé le divorce et a vécu avec un ressortissant suédois. Une nouvelle demande d’asile a alors été présentée en invoquant les risques de violences familiales en représailles en cas de retour. Selon l’intéressée, la non-conformité de son mode de vie aux rôles traditionnellement assignés par la société, la tradition et le système juridique en vigueur, peut l’exposer à des violences domestiques et autres formes de punition. En l’espèce, l’existence de risques de mauvais traitements en cas de retour en Afghanistan est avéré puisque selon des rapports d’organisations spécialisées en matière de droit de l’homme, 80% des femmes sont victimes de violences domestiques que les autorités considèrent comme légitimes et dont les auteurs ne sont pas poursuivis. En conséquence, une violation de l’art 3 est constatée. Les craintes liées au retour dans le pays d’origine peuvent être liées aux activités politiques menées par une personne. Dans une affaire récente jugée le 02/092010, YP et LP c France n° 32476/067, un opposant politique, dont le degré de militantisme est suffisamment démontré par la preuve de mauvais traitements subis et de la teneur des rapports internationaux sur la situation au Belarus, établit ainsi qu’un retour dans ce pays l’exposerait, comme ses proches, à des persécutions (violation de l’art 3 si renvoi vers cet Etat) B- Actes préjudiciables d’ordre psychologique A côté des traitements préjudiciables de caractère physique, il convient d’évoquer ceux qui résultent de comportements revêtant un caractère psychique / psychologique L’esclavage domestique ou la servitude, pratiques anciennes, subsistent toujours. Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt rendu le 26/07/2005, requête n° 3316/01, Siliadin c France, une mineure étrangère avait été contrainte de travailler contre son gré, sans relâche, sans rémunération et a ainsi été soumise à un travail forcé. Si la Cour a considéré qu’une telle situation ne pouvait être assimilée à de l’esclavage, au sens propre du terme, dans la mesure où les « employeurs » n’ont pas exercé sur elle un véritable droit de propriété, la réduisant à l’état d’objet, il n’en demeure pas moins qu’elle a été soumise à un travail forcé. L’obligation faite 6 7 A la date du séminaire cet arrêt n’est pas encore revêtu de caractère définitif. Conformément à l’article 44 de la Convention, un arrêt de chambre acquiert ce caractère dans les 3 mois suivant la date de son prononcé en l’absence de demande de renvoi ou en cas de rejet par le collège de la Grande chambre d’une telle demande. Même observation que ci-dessus 72 à l’intéressée de prêter, sous la contrainte, sa force de travail, induit qu’elle a été tenue dans un état de servitude. La législation pénale nationale en vigueur à la date des faits, n’a pas assuré à la requérante une protection concrète et effective contre les actes dont elle a été victime. Il s’ensuit que l’article 4 (qui prohibe l’esclavage et le travail forcé) a été violé. Une autre affaire est emblématique à cet égard. Il s’agit de l’affaire Rantsev c Chypre et Russie n° 25965/04 du 07/01/2010. Une jeune femme russe est arrivée à Chypre avec un visa d’artiste de cabaret et y a travaillé quelques jours avant de quitter son travail. Après que la police eût demandé au directeur du cabaret de revenir avec elle pour des recherches relatives à son statut d’immigrée, elle est retrouvée, quelques heures plus tard, décédée, dans des conditions étranges et non élucidées. S’agissant tout d’abord du grief tiré de la méconnaissance de l’article 2 (qui protège le droit à la vie), la Cour constate un manquement des autorités chypriotes faute d’avoir conduit une enquête effective sur les circonstances du décès; en revanche, une telle violation ne peut être constatée pour la Russie. En ce qui concerne l’article 4, la Cour précise que le trafic d’êtres humains, compte tenu de sa nature et des fins d’exploitation qu’il poursuit, suppose l’exercice de pouvoirs comparables au droit de propriété; que les trafiquants voient l’être humain comme un bien affecté à des travaux forcés et placent la victime sous surveillance constante en ayant souvent recours à la violence et aux menaces. Or l’article 4 interdit ce type de trafic. En l’espèce, Chypre a manqué à l’obligation positive de l’article 4 en ce que ce pays n’a pas mis en place un dispositif légal et administratif permettant de lutter contre ce trafic (prévention-punition) et en ce que la police n’a pris aucune mesure pour protéger l’intéressée alors que les circonstances pouvaient laisser soupçonner qu’elle pouvait être victime de tels faits. De même, un constat de violation de cette disposition doit être opéré à l’égard de la Russie faute pour elle d’avoir recherché quand et où Mlle Rantseva avait été recrutée. Le mariage, notamment lorsqu’il est précoce ou forcé, peut constituer un traitement préjudiciable pour les personnes concernées. A cet égard, la Cour a eu l’occasion de préciser que l’obligation faite aux futurs époux de respecter l’âge nubil légal, même si la religion de l’intéressé autorise le mariage à un âge inférieur, ne saurait constituer un refus du droit au mariage au sens de l’article 12 de la Convention. Le droit de se marier est soumis aux lois nationales qui en régissent l’exercice : Khan c Royaume-Uni (décision) n° 11579/85 du 07/07//1986. Bien que certaines pratiques administratives en matière de rétention administrative (en matière de police des étrangers) ne soient pas nécessairement constatées de manière « traditionnelle », il peut être intéressant, au regard de l’actualité, d’examiner la position de la Cour en ce domaine. En présence d’un enfant de 5 ans retenu seul, séparé de ses parents, dans des conditions identiques à celle d’un adulte pendant 2 mois et alors qu’aucune 73 personne ne s’en occupait particulièrement, une violation de l’article 3 doit être constatée en raison du manque d’humanité atteignant le seuil requis pour être qualifié de traitement inhumain : Mubilanzila Mayeka c Belgique n° 13178/03 du 12/10/2006. Dans le même sens, la Cour rappelle que les Etats sont tenus, au titre de leurs obligations positives, d’une obligation de protection des enfants et d’adopter des mesures adéquates. Le fait de retenir, pendant plus d’un mois, dans un centre fermé, dont l’infrastructure était inadaptée à leur accueil, des enfants dont l’état de santé était au surplus préoccupant, est de nature à provoquer des dommages psychiques, y compris lorsque les enfants ne sont pas séparés de leurs parents. En conséquence, une violation de l’article 3 est observée en ce qui concerne les enfants ; toutefois, la même conclusion ne peut être tirée s’agissant de la mère qui n’était pas séparée de ses enfants (dont la présence a pu atténuer quelque peu le sentiment d’angoisse et de frustration causé par cet enfermement). Il peut être observé que la Cour intègre dans sa réflexion, la teneur des termes de la Convention des droits de l’enfant du 20/11/1989) : Muskhadzhiyeva c Belgique n° 41442/07 du 19/01/2010. L’éducation dispensée aux enfants, lorsqu’elle est contraire à l’intérêt de l’enfant ou aux convictions profondes des parents, peut être regardée comme étant à l’origine d’un traitement préjudiciable. En matière d’éducation d’enfants roms, deux affaires retiennent l’attention. Dans la 1ère, DH c République tchèque n° 57325/00 du 13/11/2007, les requérants faisaient état de ce qu’en raison du placement de leurs enfants dans des classes pour déficients intellectuels, ils étaient victimes, sans justification objective et raisonnable, d’un traitement moins favorable que celui réservé aux enfants nonroms. Même si en l’occurrence, le système d’école spéciale répondait à la volonté de trouver une solution pour les enfants ayant des besoins éducatifs spécifiques, la législation a eu des effets préjudiciables disproportionnés sur la communauté rom. Compte tenu de ce que les éléments fournis sont suffisamment fiables et révélateurs pour faire naitre une présomption de discrimination indirecte, il incombe alors au gouvernement défendeur de prouver que cette différence d’effet de la législation est le résultat de facteurs objectifs non liés à l’origine ethnique. Tel n’ayant pas été le cas, faute de justification du placement systématique d’enfants roms dans de telles classes, la Cour en déduit qu’une violation de l’article 2 du protocole n° 1 relatif au droit à l’éducation et de l’article 14 qui prohibe toute discrimination a été commise. Dans la 2d affaire, les enfants roms étaient affectés dans des classes qui leur étaient réservées comportant un enseignement réduit. Or, s’agissant d’une minorité défavorisée et vulnérable, celle-ci a besoin d’une protection spéciale. Par ailleurs, une différence de traitement n’est possible que si elle est justifiée et raisonnable; 74 ainsi, le placement temporaire dans une classe spéciale en raison de l’insuffisante connaissance de la langue n’est pas automatiquement contraire à l’article 14. En l’espèce, il est constaté que la mesure touchant tous les membres d’un groupe ethnique spécifique, des garanties doivent être apportées, surtout lorsque les parents ne sont pas en mesure d’évaluer toutes les conséquences de leur accord à un tel placement. Dans cette affaire, dès lors que l’Etat n’apporte pas de justification quant à une prise en charge suffisante des besoins particuliers de ces enfants, la Cour en déduit que les articles 2 du protocole n° 1 et 14 ont été méconnus : Orsus c Croatie n° 15766/03 du 16/03/2010. Une attention particulière doit être portée par les autorités s’agissant des convictions religieuses, au nombre de celles qui sont les plus intimes, et qui revêtent dans une société un caractère traditionnel. L’interdiction du port du foulard islamique à l’université, prévisible dans le contexte particulier de l’espèce, poursuivait un but légitime à savoir le respect des droits et libertés d’autrui et le maintien de l’ordre public afin de préserver le caractère laïc des établissements. De ce fait, aucune violation de l’article 9 (liberté religieuse) conjugué à l’article 2 du protocole n° 1 ne peut être constatée : Leyla Sahin c Turquie n° 44774/98 du 10/11/2005. S’agissant de l’exposition de symboles religieux dans des salles de classe, la Cour a estimé que, compte tenu de ce que l’esprit des enfants manque de la capacité de se distancier du message découlant d’un choix préférentiel de l’Etat en matière religieuse, ce dernier a l’obligation de s’abstenir d’imposer, même indirectement, des croyances dans des lieux où les personnes sont dépendantes ou sont vulnérables. En conséquence, l’exposition obligatoire de symboles religieux est contraire au principe de laïcité, dans la mesure où elle peut heurter les consciences et l’éducation que les parents veulent donner : Lautsi c Italie n° 30814/06 du 03/11/20098. Quand un enseignement religieux est dispensé, il doit répondre à des critères d’objectivité et de pluralisme; l’élève ne doit pas se trouver face à des conflits entre l’éducation donnée à l’école et les convictions des parents. Lorsque ces derniers doivent déclarer adhérer à une religion donnée, leur liberté de conviction ne peut être regardée comme respectée, de sorte qu’une violation de l’article 2 du protocole n° 1 existe : Hasan Zengin c Turquie n° 1448/04 du 09/10/2007. Dans la même optique, les parents ou les élèves ne doivent pas être contraints de révéler leurs convictions religieuses ou philosophiques. Le fait pour des parents de devoir demander une dispense d’enseignement religieux les expose à dévoiler leurs convictions. De plus, il était en l’espèce noté un manquement de l’Etat à une 8 L’affaire a fait l’objet d’un renvoi en Grande chambre, l’audience y afférente a eu lieu le 30 juin 2010 et l’arrêt sera rendu ultérieurement 75 diffusion objective, critique et pluraliste des informations et connaissances figurant au programme : Folgero c Norvège n° 15472/02 du 29/06/2007 (violation de l’article 2 du protocole n° 1). Dès lors qu’un enfant n’a pu suivre un cours d’éthique, au lieu d’un cours de religion, du fait de l’insuffisance du nombre d’élèves, l’absence de notes en cette matière révèle ses convictions. Bien qu’il ne puisse être observé de violation du droit à l’instruction en raison de l’absence d’obligation pour les Etats d’organiser de tels cours, une discrimination dans la jouissance des libertés de pensée, de religion et de conscience doit être constatée. En effet, l’article 9 de la Convention doit être lu comme protégeant non seulement les croyances religieuses mais également les convictions des athées ou des agnostiques et l’Etat a un rôle d’organisateur neutre et impartial dans l’exercice des religions. Une forme de discrimination et de stigmatisation injustifiée des élèves non croyants emporte violation des articles 9 et 14 : Grzelak c Pologne n° 7710/02 du 15/06/2010. II- LES ELEMENTS INDIFFERENTS Dans l’appréciation que la Cour porte sur les circonstances de l’espèce afin d’apprécier si un traitement préjudiciable doit, ou non, être constaté, certains éléments présentent un caractère indifférent. Il en est tout d’abord du sentiment de l’opinion publique quant au bien-fondé de la mesure, son efficacité (à les supposer d’ailleurs fondés) ou le fait que le manquement soit involontaire. Ceci est illustré dans différentes affaires. Ainsi dans l’affaire Opuz (n°33401/02 du 09/06/2009), la Cour affirme que le manquement, même involontaire, des Etats à leur obligation de protéger les femmes contre la violence domestique s’analyse en une violation du droit de celles-ci à une égale protection de la loi. De ce constat de discrimination, découle celui de la méconnaissance des articles 2, 3 et 14. De même, pour la Cour, une peine ne perd pas son caractère dégradant du fait qu’elle passe aux yeux de l’opinion pour constituer un moyen efficace de dissuasion. Le recours à des peines contraires à l’article 3 n’est pas admissible quel que soit le caractère dissuasif; peu importe que la fustigation soit le substitut d’une détention : Tyrer c RU du 25/04/1978. La même conclusion doit être tirée s’agissant du fait qu’une peine ait été atténuée (en l’espèce, un seul coup de fouet devait être donné au lieu des 100 coups initialement prévus… mais avec un martinet comportant 100 lanières !). Ladite peine n’avait pas pour autant un caractère symbolique ni ne perdait son caractère inhumain. La victime reste traitée publiquement en objet aux mains de la puissance publique : DH c Turquie du 22/06/2006. 76 Similairement, la prohibition de la torture et des mauvais traitements revêt un caractère absolu, quels que soient les agissements de la personne concernée, même indésirable et dangereuse. Ainsi, en présence d’une personne condamnée à une peine d’emprisonnement pour implication dans des actes de terrorisme, peine assortie d’une interdiction du territoire, qui serait exposée à des risques très sérieux en cas de retour dans son pays d’origine, l’éloignement de l’intéressé emporterait violation de l’article 3 si une telle mesure était mise à exécution : Daoudi c France n° 19576/08 du 03/12/20099. L’affaire Gafgen c Allemagne n° 22978/05 du 01/06/2010 est également pertinente à cet égard. En effet, un fonctionnaire de police, sur instructions de sa hiérarchie, avait menacé le requérant de souffrances intolérables afin de l’amener à révéler où se trouvait l’enfant qui avait été enlevé. La Cour observe que si les agents de police ont certes agi dans le souci de sauver la vie d’un enfant, l’interdiction des mauvais traitements vaut indépendamment des agissements de la victime ou de la motivation des autorités de sorte qu’aucune exception, même en cas de danger menaçant la vie d’un individu, ne peut être tolérée. Les menaces immédiates de mauvais traitements délibérés et imminents afin d’extorquer des informations, ayant du engendrer chez le requérant une peur et des souffrances mentales considérables, elles sont suffisamment graves pour être qualifiées de traitement inhumain tombant sous le coup de l’article 3. III- LA CONCILIATION DE DIFFERENTS DROITS Les droits et libertés dont la violation est invoquée par les requérants doivent être conciliés avec les autres dispositions de la Convention. A titre d’illustration, il est possible de mentionner la décision d’irrecevabilité rendue par la Cour le 13 mai 1982 (décision n° 8811/79), Sept personnes contre Suède. Les membres d’un mouvement religieux, partisans de châtiments corporels, se plaignaient de ce que la législation en vigueur, de par la pénalisation de tels faits, restreignait leurs droits. Toutefois, ces mesures visant à lutter contre la violence et à protéger les personnes faibles et vulnérables dans la société, il ne saurait être considéré que les requérants auraient subi une atteinte à leur droit de mener une vie privée et familiale, à leur droit à la liberté religieuse ou à leur droit de donner l’éducation qu’ils souhaitent à leurs enfants. La même solution est 9 En application de l'article 39 du règlement de la Cour, cette dernière, dans l'intérêt des parties et du bon déroulement de la procédure, peut indiquer aux parties les mesures provisoires méritant d’être adoptées. La Cour a ici préconisé qu’il convenait de ne pas expulser le requérant vers l'Algérie pendant la durée de la procédure devant la Cour. La procédure de l’article 39 permet notamment de recommander de donner un caractère suspensif à l’exécution d’une mesure prise par une autorité nationale. 77 donnée dans l’affaire Opuz c Turquie du 09/09/2009 (précitée) : l’obligation pour l’Etat de légiférer afin de protéger les personnes ne peut être regardée comme une violation du droit à la vie privée et familiale. Une affaire d’enlèvement international d’enfants (Neulinger et Schuruk c Suisse n° 41615/07 du 06/07/2010) a donné lieu à un processus juridictionnel long et complexe. Mais, en tout état de cause, dans la recherche du juste équilibre entre les intérêts en jeu (intérêt de l’enfant, de chacun des parents, de l’ordre public), l’intérêt supérieur de l’enfant est primordial10. IV- LES OBLIGATIONS ETATIQUES Afin d’éviter la survenue de traitements emportant des effets préjudiciables pour les personnes, l’Etat doit mettre en œuvre un certain nombre d’obligations positives. Il doit tout d’abord instaurer une législation permettant de protéger efficacement les personnes les plus vulnérables tout en respectant les convictions des personnes. L’obligation de protection est une obligation de moyens et non de résultat. Cette obligation est rappelée dans divers litiges. Ainsi, dans l’affaire Campbell et Cosans c RU n° 13590/88 25/02/1982, la requérante demandait à avoir l’assurance que son fils, au primaire, ne recevrait pas de châtiment corporel. La Cour a affirmé, à cette occasion, que l’Etat doit respecter le droit des parents d’assurer l’éducation conforme à leurs convictions religieuses et philosophiques; la notion de conviction s’entendant de toute conviction non incompatible avec la dignité de la personne et n’allant pas à l’encontre du droit de l’enfant à l’instruction. Dans l’affaire Opuz précitée, la Cour a rappelé que l’Etat doit, non seulement, s’abstenir de provoquer la mort de manière volontaire mais également, prendre les mesures nécessaires à la protection de la vie des personnes. Il doit mettre en place une législation dissuadant de commettre des atteintes contre les personnes. En l’espèce, un manque de diligence de l’Etat pour protéger la vie de la mère compte tenu du caractère violent, qui était connu, de l’auteur des faits, de l’existence d’antécédents et de l’absence d’enquête effective sur un meurtre intentionnel doit être constaté. Dans l’affaire Siliadin c France du 26/07/2005, la législation pénale applicable n’ayant pas assuré une protection concrète et effective contre les actes dont la requérante a été victime, les stipulations conventionnelles ont été méconnues. 10 Dans cette affaire, bien que la mère ait illégalement quitté le territoire israélien, sans l’accord du père, compte tenu, notamment, du comportement de ce dernier, un retour en Israël porterait une atteinte disproportionnée au droit à la vie privée et familiale de l’enfant, ce qui permet à la Cour de constater une violation de l’article 8. 78 En second lieu, l’Etat doit s’abstenir de commettre tout acte qui exposerait la personne à un traitement qui lui est préjudiciable. Il ne doit pas, par exemple, expulser une personne qui risquerait la mort, la torture…, imposer des croyances dans des lieux où se trouvent des personnes vulnérables… En 3e lieu, l’Etat doit prévoir des mécanismes de recours efficaces en cas d’allégations de violation d’un droit reconnu par la Convention (article 13) et à ce titre, il doit mener des enquêtes effectives et approfondie en cas d’allégations d’atteintes aux droits fondamentaux à la vie, de torture et de mauvais traitements. Les exemples jurisprudentiels sont nombreux (Aksoy c Turquie n° 21987/93 du 18/12/1996; Kaya c Turquie n° 22791/93 du 19/02/1998 ou Falcoianu c Roumanie, n° 32943/96 du 09/07/2002). Lorsque la violation concerne les articles 2 et 3, une indemnisation du dommage moral découlant de la violation doit en principe être possible et faire partie du régime de réparation mis en place à peine de méconnaitre l’article 13 relatif au droit au recours (Keenan c RU n° 27229/95 du 03/04/2001 ; Paul et Audrey Edwards c RU n° 46477/99 du 14/03/2002 ou Bubbins c RU n° 50196/99 du 17/03/2005). Deux observations peuvent être faites en guise de conclusion : Tout d’abord, il convient d’insister sur le fait que l’essence même de la Convention est le respect de la dignité et de la liberté humaine. En conséquence, toute personne dispose du droit de ne pas subir de pratiques préjudiciables, quel que soit le fondement juridique adéquat et de faire réparer le préjudice subi en cas de mauvais traitements. Depuis son origine, la Convention et la Cour européenne protègent, non pas des droits théoriques, mais des droits concrets et effectifs. L’observation de la jurisprudence de la juridiction permet de constater qu’elle s’adapte de manière continuelle, tant en ce qui concerne le fond du droit que la procédure, afin de permettre une mise en œuvre effective des droits garantis, indépendamment d’un environnement devenant plus complexe et plus mouvant. Il s’agit là, bien évidemment, d’une grande richesse. Il apparait pertinent d’observer que la complémentarité des divers modes d’action permettant la sauvegarde et le développement des droits humains est de plus en plus patente. Pour ne citer que le Conseil de l’Europe, diverses institutions œuvrent contre les pratiques préjudiciables. Tel est le cas du Commissaire aux droits de l’homme11, de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe12, du 11 12 Chargé de la promotion des droits de l’homme et de leur respect L’Assemblée formule des recommandations et définit des politiques en vue de renforcer le caractère effectif des droits de l’homme. A titre d’illustration, l’actualité récente autorise à citer la recommandation du 05/10/2010 sur les sévices infligés aux enfants placés en établissement. Il a été rappelé que les Etats doivent prendre des actions plus fermes afin de renforcer la législation contre les abus sur les enfants; ils doivent garantir une protection législative en prévoyant des poursuites d’office pour les maltraitances commises sur les enfants avec des règles de contrôle externe des différentes institutions. 79 Comité pour la prévention de la torture13, de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance14. La conclusion de conventions, ayant valeur de traités internationaux, contribue à renforcer le cadre juridique protecteur des droits de l’homme. La Convention sur les droits de l’enfant, rédigée sous l’égide des Nations-Unies est bien connue des participants à ce séminaire. L’exhaustivité n’est pas possible mais l’on peut également évoquer la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales15 qui a pour but de permettre aux minorités d’accéder aux médias, à l’éducation, recherche d’absence de discrimination avec un mécanisme de suivi, la Convention pour la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels du 25/10/200716, qui tend à la prévention de la traite et la poursuite des délinquants… D’une manière générale, il peut être observé que les arrêts de la Cour se réfèrent, de manière beaucoup plus systématique que par le passé, aux informations qui peuvent lui être fournies par les ONG, les associations… Une meilleure connaissance des situations rencontrées dans les Etats, membres ou non du Conseil de l’Europe, contribue indubitablement, alors que le droit est étroitement dépendant du fait, à une analyse plus fine du contexte dans lequel se situe le litige dont la Cour a à connaitre et, par suite, peut-on l’espérer, à une meilleure acceptabilité des décisions juridictionnelles. 13 14 15 16 Son action s’exerce essentiellement dans lieux de détention. Après visite, un rapport est envoyé à l’Etat concerné avec les constations et recommandations, réponses de l’Etat aux questions posées. Elle étudie les informations qui lui sont fournies en la matière et effectue des visites sur place. Un dialogue est mené avec autorités, autorisant subséquemment une analyse de la situation du pays et la formulation de recommandations. Des relations avec la société civile sont développées. Entrée en vigueur en 1998 et associant actuellement 39 Etats membres Entrée en vigueur le 01/02/2008 80 DEUXIÈME PARTIE PERSPECTIVES ACTUELLES SUR LES PRATIQUES TRADITONNELLES PRÉJUDICIABLES 81 DU ROLE DES EXCISEUSES OU MATRONES AFRICAINES DANS LES MUTILATIONS SEXUELLES FEMININES : LE CAS DU SENEGAL PIERRETTE HERZBERGER-FOFANA Dr, Chargée de cours et chercheur, Université d’Erlangen-Nuremberg, Allemagne Résumé L’auteur jette un éclairage critique sur les raisons sociales des pratiques préjudiciables et nuisibles à l’épanouissement de l’enfant, en Afrique Subsaharienne et plus particulièrement au Sénégal. S’agissant des MGF, la fonction sociale des tradipraticiennes ainsi que leur rôle dans le développement ou l’éradication de l’excision sont rappelés. Qu’en est-il de la perception de leur statut, alors que l’échelle des valeurs les concernant s’effondre dans la plupart des sociétés qui pratiquent l’excision ? Comment peut-on les intégrer dans le système sanitaire, tout en tenant compte de leurs compétences de sages-femmes ou autres conseillères conjugales ? L’approche en la matière de l’ONG Tostan, ou encore celle du Comité Inter-Africain est relevée, mais aussi les stratégies des matrones pour contourner l’abandon des mutilations. La reconversion des matrones en agents communautaires de santé peut faire d’elles des alliées de premier plan dans la lutte contre les MGF. Zusammenfassung Die Autorin beleuchtet kritisch die sozialen Gründe, die in den afrikanischen Ländern südlich der Sahara und insbesondere in Senegal hinter den schädlichen Praktiken stehen und der Persönlichkeitsentfaltung von Kindern schaden. Die soziale Funktion traditioneller Heilerinnen bei der WGV wird in Erinnerung gerufen sowie ihre Rolle bei der Weiterentwicklung oder der Überwindung von Beschneidung. Wie wird der Status dieser Heilerinnen wahrgenommen, während sie doch im Wertesystem der meisten Gesellschaften, die Beschneidung praktizieren, an Wichtigkeit verlieren? Wie können sie ins Gesundheitssystem integriert und gleichzeitig ihren Fähigkeiten als Geburtshelfer oder als Eheberater Rechnung getragen werden? So klar die Positionen der NGO Tostan oder auch des Inter-Afrikanischen Komitees gegenüber diesem Thema sind, so eindeutig sind 82 jedoch auch die Strategien der Matronen, um die Abschaffung von Verstümmelung zu umgehen. Die Umschulung von Matronen in Gesundheitsakteure auf Gemeindeebene kann aus ihnen Verbündete für die Bekämpfung von WGV machen. Resumen El autor analiza de manera crítica las razones sociales de las prácticas perjudiciales y dañinas a la expansión del niño, en África Subsahariana y más particularmente en Senegal. Tratándose de las MGF, la Sra. Herzberger-Fofana recuerda la función social de las tradipracticianas así como su papel en el desarrollo o la erradicación de la excisión. ¿Y que de la percepción de sus estatutos, mientras que la escala de valores que las concerniere se hunde en la mayoría de las sociedades que practican la excisión? ¿Cómo se puede integrarlas en el sistema sanitario, teniendo en cuenta sus competencias de comadronas u otras consejeras conyugales? La manera de la ONG Tostan de tratar el asunto, o también la del Comité Inter Africano son destacadas, pero también las estrategias de las matronas para contornar el abandono de las mutilaciones. La reconversión de las matronas en agentes comunitarios de salud puede hacer de ellas aliadas de primer plan en la lucha contra las MGF. Summary The role of African excisors and matrons in female genital mutilation. The case of Senegal. The author sheds critical light on the social grounds of practices harmful and contrary to the development of children, in sub-Saharan Africa and more precisely Senegal. With regard to FGM, the social function of traditional healers and their role in the expansion or curbing of FGM are pointed out. How is their statute perceived, in a time when the values they embody are disintegrating in most communities practicing FGM? How can they be involved in the health system, taking into account their experience as midwifes and sex-counselors? The vision and approach of NGO Tostan and of the Inter-African Committee are outlined, along with the matrons’ strategies to dodge abandonment of the mutilations. The reconversion of matrons into health community agents can turn them into frontline allies in the fight against FGM. * * * 83 « Il y a des pratiques que nos ancêtres eux-mêmes s’ils revenaient à la vie trouveraient caduques et dépassées » (Amadou Hampaté Bâ) Cette citation du Sage de l’Afrique nous incite à analyser dans la présente communication, les mutilations génitales féminines. Nous nous appuyons sur les discours qui sous-tendent cette problématique par les diverses parties prenantes sur la question afin de dégager les tenants et aboutissants d’une telle pratique. Nous tenterons de jeter un éclairage critique sur les pratiques préjudiciables aux enfants et néfastes à leur santé. Parmi les pratiques que l’on peut considérer comme obsolètes nous mettrons l’accent sur les mutilations génitales féminines et autres formes de violence faites aux jeunes filles comme le repassage des seins. On peut se poser la question, qui sont les acteurs de ces pratiques préjudiciables et nuisibles à l’épanouissement d’un enfant. Quels rôles jouent les matrones dans le développement des mutilations génitales féminines ? Comment sont-elles perçues aujourd’hui alors que l’échelle des valeurs les concernant s’effondre dans la plupart des sociétés qui pratiquent l’excision ? Comment peut-on les intégrer dans le système sanitaire tout en tenant compte de leurs compétences ? Comment peuton parvenir à les inclure dans le système d’éradication de ce fléau qui n’a plus aujourd’hui sa raison d’être. En un mot comment abolir de telles tares tout en tenant compte des sensibilités de ceux qui y demeurent attachés ? Notre communication inscrit l’excision dans un cadre social global qui s’étend au-delà des seules frontières de l’Afrique, car l’émigration de fortes minorités en Occident insère aujourd’hui cette coutume dans le processus de globalisation. Cette opération qui a lieu en Afrique, en Europe et en Amérique interpelle tout un chacun à s’interroger sur la valeur d’une telle pratique. Nous aborderons trois points essentiels à savoir. Nous analyserons le programme d’éradication du « Comité Inter-Africain » et de « Tostan » et la reconversion des matrones. Telles sont les réflexions qui sous-tendent notre réflexion. INTRODUCTION Depuis des décennies des voix de femmes Africaines s’élèvent pour dénoncer une pratique qui durant des siècles régularisait la vie sociale de nombreuses ethnies du continent. Cette coutume réconfortait les jeunes filles et leurs parents dans leur mode de pensée. Ce rite séculaire répondait également à une demande sociale qui était régie par les matrones. Elles sont donc les agents incontournables en rapport avec cette tradition et son éradication. En effet, tant qu’elles auront l’occasion d’exercer leur métier considéré comme honorable, il y aura des filles qui seront excisées. Il convient donc de contribuer non seulement à un changement de valeurs 84 et de comportement culturel mais aussi de créer un cadre propice qui faciliterait leur insertion dans le monde du travail en tenant compte de leur savoir-faire1. Qui sont les matrones ? Comment peut-on renforcer leurs capacités afin qu’elles soient informées sur les complications médicales liées à l’excision pour qu’elles puissent devenir des agents de santé efficaces auprès des communautés villageoises dont elles ont la garde. Les mutilations tendent partout à diminuer en milieu urbain depuis que les pays africains mènent à grande échelle des campagnes de sensibilisation. Cependant ce rituel perdure encore dans les zones rurales et dans les grandes banlieues des capitales africaines. Ces opérations sont pratiquées par une femme du village, une matrone ou tradipraticienne, comme le mentionnent les biographies des auteures ci-dessous2. METHODOLOGIE La principale technique de recueils de données utilisée a été l’enquête par interview; revue de presse, médias. Nous avions contacté des activistes qui travaillent sur le terrain, des sages-femmes, des médecins, des hommes et femmes de lettres et les personnes concernées pour la publication de mon ouvrage « Littérature Féminine d’Afrique noire » dans lequel nous avons consacré tout un chapitre, avec des interviews de romancières qui ont traité cette problématique. En tant que chercheur spécialiste en genre, nous avons effectué des enquêtes sur le terrain. Nous avons rencontré de nombreux jeunes gens qui étaient plutôt prêts à épouser des jeunes filles d’une autre ethnie même si elle n’est pas excisée, qu’une fille de leur propre ethnie non excisée. Les préjugés sont tenaces, et la lutte demande donc beaucoup de doigté mais aussi des arguments tangibles. PROBLEMATIQUE GENERALE 1 2 Pierrette Herzberger-Fofana,. « Abandon des Mutilations Génitales Féminines : Le Comité Interafricain en Egypte ». In: www.alpha-2.info, www.afrology rubrique récente nov. 2008 Waris Dirie, « Fleur du désert : Du désert de Somalie à l'univers des top-modèles ». L’extraordinaire combat d’une femme hors du commun. Paris : Albin Michel 1998 Abdi Nura, „Tränen im Sand“ Autobiographie. Munich: Ehrenwirth 2003 Khady, « Mutilée ». Autobiographie. Paris : Oh ! Editions 2006 Fadumo Korn, „Geboren im großen Regen“. Berlin : Rowohlt 2004 Katoucha, « Dans ma chair ». Paris: Michel Lafon 2007 Mariama Barry, « La petite Peule ». Paris : Mazarine 2000 85 Selon l’UNICEF 60% des excisions sont effectuées par des exciseuses. Matrones, exciseuses, tradipraticiennes, ces 3 termes sont employés comme synonymes en ce qui concerne les Mutilations Génitales Féminines (M.G.F.) Moins de 30% des femmes ont subi la procédure sous contrôle médical ou ont reçu des soins médicaux. Au Soudan, les sages-femmes qualifiées effectuent deux fois plus d’opérations de type intermédiaire entre clitoridectomie et infibulation que les matrones. Selon Hanny Lightfoot-Klein les sages-femmes à Khartoum s’assurent ainsi un surplus de salaire en excisant les jeunes filles dans les hôpitaux de la capitale. La médicalisation des mutilations a été condamnée par l’UNICEF qui pense que la pratique aurait tendance à se perpétuer et à empêcher le développement de solutions en vue de son abandon pur et simple. Paradoxalement, l’arrêt des excisions sous contrôle médical a eu pour but le recours aux matrones ou exciseuses traditionnelles qui opèrent le plus souvent dans la clandestinité comme au Sénégal. Or, les matrones répondent au principe de l’offre et de la demande; les convaincre d’abandonner leur métier est pour le moins, la tâche la plus ardue pour parvenir à l’abolition de ce phénomène que sont les mutilations sexuelles. Ce travail de base est indispensable pour atteindre les objectifs souhaités, et lutter contre les clichés qu’elles propagent à savoir par exemple que l’excision faciliterait les accouchements et favoriserait la naissance des garçons si précieux. Car, même si tout le monde sait, y compris celles qui pratiquent l’excision, que le genre du sexe ne dépend pas de l’excision, cette légende demeure vivace dans les mentalités. C’est un mythe qui est savamment entretenu au point que cela devienne un accord tacite entre excisées et exciseuses qui font semblant d’y adhérer. Il faut donc s’atteler à combattre ces mythes par la persuasion et avancer des arguments valables afin que le doute ne persiste pas chez toutes celles qui sont prêtes à renoncer si elles sont convaincues du bien-fondé. Cette éducation sexuelle requiert le recours aux matrones qui travaillent en étroite collaboration avec les populations et jouissent de leur confiance L’EXCISION : ESSAI DE DEFINITION Que signifie l’excision, mutilation sexuelle féminine (MSF) ou mutilation génitale féminine (MGF) selon la terminologie retenue par l’UNICEF ? L’excision, est un terme qui décrit un éventail de pratiques comprenant l’ablation partielle ou totale des organes génitaux. L’excision aussi appelée clitoridectomie consiste en l’ablation du clitoris, y compris souvent les petites lèvres et parfois toute la partie 86 externe de l’organe génital féminin à l’exception des grandes lèvres3. C’est la forme la plus répandue en Afrique de l’ouest. Ce terme désigne aussi le fait de coudre les organes génitaux féminins pour des raisons culturelles ou autres raisons non thérapeutiques. Cette opération est surtout pratiquée dans les pays de la corne de l’Afrique: l’Ethiopie, la Somalie, Djibouti, l’Erythrée mais aussi au Soudan, et en Afrique de l’ouest par certains groupes ethniques au Mali et en Guinée. Cette forme de mutilation sexuelle est également connue sous le nom d’infibulation pharaonique. Les Mutilations Génitales Féminines (MGF) signifient donc toutes les procédures ou blessures qui modifient une partie ou la totalité des organes génitaux féminines pour des raisons culturelles ou autre sans raison thérapeutiques. Malgré le recul notoire de cette pratique on estime que la clitoridectomie est pratiquée dans 28 pays du monde et toucherait encore environ 100 millions de femmes. Chaque année environ un million de filles subiraient une excision. Ces chiffres sont certes aléatoires, mais au-delà de l’arithmétique, le problème de l’excision et des matrones qui l’effectuent demeurent entier. DONNEES GENERALES SUR L’EXCISION Waris Dirie dans son ouvrage « Schmerzenkinder » estime que 500’000 filles seraient menacées d’excision dans l’Union européenne4. Les estimations les plus pessimistes s’accordent à reconnaître qu’environ en tout un million de femmes seraient excisées ou pourraient le devenir si des mesures idoines ne sont pas prises. Or, en Europe les excisions sont pratiquement toutes effectuées par des matrones qui exercent au sein des communautés. Certaines vivent dans les pays européens et leurs adresses se transmettent de bouche à oreille. A Paris, il existait tout un réseau de matrones qui œuvraient dans le 18e arrondissement et dans les banlieues de Seine Saint-Denis5. D’autres matrones sont « importées » pour les besoins de la cause, elles viennent de la corne de l’Afrique, du Yémen ou des pays de l’Afrique de l’ouest. On les recrutait surtout au Mali et au Sénégal. Dans tous les cas, elles ne possèdent que peu ou pas de formation médicale ou chirurgicale, de connaissances de l’anatomie ou de médicaments appropriés pour traiter les infections. 3 4 5 Rapport Fran Hosken & Michel Ehrlich, « La femme blessée : essai sur les mutilations sexuelles féminines. » Paris: Harmattan, 1986. p. 22 Waris Dirie, « Schmerzenskinder ». Berlin: Ullstein 2006 GAM: Excision et santé publique-Etude médicale, 45-60 in: « Les Mutilations du sexe des femmes aujourd’hui en France. » Paris 1984. Gilette-Frenoy, Isabelle : « L’excision et sa présence en France » Paris 1992 p.46 87 LES RAISONS SOCIALES DES PRATIQUES MUTILATIONS SEXUELLES AU SENEGAL DE Dans la plupart des sociétés qui pratiquent l’excision, de nombreuses personnes sont convaincues que seul le passage à ce rite permet de marier une jeune fille, elle est dès lors une femme accomplie. Sa chasteté ayant été préservée, il n’est plus à craindre que la présumée hypersexualité de la femme engendre des débordements qui risqueraient de perturber l’ordre social. Les groupes ethniques qui pratiquent l’excision sont persuadés que les filles non excisées ne sont pas en mesure de contrôler leur sexualité et auraient tendance à s’adonner au libertinage. Ce tissu de croyances incite donc les communautés à rester fidèle à une tradition obsolète par peur de répressions qui pourraient aller jusqu’à l’exclusion du groupe. Or, les communautés villageoises se caractérisent par leur mode de vie en tranches d’âge et de sexe. Selon les ethnies, la mutilation s’effectue sur une fourchette d’âge qui va de quelques jours après la naissance à sept ans dans les pays arabes comme l’Egypte et le Soudan jusqu’à l’adolescence en Afrique de l’ouest. Cette pratique tend à se développer au Sénégal depuis la promulgation de la loi en 1999 selon le quotidien Wal Fadjri du 7 août 20076. Pourtant, il nous semble que l’on ne puisse pas comparer l’excision à un acte de torture comme l’a affirmé Hilary Clinton lors de la conférence Mondiale des Femmes de Beijing en 1995. En effet, les mères des filles qui font exciser leurs filles ne sont mues que par le souci de préserver leur virginité et leur trouver un bon mari. Aujourd’hui, l’argument qui est le plus mis en avant, c’est celui d’éviter les grossesses précoces hors mariages. Les mères ne veulent pas blesser, punir ou faire souffrir leur progéniture. Il ne s’agit pas d’un acte de cruauté ou de sadisme pur à l’encontre des filles. D’ailleurs jusqu’à tout récemment, la plupart d’entre elles étaient convaincues que toutes les femmes subissaient le même sort. Ainsi Nura Abdi, Somalienne, réfugiée en Allemagne, note son étonnement dans son autobiographie lorsqu’elle apprend que des Africaines, originaires du même continent que le sien ignoraient totalement cette pratique: « Personne ne voulait croire que l’excision existe. On m’a injuriée « Non » les femmes Africaines originaires de l’Afrique de l’Ouest étaient offusquées et s’écriaient « Une telle ineptie n’existe nulle part en Afrique! » (Nura Abdi 2003/p.288) 6 « Loi sur les Mutilations Génitales Féminines ». Article 299 du Code Pénal. Dakar janvier 1999 88 LEGISLATION AUTOUR DE L’EXCISION. DU ROLE DES ETATS Actuellement 17 états africains interdisent l’excision. Cette interdiction a en pratique peu de conséquences, car la plupart des matrones ne sont pas condamnées à l’exception du Burkina-Faso et récemment au Sénégal à Matam7. C’est le cas du Soudan où une loi datant de 1946 interdit de mutiler délibérément les organes génitaux externes de la femme. Cette loi n’a jamais été appliquée et de nos jours encore, le Soudan compte parmi les pays qui possèdent un taux élevé de femmes non seulement excisées mais aussi infibulées. Or toutes ces opérations sont l’œuvre de matrones comme le décrivent Annie de Villeneuve dan son essai scientifique ou Mariama Barry dans son autobiographie. Au cours de la conférence du Caire8, les participantes du CI-AF9 ont mis l’accent sur ce qu’elles ont appelé « l’inapplicabilité » de la loi. En effet, des comportements culturels freinent la mise en œuvre. Madame le Dr. Barry, gynécologue de son état a relaté un cas intéressant. Un père de famille avait porté plainte contre sa belle-mère qui avait fait exciser ses filles à son insu. Bien qu’il l’eût prévenue que si elle usait de son droit de grand-mère maternelle, il n’hésiterait pas à la traduire devant les tribunaux, il a dû se rétracter. Il a été harcelé de toutes parts par la famille et finalement par la police qui l’a enjoint à retirer sa plainte. Le pouvoir des matrones est non seulement très fort, mais le commun des mortels dans les zones rurales leur reconnaît une force mystique. Il faut donc éviter de causer leur colère qui entraînerait une malédiction sur toute la famille. Selon les participantes, la police, la gendarmerie, l’appareil judiciaire devraient faire respecter la loi et ne pas se laisser influencer par des habitudes rétrogrades. ROLE ET SENEGAL FONCTION SOCIALE DES MATRONES AU Le terme « matrone » vient du latin « matres », « la mère ». Dans la Rome antique, les matrones étaient considérées comme les divinités de la fertilité et de la 7 8 9 Sudonline: « A Malicounda, on excise toujours. » 7 Août 2007 www.sudonline.sn Oumar Seydou Bâ. « Matam- En attendant le délibéré du jugement d’une famille pour Excision ». In: www.lequotidien.sn 12.5.2009 - « L’exciseuse Awa Diop écope de six mois de prison » http://www.senmedical.com/index.php?option=com_content&task=view&id=1040&Itemid=38 Pierrette Herzberger-Fofana. « Abandon des Mutilations Génitales Féminines : Le Comité Interafricain en Egypte». In: www.afrology rubrique récente nov.2008 CI-AF : Comité Inter-Africain. Les Pratiques Traditionnelles 89 fécondité. Elles étaient l’objet de culte aussi bien chez les Celtes que chez les Romains et étaient représentées tenant des cornes d’abondance, des corbeilles de fruits ou de céréales; et le plus souvent en allaitant un enfant. En zones rurales de l’Afrique subsaharienne, les matrones font fonction de sages-femmes et tout ce qui a trait à la santé reproductive. Elles occupent une place privilégiée car, presque partout elles remplacent surtout les agents du corps sanitaire dans les régions reculées. Les populations font appel à leur savoir qu’elles ont acquis le plus souvent par expérience ou bien transmis de mère en fille. En effet, les institutions africaines ont pris depuis longtemps conscience de la gravité de ce fléau, et du rôle des matrones ou tradipracticiennes. En Afrique subsaharienne, elles excisent partout les fillettes et les jeunes filles, lors des cérémonies prévues à cet effet. En 1984, le Comité Inter Africain (CI-AF) a vu le jour afin d’enrayer les « traditions néfastes à la santé de la femme ». Dans son programme, il inclut un volet qui est consacré aux matrones et au rôle qui leur est dévolu dans la lutte contre les mutilations. Bien que le Comité Inter-Africain CI-AF sur les pratiques traditionnelles néfastes à la santé des femmes et des enfants, se mobilise dans les 28 pays d’Afrique concernés par les mutilations sexuelles féminines pour réprimer cette coutume qui cause encore de graves problèmes dans les populations féminines, cette tradition perdure de nos jours encore. Il est donc difficile de l’éradiquer sans impliquer les exciseuses ou matrones qui en sont les vecteurs principaux, d’autant plus que tout un arsenal de mythes s’est développé autour des mutilations. Une exciseuse ne possède pas toujours des connaissances en santé reproductrice. Elle n’est pas toujours en mesure d’effectuer un accouchement alors que les matrones sont en général des accoucheuses qui usent de la pharmacopée traditionnelle pour soigner des maladies opportunistes ou assister les parturientes lors d’un accouchement. L’expression « médecine traditionnelle » se rapporte aux pratiques, méthodes, savoirs et croyances en matière de santé qui impliquent l’usage à des fins médicales de plantes, de parties d’animaux et de minéraux, de thérapies spirituelles, de techniques et d’exercices manuels – séparément ou en association – pour soigner, diagnostiquer et prévenir les maladies ou préserver la santé10. En Afrique, jusqu’à 80% de la population a recours à la médecine traditionnelle à ce niveau. PRATIQUES DES MATRONES 10 Médecine traditionnelle en Afrique.www.seneweb.org 90 Dans les campagnes, le recours aux matrones est monnaie courante non seulement pour une excision mais également lors de la nuit de noces pour une défibulation. Ce secret de polichinelle fait partie intégrante des divers rites qui précèdent les préparatifs de mariage. En effet, dans la plupart des cas, l’époux n’est pas en mesure uniquement avec son pénis de déflorer sa femme et a recours au service d’une matrone. Cette dernière ouvre la cicatrice à l’aide d’un petit couteau et facilite ainsi la consommation du mariage. L’époux paie la matrone pour ce service et elle est censée garder le silence sur sa prestation. Il existe donc un accord tacite entre les matrones et les futurs époux afin qu’ils puissent consommer le mariage. La matrone donne des conseils judicieux aux nouveaux mariés. Elle leur recommande d’avoir des rapports sexuels continus afin d’éviter que la plaie ne se referme. Au-delà de son simple rôle d’exciseuse, elle exerce aussi celui de conseillère conjugale. Les matrones sont réputées pour leur savoir-faire et surtout elles jouissent de la confiance inébranlable de leurs patientes ce qui leur confère une certaine autorité. Forte de ce pouvoir, elles peuvent compter sur la complicité des populations qui ne remettent pas en cause leur rôle. Les matrones utilisent pour leur opération des couteaux spéciaux qui sont parés de mysticisme dans l’imaginaire populaire, car ces instruments ne servent que pour ces cérémonies. Parfois ce sont des lames de rasoir ou des tessons de verre qui sont flambés juste avant la cérémonie. Tous ces objets sont conservés jalousement par leurs propriétaires d’où tout ce mystère qui les entoure; d’autant plus qu’avant de les utiliser les matrones récitent des formules incantatoires qui auraient un effet salutaire sur les patientes et atténueraient la douleur11. Au préalable, elles invoquent les divinités qui ne sont connues que d’elles-mêmes, de leur venir en aide dans leur entreprise. Elles immolent des animaux un coq blanc ou rouge selon les régions afin d’obtenir la clémence de ces divinités et de réduire le cas d’accidents. Les matrones créent un climat psychique propice qui rassure les futures excisées. Dans son ouvrage « Douleur de femme »12, l’auteur décrit les préparatifs auxquels les matrones s’adonnent. Ces pratiques purement animistes s’accompagnent de chants conçus à cet effet que les fillettes entonnent avant de subir l’acte en soi. Il semblerait que cette pratique est courante en Afrique de l’ouest alors que dans la corne de l’Afrique, il n’est nulle part question de rites, de 11 12 Nous supposons qu’il s’agit de la sourate 19 sur Marie qui fait référence à l’enfantement. Aucune exciseuse n’a voulu dévoiler la sourate qu’elle récite. Dembele Salimata Kéita. « Douleur de Femme ». Pour une stratégie de communication en faveur de la lutte contre l’excision en Côte d’Ivoire Abidjan: Edilis 2001. 91 sacrifices ou de chants13 qui accompagnent les fillettes qui se rendent aux bois sacrés pour être excisées. Un reste d’animisme demeure vivace puisque ces divinités font partie de leur patrimoine culturel africain et n’ont rien à voir avec l’islam. Parfois, les matrones récitent des sourates coraniques qui sont utilisées dans d’autres pratiques de soins, par exemple au moment de l’accouchement. Or, les diverses campagnes de sensibilisation ont prouvé que les matrones ne sont pas infaillibles. Les techniques qu’elles utilisent sont souvent sources de maux terribles voire de décès comme l’a si bien illustré Sembène Ousmane dans son film « Moolaadé » (2004)14. L’une des fillettes meurt à la suite de l’intervention qu’elle a subie. Le travail de persuasion de la principale protagoniste aboutit à un rejet de cette coutume de la part des villageoises. On assiste ainsi à une scène très forte, lorsque l’une d’entre elles invite les exciseuses à jeter leurs couteaux sur le pagne posé au sol. Ce geste signifie en effet que les mères de familles ont démythifié le rôle que jouent ces couteaux. Objets de crainte et de respect, ils étaient entourés d’un halo de mystère qui renforçait la position des « salindas » ou exciseuses. On leur prêtait un pouvoir surnaturel. Or, en les jetant au sol, les matrones reconnaissent du coup leur impuissance. Elles acceptent certes contre leur gré, le verdict des villageoises qui refusent de faire exciser leurs filles. ROLE ET STATUT DES MATRONES AU SENEGAL Clitoridectomie et infibulation sont l’œuvre de matrones ou tradipraticiennes. Au Sénégal, au Mali et en Guinée, les matrones qui pratiquent l’excision appartiennent en général à la caste des forgerons. Elles jouissent d’un statut élevé et sont également très respectées. Si jadis, les matrones percevaient une obole symbolique sous forme de présents : pagnes, noix de colas etc. de nos jours, elles sont rémunérées. Ce pécule constitue un salaire non négligeable en cette période de crise qui frappe l’Afrique de plein fouet. Outre une somme d’argent qui tourne autour de 5’000 francs CFA par patiente soit environ 9€. Cette somme peut sembler modique mais elle représente le triple de sa valeur compte tenu du niveau de vie. Il est donc difficile que les matrones renoncent ainsi à exercer un métier qui leur a été transmis de mère en fille et dont elles tirent outre des avantages matériels une notoriété et la reconnaissance de la société. Ces privilèges leur confèrent une place spéciale au sein de leur communauté respective. 13 14 Adame Bâ Konaré « Quand l’ail se frotte à l’encens ». Paris : Présence Africaine 2006 Sembène Ousmane. « Moolaade ». Film primé au festival de Cannes 2004 92 LES MATRONES AU SENEGAL ET L’APPROCHE « TOSTAN » ET DU « CI-AF » Compte tenu du rôle que les matrones jouent dans le domaine de la santé reproductive et des liens étroits qui les unissent; il a fallu développer un programme qui allie leur savoir aux techniques modernes en matière de santé reproductive afin qu’elles puissent librement renoncer aux mutilations génitales féminines. L’organisation non gouvernementale « Tostan » en wolof, la langue la plus parlée signifie « l’éclosion » a développé dans les années 80 un programme d’éducation non formelle pour les masses rurales. Ce programme en langues maternelles des participantes est basée sur l’éducation, la santé et les droits humains afin d’atteindre un développement harmonieux et durable. En tenant compte de l’environnement des villageois, Tostan a mis sur pied un ensemble de modules qui correspond aux aspirations des ruraux. Le module sur la santé reproductive traite de l’excision et ses conséquences néfastes. Nous résumons notre entretien avec Molly Melching, directrice du programme: «Je n’ai jamais dit aux femmes qu’il faut parler de l’excision comme une pratique barbare»15 Cette approche a porté fruit puisque le 30 juillet 1997, les femmes de Malicounda, village situé au Sénégal lançaient au monde entier un appel par lequel elles s’engageaient à renoncer à la pratique de l’excision. L’initiative est partie des personnes concernées. Tostan a institué dans plusieurs localités du pays des cours en langues nationales afin d’initier les femmes aux dangers que causent les problèmes de santé. Le module sur la sexualité reproductrice aborde la question de l’excision. Pour les participantes qui, jusqu’à ce jour n’étaient pas au courant des conséquences ce fut une véritable révélation, selon Mme Konaté « Vous n’avez aucune idée de ce qu’était notre village avant le programme. Ici, quand les hommes parlaient sous cet arbre, les femmes n’osaient même pas passer à côté. Moi, j’étais si timide que quand il y avait des hommes autour de moi, je ne parlais jamais fort. L’idée même de parler en public me faisait trembler comme une feuille16. » 15 16 Communication personnelle. Dakar août 2006 : « Tostan » « ECLOSION au Sénégal »: Pourquoi les populations abandonnent la pratique de l’Excision, Rapport du Projet de Recherche Opérationnelle et d’Assistance Technique en Afrique II Dakar : Population Council 1999. Sarah Crowe et Molly Melching : « Le Sénégal met fin aux mutilations féminines et à l’excision » www.unicef.org/ 24 novembre 2005. 93 « Maintenant, comme beaucoup d’autres femmes et hommes du village, j’ai étudié et j’ai appris beaucoup de choses sur nos droits, sur l’égalité et sur la non-discrimination. Cela m’a donné la confiance en moi nécessaire pour vous parler et intervenir devant ma communauté »17. Les femmes avaient du mal à s’imaginer que la stérilité qui frappait parfois certaines d’entre elles, n’était pas due au « mauvais œil » ou à la jalousie de la coépouse, mais c’était tout simplement le résultat d’une excision mal soignée et des problèmes d’hygiène qui en découlent. Par le biais de l’éducation populaire et en montrant clairement les conséquences néfastes sur la santé reproductive, les femmes de Malicounda avaient déclaré vouloir renoncer à l’excision. En tête, la célèbre matrone de la région Ourèye Sall est devenue le porte-parole de ce nouveau mouvement. Sous les feux de la télévision et devant les micros tendus du monde entier, elle a fait son mea culpa et affirme vouloir veiller à ce que la loi soit appliquée. Depuis lors, elle sillonne non seulement tous les villages, mais est l’invitée d’honneur lors des conférences internationales en Europe18. Bien que selon ses propres déclarations, elle n’aurait jamais eu d’accident au cours des dix années où elle excisait parfois en une journée jusqu’à dix filles. Elle percevait ainsi un salaire substantiel. Elle est devenue en peu de temps, la figure de proue pour toute personne qui fait des recherches sur l’approche Tostan. Sur le site Internet de Tostan, elle déclare : « Depuis que j’ai appris que les Mutilations Génitales Féminines ne sont pas une des exigences de l’Islam et que c’est une violation des droits des femmes et des filles, j’ai arrêté de pratiquer. C’est quand le programme Tostan est venu dans notre village que j’ai compris les dangers de cette pratique et que j’ai commencé à la remettre en question. Notre classe a rassemblé le village tout entier, ainsi que d’autres communautés au sein desquelles nous marions nos fils et nos filles. Tous ensemble, nous avons décidé de mettre fin à cette pratique ».19 Les populations auraient pris sur elle pour s’investir dans la lutte. En tête, Ourèye Sall aurait au préalable pris le consentement des chefs religieux. Elle aurait ensuite fait du porte-à-porte pour convaincre les familles. Si l’on en croit les rapports de Tostan, cette stratégie a eu du succès. Cette éradication dépend donc des trois étapes qu’une organisation non gouvernementale doit suivre: persuader les matrones, les chefs religieux et les familles. Il convient au préalable de 17 18 19 Sarah Crowe et Molly Melching : « Le Sénégal met fin aux mutilations féminines et à l’excision » www.unicef.org/ 24 novembre 2005. Herman, Conny (ed.) „Das Recht auf Weiblichkeit“. Hoffnung im Kampf gegen die Genitalverstümmelung. Bonn: Ed. Dietz 2000. Issha Bakker. « Au Sénégal la Directrice générale observe ce que font les communautés pour mettre fin à l’excision » www.unicef.org 13 novembre 2006. 94 convaincre les chefs de familles qui sont aussi les décideurs qui perpétuent cette tradition. Une fois leur aval acquis, convaincre les familles qui sont au premier chef les plus concernées. Car une déclaration d’un chef religieux n’engage que sa parole même si nous ne dénions pas l’impact que peut avoir sa déclaration. Si les familles peuvent admettre que l’excision affecte la santé des filles, il faut également qu’elles soient assurées qu’en adhérant à un tel programme, leurs filles ne demeurent pas célibataires. En effet si une mère de famille peut reconnaître tous ses méfaits, comment vat-elle réagir si au bout du compte les prétendants refusent d’épouser ses six ou dix filles car elles ne sont pas excisées ? Il semblerait que dans un premier temps la lutte s’est faite sans les jeunes gens qui sont les futurs époux. Il a donc fallu les inclure dans le programme en leur expliquant qu’une vie conjugale où les deux partenaires peuvent s’épanouir sans crainte de douleurs pour la femme est fondamentale pour l’équilibre du couple. Le CI-AF a beaucoup milité en ce sens et introduit les hommes dans leur programme. Quant aux déclarations à la télévision que nous avons pu entendre, elles infirment la pensée de l’ex ministre de la culture du Sénégal, il nous disait que : « Il ne faut pas voir seulement l’aspect physique de la mutilation. L’aspect physique, c’est finalement l’aspect anecdotique. Il faut se poser des questions qui vont au-delà de la blessure physique et se demander quelle valeur a la mutilation du point de vue de l’itinéraire de la pensée, de la sociologie, de la spiritualité du groupe qui s’est donné cette mutilation comme instrument de gestion sociale. Ce sont des questions culturelles que nous n’avons pas assez approfondies. Nous avons laissé la déferlante de la propagande occidentale nous envahir et ne pas nous laisser la sérénité, le temps de nous interroger d’abord au fond avant de verser dans le sentimentalisme. On a exhibé des vieilles bonnes femmes qui ne comprenaient pas du tout pourquoi on les condamnait. On les a traumatisées, on les a amenées à la télévision et on leur a fait jurer de ne plus mutiler. Mais on n’a rien réglé du tout. Au département de la culture, nous n’avons pas la même perception. Il faudrait que le débat ait lieu dans les lieux propices. Toute une machinerie s’est déclenchée qui trouve des financements, organise des colloques, orchestre une véritable mise en scène. Nous observons ce branle-bas avec sérénité. Cela me rappelle mon voyage en Casamance, au Sud du Sénégal, lorsqu’un vieux grandpère m’a dit: « Chez nous les Diolas ou les Baïnouk, on peut vous laisser parler des heures et on vous dit « YO », ce « YO » peut vouloir dire « oui » mais aussi « non ». C’est ainsi que naissent les grandes incompréhensions. On vous dit oui et pourtant en fait, c’est non. Des organismes viennent avec leurs certitudes et les plaquent sur des réalités complètement différentes. Le ministère de la culture doit défricher. Il nous faut aller au-delà du convenu. Nous sommes un 95 département qui travaille sur l’humain, nous devons donc faire preuve de sensibilité, respecter l’interlocuteur avant de le juger.»20 STRATEGIES DES MATRONES L’ABANDON DES MUTILATIONS POUR CONTOURNER Cependant si l’on croit l’article publié dans le quotidien « Wal Fadjri » du 7 août 2007 qui s’intitule : «A Malicounda, 10 ans après la déclaration d’abandon : On excise toujours les filles mais dès leur naissance »21 Un tel titre suscite la stupéfaction et la colère de toutes celles qui sont convaincues que cette pratique a été éradiquée dans cette région. Malicounda est une localité bambara, ethnie majoritaire au Mali qui a immigré depuis longtemps au Sénégal. En dehors des Bambaras, les sérères majoritaires dans la région ne pratiquent pas l’excision. Car, il semblerait qu’il existe d’autres exciseuses qui ne semblent pas du tout partager le même point de vue. Fatou Traoré, la principale exciseuse, a certes cessé d’exercer sa profession mais pour des raisons tout autres que celles que l’on s’imagine. La maladie a eu raison de ses forces et l’oblige à ne plus travailler. Elle déclare sur un ton péremptoire : « Jamais on n’arrêtera de pratiquer l’excision à Malicounda Bambara » tout en surveillant des fillettes âgées entre 3 et 5 ans qui toutes ont subi cette mutilation dès la naissance.22 Les adeptes de l’excision ont développé tout un système de ruses afin de déjouer la vigilance des autorités et organisations non gouvernementales ou des membres de la famille qui pourraient s’opposer à une telle opération. Ces femmes prétendent que le nouveau-né est malade. Il a le paludisme et qu’elles doivent se rendre au chef-lieu de la région soit à Mbour. Les fillettes sont gardées dans la maison de la matrone qui les excise aussitôt, soit bien avant que le baptême des 20 21 22 Pierrette Herzberger-Fofana « A l’Ecoute d’Amadou Tidiane Wone. Ecrivain et Ministre de la Culture du Sénégal » in www.arts.uwa.edu.au/MotsPluriels/MP2002phf.html « A Malicounda, on excise toujours » in www.Sudonline. sn 7 Août 2007 - Wal Fadjri. « A Malicounda, dix ans après la déclaration d’abandon » www.walfradjri. 7 Août 2007,fr.allafrica.com/stories/200708070357.html,http://www.kergui.com/sn/modules.php?name=News&file=arti cle&sid Sénégal : Loi contre l’excision - Les imams du Fouta se révoltent 15 mai 2009 www.sudonline.sn. Les tantes paternelles ou « badjen » exercent un pouvoir quasi absolu de décision sur les neveux et nièces surtout en milieu rural. 96 enfants ait lieu, le 8e jour de leur naissance. A cette date, selon l’exciseuse, la plaie est cicatrisée. Fatou Traoré a même excisé à l’insu des mères des bébés. En tant que matrone, elle a probablement assisté la mère lors de son accouchement ou bien elle est la tante paternelle. Son pouvoir est indéniable au sein de la famille. Elle peut donc agir sans le consentement de la mère et a pu ainsi opérer le nourrisson sans que la mère puisse intervenir. Gardienne des traditions, elle ne veut pas accepter la loi.23 Même si elle reconnaît que nombre de matrones ont préféré arrêter par peur des représailles juridiques qui pourraient s’en suivre. Bien que la loi contre les Mutilations Génitales Féminines ait été votée en 1999, et inscrite dans la nouvelle Constitution de 2001, l’excision perdure dans la clandestinité à petite échelle. Elle a encore lieu au Sénégal en 201024. « A l’heure actuelle, la région de Fatick n’a enregistré qu’une seule déclaration de Tostan. Elle date du 30 mars 2008. Et c’est à Némanding (village frontalier avec la Gambie). Ce sont trentecinq villages de Sérères Niominka qui sont signataires de la déclaration. Certes la loi est là. Mais il serait beaucoup plus souhaitable que l’abandon vienne des populations elles-mêmes. Je vous assure que l’excision est toujours pratiquée dans la localité. Les gens le font en cachette. Donc toute la bataille réside dans la communication avec les relais communautaires. Une fois que les 25 populations adhèrent, c’est fini », fait savoir M. Sy. LES PRATIQUES TRANSFRONTALIERES Lors de la conférence du Comité Interafricain, (CI-AF) les participantes ont mis en exergue la problématique des pratiques transfrontalières. En effet, il existe actuellement une sorte de tourisme des exciseuses, lorsque qu’il existe une loi dans leur pays d’origine. C’est ainsi que les villes sénégalaises à la frontière du Mali ou de la Guinée comme Kolda et Tambacounda ont le taux de prévalence le plus élevé. Afin de passer outre, les matrones sénégalaises passent la frontière et excisent les fillettes sur le territoire malien ou guinéen. En Guinée, la loi existe depuis 1965 mais elle n’a jamais été appliquée si bien que les matrones venues du Sénégal sont assurées de ne pas être arrêtées et déférées au Sénégal26. 23 24 25 26 Loi sur les Mutilations Génitales Féminines. Art. 299 bis du Code Pénal (janvier 1999). Awa Diédhiou. « Sénégal. Matam. L’exciseuse et la grand-mère condamnées à six mois ferme de prison. » In: www.pressafrik.co/senegal-Matam-l-exciseuse-et-la-grand-mere-condamnees-a-six-moisfermes_a3688.html Bocar Dieng. « Sénégal: Abandon de l’excision dans le département de Fatick-Trente cinq villages mènent la réflexion ». www.walfadjri.sn 5 juin 2008. www.allafrica.com 10.6. 2008 Sénégal : Loi contre l’excision - Les imams du Fouta se révoltent 15 mai 2009 www.sudonline.sn. Les tantes paternelles ou « badjen » exercent un pouvoir quasi absolu de décision sur les neveux et nièces surtout en milieu rural. 97 LA RECONVERSION DES MATRONES Nous devons cependant reconnaître que de nombreuses matrones-exciseuses ont déposé leurs couteaux et jeté leur lame de rasoir. Ce phénomène se répand au niveau des communautés locales concernées. Leur nombre croît officiellement d’année en année depuis l’an 2000. « Tous sont heureux de constater que plus personne ne s’aventure à exciser sa fille, du moins dans les sept villages constituant le comité de gestion communautaire. D’ailleurs, la célèbre exciseuse, Diba Samoura soutiendra avoir depuis lors, déposé les couteaux pour se reconvertir dans la couture avec une machine gracieusement offerte par Tostan. Les femmes du comité fédéral ont suffisamment mouillé les foulards pour aujourd’hui ne plus avoir à faire dans les mariages précoces et vers une politique de scolarisation et de maintien des filles à l’école. »27 Les matrones sont prises en charge en général par des organisations non gouvernementales ou par le gouvernement qui a mis en place des projets de reconversion. Ces projets leur permettent d’exercer une activité lucrative, génératrice de revenus substantiels. Dans cette entreprise, l’Etat a fait appel aux bailleurs de fonds. C’est ainsi que les G.I.E. Groupement d’Intérêt Economique ont vu le jour. Des centres de promotion féminine recyclent les matrones dans les domaines de l’agriculture comme le maraîchage, ou dans le secteur tertiaire : commerce, petite entreprise grâce aux micro crédits, fabrication de savon, couture. Au-delà de cette reconversion, il convient surtout de combattre la subordination des femmes afin qu’elles parviennent par elles-mêmes à subvenir à leurs besoins pour pouvoir s’émanciper du joug patriarcal qui demeure encore une réalité. Les anciennes exciseuses sont devenues des matrones avec une formation appropriée. Elles sont en milieu rural les personnes les plus aptes à faire abandonner l’excision de par la notoriété dont elles jouissent. On les écoute, leur parole a de la valeur. Leur engagement est sans faille car dans beaucoup de cas, elles ont aidé les femmes à accoucher. En signe de reconnaissance, les mamans donnent leur nom aux bébés. Ainsi tout un réseau « familial » se tisse entre les matrones et les mères de famille. Dans un second temps, il faut que les matrones puissent accéder aux postes à responsabilité au sein de leur communauté puisqu’elles ont renoncé à une pratique qui, au-delà du statut social que cela leur conférait, leur assurait un gagne-pain régulier. Ndoungdou Macane est une exciseuse traditionnelle qui, de par sa profession, aujourd’hui s’élève avec véhémence contre ces pratiques. 27 Tamba Boubacar. « Excisions et mariages précoces. Kédougou fait place à la scolarisation des filles » www.sudonline.sn 13juillet 2008 98 « Nous ne nous rendions pas compte du mal que nous faisions à nos filles en les excisant, nous n’avions aucune idée des conséquences négatives. Maintenant que nous avons suivi ces classes et appris ce que nous savons sur la santé et sur nos droits, nous voulons abandonner ces pratiques. »28 Ces matrones servent d’agents communautaires de santé auprès des femmes enceintes et des nourrissons, à qui elles dispensent soins et conseils. Elles sont formées à la distribution des anti-paludéens et des vermifuges pour enfants, à déterminer l’âge de la grossesse, à préparer les femmes à avoir un accouchement dans les meilleures conditions. Elles se font un point d’honneur à suivre les femmes excisées qui vont bientôt accoucher. Mme Ourèye Sall déclare : « C’est ma responsabilité de sensibiliser les autres aux dangers de cette tradition. C’est ma façon de demander pardon si j’ai fait du tort à des fillettes innocentes. »29 Ces matrones savent reconnaître les signes précurseurs de l’accouchement : début des contractions et du travail, rupture de la poche des eaux, dilatation du col etc. Elles sont en mesure de vérifier la position de l’enfant, et au moment de la naissance son niveau de vitalité (en lui tapotant les fesses pour qu’il réagisse), et elles savent également que si le bébé avale une certaine substance lors de l’accouchement (liquide amniotique), l’effet peut être nocif et il faut donc l’expulser des organes de sens par aspirations extérieures. Les matrones accoucheuses qui sont recyclées, en plus de ces connaissances, savent aussi déterminer l’âge de la grossesse, et identifier les éléments pathologiques d’une grossesse (œdèmes, pâleur des yeux), et les grossesses à risques (mauvaise position de l’enfant (présentation par le siège, par les pieds, par les mains, à l’horizontale), femmes multipares avec 3 enfants et plus, femmes ayant subi une césarienne). Alors que jusqu’ici les matrones traditionnelles se concentraient surtout sur la délivrance en elle-même et ne s’intéressaient pas au déroulement de la grossesse, les matrones recyclées effectuent des visites prénatales lorsqu’ elles sont au courant qu’une femme est enceinte. Elles utilisent certes encore des décoctions et usent de beurre de karité pour les massages, mais elles n’hésitent pas à diriger la parturiente vers les centres de santé, lorsqu’elles pensent qu’il s’agit d’un accouchement avec complications. La lame de rasoir ne leur sert que dans les cas extrêmes pour élargir le vagin, s’il lui 28 29 Nisha Bakker. « Arrêt de l’excision et des mariages précoces » www.unicef.org/french/infobycountry/Senegal_38134.html?q=printme Sarah Crowe et Molly Molching « Le Sénégal met fin aux mutilations génitales féminines et à l’excision » www.unicef.org 99 semble trop étroit pour laisser passer la tête de l’enfant. Elles font alors une petite coupure en ayant pris soin au préalable de désinfecter la lame ou de la tremper dans de l’eau chaude, et pour couper le cordon ombilical. Après l’accouchement, elles enterrent le placenta de l’enfant. Selon les ethnies, ce placenta est enterré devant ou derrière la case, à droite ou à gauche de la demeure familiale selon que c’est un garçon ou une fille, des jumeaux ou des jumelles. En milieu rural, les femmes rémunèrent les matrones en nature. Elles lui offrent le plus souvent quelques morceaux de savon, accompagnés de farine de mil, des légumes ou des pagnes tissés. Les maris gratifient ses services sous forme d’argent. En milieu musulman, la matrone reçoit de la viande de mouton lors du baptême de l’enfant, et chez les catholiques un bol de beignets ou des gâteaux. Les enfants dont elle a facilité l’accouchement lui vouent du respect leur vie durant. Les matrones, honnies par les médias occidentaux pour leurs services, gagnent de plus en plus de sympathie depuis qu’elles acceptent de se reconvertir vers d’autres activités plus saines. Condamner irrémédiablement les matrones, c’est aussi refuser d’accepter les différentes formes de diversité culturelle. Pourtant au 21e siècle et compte tenu des problèmes que l’excision cause sur le plan de la santé reproductive, il est possible de sensibiliser les populations afin qu’elles décident librement de renoncer à une tradition qui n’a plus de raison d’être. Il serait donc possible que les Africaines reconsidèrent leur position sans pour autant avoir l’impression qu’on les culpabilise, qu’on les force, qu’on agit à leur place et surtout qu’on leur impose un mode de pensée qui ne correspond en rien au leur. Surtout, elles ne se sentiraient pas bafouées dans leur honneur, dans leur moi profond. Elles trouveront ellesmêmes des solutions à leurs problèmes et qui s’apprêtent à leur façon de vivre. On n’entendra plus des phrases du genre « Pourquoi ce qui était bon jadis, doit être aujourd’hui considéré comme mauvais? » De nombreuses organisations non gouvernementales l’ont compris et agissent de concert avec les organisations locales. Actuellement, grâce aux nombreuses campagnes de sensibilisation, les populations décident librement de renoncer à une tradition qui n’a plus de raison d’être. Les femmes reconnaissent que ce rituel engendre de graves maux de santé. Les matrones ou exciseuses peuvent jouer un rôle de premier plan dans cette lutte si on parvient à les responsabiliser en les recyclant. Les exemples cités plus haut montrent qu’il est possible de les convaincre et d’en faire des alliées sûres dans la lutte contre les mutilations. Parmi les autres mutilations féminines, il faut souligner la pratique du repassage des seins qui sévit surtout au Cameroun, au Togo et en Guinée. Cette pratique est moins médiatisée que l’excision. Elle constitue cependant une mutilation; même si elle n’engage que la mère et sa fille. Elle est source de traumatismes psychologiques et physiques pour les victimes d’une telle coutume. 100 LE REPASSAGE DES SEINS Cette pratique affecte 24% des jeunes filles au Cameroun. Le « repassage des seins », des adolescentes au Cameroun est une pratique largement répandue dans les 10 provinces de ce pays d’Afrique centrale. Le modelage des seins consiste à se servir des objets chauffés, tels que la pierre à écraser utilisée dans la cuisine, le pilon, la louche, la spatule, des boules de couscous et autres pour masser les seins adolescentes dans le but de les faire disparaître. C’est une coutume qui est longtemps restée un secret bien gardé et qu’une association tente de faire interdire : au Cameroun, les mères « repassent » les seins naissant de leurs filles à l’aide d’objets chauffés. La raison principale du repassage des seins vise à retarder le développement d’une sexualité précoce, afin que les garçons ne soient pas attirés par les filles et ne les perturbent pas dans leurs études. Cependant, la raison la plus fréquemment avancée pour justifier la poursuite de cette pratique est le respect de la tradition et une obligation religieuse. D’autres motifs cités sont : une meilleure hygiène, la préservation de la virginité et de meilleures chances sur le marché matrimonial. Au cours de la conférence internationale sur les pratiques néfastes en Suisse (12.10.2010), une participante nous a affirmé que la pratique du repassage des seins est également courante au Sénégal, dans la région de la Basse-Casamance en milieu mandjak (3,7% de la population) et mancagne (2,57%). A Adéane, ville située dans cette région, ces communautés seraient les adeptes d’une telle coutume. Il n’existe à ce jour aucune étude dans ce domaine pour le Sénégal. CONCLUSION Toutes ces pratiques néfastes contre les enfants et surtout les jeunes filles : Mutilations génitales féminines (MGF), repassage des seins, dilation des petites et grandes lèvres, introcision ou introduction de sel dans le vagin des fillettes sont des pratiques discriminatoires et néfastes pour la santé de la femme et de l’enfant. Cependant, grâce aux efforts conjugués de nombreuses personnes engagées à travers notre village planétaire, elles disparaîtront afin que nous puissions avancer à pas de géant et atteindre une tolérance zéro en 2015. Car comme le dit le sage de Bandiagara, Amadou Hampaté Bâ : « La tradition est comparable à un arbre dont il faut élaguer les branches qui meurent, pour lui permettre de s’épanouir ». 101 REMARQUES Comité Inter-Africain CI-AF Comité Inter-Africain sur les pratiques traditionnelles ayant effet sur la santé des femmes et des enfants. Le CI-AF a été créé en 1984, à l’issue d’un séminaire international sur les mutilations génitales féminines (MGF) à Dakar au Sénégal. Son siège se trouve à Addis-Abeba en Ethiopie et l’organisation possède des antennes dans 28 pays. BIBLIOGRAPHIE Bakker, Nissha « Au Sénégal la Directrice générale observe ce que font les communautés pour mettre fin à l’excision » www.unicef.org 13 novembre 2006 Crow, Sarah et Melching, Molly « Le Sénégal met fin aux mutilations génitales féminines et à l’excision » In : www.unicef.org/french/infobycountry/senegal_30046.html?q=printme 24 novembre 2005 Dieng, Bocar. « Sénégal : Abandon de l’excision dans le département de FatickTrente cinq villages mènent la réflexion ». www.walfadjri.sn 5 juin 2008. www.allafrica.com 10.6. 2008 Diédhiou, Joseph « Signature de la déclaration d’abandon de l’excision: 2’336 sur 5’000 communautés ont jeté les couteaux, en dix ans » www.xibar.net 7 août 2007 Herzberger-Fofana, Pierrette. « Les Mutilations Génitales Féminines (M.G.F) » www.arts.uwa.edu.au/AFLIT/MGF1.html, www.afrology.com. Dossier. 25 S. 10 Mai 1999. Université Perth-Australie et http://www.afrology.com rubrique société. Herzberger-Fofana, Pierrette. « Littérature Féminine Francophone d’Afrique noire suivie d’un Dictionnaire des Romancières ». Paris : Harmattan 2000, 570p. Herzberger-Fofana, Pierrette. “Excision and African Literature: an activist’s annotated bibliographical”. In: Empathy and Rage: Female Genital Mutilation in African Literature ed. Tobe Levin &Augustine. London. 2009 Kane, Amadou Issa. « Sénégal : Loi contre l’excision - Les imams du Fouta se révoltent ». 15 mai 2009 102 Sudonline. «A Malicounda, on excise toujours ». 7 Août 2007 103 THE STATUS OF WOMEN AND HARMFUL TRADITIONAL PRACTICES FGM BERHANE RAS-WORK Executive Director, Inter African Committee on Traditional Practices (IAC), Geneva Résumé L’histoire de l’humanité est marquée par l’action de développer et de suivre des normes et des valeurs. Les mutilations génitales féminines sont une expérience aux conséquences parfois mortelles que des millions de femmes et de filles acceptent, comme le prix à payer pour être acceptées durablement dans leur groupe social. De nature discriminatoire et violente, les MGF sont une violation des droits humains fondamentaux de ces filles et femmes. Les MGF sont un phénomène aux multiples facettes : attitudes sociales envers les femmes, normes culturelles et tradition, et aspect socio-économiques contribuent tous à expliquer leur perpétuation. Le Comité Inter-Africain sur les Pratiques Néfastes (IAC) a élaboré des interventions de base appropriées. De plus, il aborde le sujet par différents angles, dans une approche globale et intégrée comportant plusieurs volets. Zusammenfassung Die Geschichte der Menschheit ist davon geprägt, dass Normen und Werte entwickelt und befolgt werden. Weibliche Genitalverstümmelung ist eine Erfahrung mit manchmal tödlichen Folgen, die Millionen Frauen und Mädchen als Preis hinnehmen, um dauerhaft in ihrer sozialen Gruppe akzeptiert zu werden. Aufgrund ihres diskriminierenden und gewalttätigen Charakters, stellt WGV eine Verletzung der grundlegenden Menschenrechte dieser Mädchen und Frauen dar. WGV hat viele Seiten: Die gesellschaftliche Haltung gegenüber Frauen, kulturelle Normen und Traditionen sowie die sozioökonomische Dimension helfen, ihren Fortbestand zu erklären. Das Inter-Afrikanische Komitee gegen traditionelle gesundheitsschädigende Praktiken (IAC) hat angemessene Grundinterventionen erarbeitet. Außerdem geht das Komitee das Thema aus verschiedenen Blickwinkeln an, mit einem mehrstufigen globalen und integrierten Ansatz. 104 Resumen La historia de la humanidad se caracteriza por la acción de desarrollar y seguir normas y valores. Las mutilaciones genitales femeninas son una experiencia a las consecuencias a veces mortales que millones de mujeres y niñas aceptan como el precio que se debe pagar para ser aceptadas duraderamente en su grupo social. De naturaleza discriminatoria y violenta, las MGF son una violación de los derechos humanos fundamentales de estas niñas y mujeres. Las MGF son un fenómeno a múltiples facetas: actitudes sociales hacia las mujeres, normas culturales y tradición y aspecto socioeconómico contribuyen todos a explicar su perpetuación. El Comité Inter Africano sobre las Prácticas Dañinas (IAC) elaboró intervenciones de base convenientes. Además, aborda el tema por distintos ángulos, en un enfoque global e integrado implicando varios aspectos. Summary Human history has been marked by the process of developing and observing norms and values. Female Genital Mutilation is a life threatening experience which millions of women and girls accept as a price to pay for social acceptance and survival within the group. Being discriminatory and violent, FGM are a violation of girls’ and women’s basic human rights. FGM is a multi-faceted phenomenon : social attitudes towards women, cultural norms and tradition, and socio-economic issues all account for its perpetuation. The Inter-African Committee on Harmful Practices (IAC) has designed appropriate interventions at grass root level. Moreover, it applies different entry points using a holistic and integrated multi pronged approach * * * 105 INTRODUCTION African culture is filled with beautiful traditions that go back centuries ago; sadly some of them are harmful and destructive towards women and girls. These traditions are so prominent because they represent deeply rooted cultural values that are crucial for the survival of culture and society. Human history has been marked by the process of developing and observing norms and values. Tradition ensures group and individual identity to instill a sense of belongingness and security. In the African context the strong ritual of socialization prepares the individual to live with traditional practices as a price to pay for social acceptance and survival within the group. As a result individuals are forced to accept and live with harmful traditions even when some of the practices are painful and have cruel consequences in life. Female genital Mutilation is a life threatening experience which millions of women and girls accept and undergo with a feeling of apathy. Eliminating FGM continues to be a major challenge. HTP’S - FGM Harmful traditional practices such as FGM are violation of the basic human rights of girls and women. They are traditionally condoned forms of discrimination and violence. WHO defines FGM as: “all procedures that intentionally alter or injure female genital organs for non-medical reasons”. The procedure is a culturally valued tradition that serves the needs of males. It involves the partial or total removal of healthy and normal female genital tissue, and interferes with the natural functions of girls’ and women’s bodies. Harmful traditional practices also include: facial scarring, and the forcefeeding of women, early or forced marriage, and nutritional taboos, traditional practices associated with childbirth, dowry-related crimes, honor crimes, and son preference. FGM PREVALENCE IN AFRICA FGM affects newborns, children, adolescents, and young adults. Most girls undergo FGM when they are between 7 and 10 years old. However, FGM seems to 106 be occurring at earlier ages in several countries because parents want to reduce the trauma to their children. FGM is practiced today in 28 African countries; with a prevalence rating from 5% to 99% percent (e.g. In Guinea 92% , Mali 98%, Egypt 92%, Somalia 99% and Eritrea 97%, Somalia 98%, Zaire 5% (Demographic Health Surveys ) DHS. The practice is known in different socioeconomic classes and among different ethnic and cultural groups that include: Christians, Muslims, Jews, and supporters of native African religions. The practice itself and the conditions in which most procedures take place, constitutes a health hazard with short- and long-term physical and psychological complications and effects. About 140 million women in the world have been subjected to FGM and it is estimated that every year two million are at risk. Most of them are living in African countries; however FGM also takes place among some ethnic groups in Oman, the United Arab Emirates, and Yemen, as well as in parts of India, Indonesia and Malaysia. FGM has also become an important issue in Australia, Canada, England, France, and the United States due to the continuation of the practice by immigrants from countries where FGM is common. FGM A VIOLATION OF WOMEN’S BODY These practices adversely affect the health of women and children and perpetuate the inferior status of women. Despite their harmful nature and the violation of international human rights laws, such practices persist because they imply controlling women’s body for the benefit of men and ensures the political and economic subordination of women. World Health Organization has classified four major types, going from partial to total removal of the external female genitalia for non-medical reasons. The health consequences of female genital mutilation are both immediate and long-term. It depends on the extent of the cut, the skill of the practitioner, the nature of the tools and the environment and the physical condition of the girl or woman MANY FACES OF FGM There are many aspects to consider explaining a traditional practice such as FGM some are based on economic and socio-cultural unequal norms and traditions that govern society in many countries. 107 There is no ethical arguing to preserve a cultural practice that damages women’s health and interferes with their body integrity and sexuality, however it is important to understand the meaning of HTPs and the underlying causes. Social attitudes towards women FGM is compelling evidence of discrimination and violence against girls based on the long upheld social values and practices of their communities. The socializing processes observed for boys and girls are rigorously designed to instill a feeling of superiority of boys, while girls are groomed to accept subjugation and inferiority with apathy. The established patriarchal system that has long endured the passage of time, across geographical boundaries as well, as religious and class differences, has promoted negative attitudes towards feminity. This emphasizes gender inequality. While this unfortunate situation is universal, the expression of discrimination and the degrees of violence against girls and women vary from society to society. FGM is the physical manifestation that shapes the female body to fit a standard for society. Female Genital Mutilation is part of the socialization of girls meant to avoid exclusion. Cultural norms and traditions Cultural identity is fundamental to everyone, protecting it becomes especially important in societies where the extended family is the principal source of social and economic security and were women have very few options outside marriage. Many girls are compliant when to the ritual, believing that they will be outcasts if they are not cut. Mothers also consider they are doing the best for their daughters and very few have any idea of the lifetime of damage FGM can cause or of the medical implications. Female Genital Mutilation (FGM) is a cultural tradition that shapes the physical marking of the marriageability of women. It symbolizes womanhood and control over their sexual pleasure and reproduction. A clean appearance, chastity, neatness and increased sexual pleasure for the man are some of the motivations to preserve FGM. However the desire to conform to tradition and to follow the social standard is the most powerful motive. Socio-economic issues Even when women play an important role in African society; they suffer legal, economic and social constraints. 108 In some societies it is largely assumed that educating women would make them independent. And accordingly they would do not do what they are expected to, as looking after the house, taking care of the children, and please their husband’s needs. The role of women is considered inferior to men and they are not expected to have aspirations as high as men have. In addition, these biases such as lack of access to health, education and training take a heavy toll. When the cultural and monetary costs are high or the benefits are limited, families prefer to invest their limited income in the education of boys rather than provide education for girls who would eventually marry and abandon school. Highlighting the considerable impact of social norms, traditions and inequality in access to basic rights (such as education and health) directly affecting women, may help to design better policies that can improve women’s socioeconomic status in the short and long run. WORKING TOWARD THE ERADICATION OF HTPS - FGM Positive developments have also been observed globally, and significantly on the African continent. At an international level, several instruments to protect women have been developed. In several African countries, there are laws and other legal instruments in place to combat HTPs such as FGM, early marriage and gender based violence among others. In the past few years, many NGOs have advocated to put an end to gender based violence and HTPs, putting pressure on governments to adopt policies and procedures that protect and support the empowerment of women. In this process non-government organizations have played a crucial role. IAC The Inter African Committee on traditional Practices Affecting the health of women and children is one of them and is pioneer in promoting the elimination of HTPs as FGM in Africa. IAC was set up in 1984 in Dakar, Senegal. Up to now there are 28 active national committees in Africa and ten affiliates in other parts of the world. Its vision is that African women and children fully enjoy human rights to live free of harmful traditional practices by promoting gender equality. It is to contribute to the improvement of the status of women in all aspects of social, 109 economic, and political life, human rights and quality of life, through the elimination of harmful traditional practices. IAC APPROACH (NORWAY EVALUATOR COMMENT) Through the years IAC has designed appropriate interventions at grass root level aiming to eradicate practices such as FGM. This process has required careful interventions at different levels with strategies to bring positive change of attitudes and practices. In Africa FGM involve many actors: mothers, fathers, grand-mothers, traditional practitioners, as well as religious and political leaders. Intervention programs have to take into account this reality. The experience of the Inter- African Committee on Traditional Practices (IAC) has shown that with education, training, sensitization and structured information adapted to different cultural contexts, positive change in attitudes, in behavior and in capacity building are achieved in affected communities. IAC INTERVENTIONS AND PROGRAMS Challenging long held believes and attitudes requires vision, mission and multi-pronged strategies. Sustained interventions at all levels with carefully tailored programs can certainly lead to change. IAC applies different entry points using a holistic and integrated multi pronged approach in order to reach and convince the different stakeholders as well as the public at large. Education and sensitization at all levels are regarded as vital elements to stimulate social change. Interventions are designed taking into account the sociocultural context of the communities operating at community, national, regional and international levels IAC CARRIES OUT SEVERAL PROGRAMS IN AFRICA. Youth Youth programs are conducted at regional, national and community levels. 110 Youth are an important target group both as potential or actual victims, and as future parents. IAC organizes youth forums bringing together young people from 28 African countries forming a regional youth network and also promoting campaigning against HTPs at community level. Participants carry out door to door campaigns, alternative rite of passage without excision, drama, role play and sport games. Women (15PH) The empowerment of women through campaigns of information aims to give women adequate knowledge of basic human rights, of issues and of FGM, early / forced marriage abduction, widowhood rites etc. Ex-excisors They are provided training and alternative means of sustenance: In addition, they are used as campaign agents to dissuade the community from FGM. Legislators, legal bodies and policy makers Training programs for legislators, legal bodies and policy makers pave the way for mobilizing, lobbying and advocacy. The final goal is the drafting, voting and implementation of anti- FGM laws to accelerate elimination of FGM and other HTPs. IAC uses its official relationship with the UN, African Union, and WHO to influence policy: It lobbies and calls governments to take action: Religious leaders, community leaders and traditional rulers A majority of religious leaders and community /traditional leaders are influential in their communities. They are important partners in the campaign to eliminate HTPs. IAC involves religious leaders in the campaign to clarify the misconception and the position of religion with regards to FGM. Community and traditional rulers are targeted for awareness-raising and social mobilization towards the abandonment of FGM and other HTPs through the adoption of customary laws. Media/traditional/modern IAC, convinced that media have the power to target a wider segment of population with powerful and lasting effect, reaches them through regional training workshops. Media have the advantage of immediate and simultaneous reach 111 through electronic or print mediums. To this effect involving media professional in the campaign to eliminate HTPs is a paramount asset. Health workers With the purpose to prevent the medicalization of FGM, IAC targets physicians, nurses, midwives, ward attendants, and traditional birth attendants (TBSs) when defining programmes. It is essential to persuade them to join the campaign against FGM. In 25 years, IAC has scored many achievements in the struggle against HTPs and FGM. However the remaining challenges must be faced with proper strategies and in-depth analysis. FGM has been a great challenge in the past and it was a taboo to address the issue openly. But nowadays people discuss it freely and condemn the practice. Through continuous awareness-raising and education campaigns, the attitude and behavior of society towards HTPs and FGM is gradually changing. However political will and social participation to empower women and girls through education campaigns will protect them more effectively from HTPs. CONCLUSION FGM is a practice that not only leaves survivors with health problems and psychological scars but is also a violation of the human rights of women and children. Despite the gains made toward eradicating the practice, including changing attitudes and banning of FGM in several countries, the practice persists. While governments who have ratified the various treaties outlawing FGM have a responsibility to force its prohibition, the eradication of the source of FGM is also the responsibility of society at large. Turning a blind eye to the practice encourages the violation of Human Rights and threatens the sanctity of all human rights. If society allows the violation of some, the violation of other rights is arguably much more likely to occur in those societies. The eradication of FGM is every one’s responsibility. Non-government Organizations, governments and local women’s groups cannot protect women’s and girl’s rights on their own, but together this goal may become more realistic and achievable. Awareness campaigns and funding for the purpose should therefore aim to bring together all interested and responsible parties, including those who continue to subscribe to the cultural ideal associated with FGM. 112 LA CONTRE ARGUMENTATION CULTURELLE COMME STRATEGIE DE LUTTE CONTRE LES PRATIQUES TRADITIONNELLES NEFASTES ABDOULAYE DORO SOW Professeur, Enseignant–chercheur en sciences sociales, FLSH, Université de Nouakchott, Mauritanie Résumé L’invitation à l’abandon de la pratique des MGF ne doit pas être perçue comme un procès des cultures, ni comme l’expression d’une volonté hégémonique occidentale. Les contre-arguments culturels sont susceptibles de remettre en cause l’adhésion passive des populations aux MGF. Les stratégies de lutte seront plus efficaces si elles reposent sur des données sociologiques et culturelles. L’auteur présente le cas particulier de la Mauritanie, rappelant les différentes pratiques traditionnelles néfastes, ainsi que les raisons des PTN au sein des communautés. Il précise la fonction des contre-arguments culturels, à savoir délégitimer et déconstruire les PTN. De plus, la contre-argumentation culturelle intègre le goût de l’introspection et de l’argumentaire rationnel, amenant au changement des comportements et des conduites sociales. Une méthodologie inspirée des travaux de l’école de Fribourg est proposée, s’achevant par l’apport d’exemples concrets. Zusammenfassung Die Aufforderung, die WGV-Praktiken abzuschaffen, soll weder als Angriff auf die Kulturen, noch als Ausdruck hegemonialer Ansprüche des Westens empfunden werden. Mit kulturellen Gegenargumenten kann die passive Akzeptanz der WGV durch die Bevölkerung in Frage gestellt werden. Die Strategien zur Bekämpfung werden effizienter, wenn sie auf soziologische und kulturelle Grundlagen gestützt werden. Der Autor stellt den Sonderfall Mauretanien vor und erinnert dabei an die verschiedenen schädlichen traditionellen Praktiken sowie an die dahinterstehenden Gründe in den jeweiligen Gesellschaften. Er führt das Ziel der kulturellen Gegenargumente aus, das heisst, den schädlichen traditionellen Praktiken die Legitimation abzusprechen und sie abzuschaffen. Ausserdem berücksichtigt die kulturelle Gegenargumentation eine Introspektion sowie 113 rationale Argumente und führt so zu einer Veränderung des Verhaltens und des soziales Benehmens. Ein von den Arbeiten der Hochschule Freiburger Schule inspiriertes Konzept wird vorgestellt und zum Schluss werden konkrete Beispiele gegeben. Resumen La invitación al abandono de la práctica de las MGF no debe percibirse como un pleito de las culturas, ni como la expresión de una voluntad hegemónica occidental. Los argumentos culturales en contra son susceptibles de reponer en causa la adhesión pasiva de las poblaciones a las MGF. Las estrategias de lucha serán más eficaces si se basan en datos sociológicos y culturales. El autor presenta el caso particular de Mauritania, recordando las distintas prácticas tradicionales dañinas, así como las razones de las PTN en las comunidades. Precisa la función de los contraargumentos culturales, a saber deslegitimar y descomponer las PTN. Además, la contra-argumentación cultural integra el gusto de la introspección y de la argumentación racional, conduciendo al cambio de los comportamientos y de las conductas sociales. Se propone metodología inspirada de los trabajos de la escuela de Friburgo, acabándose con la contribución de ejemplos concretos. Summary Promoting abandonment of the practice of FGM must not be perceived as a trial of cultures, neither as the expression of Western hegemony. Cultural counterarguments are likely to question passive agreement to FGM among populations. Fighting strategies will be more efficient if relying on sociological and cultural data. The authors presents the particular case of Mauritania, outlining the presence of FTPs in the country’s various communities, and their justifications. The function of cultural counter-arguments is to delegitimate and deconstruct HTPs. Moreover, cultural counter-arguments push through the habit of introspection, and rational arguing, the first step to reach behavior and social change. A methodology inspired by the Fribourg tradition is proposed, followed by concrete examples. * * * 114 INTRODUCTION Les cultures humaines se rencontrent et s’interpénètrent. Il en résulte des emprunts, des échanges et des expériences qui invitent au dépassement et aux abandons. Ce renoncement qui est source de rupture peut générer des conflits de la personnalité, voire même un sentiment de vide culturel source de malaise existentiel. Il convient cependant de souligner que toutes les cultures sont égales en termes de dignité pour replacer cette dynamique dans son véritable contexte. L’invitation à l’abandon de la pratique des mutilations génitales féminines doit être présentée comme le renoncement à une forme de stupidité comme on la retrouve dans toutes les cultures humaines. Elle ne doit pas être perçue comme un procès des cultures, ni comme l’expression d’une volonté hégémonique occidentale qui se manifeste à travers la mondialisation. Cette invitation est un appel au respect de principes qui mènent vers les normes universelles des droits de l’homme. Un marqueur culturel ne saurait participer à l’affirmation et à la préservation de l’identité s’il n’est pas conforme au respect des droits de l’homme. « Il va falloir de toutes les façons, un jour ou l’autre faire l’inventaire de nos valeurs et de nos pratiques traditionnelles » affirme Victor Topanou, secrétaire scientifique de la Chaire UNESCO de Cotonou. Les stratégies culturelles de lutte contre les MGF consistent à se servir des dictons, des proverbes et des sentences sous forme de contre-arguments culturels pour sensibiliser les populations sur les méfaits de telles pratiques. Ils peuvent être véhiculés sous la forme de cours, d’exposés, de travaux de groupe, de causeries et d’animations de quartiers avec l’appui des artistes des ulémas, des chefs traditionnels et coutumiers. Cette démarche pédagogique instaure une situation de réflexion, qui met à l’épreuve les valeurs, les normes et les attitudes, des participantes lycéennes, femmes, acteurs de la société civile face à la pratique des Mutilations Génitales Féminines. Elle permet d’amener les participants à remettre en question des croyances et des convictions considérées comme certaines car longuement véhiculées par l’éducation et le conditionnement culturel. Les contre-arguments culturels sont susceptibles de remettre en cause l’adhésion passive des populations face aux MGF et de les amener à prendre conscience que l’un des piliers essentiels (on le retrouve comme justificatif au sein de toutes les composantes nationales) de cette pratique en Mauritanie qu’est l’argument religieux n’en est pas un. La pratique des MGF n’est pas une recommandation religieuse. L’idéal serait que les 115 Ulémas acceptent de traiter de la question lors des sermons de la prière du vendredi ou bien lors des causeries dans les quartiers. Les stratégies de lutte contre les pratiques traditionnelles et plus particulièrement la pratique des MGF doivent reposer sur des données sociologiques et culturelles. La connaissance des valeurs socioculturelles (par exemple le gacce, à savoir la honte) des groupes cibles est une nécessité car la dimension des représentations culturelles joue à ce niveau un rôle essentiel. Il est pratiquement impossible de changer de manière brutale des pratiques séculaires qui sont profondément ancrées dans les mentalités. Un système social vieux de milliers d’années, qui ne peut être dénué de traditions et d’habitudes profondément enracinées, ne peut être ébranlé d’un seul coup. Ainsi donc toute lutte contre les pratiques qui se veut réaliste doit se baser sur les ressources culturelles. C’est la raison pour laquelle nous avions opté pour l’élaboration des contrearguments culturels pour faire connaître les dangers, les fausses idées et enfin pour amorcer une dynamique de changement des conduites sociales. C’est un combat de longue haleine et les exigences d’alignement aux normes juridiques internationales et de résultat immédiat peuvent tout fausser. La lutte contre les MGF suppose la conjugaison des efforts des individus venant de divers horizons, ainsi que la mobilisation des populations et des différentes autorités. Ainsi, la connaissance des justifications culturelles et la prédominance du religieux dans cette pratique, peuvent aider à mieux sensibiliser les populations. Faire appel aux exemples tirés de la réalité et du vécu quotidien des populations, constitue le piler de notre approche pédagogique qui se veut active et opérationnelle. Cependant, cette approche suppose aussi un effort de compréhension des pratiques traditionnelles néfastes, d’où cette pertinente mise en garde de Patrice Meyer-Bisch : « Il ne suffit pas d’être militant, il faut d’abord être capable de respecter et comprendre ce que les traditions culturelles portent comme forces, comme ressources d’identité. Dans le cas des mutilations génitales féminines (MGF), c’est toute la question anthropologique de la relation homme / femme qui est en jeu. L’interdit de ce traitement inhumain, cruel et dégradant fait partie des « interdits fondateurs » sans le respect desquels la dignité humaine n’est pas possible. Mais ce n’est pas un but suffisant, c’est un seuil de compréhension du respect mutuel, des relations de genre et du tissu social. » Et enfin, nous avions tenté de comprendre comment ces pratiques traditionnelles considérées de nos jours comme des violations de la personne humaine sont perçues au sein de l’imaginaire populaire des Haalpulaar’en, dans une société en profonde mutation. Il convient de souligner que la théorie de la contre-argumentation culturelle, que nous considérons comme notre principal 116 apport, découle de toute cette approche et elle s’est imposée à nous comme la seule voie permettant d’utiliser la langue comme ressource culturelle pour lutter contre les Pratiques Traditionnelles Néfastes, et pour la promotion des droits de l’homme dans les sociétés africaines traditionnelles. PRESENTATION DE LA MAURITANIE Ancienne colonie française, la République Islamique de Mauritanie a obtenu son indépendance le 28 novembre 1960. Elle est limitée au Nord par le Sahara Occidental et l’Algérie, à l’Est par le Mali et le Sénégal et à l’Ouest par l’Océan Atlantique. Elle couvre une superficie de 1.030.700 km2 pour une population de 2’548’1571 habitants, composée d’une communauté Arabe constituée de maures blancs et d’anciens esclaves affranchis appelés haratines, et d’une communauté Négro-Africaine constituée de Haalpulaar, de Soninké et de Wolof. La pratique de la mutilation génitale féminine est observée dans toutes les composantes nationales. Il convient cependant de souligner que les Wolofs ne pratiquent pas en principe l’excision et que ceux parmi eux qui se livrent à cette pratique le font à cause de la proximité géographique et culturelle. Ainsi les wolofs vivant dans leur région d’origine qu’est le Trarza ignorent la mutilation génitale féminine. PRESENTATION DE LA SOCIETE HAALPULAAR La stratification sociale de la société Haalpulaar La société Haalpulaar est ainsi stratifiée : 1 Rimbe (nobles) - Fulbe - Toorobbe - Sebbe - Jaawanbe - Subalbe Aristocratie politique et guerrière Aristocratie politique et religieuse. Guerriers Conseillers Pêcheurs Neenbe (artisans) - Waylube Forgerons Recensement Général de la population et de l’habitat 2001 117 Jiyaabe (esclaves) - Sakkeebe - Maabube - Lawbe Cordonniers Tisserands Boisseliers - Wammbabe - Awlube Guitaristes laudateurs Griots - Maccube Esclaves non affranchis DEFINITIONS ET RAISONS DES PRATIQUES TRADITIONNELLES NEFASTES OBSERVEES AU SEIN DES COMMUNAUTES CULTURELLES MAURITANIENNES Est forcé, un mariage où au moins l’une des parties ne consent pas au mariage et où la contrainte est employée. En Europe, ce phénomène peut prendre différents aspects : soit la jeune fille, résidente en Europe, est attirée à l’étranger sous un prétexte fallacieux, soit, venant de l’étranger, elle est « importée », voire achetée par un occidental ou un immigré naturalisé. Il se peut encore que les futurs époux résident déjà sur le territoire au moment du mariage. Le lévirat est un type particulier de mariage où une veuve épouse le frère du défunt, afin de continuer la famille de ce dernier. Les enfants issus de ce remariage ont le même statut que les enfants du premier mari. Cette pratique, souvent forcée et combinée avec la polygamie, est notamment encore pratiquée dans certains pays africains. Le sororat est la pratique du remariage d’un veuf avec la sœur de son épouse. La pratique du lévirat et du sororat en tant que stratégie matrimoniale endogamique est destinée à renforcer la cohésion sociale du groupe ethnique et celle de la famille, tout en permettant la protection et l’éducation des enfants. On appelle mariage précoce, tout mariage au sein duquel l’un des partenaires est âgé de moins de 18 ans. Le désir de maintenir des stratégies matrimoniales dont la finalité est de préserver la cohésion sociale du groupe ethnique et d’enrayer le spectre des grossesses hors du mariage a donné naissance au mariage précoce. Le désir de sauvegarder la pureté généalogique du sang et de garantir l’honneur du groupe familial a enfanté des pratiques visant à contrôler et à surveiller la sexualité des femmes. En effet, dans une culture où la virginité est une valeur et où toute grossesse avant le mariage entraîne un déshonneur, l’excision apparaît comme une solution. 118 Les mutilations génitales féminines couvrent un large éventail d’opérations rituelles et non médicales, effectuées sur les organes génitaux des femmes, qui englobent toutes leur ablation partielle ou totale ou des incisions à l’intérieur du vagin. Elles recouvrent donc toutes les interventions incluant l’ablation partielle ou totale des organes génitaux externes de la femme. La forme la plus courante est l’excision du clitoris et des petites lèvres et la forme la plus extrême est l’infibulation. On parle de mutilation génitale car les raisons qui poussent à faire cette opération ne sont pas d’ordre médical mais purement socioculturel. L’excision (MGF) apparaît aujourd’hui comme celle qui pose le plus de défis. Le gavage est une pratique traditionnelle observée en milieu maure et elle consiste à engraisser les jeunes filles en leur donnant une très quantité de nourriture. Le dicton maure stipule : « La femme n’occupe de l’attention que ce qu’elle occupe de l’espace » autrement dit « le prestige social d’une femme dépend du volume qu’elle occupe dans l’espace ». Les fillettes sont engraissées pour acquérir un indice de richesse flatteur pour les parents. Il est aussi considéré comme un facteur de séduction, un jeu pour se préparer au mariage. L’épouse obèse témoigne de la richesse du mari (valeur partagée par la majorité des ethnies de la région). C’est probablement là, une question de vanité plus que d’esthétique. Une femme grosse, donc oisive, doit être bien pourvue de servantes et de chamelles laitières. L’histoire nous révèle que certaines civilisations ont valorisé l’obésité féminine, et vanté des endroits imposants de leurs corps. Les tableaux présentant des femmes fortes, notamment du moyen âge en Europe, témoignent largement de cela. Ces perceptions de la beauté devraient être, nous le supposons, en rapport notamment avec le partage du travail et l’abondance dans des régions données. « Cet embonpoint, déjà apprécié au XI et XVI siècles est demeuré un canon de la beauté maure » nous évoque Odette du Puigaudeau, qui décrit dans son œuvre « Arts et Coutumes des Maures »* des conditions de gavage (chez les habitants du Nord mauritanien) et à quel point les Maures tenaient à gaver leurs filles. Ainsi pour nous résumer nous dirons que toutes ces pratiques traditionnelles néfastes tournent autour de ces principales raisons : la beauté féminine, la fidélité conjugale, l’accomplissement de la prière, la préservation de la virginité, la défense de l’honneur du groupe familial et la quête de la pureté généalogique du sang. * Odette du Puidaudeau Arts et Coutumes des Maures, page 45, Annales de l'IFAN Dakar, 1956 119 LE STATUT DE LA PERSONNE HUMAINE Le sentiment de gacce2 en tant que confirmation de l’identité ontologique de l’homme ne peut être bien saisi sans un détour par la notion de personne chez les Haalpulaar’en. La personne est avant tout un tagoore c’est à dire une créature divine et qui, à ce titre a une certaine dignité. Le tagoore est constitué de plusieurs éléments dont le banndu c’est-à-dire le corps; le hakille c’est à dire la raison ou la conscience. Il est perçu comme cette instance qui permet à l’homme de penser, de discerner le bien du mal avant toute conduite. Il y a le fittaandu et le wonki pour désigner l’âme, la vie, en un mot le principe vital. Il reste que le wonki renvoie surtout à l’existence c’est-à-dire à la dimension matérielle de l’être. La combinaison de ces éléments, l’attribut de la pensée n’est pas, dans la pensée négro-africaine, une condition suffisante pour revendiquer ou conférer le statut de l’humain à quelqu’un. Contrairement à la tradition hellénique, la raison n’est pas la marque essentielle de l’homme, l’homme n’est pas seulement une substance pensante. L’homme, en milieu Haalpulaar, est une substance qui éprouve de la honte. “No mo hersataa wonaa neo” autrement dit un homme qui ne ressent pas la honte, n’est pas un homme. Le gacce est donc ce qui confère à l’homme son statut de personne humaine. Il est impossible de décrire un homme, de le nommer et même de le concevoir sans y rattacher le sentiment de gacce. L’homme est donc un être qui éprouve ontologiquement la honte. Dans la vie de tous les jours, l’homme est structuré pour éprouver de la honte afin de savoir comment il doit se comporter selon son statut, son sexe, son âge, sa situation matrimoniale, en face de son paso, de ses beaux-parents etc. Principe régulateur de toutes les attitudes sociales dans le milieu Haalpulaar où la dimension axiologique de la conduite reste prédominante, le sentiment de gacce est ce par quoi l’homme arrive à se comporter moralement et se distingue ainsi radicalement de l’animal. L’univers social des Haalpulaar’en est fortement imprégné de ce sentiment. Le gacce est une valeur essentielle en ce sens que l’honneur, la dignité, la retenue, sont ressenties en fonction du degré du sentiment de gacce qu’éprouve une personne. Dans une société où le gacce est si ancré, toute quête d’un plaisir charnel est l’objet d’une codification et d’une normalisation rigoureuse quant à son mode d’expression et de satisfaction. 2 honte 120 LA METHODOLOGIE La méthodologie suivie pour comprendre la pratique des mutilations génitales féminines au sein de la communauté Haalpulaar’en de Kaédi et élaborer les contrearguments culturels est la suivante. Nous avions dans un premier temps rencontré les mères des fillettes, les exciseuses traditionnelles, les théologiens, les pères de famille et enfin des adolescentes pour recueillir les arguments culturels c’est à dire l’ensemble des procédés de justification et de légitimation de la pratique des mutilations génitales féminines. Il convient cependant de souligner que lors de notre rencontre avec les adolescentes, nous avions surtout cherché à obtenir des informations sur leurs perceptions de la pratique des mutilations génitales féminines Ce recueil s’est accompagné de la recherche du degré de connaissance desdites personnes ressources des dangers liés à cette pratique. Dans un deuxième temps nous avions rencontré les exciseuses traditionnelles pour obtenir des informations sur leur rang social, leur âge, les connaissances (entendez par là les formules magiques et les chansons qui accompagnent cette pratique), les techniques médicales, les modalités pratiques de l’excision, les instruments utilisés, le mode de transmission de la connaissance, le lieu, l’âge des fillettes excisées, les femmes qui amènent les fillettes et la nature des dons liés à ces prestations. Et enfin dans un troisième temps nous avions rencontré le personnel médical qui se livre à cette pratique, ainsi que les mères de famille déjà conscientes des dangers de la pratique des mutilations génitales féminines et qui ne se déclarent pas pour autant contre la pratique. Notre intention étant de connaître les véritables raisons de cette hésitation, disons de cette peur. Cette approche nous a permis de collecter des chansons, des mythes, des proverbes et des sentences ayant pour fonction de justifier culturellement et de légitimer la pratique des mutilations génitales féminines, sans oublier l’argument religieux. C’est munis de ces arguments culturels que nous avions procédé à l’élaboration des contre-arguments culturels. Durant cette phase, il s’agit de vérifier la pertinence et l’opérationnalité des arguments culturels en les confrontant à la réalité et au vécu quotidien des populations. Après avoir émis quelques contrearguments culturels, nous sommes allés sur le terrain rencontrer les femmes et pour recueillir et partager leurs expériences. On s’est rendu compte que non seulement la pratique des mutilations génitales féminines n’est pas ce puissant bouclier qui permet de domestiquer la sexualité pour prévenir les actes jugés honteux, mais qu’elle était très dangereuse sur le plan sanitaire et qu’elle constitue un attentat à la dignité de la femme. 121 Alors quelle attitude face à cet argument culturel qui dit « Debbo haalpulaar mo haddaaki wona haalpulaar » c’est-à-dire qu’une femme haaalpulaar non excisée n’est pas une femme haalpulaar. Il fallait donc leur expliquer que la quête de l’identité ne saurait se faire par des moyens qui violent la dignité de la femme et qu’aucune culture ne peut se prévaloir d’une spécificité allant dans ce sens. Cependant il faut noter que lors de cette première étape de nos travaux, nous n’avions pas cherché à recueillir l’expérience des adolescentes relatives à des mutilations génitales féminines ni à leur faire partager celle des mères de famille. Cette méthodologie a été approfondie suite notre rencontre avec le Professeur Patrice Meyer-Bisch, dont les définitions de la culture et des droits culturels nous ont amené à mettre en chantier la philosophie des contre-arguments culturels. En effet ses analyses m’ont poussé à revoir la nature de ma collaboration avec les jeunes filles de Kaédi. Nous sommes retournés sur le terrain et nous avions décidé de les impliquer et de les responsabiliser et de cette initiative sont nés ces contrearguments culturels poignants et pertinents sur la pratique des mutilations génitales féminines. Cependant l’énoncé qui m’a le plus impressionné est celui qui a été fait par Kadia Mbaye : « » à savoir que le fait d’exciser une fille déjà consciente ressemble à un viol. LA DEFINITION DES CONTRE-ARGUMENTS CULTURELS La contre-argumentation culturelle est une stratégie culturelle destinée à combattre et à dévaloriser certaines pratiques traditionnelles néfastes. Les contrearguments culturels forment un procédé qui consiste à s’appuyer sur la culture pour dévaloriser et déconstruire certaines pratiques traditionnelles qui sont dangereuses sur le plan médical, non conformes au respect des Droits de l’homme et qui ne sont pas une obligation religieuse afin de changer les attitudes, les comportements et les conduites sociales des populations. Pour ce faire il faut s’attaquer à la sphère de légitimation desdites pratiques dans l’imaginaire populaire mauritanien. LE POURQUOI CULTURELLE DE LA CONTRE-ARGUMENTATION Le choix de l’application de la contre-argumentation culturelle sur la pratique des mutilations génitales féminines est lié au fait que c’est la pratique traditionnelle 122 néfaste la plus répandue. Elle est observée presque par toutes les composantes nationales mauritaniennes. (Voir les chiffres des mutilations génitales féminines) Cette stratégie culturelle est due au fait que toutes les autres formes d’approches (sanitaire, juridique et économique) qui se manifestent sous la forme de sensibilisation aux les méfaits des MGF, à la pénalisation des MGF et à la reconversion des exciseuses traditionnelles n’ont pas donné les résultats escomptés en Mauritanie. Certes les vertus de la pénalisation sont réelles. Elle aide à débarrasser les gens des mystifications et des balivernes qui dominent leur esprit, le remplissent d’illusions et les incitent à pratiquer ce qui est contraire à leur intérêt. Mieux, elle essaie de leur faire prendre conscience qu’en criminalisant ce genre d’actes, elle traduit et préserve leurs intérêts en leur expliquant les effets négatifs de cet acte. Malgré ces vertus, elle n’aura aucun impact si les populations n’y adhérent pas. Alors nous nous sommes dit pourquoi ne pas tenter avec la contreargumentation et essayer de voir dans quelle mesure la combiner avec les autres formes de stratégies qui préconisent la pénalisation, la reconversion des exciseuses traditionnelles, la formation et le dialogue des générations. LA FONCTION DES CONTRE-ARGUMENTS CULTURELS La fonction des contre-arguments culturels est de délégitimer et de déconstruire les pratiques traditionnelles néfastes que sont les mutilations génitales féminines, le lévirat et le sororat, les mariages précoces, le gavage et les tabous alimentaires. Mieux, elle vise à long terme à dévaloriser et à déconstruire les pratiques traditionnelles dans l’imaginaire populaire des Mauritaniens. C’est la raison pour laquelle tous les modes de véhicule de l’information dans les sociétés traditionnelles seront identifiés et mis à contribution. La contre-argumentation culturelle est une invitation à l’introspection et au changement des comportements et des conduites sociales. Il s’agit d’intégrer dans le système des représentations culturelles africaines, le goût de l’introspection et de l’argumentaire rationnel. « La modernité réside dans un effort interne gigantesque que doivent mener les élites africaines dans la remise en cause courageuse de ce qui, dans leur culture, est mortifère. Il leur faudrait accepter de perdre ce qui est mort dans leur culture, d’en faire le deuil, un deuil actif au sens freudien du terme, pour redevenir créateur comme leurs ancêtres l’ont été. En d’autres termes, la modernité est un long processus de construction et de déconstruction de soi ». 123 Il convient de souligner que l’investigation rationnelle est la mère de l’esprit critique qui est à la base des progrès, tant au niveau scientifique, technique, sanitaire, que dans la gestion des affaires de la cité et de l’amélioration des indicateurs de qualité de l’espace socio-politique en Occident. La démocratie ne repose-t-elle pas sur cette confiance que tout individu doué de raison est apte à choisir et à se comporter selon les lois dont la finalité est de réguler la vie en société, garantissant l’ordre et la paix ? Que l’on ne vienne donc pas nous rétorquer que la contre-argumentation culturelle met surtout en avant la raison et la puissance de la logique. Que serait un individu sans la raison, en un mot sans cette faculté d’analyse et de discernement ? Il est curieux de constater que dès que la théorie de la contre-argumentation culturelle est abordée, la question de la spécificité ressurgit. Il est donc temps que les Africains mettent fin à la conspiration du silence qui entoure les pratiques traditionnelles et se dépouillent de cesdites pratiques et croyances qui sont dangereuses sur le plan sanitaire et qui constituent de graves violations des droits de la personne humaine. La contre-argumentation culturelle reste ouverte à tous les apports ayant pour objectifs de combattre les pratiques traditionnelles néfastes. Ainsi certains contrearguments culturels ont un aspect : - sanitaire : c’est-à-dire : « la pratique de l’excision peut entraîner des complications au moment de l’accouchement ». Un aspect juridique : à savoir que « l’Etat interdit la pratique de l’excision » - psychologique: « Sache que le jour où les femmes se mettent en valeur, si tu es excisée tu y iras avec un handicap ». -émotionnel : « Une femme haalpulaar excisée voit sa coépouse wolof devenir la préférée de leur époux ». Et enfin, éthique : c’est-à-dire : « Le fait d’exciser une fille déjà consciente ressemble à un viol ». Et enfin la contre-argumentation culturelle fait appel à l’histoire. Nous avions cherché dans notre patrimoine culturel des figures légendaires qui ont incarné des valeurs positives telles que la droiture, l’honnêteté, le sens de la dignité et le refus de la compromission en toutes circonstances. Il s’agit de Hamme Birom Mody 124 Kome et de i qui sont encore considérés de nos jours comme des héros dont l’évocation des faits exerce une forte fascination dans l’imaginaire populaire des Haalpulaar’en de la Vallée du fleuve Sénégal. La réhabilitation des figures légendaires permet de contrebalancer les fausses valeurs véhiculées par la culture pour légitimer la corruption et le détournement des deniers publics. Par cette réhabilitation la contre-argumentation culturelle permettra d’impulser de nouvelles conduites, de valoriser certains comportements et de criminaliser l’éthique fondée sur la violence et l’accaparement. LE SUPPORT ET LES CANONS DE LA COMMUNICATION Dans une société orale comme celle de la communauté Haalpulaar’en de Kaédi, la mémoire collective joue un rôle capital. Les faits et gestes des individus sont rapportés par des chansons. Le poids des mots exerce une réelle emprise sur le vécu quotidien des populations et le désir de défendre son prestige social reste très fort. Le mot installe l’individu dans sa dignité culturelle. Il est ce par quoi on lui signifie qu’il est le bienvenu, qu’on a de la considération pour lui et qu’il est un « Tagoore » c’est à dire une créature qui mérite du respect. Ce climat d’échange des mots fait qu’il devient un sujet apte à recevoir, à donner et à partager. L’appropriation des droits humains passe nécessairement par les canons des ressources culturelles que sont la langue et les proverbes. C’est le lieu de connexion et de partage des expériences et des acquis entre les humains. C’est dans ce contexte que Amadou Ba affirme que : « La langue et la culture ont de tout temps constitué les principaux attributs par lesquels les peuples déterminent leur identité et se valorisent face aux autres. C’est aussi les attributs pour lesquels l’autre est admiré, l’autre est méprisé, l’autre est accepté, l’autre est refusé. La langue est l’âme d’un peuple ». L’âme, ce n’est pas seulement ce qui donne la fierté d’être et d’exister, c’est ce qui permet d’exister, c’est ce qui fait vivre. C’est pourquoi l’âme exige de tout temps respect et considération. Sans âme l’humain ne vit point, n’existe point. Ainsi, les conflits entre la culture et les droits deviennent des conflits pour l’existence pour la vie. Et concernant les proverbes, on souligne que : 125 « Les Proverbes sont un moyen typique de transmission de la tradition et du savoir traditionnel. Ils sont peut-être un des derniers moyens de transmission de ce savoir qui continue à jouer un rôle important dans les contextes quotidiens, traditionnels et modernes ». Il ressort de ces multiples assertions que dans toutes les sociétés humaines, les considérations ayant trait aux droits de l’homme et au respect de la dignité humaine sont présentes même si elles ne sont pas codifiées. La philosophie des contre-arguments culturels inspirée des travaux de l’école de Fribourg sur les droits culturels Observer : La pratique, les protagonistes, le rituel, les instruments, les contre-prestations, les techniques médicales, le savoir-faire, les formules et les chansons qui accompagnent cette pratique. Recueillir : Les arguments culturels et les différents modes de véhicule de cesdits arguments culturels à savoir les dictons, les sentences, les mythes, les chansons et les proverbes. Confronter : Les arguments culturels avec la réalité et le vécu quotidien des populations, afin de tester leur degré d’opérationnalité et de déceler les lacunes et les zones d’ombres. Partager : Les expériences personnelles selon le profil, les témoignages, les confidences, les expériences des autres pays de la sous-région. Impliquer : Les adolescentes les mères de famille, les Ulémas, les ONG, les directeurs des établissements scolaires et des centres de formation professionnelle dans la recherche des contre-arguments culturels, à partir des expériences, des témoignages, des confidences et du résultat de la confrontation des cesdits arguments culturels avec le vécu quotidien des populations. Responsabiliser : Les adolescentes, les mères de famille, les pères de famille, les Ulémas, les autorités et la société civile, afin qu’ils deviennent des acteurs vecteurs de la sensibilisation sur les méfaits de la pratique des MGF. Cette méthodologie est le fruit de la collaboration avec l’IIEDH de Fribourg. 126 LES ARGUMENTS CULTURELS L’excision empêche le déshonneur L’excision garantit la préservation de la virginité Si vous entendez cette chanson, on a à faire à une vierge L’excision éduque et atténue le plaisir charnel Une femme non excisée sera mariée par un troubadour La femme est le pilier de la généalogie Que le varan se marie au varan Kumba porta le pagne et enfanta d’un héros Une femme non excisée ne peut pas prier Une femme non excisée n’est pas attrayante sexuellement pour un homme Le fait d’exciser les fillettes fait partie intégrante de nos traditions Ce sont les traditions qui préservent l’identité du groupe ethnique 127 Tout homme doit être fier de ce qui fait partie de son identité LES CONTRE-ARGUMENTS CULTURELS EN PULAAR L’excision n’empêche pas le déshonneur Je suis digne, je suis digne pourvu qu’il n’y ait pas la famine L’excision ne permet pas de préserver la virginité L’excision n’est pas un bouclier contre le désir charnel L’excision n’empêche pas une femme de se laisser aller Les êtres humains sont des morceaux de tissu Chaque enfant suit son destin La personnalité n’est pas un fait héréditaire Les haalpulaar’en se marient avec les femmes wolofs Les mecquoises prient et font le pèlerinage pourtant elles ne sont pas excisées Le fait d’exciser une fille déjà consciente ressemble à un viol 128 Le viol porte atteinte à l’honneur et à la dignité de la fille Le viol est une blessure qui ne cicatrise jamais Il n’est pas dit que toutes les traditions sont bonnes, pour preuve le cérémonial de blâme des belles sœurs a été complément abandonné pour inconvenance Le fait d’abandonner certaines traditions ne porte nullement atteinte à l’identité du groupe ethnique L’esclavage fait partie des traditions mais de nos jours nul ne peut se valoriser en se vantant d’avoir beaucoup d’esclaves 129 PERSPECTIVES ACTUELLES AUX PRATIQUES TRADITIONNELLES PREJUDICIABLES KAMEL FILALI Vice Président UNCRC, Algérie Résumé Les éléments qui amènent aux PTP sont pluriels. L’une des notions essentielles demeure que cette règle d’action est considérée comme obligatoire dans le processus d’acceptation sociale de l’enfant et/ou des parents dans la communauté. L’auteur rappelle l’ampleur du phénomène et s’attache à donner un aperçu des instruments internationaux, s’arrêtant plus spécifiquement sur la CIDE. Evoquant plusieurs articles, les principes de convergence et d’universalité des grands traités internationaux sont ensuite relevés. Les Etats parties se voient rappeler l’obligation de tenir compte des observations finales du Comité des Droits de l’Enfant. Tous les droits de l’Homme ont la même valeur et s’appliquent à chaque être humain. Lorsqu’il y a conflit dans les droits, l’importance majeure doit être donnée à l’intérêt supérieur de l’enfant. Les observations finales du CDE ou du CIDAW doivent amener à la confection de stratégies au niveau international, régional et local, en vue de l’éradication des PTN. Zusammenfassung Zahlreiche Faktoren liegen den schädlichen traditionellen Praktiken (STP) zugrunde. Ein Hauptaspekt ist immer noch, dass diese Praktiken für die soziale Akzeptanz des Kindes und/oder der Eltern in der Gesellschaft als unumgänglich angesehen werden. Der Autor ruft die Tragweite des Phänomens in Erinnerung und gibt einen Überblick über die internationalen Verträge zu diesem Thema, mit besonderem Augenmerk auf der Kinderrechtskonvention (KRK). Anschliessend erwähnt er mehrere Artikel und hebt dadurch die Konvergenz- und Universalprinzipien der wichtigen internationalen Verträge hervor. Die Mitgliedstaaten werden daran erinnert, dass sie die abschliessenden Bemerkungen des Komitees für Kinderrechte berücksichtigen sollten. Alle Menschenrechte haben den gleichen Wert und gelten für jeden Menschen. Wenn es zwischen verschiedenen Rechten zu einem Konflikt kommt, muss das Wohl des Kindes in den Vordergrund gestellt werden. Die abschliessenden Bemerkungen des Komitees 130 für Kinderrechte oder des CEDAW müssen zu einer Ausarbeitung von Strategien auf internationaler, regionaler und lokaler Ebene im Hinblick auf die Beseitigung von STP führen. Resumen Los elementos que llevan a las PTP son plurales. Una de las nociones esenciales permanece que esta norma de acción se da por obligatoria en el proceso de aceptación social del niño y/o de los padres en la comunidad. El autor recuerda la amplitud del fenómeno y da una vista de los instrumentos internacionales, más específicamente sobre el CIDE. Evocando varios artículos, Sr. Filali destaca los principios de convergencia y universalidad de los grandes tratados internacionales. Los Estados partes se ven recordar la obligación de tomar en cuenta las observaciones finales del Comité de los Derechos del Niño. Todos los derechos humanos tienen el mismo valor y se aplican a cada ser humano. Cuando hay conflicto en los derechos, la importancia principal debe darse al interés superior del niño. Las observaciones finales del Comité de los derechos del Niño o el CIDAW deben llevar a la elaboración de estrategias a nivel internacional, regional y local, en vista de la erradicación de las PTP. Summary The root causes for HTPs are multifold. An essential feature is that their rule of action is considered compulsory for social acceptance of the child and/or the parents in the community. The author reminds how wide-ranging this phenomenon is, and gives a survey of international instruments, with an emphasis on the CRC. Mentioning several articles, the convergence and universality principles contained in international treaties are pointed out. State parties are pledged to take into account the Concluding Observations of the Committee on the Rights of the child. All Human rights have the same worth, and apply to every human being. In case of conflicting rights, priority must be given to the best interests of the child. The Concluding Observations of the CRC and CEDAW Committees must lead to the building up of strategies at international, regional and local level, in view of the elimination of HTPs. * * * 131 C’est pour moi un grand honneur et un immense plaisir de pouvoir m’adresser à cette honorable assemblée sur le thème des défis et perspectives aux pratiques traditionnelles néfastes, un sujet aussi bien passionnant que présentant des défis importants. Parler des droits de l’enfant et des pratiques traditionnelles préjudiciables nous impose d’abord de faire le constat du contenu et de l’ampleur de ce phénomène, mais aussi de nous poser des questions quant aux défis et perspectives. Le thème des pratiques traditionnelles préjudiciables implique que l’on se penche sur la question de la diversité culturelle et l’approche universaliste des droits de l’Homme, l’importance de l’éducation dans la lutte pour l’abandon des pratiques traditionnelles préjudiciables et la nécessité de maintenir une prohibition par le droit de ces pratiques pour éradiquer le phénomène. Avant d’aller plus loin dans mon développement il conviendrait de délimiter le contenu de la notion clé qui va surgir tout au long de cette présentation, à savoir les pratiques traditionnelles préjudiciables. De quoi s’agit-il ? Il s’agit avant toute chose de définir ce qu’il faut entendre par « pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé » afin de mieux déterminer ce que cellesci englobent ou non. Elément matériel des PTP : La pratique se définit comme le fait de suivre une règle d’action sur le plan moral ou social (insister sur la fréquence, la répétition du fait social représenté par la PTP). Elément Psychologique : Elle est traditionnelle lorsqu’elle est le fruit d’une manière de penser, de faire ou d’agir, qui est un héritage du passé. L’élément essentiel est que la communauté perçoit cette pratique comme une obligation et par conséquent cette tradition est érigée en source de droit et devient une coutume à laquelle sont rattachés des effets juridiques, dont l’obligation. Elément lié au dommage (préjudice) : Finalement cette pratique doit être préjudiciable à la santé, c’est-à-dire qu’elle doit porter préjudice à la santé physique et/ou psychique de l’enfant et/ou mettre en danger son développement. Le plus important à retenir est que cette règle d’action est considérée comme obligatoire dans le processus d’acceptation sociale de l’enfant et/ou des parents dans la communauté, ou est considérée comme bénéfique pour l’enfant. L’enfant n’y échappe alors que très rarement, sous peine d’exclusion sociale, familiale, voire d’atteinte à sa vie. Le présent document tente de donner un aperçu d’une pratique traditionnelle, culturelle et sociale : les mutilations génitales féminines (MGF), qui a eu des 132 incidences sur la santé. Il s’efforce également de souligner les efforts entrepris au niveau continental et mondial pour éliminer cette pratique traditionnelle préjudiciable, ainsi que les problèmes qui se posent dans la lutte contre de telles pratiques. En outre, il soumet certaines recommandations pour des actions concertées, dans le but de mettre fin aux pratiques traditionnelles néfastes, notamment les mutilations génitales féminines. I- CONTENU ET AMPLEUR DES TRADITIONNELLES PRÉJUDICIABLES PRATIQUES 1/ Contenu des pratiques traditionnelles préjudiciables Lors de la rédaction de la Convention relative aux Droits de l’Enfant, la principale pratique que les rédacteurs avaient à l’esprit était celle des mutilations génitales féminines (MGF). Il s’agit de l’une des pratiques traditionnelles préjudiciables les plus répandues. C’est pourquoi les MGF seront évoquées continuellement dans mon intervention pour étoffer l’ampleur des pratiques traditionnelles préjudiciables. Il y a cependant beaucoup d’autres pratiques commises chaque jour sur les enfants et ce, souvent impunément, mariage forcé, châtiment corporel, violence à l’égard des femmes, le ‘sororat’ et le lévirat, gavage des femmes, les femmes girafes, les disques labiaux, le repassage des seins, la torture. En Afrique, les pratiques traditionnelles préjudiciables sont aggravées par la précarité de la situation sanitaire qui est particulièrement mauvaise pour les femmes et les enfants, comme par exemple le manque de logement approprié et d’eau potable, la malnutrition, des services de santé insuffisants, sous ou mal utilisés, l’insuffisance des systèmes éducatifs, etc. Il ya bien sûr d’autres pratiques traditionnelles préjudiciables reconnues par les organes internationaux (ONU) par exemple : - Le crime d’honneur - Le châtiment corporel - La dot - Le contrôle de la virginité - La croyance que l’enfant est possédé - Les rites de veuvage 133 - Les castes - La préférence systématique pour les garçons. 2/ Conséquences préjudiciables Décès, douleurs aiguës, lésions des tissus, parfois graves états de choc, risques de décès, hémorragies, infections (hépatite, tétanos, VIH, empoisonnement du sang) qui peuvent entraîner la mort, fractures et luxations lorsque la fillette se débat, brûlures à l’émission de l’urine, etc. 3/ Ampleur du phénomène (exemple des MGF) Il faut signaler tout d’abord que l’OMS considère ce phénomène comme un problème de santé publique à l’échelon mondial. Comme déjà mentionné plus haut dans mon introduction, je retiendrai les MGF pour renseigner sur l’étendue du phénomène des pratiques traditionnelles préjudiciables. L’OMS estime, à l’échelle mondiale, de 100 à 132 millions le nombre constant de filles et de femmes ayant subi des mutilations sexuelles, dont environ 120 millions pour le seul continent africain (soit un tiers de la population féminine de l’Afrique). Chaque année, 2 millions de filles supplémentaires sont susceptibles de connaître le même sort. La plupart d’entre elles vivent dans 28 pays africains, un plus petit nombre au Moyen-Orient, dans des pays d’Asie, chez certains Aborigènes d’Australie et en Amérique latine. Les chiffres globaux et par type de mutilations sont probablement sous estimés, d’une part en raison d’une très probable non-déclaration d’un certain nombre de cas, mais aussi d’un témoignage imprécis des victimes, tendant à sous-estimer l’importance de la mutilation. Les pays occidentaux connaissent de plus en plus de mutilations génitales féminines, chez les femmes et fillettes immigrées des sociétés concernées : en Europe, notamment en Allemagne, en Belgique, en France, en Grande-Bretagne, en Suède, en Suisse, et aussi au Canada, aux États-Unis d’Amérique, en Australie, en Nouvelle-Zélande, etc. II- INSTRUMENTS INTERNATIONAUX a) La Déclaration universelle des droits de l’Homme. - Article 1 : 134 « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité ». b) La Convention des Droits de l’Enfant (CDE) La Convention des Droits de l’Enfant (CDE) est la Convention la plus largement ratifiée des Nations Unies. Son article 1er définit l’enfant comme tout être humain âgé de moins de 18 ans, sauf dans les cas ou la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable. Les Etats Parties doivent prendre en compte les principes généraux que l’on retrouve dans ses article 2 (non-discrimination), article 3 (intérêt supérieur de l’enfant), article 6 (droit à la vie, survie et développement) et article 12 (droit de l’enfant d’être entendu). L’article 5 évoque le rôle des parents, ou le cas échéant, les membres de la famille élargie ou de la communauté, comme prévu par la coutume locale, les tuteurs ou autres personnes légalement responsables de l’enfant, de donner à celuici, d’une manière qui corresponde au développement de ses capacités, l’orientation et les conseils appropriés à l’exercice des droits que lui reconnaît la Convention. Le Comité des Droits de l’Enfant n’a pas fait d’interprétation sur l’application de cette disposition et comment elle devrait être interprétée et elle peut être très facilement en conflit avec la notion de l’intérêt supérieur de l’enfant. Dans la pratique les parents sont de facto les détenteurs des droits de leurs enfants et revendiquent toujours de meilleures connaissances pour la prise de décision en leur lieu et place (négation du droit de l’enfant d’être entendu). Conformément à l’article 24(3) « Les Etats Parties prennent toutes les mesures efficaces appropriées en vue d’abolir les pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé des enfants ». Les pratiques traditionnelles sont très souvent appliquées sans le consentement avisé de la fille. Cette dernière peut être trop jeune pour donner un consentement avisé. La pratique traditionnelle est mise en œuvre contre la volonté de la fille et au nom de la tradition ou coutume. Les pratiques traditionnelles impliquent l’usage de la violence. L’article 24(3) donne au risque porté a la santé une considération centrale. Les Observations Générales du Comité des Droits de l’Enfant sur la santé des adolescents (2003 N° 4), HIV/SIDA et les droits de l’enfant (2003 N° 3) et la mise en œuvre des droits de l’enfant dans la petite enfance (2005 N° 7) : Toutes ses Observations Générales font spécifiquement référence aux pratiques traditionnelles préjudiciables. 135 L’article 37(a) stipule que : « nul enfant ne doit être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumain ou dégradants... » La disposition est absolue dans le sens où elle stipule que nul enfant ne doit être soumis, elle est l’équivalent de l’article 5 de la (DUDH) et à l’article 7 du Pacte sur les droits civils et politiques (PDCP). Cette disposition s’applique à tout enfant et en tout lieu. Dans l’observation générale N° 8 du Comité des Droits de l’Enfant sur le droit de l’enfant à une protection contre les châtiments corporels et les autres formes cruelles ou dégradantes de châtiments (art. 19, 28 (par. 2) et 37, entre autres) le Comité définit le châtiment corporel ou physique comme « tous châtiments impliquant l’usage de la force physique et visant à infliger un certain degré de douleur ou de désagrément, aussi léger soit-il ». La plupart de ces châtiments donnent lieu à l’administration d’un coup (tape, gifle, fessée) à un enfant, avec la main ou à l’aide d’un instrument - fouet, baguette, ceinture, etc. De l’avis du Comité, tout châtiment corporel ne peut être que dégradant. En outre, certaines formes non physiques sont également cruelles et dégradantes et donc incompatibles avec la Convention. À leur nombre figurent, par exemple: les châtiments tendant à rabaisser, humilier, dénigrer, prendre pour bouc émissaire, menacer, effrayer ou ridiculiser l’enfant. c) Les Observations finales du CDE Les Observation finales du CDE doivent être perçues comme obligatoires par les Etats Parties dans le sens ou elles font partie du processus d’établissement des rapports et sont une pièce d’orientation essentielle permettant à ces Etats de connaître quels sont les progrès effectués et les points de préoccupation sur lesquels des efforts doivent être déployés et pour lesquels l’Etat soumis à examen doit apporter des réponses sur les mesures prises dans son prochain rapport périodique. d) La Convention sur l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes. Cette Convention n’a pas de dispositions explicites sur les pratiques traditionnelles préjudiciables ou sur la violence mais dans l’Observation Générale N°19 (1992) le Comité (CEDAW) affirme que 136 « La violence fondée sur le sexe est une forme de discrimination qui empêche sérieusement les femmes de jouir des droits et libertés au même titre que les hommes». (voir article 1 de la convention) L’article 5 de cette Convention demande aux Etats parties qu’ils « prennent toutes les mesures appropriées pour modifier les schémas et modèles de comportement socio culturels de l’homme et de la femme en vue de parvenir à l’élimination des préjugés et des pratiques coutumières, ou de tout autre type, qui sont fondés sur l’idée de l’infériorité ou de la supériorité de l’un ou l’autre sexe ou d’un rôle stéréotypé des hommes et des femmes ». III- DÉFIS ET PERSPECTIVES 1/ Diversité culturelle et droits de l’Homme L’universalité des droits de l’Homme est bien instituée dans différents instruments relevant du Droit international. Les droits de l’Homme sont affirmés parmi les objectifs des Nations Unies dont la Charte les attribue « à tous sans distinction aucune ». La Déclaration universelle des droits de l’Homme affirme également un consensus autour des standards universels des droits de l’Homme. L’universalité des droits de l’Homme est aussi bien établie dans les deux protocoles de 1966 relatifs aux droits civils et politiques d’une part et aux droits économiques, sociaux et culturels de l’autre. La Déclaration et le Programme d’Action de Vienne adopté en 1993 ont renforcé l’universalité des droits de l’Homme en réaffirmant que tous les droits de l’Homme sont universels, indivisibles et interdépendants, ce qui signifie que les droits politiques, civils, culturels et économiques doivent être appréhendés dans leur totalité comme étant des droits de l’Homme. On ne peut donc adopter une approche sélective. Tous les droits de l’Homme ont la même valeur et s’appliquent à tous les êtres humains. Pour éviter de m’engager dans un exercice de citation d’une multiplicité d’instruments juridiques, je me contenterai de signaler que l’universalité des droits de l’Homme trouve également un champs d’élection dans les instruments internationaux ou régionaux relatifs par exemple à l’esclavage, la torture, la discrimination raciale, le génocide, la discrimination contre les femmes, les droits de l’enfant, les minorités et la tolérance religieuse. Les bases d’une diversité culturelle ou plus précisément d’un relativisme culturel ne sauraient justifier aucun écart par rapport à l’universalité des droits de l’Homme. La relativité culturelle s’entendrait dans ce cadre par l’affirmation que les droits de l’Homme ne seraient pas universels mais plutôt varieraient 137 significativement pour tenir compte des différentes spécificités culturelles. Il en découle que le relativisme culturel entraînerait que la promotion, protection, interprétation et application des droits de l’Homme seraient tributaires des différentes valeurs et traditions culturelles, ethniques et religieuses. Cette approche donnerait aux Etats un grand pouvoir de discrétion quant à la sélection des droits dignes de protection sur une base culturelle qui transcenderait le Droit international. Le fondement de cette pensée repose sur la présomption que la culture traditionnelle et son système de valeurs en tant que source normative, serait suffisant pour assurer la protection de la dignité humaine. Plusieurs autres exemples illustrant cette réalité peuvent en effet être avancés. C’est le cas des mutilations génitales féminines déjà évoquées plus haut dans ce développement. Bien évidemment cette pratique est contraire à la majorité des instruments internationaux relatifs aux droits de l’Homme. La Déclaration universelle des droits de l’Homme, la Convention des Droits de l’Enfant, la Convention sur l’élimination de toute les formes de discrimination contre les femmes, s’accordent à demander aux Etats notamment de prendre toutes les mesures légales, administratives, éducatives et sociales pour protéger les enfants contre toute forme de violence physique ou mentale, mauvais traitement, exploitation et abus sexuels. D’une manière plus précise, l’article 24(3) de la Convention des Droits de l’Enfant impose aux Etats de prendre toutes les mesures effectives et appropriées pour abolir les pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé des enfants. Selon cette approche, les Etats qui continuent de tolérer des pratiques traditionnelles contraires aux droits de l’Homme contreviennent, purement et simplement, à leurs obligations tirées du Droit international. En d’autres termes, l’atténuation de l’universalité des droits de l’Homme en raison d’une quelconque diversité culturelle ne semble pas envisageable. Les droits de l’Homme universels constituent une réalisation moderne nouvelle pour toutes les cultures. Les droits de l’Homme reflètent une dynamique coordonnée de la communauté internationale pour réaliser et développer des standards communs jugés bénéfiques pour tout le monde et instaurer un système normatif international de protection de la dignité humaine. Aucune culture de nos jours ne peut légitimement réclamer un droit à l’exercice de l’esclavage par exemple, malgré l’ancrage de cette pratique dans certaines cultures. L’esclavage sous toutes ses formes anciennes et contemporaines, constitue désormais une grosse violation du Droit international relatif aux droits de l’Homme. C’est dans cette perspective que la diversité culturelle doit appréhender l’universalité des droits de l’Homme. 138 IV- QUELQUES RECOMMANDATIONS Etant donné que les pratiques culturelles et les pratiques traditionnelles définissent l’identité d’un individu et sont importantes pour le développement d’un sens de l’appartenance, de fierté et la promotion d’une cohésion sociale, une critique des pratiques culturelles et traditionnelles considérées comme préjudiciables ou pas, peut générer des réactions négatives de la part des communautés qui adhèrent à ces pratiques. Les critiques, particulièrement celles qui émanent de l’extérieur, sont perçues comme des jugements de valeurs. La question est de savoir quelles sont les valeurs retenues pour questionner ces pratiques culturelles et traditionnelles (occidentales, religieuses et universelles (DUDH, Droit international coutumier, réaction des propratiques traditionnelles néfastes). Le droit à la culture ou le droit de participation aux activités culturelles est très souvent évoqué par ceux qui défendent la nécessité de préserver les pratiques traditionnelles y compris celles qui ont des conséquences néfastes sur la santé des filles et adolescentes et violent leurs droits. Il est vrai qu’il y a reconnaissance, par le Droit international des droits de l’Homme, du droit pour ces personnes de pratiquer leur culture, mais il est néanmoins certain que la jouissance de ce droit ne devrait pas avoir pour résultat la négation des autres droits contenus dans ces instruments internationaux relatifs aux droits de l’Homme. Quant il y a conflit dans les droits, la résolution d’un tel conflit devrait être le résultat d’une approche globale donnant une importance majeure à l’intérêt supérieur de l’enfant et au bien-être de la fille et de l’adolescente. L’article 3 de la Convention des Droits de l’Enfant stipule que « dans toutes les décisions qui concernent les enfants […] l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale ». Les Etats parties aux Traités et Conventions internationales et régionales relatives aux droits de l’Homme devraient s’interdirent d’évoquer des considérations d’ordre religieux ou culturel pour justifier leur manquement à une obligation internationale relative à l’élimination des pratiques traditionnelles préjudiciables et autres formes de violence. Les discriminations entretenues contre les femmes permettent de garder la femme dans une position secondaire par rapport à celle de l’homme. Les pratiques traditionnelles préjudiciables pratiquées contre les filles et les adolescentes assurent la pérennité de cette subordination et le rôle dominant de l’homme et du garçon dans une société patriarcale. Tout effort en vue de l’élimination des pratiques traditionnelles préjudiciables sera confronté par une résistance de ceux 139 qui veulent entretenir le statu quo, y compris par des femmes qui elles-mêmes ont été éduquées dans un tel système depuis leur naissance pour accepter leur situation d’infériorité. Les filles et les adolescentes devraient être des leaders dans le processus de changement de leur communauté. Elles doivent participer et être agent pour le changement, pour une prise de conscience. L’Etude du SG des Nations Unies sur la violence a trouvé que les enfants subissaient des agressions dans le milieu familial et qui se caractérisaient par des actes de violence et d’abus sexuels, des pratiques traditionnelles préjudiciables, des humiliations et d’autres violences psychologiques et négligences. Dans plusieurs pays, il y a toujours cette résistance à l’intervention de l’Etat, s’agissant des sphères considérées comme privées telles que la famille. L’Etat doit agir pour protéger les enfants et satisfaire à son obligation internationale conformément à l’article 19 du CIDE qui stipule que : « Les Etats parties, prennent toutes les mesures législatives, administratives, sociales et éducatives appropriées pour protéger l’enfant contre toute forme de violence, d’atteinte ou de brutalité physiques ou mentales, d’abandon ou de négligence, de mauvais traitements ou d’exploitation, y compris la violence sexuelle pendant qu’il est sous la garde de ses parents ou l’un d’eux, de son ou ses représentants légaux ou à toute autre personne à qui il est confié ». Les Etats parties aux instruments internationaux et régionaux relatifs aux droits de l’Homme doivent : - harmoniser et adapter leur législation interne à ces instruments et adopter une législation qui interdit explicitement les pratiques traditionnelles préjudiciables en particulier et toute autre forme de violence en général, - mettre fin à l’impunité en procédant à la stricte application de la loi, particulièrement contre les pratiques traditionnelles préjudiciables. Stratégies : L’étude du SG des Nations Unies sur la violence contre les enfants produit une feuille de route très claire à travers ses 12 recommandations sur les méthodes à suivre pour prévenir et réagir contre la violence exercée contre des enfants, y compris l’interdiction des pratiques traditionnelles néfastes. Ces recommandations prises en considération avec les conventions internationales et régionales des droits de l’Homme, les Observations finales, particulièrement celles du CDE et CEDAW, devraient être considérées comme des directives pour la confection de stratégies au niveau international, régional et local en vue de l’élimination des pratiques traditionnelles préjudiciables. Tous les secteurs devraient prendre des mesures pour une collecte des données et des études sur les pratiques traditionnelles préjudiciables. Ces 140 recherches devraient porter sur les PTP, mais aussi sur la torture et notamment le lien qui existe entre ces pratiques et la torture en vue de considérer cette infraction comme appartenant au jus cogens. Le manque de ressources financières est très souvent évoqué pour justifier un manquement aux obligations internationales, notamment celles contenues dans la CIDE. Le manque de ressources ne doit pas être considéré comme un argument pour justifier l’inaction des Etats. Il y a une dimension internationale à l’obligation de l’Etat partie, le Préambule de la CIDE reconnaît l’importance de la coopération internationale pour améliorer les conditions de vie. Le principe de l’indivisibilité et d’interdépendance des droits de l’enfant rend l’extension internationale de la coopération à la défense d’autres droits, y compris la protection des enfants contre toute forme de violence. ANNEXE Quelques Observations finales du CDE relatives aux Pratiques traditionnelles préjudiciables Sénégal - 20 octobre 2006 - Pratiques traditionnelles préjudiciables 50. Le Comité se félicite des efforts accomplis par l’État partie pour combattre les mutilations génitales féminines. Il salue en particulier la promulgation de la loi n o 99-05 qui interdit ces pratiques. Il demeure toutefois préoccupé par la persistance de pratiques nuisibles pour les filles, notamment les mutilations génitales féminines, les mariages précoces et forcés et les nouvelles formes de violence telles que l’infanticide. 51. Le Comité recommande à l’État partie : a) De poursuivre les campagnes de sensibilisation visant à combattre et à éliminer les mutilations génitales féminines et les autres pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé, à la vie et au développement des enfants, en particulier des filles; b) De mettre en place des programmes d’information et de sensibilisation destinés aux praticiens et au grand public afin d’encourager l’évolution des comportements traditionnels et de décourager les pratiques préjudiciables, en s’appuyant sur la famille élargie et les chefs traditionnels et religieux et en aidant les personnes qui pratiquent les mutilations génitales féminines à trouver d’autres sources de revenus; 141 c) De veiller à l’application de la loi no 99-05 en ce qui concerne, notamment, l’interdiction des mutilations génitales féminines et de toutes les formes de mutilation sexuelle et de faire en sorte que les auteurs de ces pratiques soient traduits en justice. Pratiques traditionnelles préjudiciables - 26 juin 2009 67. Le Comité est préoccupé par la persistance de certaines pratiques traditionnelles préjudiciables comme le système de la dot ou les mariages précoces et forcés, qui affectent particulièrement les filles et ont des répercussions négatives sur leur santé, leur développement et le plein exercice de leurs droits. Ces pratiques exposent aussi les filles à des violences à caractère sexiste. 68. Le Comité recommande à l’État partie de prendre de toute urgence des mesures législatives en vue d’interdire les mariages précoces et forcés ainsi que d’autres pratiques traditionnelles qui sont préjudiciables à la santé et au développement des garçons comme des filles. Il demande instamment à l’État partie de mettre en œuvre des programmes de sensibilisation qui tiennent compte des différences entre les sexes, avec la participation des dirigeants communautaires, à l’intention des professionnels, des familles et du grand public, afin de mettre un terme à ces pratiques préjudiciables, notamment dans les zones rurales. Il lui recommande en outre d’adopter des mesures efficaces en vue de favoriser l’émancipation des filles au sein de la famille, à l’école et dans le cadre de la communauté. Mauritanie - 17 juin 2009 Pratiques traditionnelles préjudiciables 61. Tout en prenant note du fait que les mutilations génitales féminines sont interdites sous peine de sanctions pénales par l’ordonnance no 2005-015 du 5 décembre 2005 portant protection pénale de l’enfant, le Comité s’inquiète de constater que dans la pratique, il n’est pas donné effet à cette interdiction. Le Comité est gravement préoccupé par l’incidence toujours élevée des mutilations génitales féminines qui touchent quelque 70% des filles mauritaniennes. Le Comité est en outre préoccupé par le fait que le mariage précoce reste une pratique courante et que les filles continuent d’être soumises à une alimentation forcée, le gavage. 62. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour faire respecter les dispositions incriminant les mutilations génitales féminines et de veiller à ce qu’elles s’appliquent en toutes circonstances. En outre, le Comité 142 recommande qu’une stratégie de prévention efficace des pratiques traditionnelles préjudiciables, notamment les mutilations génitales féminines, le mariage précoce et l’alimentation forcée (gavage), soit élaborée d’une manière globale en consultation avec la société civile. Des campagnes de sensibilisation aux effets négatifs de ces pratiques sur la santé et l’estime de soi des enfants, en particulier les filles et leur famille future, devraient être menées de manière systématique et constante auprès de tous les secteurs de la société, notamment les différents groupes socioculturels ainsi qu’auprès des chefs communautaires, traditionnels et religieux. Des incitations et un appui devraient être apportés aux familles qui refusent de soumettre leurs filles aux mutilations génitales féminines. Le Comité recommande en outre à l’État partie de donner la possibilité, le cas échéant, aux personnes qui pratiquent les mutilations génitales féminines de se reconvertir et de les aider à trouver de nouvelles sources de revenus. Des ressources suffisantes devraient être allouées aux mesures ci-dessus énoncées, en particulier dans les régions rurales. Le Comité recommande à l’État partie de solliciter une assistance technique de l’UNICEF pour faire face à ces préoccupations. Cameroun - 18 février 2010 Pratiques traditionnelles préjudiciables et campagnes de lutte contre ces pratiques 59. Le Comité se félicite du réexamen en 2009 du Plan d’action national de lutte contre les mutilations génitales féminines (MGF) et de l’adoption du Programme national de la santé de la reproduction, qui prévoit notamment l’élimination des pratiques traditionnelles préjudiciables, dont les MGF et les mariages précoces ou forcés. Le Comité observe avec intérêt que l’État partie élabore actuellement un projet de loi sur les mutilations génitales féminines et d’autres infractions à caractère sexiste. Il est toutefois profondément préoccupé par le fait que l’infibulation, la forme de MGF la plus extrême, et l’excision continuent d’être couramment pratiquées, surtout dans les régions du Sud-ouest et de l’ExtrêmeNord. Il regrette également le manque d’informations et de statistiques adéquates au sujet des pratiques traditionnelles préjudiciables et le peu d’actions de sensibilisation menées parmi les groupes de population concernés pour obtenir l’abandon de telles pratiques. Le Comité partage les préoccupations formulées par le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes concernant la persistance sur le territoire de l’État partie de pratiques traditionnelles préjudiciables, dont les mutilations génitales féminines, le « repassage des seins et les mariages précoces ou forcés, qui sont contraires aux droits des filles et des femmes, portent atteinte à leur statut et à leur dignité et ont des effets particulièrement nocifs sur leur santé. 143 60. Dans le prolongement de sa précédente recommandation de 2001, le Comité invite instamment l’État partie: a) À prendre toutes les mesures nécessaires pour adopter sans délai le projet de loi sur les mutilations génitales féminines et d’autres infractions à caractère sexiste; b) À ériger expressément en infraction les mutilations génitales féminines, le repassage des seins, les mariages précoces et les mariages forcés et à traduire en justice les responsables de telles pratiques; c) À assurer la mise en œuvre intégrale du Plan d’action national de lutte contre les mutilations génitales féminines et du Programme national de la santé de la reproduction, et à allouer des ressources suffisantes pour y parvenir, en particulier dans les régions du Sud-ouest et de l’ExtrêmeNord; d) À mettre en place des programmes de réadaptation physique et psychologique à l’intention des enfants victimes de pratiques traditionnelles préjudiciables et à dégager des ressources suffisantes pour leur application; e) À développer les campagnes de sensibilisation et les programmes d’éducation concernant les effets des pratiques traditionnelles préjudiciables sur la santé, le statut et la dignité des enfants, en particulier des filles, et à faire en sorte que ces campagnes soient menées de manière systématique et constante auprès de tous les secteurs de la société, notamment auprès du grand public et des hommes ainsi qu’auprès des chefs communautaires, traditionnels et religieux. L’État partie devrait également veiller à associer pleinement la société civile et les enfants aux programmes Burkina Faso - 9 février 2010 Pratiques traditionnelles préjudiciables 58. Le Comité salue l’engagement pris par les plus hautes instances de l’État de lutter contre les mutilations génitales féminines et leurs initiatives complémentaires, telles que la mise en place d’une permanence téléphonique nationale. Toutefois, il reste préoccupé devant la persistance des mutilations génitales féminines, l’augmentation du nombre de cette mutilation chez les nourrissons, spécialement dans le nord du pays, et le faible niveau de sanctions prises contre ceux qui soumettent les filles à de telles mutilations. Il est également 144 vivement préoccupé de ce que peu de mesures ont été prises pour prévenir, interdire et sanctionner la pratique du mariage précoce ou forcé, malgré la fréquence élevée de telles pratiques constatée dans l’État partie. 59. Le Comité prie instamment l’État partie : a) de poursuivre ses efforts visant à éliminer les mutilations génitales féminines sur tout son territoire, en particulier en améliorant la coordination de la lutte contre les activités liées à cette pratique, en veillant à ce que leurs auteurs soient poursuivis et dûment punis, et en continuant de mener des actions de sensibilisation pour faire évoluer la perception culturelle de ces mutilations; b) de renforcer la coopération avec les pays voisins pour lutter contre les mutilations génitales féminines; c) de mettre en œuvre des mesures pour interdire les pratiques traditionnelles en matière de mariage, notamment les mariages forcés, qui sont préjudiciables aux enfants, dont l’adoption d’une législation appropriée et son application; d) de mener des campagnes de sensibilisation, spécialement parmi les chefs traditionnels locaux, sur les répercussions du mariage précoce ou forcé, notamment sur les filles; e) de prévoir des centres d’accueil pour les filles qui fuient les mariages précoces et forcés. Nigeria - 21 juin 2010 Pratiques traditionnelles préjudiciables 65. Le Comité exprime sa vive inquiétude au sujet du très grand nombre de mariages précoces de filles dans les États du Nord et des effets de cette pratique sur l’exercice par ces jeunes filles d’autres droits, en particulier le droit à l’éducation. Le Comité prend note avec satisfaction de l’adoption par certains États de lois qui interdisent de déscolariser les filles pour les marier. Il prend acte de l’approche multidisciplinaire adoptée par l’État partie pour sensibiliser la population et faire évoluer les mentalités en ce qui concerne les mutilations génitales féminines, et note que les scarifications et les mutilations génitales féminines constituent des infractions punissables en vertu de la loi sur les droits des enfants, mais il est préoccupé par le pourcentage élevé de femmes qui ont subi des mutilations génitales. Il regrette que l’État partie n’ait pas donné d’informations actualisées sur les mesures qu’il a prises pour prévenir et éliminer les pratiques traditionnelles 145 préjudiciables, et notamment sur les progrès accomplis dans l’application de ses recommandations précédentes (CRC/C/15/Add. 257, par. 54 à 58). 66. Le Comité engage instamment l’État partie, à titre de priorité : a) À prendre rapidement des mesures pour lutter contre la pratique du mariage précoce dans les États du Nord; b) À mettre en œuvre des programmes de sensibilisation concernant l’interdiction du mariage précoce consacrée par la loi sur les droits des enfants et à veiller à ce que les États intègrent cette interdiction dans leur législation pour tous les enfants de moins de 18 ans; c) À concevoir et mettre en œuvre des programmes complets de sensibilisation portant sur les effets néfastes du mariage précoce sur le droit des filles à la santé, à l’éducation et au développement, en ciblant en particulier les chefs traditionnels et religieux, les parents et les parlementaires des États, ainsi que des programmes portant sur l’interdiction légale de retirer des enfants de l’école pour les marier; d) À éliminer les mutilations génitales féminines et les autres pratiques traditionnelles préjudiciables, notamment en adoptant une législation interdisant les mutilations génitales féminines et à entreprendre des programmes de sensibilisation destinés aux parents, aux femmes et aux filles, aux chefs de familles et aux chefs religieux et aux dignitaires traditionnels et faisant appel à leur participation. Enfants accusés de sorcellerie 67. Le Comité prend note avec satisfaction des mesures adoptées par l’État partie pour lutter contre le phénomène des enfants accusés de sorcellerie, notamment l’adoption d’une législation interdisant cette pratique dans l’État d’Akwa Ibom, l’arrestation des responsables et l’engagement de poursuites, la mise en œuvre de programmes de réadaptation et de sensibilisation et l’application de projets de réunification familiale qui ont donné de bons résultats. Il reste néanmoins extrêmement préoccupé par la stigmatisation des enfants accusés de sorcellerie, qui serait courante dans l’État partie, et des informations selon lesquelles ces enfants sont torturés, maltraités, abandonnés ou même tués du fait de la stigmatisation et des persécutions dont ils font l’objet. Le Comité est particulièrement préoccupé par le fait que certaines églises et l’industrie cinématographique inciteraient à croire aux enfants sorciers et par le fait que les enfants déjà vulnérables, notamment les enfants issus de familles défavorisées et les enfants handicapés, risquent plus que 146 les autres d’être accusés de sorcellerie. À cet égard, le Comité se dit vivement préoccupé par les informations selon lesquelles des enfants sont tués arbitrairement, alors qu’on cherche à leur faire avouer qu’ils sont sorciers ou lors de rituels d’exorcisme. 68. Le Comité invite instamment l’État partie à redoubler d’efforts pour lutter contre la croyance en la sorcellerie et les accusations de sorcellerie à l’égard des enfants. En particulier, le Comité encourage instamment l’État partie: a) À incriminer, aux niveaux de la Fédération et des États, le fait d’accuser un enfant de sorcellerie et les mauvais traitements qui en résultent, et à veiller à ce que les auteurs d’infractions liées à des accusations de sorcellerie soient poursuivis en justice; b) À dispenser aux membres des forces de l’ordre et aux procureurs une formation sur les dispositions pénales incriminant de tels actes; c) À mettre en place, à l’intention du grand public et des chefs religieux, des programmes de sensibilisation, notamment en coopération avec les organisations de la société civile et les médias, pour lutter contre la croyance en la sorcellerie chez les enfants; d) À règlementer les institutions religieuses qui ont recours à de telles pratiques et à leur demander d’adopter des politiques de protection de l’enfance; e) À entreprendre une étude approfondie sur les causes et les conséquences de ce phénomène. Soudan - 1 October 2010 Harmful traditional practices 56. The Committee notes with concern that female genital mutilation remains widespread in Northern Sudan, despite the adoption of the National Plan for Child Welfare (2007-2011). It is concerned that, although the Child Act (2008) of Southern Sudan and the South Kordofan Prevention of Female Genital Mutilation Act (2008) prohibit and criminalise female genital mutilation, the Child Act (2010) does not prohibit the practice. The Committee is also concerned at the prevalence of the early and forced marriage of girls, which frequently has a negative impact on their health, education and social development. 57. In the light of article 24, paragraph 3 of the Convention, the Committee urges the State party to: 147 (a) Pass legislation at the federal level to expressly prohibit female genital mutilation and early marriage and ensure that such legislation is enforced in practice; (b) Strengthen educational and awareness-raising programmes on the harmful effects of early and forced marriage and female genital mutilation; and (c) Take into consideration recommendations made by NGOs specialized in these areas as well as those of moderate religious leaders. Burundi - 1 October 2010 Corporal punishment 39. The Committee notes with interest that the new Penal Code of 2009 has increased penalties for cruel, inhuman and degrading treatment against children. However, the Committee is concerned that corporal punishment continues to be practiced in some schools and that domestic legislation does not explicitly prohibit corporal punishment in the home, schools, and alternative care settings and as a disciplinary measure in penal institutions. 40. The Committee urges the State party to take all the necessary measures to eradicate corporal punishment, and in particular: (a) Undertake a review of current legislation to explicitly prohibit the use of corporal punishment in all areas, including in the home, schools, in alternative care settings and in the penal system; (b) Introduce public education, awareness-raising and social mobilization campaigns in cooperation with the media, on the harmful effects of corporal punishment with a view to changing the general attitude towards this practice, and promote positive, non-violent, participatory forms of child-rearing and education; (c) Conduct a comprehensive study to assess the causes, nature and extent of corporal punishment and (d) Take into account its general comment No. 8 (2006) on the right of the child to protection from corporal punishment and other cruel or degrading forms of punishment (arts. 19; 28, para. 2; and 37, inter alia). Violence against girls 41. The Committee welcomes the fact that the State party has become a member of the International Conference of the Great Lakes Region (ICGLR) and has thus 148 adopted the Protocol on the Prevention and Suppression of Sexual Violence against Women and Children. However, the Committee is gravely concerned that the incidence of rape and other sexual violence against women and girls remains high, including domestic violence despite express prohibition in the penal code and the definition of rape as a crime. The Committee is further concerned that enforcement is poor, victims are discouraged or afraid of reporting rape, many are ostracized and stigmatized, judges fail to take accusations seriously and few cases are successfully investigated and prosecuted. 42. The Committee urges the State party to pass legislation on sexual and gender based violence, thus domesticating the ICGRL Protocol on the Prevention and Suppression of Sexual Violence against Women and Children, and to ensure that legislation as well as the revised penal code are disseminated and applied. 149 LUTTE CONTRE LES MUTILATIONS GÉNITALES FÉMININES : QUELQUES RÉFLEXIONS APRÈS HUIT ANS D’ACTIONS EN SUISSE PAOLA RIVA GAPANY Sous-directrice, Institut international des Droits de l’Enfant, Sion Résumé L’enfant est un invariant culturel qui rassemble les communautés, si différentes soient-elles. En Suisse, les MGF, brisant peu à peu les tabous, deviennent un sujet connu qui demeure complexe car interdisciplinaire, et nécessite la mise en commun des ressources professionnelles dans une ouverture et une écoute particulières. L’appui des communautés et professionnels concernés s’avère nécessaire, de même que l’établissement de programmes de prévention et leur mise en œuvre. C’est ainsi qu’une commission nationale d’experts, coordonnée par Caritas Suisse, se réunit annuellement pour discuter des différentes avancées et problèmes. Parmi ces-derniers, l’auteur relève une tendance générale et néfaste à la médicalisation de l’acte, de même qu’un véritable tourisme « excisoire ». Il devient primordial d’inscrire cette question dans le cursus académique d’étudiants potentiellement concernés de par leur future profession. Zusammenfassung Das Kind ist eine kulturelle Konstante, die allen Gemeinschaften gemeinsam ist, so verschieden sie auch sein mögen. WGV wird in der Schweiz als Thema immer weniger tabuisiert und immer bekannter. Durch seine Interdisziplinarität bleibt es jedoch weiterhin sehr komplex. Für die Bekämpfung von WGV sind die Zusammenlegung der professionellen Ressourcen sowie Offenheit und eine besonderen Hörbereitschaft notwendig. Die Unterstützung der betroffenen Gemeinschaften und Berufstätigen, sowie auch der Aufbau und die Umsetzung von Präventionsprogrammen erweisen sich als grundlegend. Deshalb trifft sich jährlich eine von Caritas Schweiz organisierte nationale ExpertenInnenkommission, um die verschiedenen Fortschritte und Probleme zu besprechen. Die Autorin stellt eine allgemeine und schädliche Tendenz zu einer Medikalisierung der Tat fest sowie einen regelrechten „Beschneidungs-Tourismus“. Es wird immer wichtiger, dieses 150 Thema in der Ausbildung von Studierenden zu behandeln, die in ihren zukünftigen Berufen möglicherweise damit konfrontiert sein werden. Resumen El niño es un invariante cultural que reúne a las comunidades, tan diferentes sean. En Suiza, las MGF, rompiendo poco a poco los tabúes, se convierten en un tema conocido que sigue siendo complejo ya que interdisciplinario, y requiere la puesta en común de los recursos profesionales en una apertura y una escucha particular. El apoyo de las comunidades y profesionales en cuestión resulta necesario, así como el establecimiento de programas de prevención y su aplicación. Por lo tanto, una comisión nacional de expertos, coordinada por Caritas Suiza, se reúne anualmente para discutir de los distintos avances y problemas, entre cuales, el autor destaca una tendencia general y dañina a la medicalización del acto, así como un verdadero turismo “excisorio”. Se vuelve primordial de inscribir esa cuestión en el curso académico de estudiantes potencialmente concernidos debido a su futura profesión. Summary The child is indeed a cultural invariant likely to rally communities, however different. In Switzerland, taboos are being broken, and the FGM issue is by and by becoming common knowledge. Being interdisciplinary, it remains however complex, and requires the very open-minded and sensitive sharing of professional resources. This cannot go without support from communities, nor without the devising and implementation of prevention programmes. In this respect, a national Commission of experts steered by NGO Caritas Switzerland meets annually to discuss breakthroughs and problems. The latter include a growing harmful tendency to medicalize the practice, as well as the existence of “excisory” tourism. The author points out that it is becoming an urgent matter to place this issue in the curriculum of students potentially concerned in their future profession. * * * 151 INTRODUCTION : LE CADRE DES ACTIONS Le contexte suisse est celui d’une terre d’asile qui accueille des migrants dont certaines pratiques coutumières, parfois méconnues, entrent en conflit avec la loi nationale, européenne et internationale. Ces pratiques posent un certain nombre de problèmes aux professionnels d’horizons variés, tels que médecins, juristes, enseignants, responsables étatiques. Comment agir pour éradiquer une pratique méconnue ? Comment mener une action d’information et de prévention efficace en évitant la stigmatisation des communautés concernées ? Quel est le rôle de la loi ? L’Etat a-t-il une responsabilité sociale ? Qui doit agir ? Quels services étatiques ? Comment intégrer ces personnes, tout en sachant que le combat contre les MGF est le cadet des soucis pour les tous nouveaux arrivants ? Doit-on cibler la 2e et 3e génération uniquement ? Comment accompagner physiquement et psychiquement les femmes ayant subi une excision, alors que cette pratique est méconnue par la plupart des professionnels de notre pays ? Telles sont les questions qui émergent dans le contexte suisse actuel et auxquelles des réponses claires tardent à être données. QUELQUES CONSTATS 1er constat : toutes les civilisations ont connu, connaissent et connaîtront des pratiques traditionnelles néfastes à la santé. Ex : la Suisse a connu les mariages forcés et connaît les châtiments corporels sur les enfants; elle connaît également les MGF de par la migration, et commence à être confrontée à des pratiques nouvelles comme le repassage des seins, les enfants sorciers, l’envoûtement ou la consécration de l’enfant à une divinité. 2e constat : certaines pratiques traditionnelles néfastes à la santé ne sont pas nouvelles en Europe. Exemple : la féministe et femme de lettres française Benoîte Groult rédigea Ainsisoit-elle en 1975 où elle parle ouvertement du secret le mieux gardé au monde : l’excision. Son ouvrage contribua a la prise de conscience de l’existence de cette pratique. Cela signifie que le thème des pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé est débattu en Europe depuis plus de 40 ans, et que durant ce laps de temps, les positions et donc les actions ont évolué; par exemple dans les années soixantedix, toute tentative d’éradication de la pratique se heurtait au relativisme culturel, invoqué par un grand nombre de professionnels, notamment les médecins; puis, portée par la vague féministe, la question des MGF devint le combat des femmes aidant leurs sœurs à soulever le joug patriarcal machiste. Actuellement, la question 152 est plus vue sous l’angle de l’intégration, avec une réflexion sur les valeurs communes à tout être humain, ce qui pose la question du non – respect de la valeur, donc de la violation de la loi. A titre d’exemple, le Conseil national du Parlement suisse vient d’adopter en décembre 2010 l’article 124 du code pénal prévoyant l’incrimination de l’excision quel que soit le lieu de commission de l’acte; l’acte sera passible de 180 jours amendes au moins ou d’une peine privative de liberté de 10 ans au plus1. 3e constat : La complexité du sujet. Il est pluridisciplinaire, transdisciplinaire, multisectoriel. Il touche aux domaines suivants2 : médical : gynécologie, obstétrique, sexologie, pédiatrie, psychiatrie et chirurgie; psychologique; déontologique/ confidentialité); juridique : droits humains, droit pénal, droit d’extradition, droit d’asile, droit civil, droit des obligations, droit de la famille et droit des victimes; éthique ethnologique; anthropologique; sociologique; historique; religieux; politique; médiation interculturelle; médiatique. professionnelle (secret professionnel, Il se heurte au tabou du sexe, au respect de la sphère intime d’une femme et au respect de sa culture. Il souffre de la politisation de l’étranger dans un contexte hostile aux migrants. Les débats autour du port du foulard, ou voile religieux, dans une société laïque se confondent pêle-mêle avec des sujets comme l’excision ou 1 2 Voir ci-après le paragraphe sur les avancées. Les mutilations génitales féminines, Manuel didactique à l’usage des professionnels en Suisse, 2009, p.9 153 les mariages forcés. La méconnaissance du sujet renforce la croyance populaire erronée, que la religion, notamment l’Islam, prescrit ces pratiques. 4e constat : les femmes et communautés concernées vivent un repli identitaire qui les conforte dans l’idée de faire exciser leurs filles, même nées en Suisse. Ces quatre constats expliquent les difficultés rencontrées dans l’établissement de programmes de lutte, la collaboration hésitante de certains professionnels et le peu d’intérêt témoigné à ce problème. L’INTÉGRATION AU SERVICE DE LA LUTTE CONTRE LES MGF L’intégration, à ne pas confondre avec l’assimilation, suppose une rencontre de plusieurs parties, qui se mélangent pour former un groupe homogène, tout en gardant leurs propres particularités, en l’espèce leur identité culturelle. Lorsque l’identité passe par des coutumes contraires au droit international public (droits humains), au droit européen (Convention Européenne des Droits de l’Homme) et au droit national suisse (code pénal), l’Etat a une responsabilité sociale de tout mettre en œuvre pour que les personnes migrantes concernées abandonnent leurs pratiques coutumières ancestrales, telles que l’excision ou les mariages forcés. L’Etat doit inclure les personnes concernées, soit se mettre à leur disposition pour qu’elles vivent dans la société d’accueil en pleine harmonie avec sa législation. Pour ce faire, et afin d’éviter les sentiments de jugements culturels et de rejet des personnes d’origine étrangère, la méthode participative doit être privilégiée; les femmes et les hommes des communautés concernées doivent s’exprimer afin d’expliquer la signification et la portée de leurs coutumes, ceci pour pallier au manque de connaissances et d’informations sur le sujet. L’Etat doit pouvoir compter sur leur participation engagée et veiller à ce que toute action menée se fasse avec leur collaboration effective. Pour ne pas porter un jugement de valeur, l’approche basée sur la bientraitance place toute action sous un signe positif et n’engendre pas le sentiment de jugement culturel. La bientraitance peut être définie comme la promotion et la mise en place effective de pratiques et d’attitudes garantes du bon développement de l’enfant3; il s’agit d’une démarche favorable au respect, au bien-être et à l’épanouissement des personnes4. Placer la lutte contre les MGF dans le cadre de la bientraitance équivaut à l’inscrire dans un contexte positif et marque la volonté de l’Etat d’aborder la question sous 3 4 Graz Bernard (2007), Bientraitance : revue de la littérature et états des lieux, Editions Fondation Charlotte Olivier, Fribourg, p.13 Ibidem, p.13 154 un angle favorisant le bien-être et le développement de la personne5. Méthodes participative et bientraitante poursuivent le but de renforcer les personnes dans leurs droits, de protéger les enfants, en l’espèce les filles, et de soutenir la famille, garant fondamental du développement harmonieux de tout individu. L’ENFANT COMME INVARIANT CULTUREL Parler d’une pratique que l’on ne connaît pas, surtout pour la condamner, est une mission périlleuse, même basée sur des méthodes participative et bientraitante. L’expérience démontre que pour amorcer un travail de fond, basé sur le dialogue interculturel, des thèmes fédérateurs et communs servent à dresser des ponts entre la société migrante et d’accueil. Parmi ces sujets : l’enfant, son développement et sa protection. L’engouement des Etats pour la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant (CDE),6 confirme cette affirmation. L’enfant doit être protégé contre la maltraitance (art. 19 CDE) et tout doit être mis en œuvre pour garantir son développement harmonieux (Préambule et art. 6 CDE); à cet égard, la famille joue un rôle essentiel (Préambule CDE). L’enfant est donc un invariant culturel qui rassemble les communautés si différentes soient-elles. Parler du sain développement de l’enfant, équivaut non seulement à protéger sa santé, mais à assurer sa place dans la société contextuelle, soit le pays d’accueil. Le dialogue interculturel s’en trouve donc facilité et la nécessité d’abandonner les pratiques néfastes à la santé de l’enfant s’impose aux familles concernées en Suisse. Il est à relever que la CDE interdit formellement la pratique des MGF à l’art. 23 ch. 3 (abolition des pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé des enfants), de même que la Charte africaine des Droits et du Bien-être de l’Enfant du 26 novembre 1999 par l’art. 21 (protection contre les pratiques culturelles néfastes)7. LES AVANCÉES Connaissance du problème 5 6 7 Les mutilations génitales féminines, Manuel didactique à l’usage des professionnels en Suisse, at 2, 96. Ratifiée par tous les Etats, à l’exception des Etats-Unis et de la Somalie. Ratifiée par la Suisse le 26 mars 1997 (RS 0.107). Il est à noter que la Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) admet que les MGF sont des pratiques inhumaines proscrites par l’art. 3 CEDH, à savoir l’interdiction des traitements inhumains et dégradants. 155 Le sujet des MGF, tout comme celui des mariages forcés, devient petit à petit un sujet connu de la part des professionnels concernés notamment. Ces derniers, comme par exemple les pédiatres, n’hésitent plus à prendre contact avec des organismes compétents pour signaler une fillette en danger, ou prendre des informations quant à une situation à risque. Il en va de même pour les « profanes » soit des personnes qui ont entendu parler de la problématique via les médias et qui sont interpellés par une famille de leur entourage par exemple. Le sujet est donc moins tabou, la peur de stigmatiser l’étranger moins présente. Rôle des médias8 Si la question des MGF prend de l’importance dans la société d’accueil, c’est aussi en grande partie grâce aux médias. Les médias ont un grand rôle à jouer dans la prévention et la sensibilisation du public; cependant, si les journalistes ne maîtrisent pas le sujet, le risque de stigmatisation des communautés étrangères est grand. Réduire la culture d’une ethnie à la seule pratique des MGF est non seulement attentatoire à la dignité des personnes concernées, notamment les victimes, mais attise la xénophobie de la société d’accueil. Les récents articles parus dans la presse au sujet de l’excision démontrent une évolution positive dans la présentation de la problématique. Des mots tels que pratique barbare, ou infâmante, ont disparu, pour faire place à des expressions telles que coutume ancestrale néfaste; de même les photos des exciseuses brandissant des lames de rasoir, ou de fillettes, jambes pliées pleurant devant leur case, ont fait place à des images de femmes courageuses s’opposant à cette tradition. Réseau national /Commission nationale d’experts9 Pour pouvoir agir concrètement sur le terrain, face à des situations à risque, l’appui des communautés et professionnels concernés est nécessaire. De même, l’établissement de programmes de prévention et leur mise en œuvre, doivent s’appuyer sur un réseau de connaisseurs du sujet. Ainsi, un réseau national d’experts de lutte contre les MGF- la commission nationale d’experts- coordonnée par Caritas Suisse- se réunit annuellement pour discuter des avancées et des problèmes; un conférencier est invité à exposer un thème en lien direct avec les MGF, comme par exemple la protection de l’enfant ou la reconstruction 8 9 Voir IDE, DE BORTOLI Ilaria, Le mutilazioni genitali femminili nella stampa europea, Un’analisi comparativa dei quotidiani di 4 paesi, dal 2000 al 2010, http://www.childsrights.org/html/documents/programmes/101012_Media_e_MGF.pdf Voir CARITAS Suisse, http://web.caritas.ch/page2.php?pid=2100&fv_100_feature_id=780&fv_100_freecontentcategory_id=764&fv_1 00_freecontententry_id=993 156 chirurgicale des parties génitales excisées. Une newsletter est publiée deux fois par année. Travail interdisciplinaire Comme mentionné plus haut, les MGF sont un sujet complexe car interdisciplinaire. Mettre en commun ses ressources professionnelles nécessite une ouverture et une écoute particulières; parfois, les positions sont divergentes : par exemple, qu’en est-il du secret médical lors d’une suspicion d’une excision lors des prochaines vacances ? La commission nationale des experts mentionnée ci-dessus a réussi à initier ce travail interdisciplinaire par son réseau ce qui est un apport important dans la mise sur pied de programmes de prévention mais également dans les situations à risque. Certains cantons ont instauré ce même genre de réseau. Programmes initiés par les migrants eux-mêmes ou en collaboration avec les cantons et la société civile Plusieurs programmes de prévention et de sensibilisation ont vu le jour. Ils sont le fruit d’une collaboration entre migrants, ONGs et/ou cantons. Ces derniers n’hésitent pas à puiser dans les ressources, notamment didactiques, des autres cantons ou à s’inspirer des actions positives menées dans ce domaine. Législation – Jurisprudence10 Contrairement à d’autres pays européens, le Code pénal suisse (CP) ne contient aucune disposition réprimant explicitement les mutilations génitales féminines. Les deux cas jugés en Suisse le furent sur la base des lésions corporelles graves ou simples (art. 122 et 123 CP). Selon le Conseil national suisse, se prononçant sur l’initiative parlementaire 05.404 (Réprimer explicitement les mutilations sexuelles commises en Suisse et commises à l’étranger par quiconque se trouve en Suisse) : « La législation a un rôle important à jouer dans l’affirmation de l’opposition radicale d’un Etat à de telles pratiques. La mention expresse de l’interdiction des mutilations génitales féminines dans le Code pénal serait un signal fort, dont il ne faudrait pas sous-estimer l’importance. Cela favoriserait l’impact des mesures de sensibilisation et faciliterait la lutte contre ces pratiques en faisant connaître et admettre cette interdiction. »11 10 11 Voir également : WHEELER P. (2003), Eliminating FGM : the role of the law, in The International Journal of Children’s Rights, 11, 2003 pp.257-271. Motion parlementaire Roth-Bernasconi n° 05.404 (Réprimer explicitement les mutilations sexuelles commises en Suisse et commises à l'étranger par quiconque se trouve en Suisse) in Bulletin officiel : les procès-verbaux du 157 Un nouvel article 124 intitulé « Mutilations génitales féminines » a été adopté par le Conseil national. Il punit d’une peine privative de liberté de dix ans au plus ou d’une peine pécuniaire de 180 jours-amende au moins quiconque aura mutilé des organes génitaux féminins, aura compromis leur fonction naturelle ou leur aura apporté toute autre atteinte. L’alinéa 2 de l’article 124 prévoit qu’une telle infraction est punissable en Suisse, même si elle a été commise à l’étranger et n’est pas pénalement répréhensible dans l’Etat dans lequel elle a été perpétrée, indépendamment de la nationalité de l’auteur ou de la victime. Cet alinéa institue ainsi une compétence universelle des juridictions pénales suisses dans ces cas, contrairement au principe de la double incrimination en vigueur jusqu’à maintenant12. La question des MGF a également été abordée en relation avec la modification de certaines lois cantonales. Par exemple, le canton du Tessin a introduit un article 16 dans la loi cantonale sur la citoyenneté tessinoise 13 : le candidat à la naturalisation doit prouver qu’il connaît également les normes interdisant de soumettre les filles, les adolescentes et les femmes aux MGF. Dans certains cantons, comme le Valais, lors de la modification de la loi cantonale sur la santé, les discussions des députés portèrent sur l’obligation de dénoncer aux autorités compétentes des cas à risques de MGF. LES PROBLÈMES Médicalisation de l’acte Une tendance générale à médicaliser l’acte se dégage afin d’éviter les complications immédiates des MGF, telles qu’infections et hémorragies14. Cette position est suivie par quelques gynécologues dans certains pays d’origine, comme 12 13 14 Conseil national et du Conseil des Etats, Conseil national - Session d'hiver 2010 - Quatorzième séance – 16.12.10.t// Voir également: RIVA GAPANY Paola, in Les mutilations génitales féminines, Manuel didactique à l’usage des professionnels en Suisse, at 3, pp. 83-85 Legge sulla cittadinanza ticinese e sull’attinenza comunale (RLCCit) - 10 ottobre 1995 UNICEF (2005) : Changer une convention sociale néfaste : La pratique de l’excision/mutilation génitale féminine, Innocenti Digest, Italie, Florence, réimpression 2007, pp.15-16 158 par exemple au Soudan15. Même si minoritaire et effectuée dans les pays d’origine, cette pratique est dangereuse, car elle conforte les migrants quant au bienfondé de l’acte et leur permet de cacher plus facilement cette pratique aux autorités de la société d’accueil. Tourisme « excisoire » Compte tenu des difficultés administratives qu’éprouvent certains migrants à se rendre dans leur pays d’origine, et au vu des actions menées en Suisse pour lutter contre les MGF, certains parents désireux de faire exciser leur fille n’hésitent plus à se rendre dans des pays européens voisins, lorsqu’une exciseuse est de passage. Un véritable tourisme « excisoire » s’est développé et les familles s’organisent financièrement afin de payer le voyage, le séjour et les « honoraires » de la matrone. Ces déplacements sont difficiles à déceler car la liberté de mouvement est garantie; beaucoup de familles sont éparpillées à travers l’Europe, ce qui rend logique des déplacements en vue de retrouvailles. De plus, comme il s’agit d’un problème transfrontalier et international, une collaboration entre deux voir plusieurs pays est nécessaire, ce qui peut parfois poser des problèmes, notamment de célérité de la procédure. Manques de recherches médicales L’excision n’intéresse que très peu la recherche médicale. Les publications médicales dans ce domaine sont rares. La prise en charge des femmes ayant subi une MGF, tout comme l’impact psychologique de l’excision sur la femme mériteraient plus d’attention de la part des chercheurs. LES DÉFIS Face à la complexité du sujet, la société d’accueil ne doit pas se bercer d’illusions : seuls des efforts constants et répétés aboutiront à l’abandon de cette pratique par les migrants concernés. Il est donc primordial de ne pas baisser la garde et de considérer ce sujet comme une question de santé publique suisse faisant partie des programmes d’intégration. Cependant, quelques années de sensibilisation n’éradiqueront pas complètement cette coutume ancestrale sur notre territoire. Les actions menées doivent viser le long terme et s’inscrire dans un but 15 HASSAN Mustafa, Cultural relativism and children's rights: the case of female genital mutilation in Sudan, MCR thesis, IUKB, 2010 159 de durabilité. Ainsi, il est primordial d’inscrire cette question dans le cursus académique d’étudiants potentiellement concernés dans leur profession future, comme médecins, assistants sociaux, professeurs, etc. Le plus grand défi reste que la société d’accueil dans son ensemble se sente concernée en tant qu’êtres humains et non pas en tant que société suisse qui doit s’occuper des étrangers. CONCLUSION Après huit ans d’activités en Suisse, la lutte contre les MGF avance, même si rien n’est acquis face à la complexité du problème. La participation active des migrants est essentielle; les hommes doivent collaborer à cette affaire de femmes, accepter une épouse non-excisée et refuser les MGF pour leurs filles. Ceci est d’autant plus urgent que l’importance des communautés à risque croît dans les terres d’asile, au vu de la situation politique dans certains pays. La diaspora à l’étranger a donc un rôle crucial à jouer, pour autant que les sociétés d’accueil s’ouvrent sans s’effrayer sur ces pratiques traditionnelles néfastes à la santé. BIBLIOGRAPHIE RIVA GAPANY Paola, juin 2006, Mutilations génitales féminines: du tabou aux stratégies d’intervention. Dans Bulletin suisse des droits de l’enfant, Vol. 12, N°2: p.9 RIVA GAPANY Paola, mai 2006, Les mutilations génitales féminines en Suisse: Point de la situation d’après les études d’UNICEF. Dans: Institut international des Droits de l’Enfant, Journée de sensibilisation aux mutilations génitales féminines en Valais. Sion, pp.8-15 UNICEF Suisse, 2005, Les mutilations génitales féminines en Suisse : Enquête auprès des sage-femmes, gynécologues, pédiatres et services sociaux. Zurich JAEGER Fabienne, HOHLFELD Patrick, 2009, Comment agir concrètement contre l’excision des filles en Suisse. Dans : Forum Med Suisse, 9:478 RAS WORK Berhane, mai 2001, L’excision contexte culturel et juridique. Dans: UNICEF Suisse, Rapport final de la journée consacrée à l’excision, Zurich 160 PREVENTING HEALTH-CARE PROVIDERS FROM PERFORMING FEMALE GENITAL MUTILATION ELISE JOHANSEN Technical Officer, Department of Reproductive Health and Research, World Health Organization1, Geneva Résumé La tendance à la « médicalisation » des MGF s’avère extrêmement préoccupante. En effet, cela peut contribuer et contribue probablement déjà à une légitimisation et même une institutionnalisation des MGF. Cette tendance serait donc contre-productive et représenterait un risque sérieux. Après avoir dépeint le contexte mondial et montré le manque de preuves du bienfait ainsi que les lacunes et contradictions de cette tendance, Mme Johansen met en avant les conséquences dramatiques qui peuvent résulter de la « médicalisation » des MGF. Selon elle, c’est à chaque fois l’effet inverse que celui prétendument escompté qui se produit. L’auteur finit par nous présenter la stratégie de l’OMS pour lutter contre ce phénomène pour le moins inquiétant. Zusammenfassung Die Tendenz zu einer "Medikalisierung" von WGV erweist sich als äusserst besorgniserregend. Denn dies kann – und hat wahrscheinlich bereits – zu einer Legitimation und sogar einer Institutionalisierung von WGV führen. Eine solche Entwicklung wäre also kontraprodutiv und würde ein erhebliches Risiko darstellen. Elise Johansen beschreibt den globalen Kontext und den Mangel an Beweisen für positive Auswirkungen sowie die Lücken und Widersprüche einer „Medikalisierung“ von WGV und rückt anschliessend die dramatischen Folgen in den Vordergrund, die aus dieser Entwicklung erfolgen können. Gemäss der Autorin hat eine „medikalisierte“ WGV jedes Mal den entgegengesetzten Effekt, als den vermeintlich erhofften. Zum Schluss stellt sie uns die Strategie der WHO vor, um dieses beunruhigende Phänomen zu bekämpfen. 1 The author is a staff member of the World Health Organization. The author alone is responsible for the views expressed in this publication and they do not necessarily represent the decisions, policy or views of the World Health Organization. 161 Resumen La tendencia a la “medicalización” de las MGF resulta extremadamente preocupante. En efecto, eso puede contribuir y ya contribuye probablemente a una legitimización e incluso una institucionalización de las MGF. Entonces, esta tendencia sería contra-productiva y representaría un riesgo serio. Después de haber empeñado el contexto mundial y mostrado la falta de pruebas del beneficio así como las lagunas y contradicciones de esta tendencia, la Sra. Johansen alega las consecuencias dramáticas que pueden resultar de la “medicalización” de las MGF. Según ella, a cada vez es el efecto opuesto al supuestamente previsto que se produce. El autor termina presentándonos la estrategia de la OMS para luchar contra este fenómeno por lo menos inquietante. Summary The trend towards “medicalization” of FGM is extremely alarming. Indeed, that can contribute and contributes probably already to a legitimisation and even an institutionalization of FGM. So, this trend would be counterproductive and would represent a serious risk. After depicting the world context and showing the lack of evidence of the benefit as well as the gaps and contradictions of this trend, Mrs. Johansen highlights the dramatic consequences which can result from the “medicalization” of FGM. She explains that it is always the opposite effect of the pretended one which occurs. The author finishes by presenting us the WHO’s strategy to fight against this alarming phenomenon. * * * 162 Female genital mutilation (FGM) refers to all procedures involving partial or total removal of external female genitalia or other injury to the external female genital organs for non-medical reasons. It is practised in 28 countries in Africa, and in some countries in Asia and the Middle East. Furthermore, due to international migration, cases of FGM can be found throughout the world. Classification of female genital mutilation Type I: Partial or total removal of the clitoris and/or the prepuce (clitoridectomy). Type II: Partial or total removal of the clitoris and the labia minora, with or without excision of the labia majora (excision). Type III: Narrowing of the vaginal orifice with creation of a covering seal by cutting and appositioning the labia minora and/or the labia majora, with or without excision of the clitoris (infibulation). Type IV: All other harmful procedures to the female genitalia for non-medical purposes, for example: pricking, piercing, incising, scraping and cauterization. FGM affects about 140 million girls and women worldwide. In addition, more than 3 million girls are at risk of undergoing FGM annually (Yoder et al 2004). FGM of any type is a violation of the human rights of girls and women. FGM is harmful to girls and women in many ways. The removal of or damage to healthy normal genital tissue interferes with the natural functioning of the body, and is associated with a series of short and long term risks to physical, psychological and sexual health and well-being (WHO 2006, 2008; Berg et al 2010), According to the World Medical Association’s Declaration of Helsinki, 1964, it is the mission of the physician to safeguard the health of the people. Health professionals who perform FGM are violating girls’ and women’s right to life, right to physical integrity, and right to health. They are also violating the fundamental ethical principle to “do no harm” (WMA 1964). Therefore, WHO is concerned with the trend that an increasing proportion of girls being subjected to FGM have this done by health professionals. A recent estimate found that this is the case for more than 18% of all girls and women who have already undergone FGM in Africa and Yemen. The proportion varies substantially between countries though, from an estimated 2% in Burkina Faso to 163 an estimated 74.5% among girls in Egypt2. The prevalence is particularly high in six countries; Egypt, Guinea, Kenya, Nigeria, Northern Sudan and Yemen, where more than one-third of woman had their daughters cut by a trained health professional. And in all countries we see that more younger women than older women are undergoing FGM by a health-care provider, suggesting an overall trend of increase. Even in countries where FGM is not a tradition, but where FGM is present due to migration, there is a move towards ‘medicalization’.3 This is mostly in the form of suggestions for a “mild” procedure as a form of harm reduction, as we saw in the 2010 revision of the policy statement from the Association of American Pedriatics (AAP 2010)4, and through the practice of re-infibulation (Thierfelder et al 2005; Johansen 2006; Leye et al 2008; Serour 2010). Re-infibulation refers to a closure of the vulva after birth or other surgery through re-stitching the two sides of the labia, thus re-creating the most severe form of FGM. The increasing trend towards ‘medicalization’ constitutes a serious concern. Medicalization contributes to reinforce and legitimize the practice of FGM (WHO 1982, and hence hinders the work towards abandonment of FGM. Also, by performing FGM, health professionals compromise the code of medical ethics of doing no harm. Health-care providers therefore need guidelines and support to strengthen their contribution to the abandonment of the practice, and how to resist eventual requests for performing the procedure. INTERNATIONAL REACTIONS TO THE MEDICALIZATION OF FGM The medicalization of FGM was first condemned by WHO in 1979, as an outcome of the first international conference on FGM that was held in Khartoum, Sudan. This was restated in a WHO 1982 statement. The standpoint was further confirmed and highlighted in the joint WHO/UNICEF/UNFPA statement against FGM in 1997 (WHO 1997). In 1993 the practice of medicalization was condemned by the World Medical Association, and later by numerous other medical professional associations, as well as by international agencies, NGOs, and governments. And finally, the condemnation of medicalization was again 2 3 4 The data from Burkina Faso is based on the DHS report from 2003, and the prevalence is among mothers. The data from Egypt is based on the DHS report from 2005, and the prevalence of medicalization is among daughters. “Medicalization” refers to situations in which FGM is practiced by any category of health-care provider (WHO 2010). Similar suggestions have been made also earlier in several countries including Italy, the Netherlands and USA (Colombo 2004; Shell-Duncan 2001). 164 emphasized in “Eliminating female genital mutilation - an interagency statement” that was co-signed by 10 UN agencies in 2008. In spite of these steps health-care providers continue to perform FGM to an increasing extent. Furthermore, some authoritative organizations; including some professional organizations, international humanitarian organizations and government officials occasionally have expressed support for medicalization of FGM.5 In light of this, the World Health Organization has taken the initiative to collaborate with key agencies to increase its efforts to stop health-care providers from performing FGM (WHO 2010). Before spelling out the concrete measures taken last year, this paper will describe some of the factors that motivate healthcare providers to perform FGM, with a particular focus on the now withdrawn suggestion by the American Pediatric Association to perform just “a little nick”. REASONS FOR THE MEDICALIZATION OF FGM The motivations for families and individuals to prefer health-care providers to carry out FGM, is mainly related to a wish to reduce the risks of the procedure. The increased demand for health-care providers to perform FGM may therefore be a result of increased information about the harmful health consequences of the practice. A similar trend can be seen with regard to reinfibulation. Women themselves, or members of their family, may request health-care providers to perform the procedure, believing it to be less risky than if they resort to traditional practitioners. But what are the motivations of the health-care practitioners that accept to perform FGM? There are few studies that have looked into this, but those existing show a number of motivations. In most cases, the health-care providers are a part of the society in which they serve, and therefore also tend to share the same support and rationale for the practice of FGM as others in their community. For example, several studies in Egypt, with a FGM prevalence rate of 91% in 20086, indicate a wide support for FGM among medical doctors and medical students 5 6 The following examples illustrate support for the medicalization of FGM by an international humanitarian organization and government officials, respectively. In 1999, the international medical aid agency Medecins Sans Frontiers (MSF) said its workers provided surgical equipment for FGM, but claimed it does not support the procedure. MSF said providing clean instruments was “first aid response”, since female genital mutilation can result in infections and cause “horrific complications” in childbirth and intercourse (Nicole Veash, London Observer, 22 Aug 1999). Following public condemnation by advocacy groups, MSF issued a policy paper in the same year opposing female genital cutting (MSF 1999). The organization stated that the procedure would not be undertaken in any of its facilities and that instruments it supplied would not be used for the procedure (MSF 1999). The prevalence data is taken from the DHS report from Egypt in 2008. 165 (Hadi and Salaam 1999; Refaat 2009). In Kenya a study revealed support for FGM among nurses (Njue and Askew 2004). In Sudan midwifes, who perform FGM, also play a key role in not only performing, but also promoting reinfibulation (Berggren et al. 2004). Another reason why some health-care providers agree to perform FGM is a lack of awareness or acceptance of documented health risks, both long- and shortterm. Furthermore, there is a widespread belief that if FGM is done in a medical setting, there would be no such risks involved (Hadi and Salam 1999; Refaat 2009). Some health-care providers, who themselves don’t support the practice, still consider it their duty to support the patient’s socioculturally motivated request for FGM (Johansen 2006; Leyle et al. 2008). Others see ‘medicalization’ as a form of harm reduction, considering that performing it will avoid the girls being taken for FGM to a less qualified person who will perform FGM in a more extensive way or in an unhygienic setting. Health workers can also develop a professional interest in performing, and thereby supporting FGM, including an interest in financial gain that has been documented to be one of the motivating factors (Njue and Askew 2004; Refaat 2009). This can also be linked to an institutionalization of the practice. There are reports of individual countries where FGM of a newborn daughter (Budiharsana 2004) or reinfibulation of the mother (Berggren et al 2004) has become a routine procedure, part of the childbirth package. Finally, there has also been higher level support for the medicalization of FGM, both from some professional organizations, international humanitarian organizations and even governments. Among the motivations that have been presented is the expectation that medicalization may reduce the risks of the procedure, limit the extent of mutilation, and reduce the pain associated with it. Another common argument is that medicalization could be a first step towards full abandonment of FGM. For example in Egypt, the legal regulations of FGM have changed several times throughout history, which is reflected in the ‘medicalization’ trends. In 1994, the Egyptian Minister of Health stated that doctors could perform FGM on girls in designated facilities at fixed times and prices, claiming that medicalization of the practice would reduce complications and eventually end the practice (ShellDuncan 2001). Subsequent pressure from international agencies, as well as the reported deaths of girls who were cut in hospitals instigated a renewed ban on the practice in public hospitals, which was overturned and then reinstated in late 1997 (Shell-Duncan 2001). However, even after this ban, the law opened for FGM in cases where it was deemed “medically necessary”. It does not seem that this policy resulted in either reduction in FGM incidents, or in the proportion of FGM carried 166 out by health care providers. This points to a risk in the definition of FGM itself, as any procedure “without medical indication”, supported by perceptions among some health-care providers that some women may have a medical need for FGM (Fahmy et al. 2010). If health-care providers share the local sociocultural belief that removal of clitoris will reduce women’s sexual desire, and they agree to this as a socio-cultural goal, then they could interpret FGM as medically necessary. WHY ‘MEDICALIZATION’ OF FGM MUST BE STOPPED The performance of FGM by health-care providers, despite the global recognition of FGM as a harmful practice and a violation of human rights, constitutes a break in medical ethical responsibility. In most countries, it also constitutes a violation of the law. Today, 18 of the 28 countries in Africa and the Middle East where FGM has been documented have enacted legal sanctions against FGM, and so have many receiving countries of migration. The involvement of health-care providers in the performance of FGM is likely to create a sense of legitimacy for the practice. It gives the impression that the procedure is good for health, or at least that it is harmless. This can further contribute to institutionalization of the practice, rendering it a routine procedure and even leading to its spread into cultural groups that do not have this as a longterm tradition as has happened in certain countries. Furthermore, the medicalization of FGM may lead to some health-care providers developing a professional and financial interest in upholding the practice. Performance of FGM by health-care providers contributes to upholding the practice of FGM. Medicalized FGM is not necessarily safer or less extensive (Budiharsana 2004). It also ignores the long-term complications of the practice, including sexual, psychological and obstetrical complications that have been found to be associated with FGM, and there are no data suggesting that these vary according to who performed the original FGM. Finally, there is no evidence to suggest that medicalization of FGM serves as a first step towards full abandonment, as some supporters of medicalization have suggested. WHY EVEN A “RITUAL NICK” IS INACCEPTABLE A challenge that has come up several times over the past few years, most recently in the now withdrawn policy statement of the American Association for Pediatrics, was that health-care providers should “reach out to the community” and perform a minor form of FGM, described as a “ritual nick”, in which no tissue is 167 removed (AAP 2010). The motivation was partly described as a move towards “harm reduction”, based on an expectation that by health care providers agreeing to perform a “symbolic nick”, this would replace a more extensive and harmful form of FGM that parents would otherwise resort to from traditional providers. Individuals and organizations who support a medicalized form of FGM often use arguments based on an expectation that a medically performed FGM would be less extensive, less harmful, and would be a form of harm-reduction as a consequence of it being expected to replace more extensive type of FGM performed “in the backstreet”. Many also express a view that they expect FGM performed by a health provider to be a first, and necessary, step towards total abandonment. However, there is no evidence that support these expectations. Furthermore, there are several gaps and contradictions in the logic underlying these expectations. Some aspects of the two most common expected positive outcomes of health-care providers performing a “ritual nick” are discussed below. These are: expectations that a “symbolic nick” would satisfy cultural expectations, and that a “mild” FGM would replace a more extensive one. Firstly, how well-founded is the expectation that a “ritual nick” would fulfil cultural expectations? A “ritual nick” as was proposed by the American Association of Pediatrics (AAP) was not to remove any tissue or create any changes; hence there would be no scar or trace of the procedure later. In contrast, Type I, II and III FGM all encompass the removal of the clitoris and labia minora, and in Type III also creating a physical closure. The removal of the clitoris is in almost all practicing communities associated with an idea that women’s sexual desires and drives come from the clitoris, and that its removal is necessary to reduce women’s proneness towards socioculturally unacceptable sexual activities, particularly pre- or extramarital sexual relations, as well as other forms of behaviour deemed unacceptable for adult women. Type III FGM, also called infibulation, is in practicing cultures often understood as a way of creating a “hymen”. The seal of skin covering the vulva that is created through infibulation is expected to contribute to safeguard as well as prove premarital virginity. If you remove these two practices: removal of the clitoris and closure of the vulva, and introduce instead a “ritual nick”, it is difficult to imagine how this could satisfy any of the cultural meanings. It would not be visible and therefore could not be proven. Neither would it cut the organ associated with immorality and childishness in women, nor secure any closure that would safeguard or prove virginity. Therefore, it would be expected that parents who were willing to replace any form of FGM with a “ritual nick”, have already abandoned the cultural expectations the nick was meant to satisfy. 168 Secondly, what is the basis, and how reliable is the expectation that a “mild” form of FGM that creates no anatomical changes would replace a more extensive one, as suggested by the proponents? There is no evidence to argue either for or against this expectation. However, based on our understanding of the issue, a different conclusion can be drawn. Imagine a family that requests a health care provider to perform a “ritual nick” that leaves no scar or evidence of any procedure being done to avoid the risks of an extensive procedure performed by a traditional circumciser. Would it not be more likely to expect that a grounded refusal from the health professional to do so, would encourage the family to drop the procedure altogether, rather than encouraging them to resort to an extensive and risky procedure performed by a traditional circumciser or another back-street provider? Furthermore, acknowledging that a major motivation for FGM is social convention and conforming to social pressure, if an invisible un-invasive procedure would be accepted by the community, the family might as easily just claim they have done something. There would be no need for a health-care provider to perform a procedure that leaves no trace and that cannot be proven. Furthermore, serious concerns have been expressed concerning how to control such a “loophole”, particularly from those working against FGM in the countries. Who and how could one ensure that what is carried out is an invisible harmless nick? Several studies, as well as anecdotal evidence, suggest that in more cases than not, what is described as a “ritual nick” in reality can be anything from FGM Type I to Type III (Elmusharaf et al. 2006). Such studies and anecdotal evidence suggest that most claimed change from Type III to Type I or “symbolic nicking”, is mostly about a change in the rhetoric and naming of the practice, while the cutting is less significantly reduced. Another example is the Multiple Indicator Cluster Survey (MICS 2006) studies from Somalia where infibulation is reported at 79% whereas the medical records from a large maternity hospital in Somalia found an infibulation prevalence at 99% (results found at http://www.ednahospital.org/). There are also qualitative studies from countries such as Thailand and Indonesia, which traditionally have mostly practiced purely “symbolic” or rather “illustrative” rituals, in which the skin of the girl is not touched but where one has identified a movement towards more extensive cutting over recent years (Budiharsana 2004). These experiences, as well as the continuing strong practice of FGM in Egypt, clearly show that the idea that “medicalization” would make it any easier for the practice to “die out” or be more easily addressed is not correct. However, again, there is no evidence supporting the belief that people who practice a less extensive form of FGM abandon it more readily than those practicing a more extensive form. Hence to think that reduction in extent or medicalization of the procedure would be a logical step towards change is not founded on evidence. 169 Finally, several studies have shown that many girls go through FGM several times. For example, several studies suggest that more than 50% of women with type III FGM are subjected to a second, and less often a third, surgery, because they are not satisfied with the degree of closure after the first surgery (Chalmers and Hashi 2000; Johansen 2006). WHY MEDICALIZATION OF FGM MUST BE STOPPED To conclude, there are no good and sound arguments to support the provision of FGM by health-care providers. On the contrary, there are many sound arguments against it: If health care-providers perform FGM, they are actually violating the human rights of the girls. Medicalized FGM can lead to a new legitimization of the practice. When health-care providers do it, it can be seen as being good for health. In meetings with people in the countries where this is practised, many pointed to the fact that those who perform FGM had certificates for their qualifications that were officially recognized, hence what they do must also be officially recognized, they reasoned. When health-care providers agree to perform FGM it can contribute to an institutionalization of the practice. This we have seen for example in Indonesia, where genital mutilation of newborn girls is part of the birthcare package offered by midwives (Budishana 2004), in the same way circumcision of boys was routinely performed in the US until recently. In Sudan, re-infibulation of the mother is part and parcel of the birth-care package (Berggren et al 2004). By allowing health-care professionals to perform FGM they can develop a financial and professional interest in upholding the practice. We have seen this for example in cosmetic genital surgery, where cosmetic surgeons advertise their services by presenting female genitalia that are within the normal variation as abnormal (Braun 2009, 2010). In a similar way, some Egyptian doctors on television, as well as in lectures and private conversations, have insisted on a conviction that Egyptian women need FGM because they have enlarged clitorises. If we want to support the work towards the abandonment of FGM, to introduce and legalise ‘medicalized’ FGM would be counterproductive. 170 WHO INITIATIVES TO STOP HEALTH CARE PROVIDERS FROM PERFORMING FGM Noting with concern that the trend of medicalization of FGM is increasing in spite of WHO having condemned this since 1979, WHO decided to take a lead to strengthen tools and guidance that will stop health-care providers from performing FGM. WHO has worked closely in these efforts with both other international organizations and professional bodies. A first step was the organization of a consultative meeting with key organizations and countries in 2009, as a part of a consultative process to formulate a global strategy as well as national action plans. The “Global Strategy to stop health-care providers from performing female genital mutilation” has been signed by 7 UN agencies and 6 professional organizations7. It was launched on 28 May 2010. The goal of the strategy is to assist policy-makers in governments, parliamentarians, international agencies, professional associations, community leaders, religious leaders, NGOs and other institutions in their efforts to enable health-care providers to contribute to the abandonment of FGM rather than to its persistence. The global strategy outlines four areas of activities: mobilize political will and funding; strengthen the understanding and knowledge of health care providers; create supportive legal and regulatory frameworks; and strengthen monitoring, evaluation and accountability. The World Health Organization will support a wide dissemination and implementation of the global strategy to stop health care providers from performing female genital mutilation, particularly in countries with a high or rapidly increasing trend. This includes close collaboration with health policy makers and both pre- and in-service training for all relevant groups of health-care providers. 7 In addition to WHO, UNICEF and UNFPA, this includes; Joint United Nations Programme on HIV/AIDS (UNAIDS), United Nations Development Programme (UNDP), United Nations Population Fund (UNFPA), United Nations High Commissioner for Refugees (UNHCR), United Nations Children's Fund (UNICEF), United Nations Development Fund for Women (UNIFEM), World Health Organization (WHO), the International Federation of Gynecology and Obstetrics (FIGO), International Council of Nurses (ICN), International Organization for Migration (IOM), Medical Women's International Association (MWIA), World Confederation for Physical Therapy (WCPT) 171 REFERENCES American Academy of Pediatrics. 2010. Ritual genital cutting of female minors, Pediatrics 125:1088–1093. Berg RC, Denison E, Fretheim A. 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Female genital cutting in the Demographic and Health Surveys: a critical and comparative analysis. Calberton, Macro International Inc. 174 ACCELERATION OF FGM/C ABANDONMENT: WHAT WORKS? NAFISSATOU J. DIOP Coordinator, UNFPA-UNICEF Joint Programme on FGM/C, New York, USA Résumé Dans la lutte contre les MGF, les ONGs ont ouvert la voie, mais les structures gouvernementales de plusieurs pays ont plaidé activement contre cette pratique. Cependant, les interventions ont été mises en œuvre sans guère de démarches documentant comment elles fonctionnent, ou évaluant leur influence sur les connaissances, les croyances, les attitudes et les comportements. Cet essai décrit brièvement trois stratégies qui ont été testées et évaluées systématiquement. Les programmes éducatifs basés sur des méthodes participatives arrivent en tête lorsqu’il s’agit de faire comprendre aux femmes que cette pratique n’est pas une affaire individuelle, mais est à mettre en lien avec leurs droits, leurs rôles dans la société et dans le développement communautaire. Zusammenfassung Die NGOs haben den Weg für die Bekämpfung von WGV geebnet, aber auch staatliche Strukturen verschiedener Länder sind aktiv gegen diese Praktiken aufgetreten. Die Interventionen wurden jedoch umgesetzt, ohne dass ihre Funktionsweise dokumentiert oder ihr Einfluss auf Wissensstand, Glauben, Einstellungen und Verhaltensweisen evaluiert worden wäre. Die Autorin beschreibt kurz drei Strategien, die systematisch getestet und bewertet wurden. Die auf partizipative Methoden aufgebauten Bildungsprogramme stehen an erster Stelle, wenn es darum geht, den Frauen darzulegen, dass solche Praktiken keine private Angelegenheit sind, sondern mit ihren Rechten, ihrer Rolle in der Gesellschaft und der Gemeindeentwicklung im Zusammenhang stehen. Resumen En la lucha contra las MGF, las ONG abrieron la vía, pero las estructuras gubernamentales de varios países abogaron activamente contra esta práctica. Sin embargo, las intervenciones se aplicaron sin gestiones documentando cómo funcionan, o evaluando su influencia sobre los conocimientos, las creencias, las actitudes y los comportamientos. Este ensayo describe brevemente tres estrategias 175 que se probaron y se evaluaron sistemáticamente. Los programas educativos basados en métodos participativos llegan a cabeza cuando se trata de hacer entender a las mujeres que esta práctica no es un asunto individual, pero debe ponerse en relación con sus derechos, sus papeles en la sociedad y en el desarrollo comunitario. Summary In the fight against FGM, NGOs have led the way but governmental bodies in several countries have actively advocated against the practice. However, interventions have been implemented with little attempt to document how they work, or to evaluate their influence on knowledge, beliefs, attitudes, and behavior. This essay briefly describes three strategies that have been tested and systematically evaluated. Education programmes relying on participatory methods rank first when it comes to making women understand that this practice is not merely an individual concern or a health related problem, but an integral component of their rights, their roles in society and community development. * * * 176 Female genital mutilation and cutting (FGM/C) comprises all procedures involving partial or total removal of the external female genitalia or other injury to the female genital organs for non-medical purposes. In addition to being extremely harmful to women and their unborn children, FGM/C impedes the realization of the United Nations Millennium Development Goals. For example, Goal # 3 promotes gender equality and women’s empowerment; Goal # 4 calls for a reduction in child mortality and Goal #5 focuses on reducing maternal mortality. None of these three goals can be achieved unless FGM/C is totally abandoned. Women’s health, their empowerment, and the realisation of their rights are essential steps in the elimination of poverty. From a human rights perspective, FGM/C is rooted in a culture of discrimination against women and control of their sexuality. It is a human rights violation that deprives the individual of bodily integrity and freedom from torture and degrading and inhumane treatment. It is therefore intimately linked to the unequal position of women in the political, social, and economic spheres of the societies where it is practiced. If the victim survives, the immediate health consequences of FGM/C may last for weeks or longer, while the psychological scars can last a lifetime. The immediate consequences include: haemorrhage, excessive pain, infections and abscesses. Acute urinary retention can result from swelling and inflammation around the wound, often exacerbated by the girls’ or women’s fear of pain from urine coming in contact with the fresh, sore wound. Injury can also occur to the neighbouring tissues such as the urethra and the vaginal opening. Fractures and dislocation have been reported, especially to the pelvis, due to heavy pressure being applied to girls and women who resist. Long-term consequences are more likely to occur with the more severe types of mutilation (Types 2 and 3). These include cysts and abscesses on the vulva and recurrent urinary tract infections which can damage the kidneys. Painful menstruation and accumulation of menstrual blood in the vagina can occur as a result of total or partial occlusion of the vaginal opening. Chronic pelvic infection can occur and sometimes be accompanied by discharge which can spread to the uterus and the fallopian tubes. Slow and incomplete healing of the wound and infection can lead to the production of excessive connective tissue in the scar and to keloid scar formation or an excessive growth of scar tissue. This may obstruct the vaginal opening, leading to painful menstrual periods and difficulties in receiving gynaecological care. Sexual dysfunction may also occur in both partners as a result of painful intercourse. Psychological consequences include: worry, nervous shock, loss of trust and self-confidence and fear of the pain brought on by marital sexual relations. 177 A 2006 WHO study on FGM/C and its obstetric consequences in six African countries confirmed that women who have undergone FGM/C are significantly more likely to require caesarean section, a procedure not available to most rural women. Women also risk extensive bleeding, longer hospital stays after delivery (assuming the woman has access to a hospital), perineal tear, prolonged labour, the need for episiotomies (cutting the skin between the vagina and the anus – also a procedure that requires a trained physician), and death. The risk increases with the extent of cutting, with greatest risk experienced by women who have undergone Type 3 of FGM/C (infibulation). With infibulation, a woman’s husband may have to use a knife on the wedding night to open the vagina, thus causing more pain, trauma, bleeding and risk of infection. Among babies, the death rate during and immediately after birth was found to be much higher for infants born to excised mothers; the rate increased with the type of FGM/C. For the countless women who deliver at home without qualified health care providers – and for their babies – the consequences of FGM/C are likely to be far more severe and the mortality rates far higher. Between 100 million and 140 million women in the world today have been cut, and 3 million more girls are at risk each year. Women are subjected to FGM/C in 28 countries in Africa, as well as in Yemen, and it is also practiced by immigrants in Australia, New Zealand, Canada, Europe and the United States. Some forms of FGM/C have also been reported in Central and South America. There are unconfirmed reports of limited incidences of FGM/C in the Islamic Republic of Iran, Jordan, Oman, the Occupied Palestinian Territory (Gaza) and certain Kurdish Communities in Iraq. In addition, the practice has been reported among certain populations in Columbia, India, Indonesia, and Malaysia. Female Genital Mutilation/Cutting is prevalent in 28 countries in Africa, and grassroots activists, nongovernmental organizations, and national committees are working together to end it. This essay discusses strategies employed to encourage the abandonment of FGM/C. The proportions of the population practicing FGM/C vary both between countries and within them. FGM/C is almost universal (92 percent) in Mali (CPS/MS and Macro International 2002), and it is widespread (72 percent) in much of Burkina Faso (INSD and Macro International 2000). In Senegal, the national prevalence rate is estimated to be 20 percent (Mottin-Sylla 1990), but the practice is restricted to some ethnic groups (Fulani, Mandingo, and Soninké, among others) among which the prevalence rate is high (80–90 percent). In Egypt 91% of the women are cut. 178 The rationales given for this practice in West Africa and the underlying social and cultural reasons for its continuation are: preserving cultural identity; defining females’ gender identity; maintaining personal hygiene (the clitoris is seen as a source of germs and possible infection during childbirth); reducing sexual desire, thereby controlling female sexuality; and complying with religious teachings. A variety of interventions to encourage individuals, families, and communities to abandon the practice have been undertaken in these countries since the early 1990s (see Diallo 1997 for a review of approaches taken in Mali). Nongovernmental organizations (NGOs) have led the way but governmental bodies in several countries, Burkina Faso, Mali, Senegal, Gambia, Kenya, Djibouti, Egypt, and Uganda have actively advocated against the practice. Although there is great variety in the approaches taken, the major strategies for encouraging abandonment of FGM/C in these countries can be broadly categorized as follows: Undertaking awareness- raising campaigns among the general population that highlight the health problems associated with the practice, and advocate for its abandonment because it is both harmful to women and children and contravenes several of their basic human rights. Persuading traditional practitioners to stop the practice and supporting them to become educators and advocates against FGM/C. Educating health care providers working in formal medical settings to act as change agents among their clients and communities, as well as to convince those among them who are currently carrying out the practice to stop. Implementing community-level behavior change strategies that educate key actors in the community, build the capacity of women to actively participate in decisions concerning them, and create supportive mechanisms for widespread abandonment of the practice. Introducing legislation to prohibit and criminalize the practice. For the most part, these interventions have been implemented with little attempt to document how they work, or to evaluate their influence on knowledge, beliefs, attitudes, and behavior. As a consequence, there is little empirical evidence of their relative effectiveness. Unfortunately, this problem characterizes almost all interventions aimed at encouraging the abandonment of FGM/C. WHO found that the most neglected aspect of anti-FGM/C programs “is that of applied or operational research on how to design interventions that would convince individuals and communities to stop the practice? Methodologies for monitoring and evaluating different interventions are also lacking” (WHO 1998). Since 1995, 179 the Population Council has undertaken a series of studies in Burkina Faso, Mali, Senegal and other countries where the practice is prevalent to test and evaluate several of these strategies using experimental designs. Other studies have been undertaken that analyze the socio-cultural context in which FGM/C is practiced and in which the interventions operate, and participatory learning approaches have been used in various communities to identify strategies that would be acceptable and effective. This essay briefly describes three strategies that have been tested and systematically evaluated and then discusses the key findings of those studies. The essay concludes with a discussion of the lessons learned and recommendations for directions that efforts to change behavior in this region should take. EVALUATING INTERVENTION STRATEGIES The strategy that has been most commonly used for addressing FGM/C is mass or community-level campaigns to educate people about the health risks associated with it, usually within the context of portraying FGM/C as a traditional practice that is harmful to women and children. This approach can certainly be successful in raising awareness; the large–scale campaigns conducted by the CNLPE in Burkina Faso (CNLPE 1997) have been cited as a good example (WHO 1999). Improving knowledge about the health risks that may be associated with the practice is a necessary but insufficient step toward changing social behaviors, however (WHO 1999). This is because many women who undergo genital cutting, and especially the lesser types, do not suffer any health consequences, and so the argument can lose its validity in such situations (Obermeyer 1999), and because knowledge of the health risks is pushing many communities who strongly want to sustain the practice to seek medical assistance in performing the cutting rather than abandon it (see discussion later about medicalization). Effective strategies that seek to change behaviors and practices that are social conventions rather than individual preferences, as is the case with FGM/C, do require an educational component to generate initial awareness of and contemplation about the disadvantages of continuing the practice. But they also require a sequence of components to follow this first stage, and which are usually implemented community-wide, to build the commitment of the majority of families to decide to change their behavior, to go ahead and implement that decision, and to then ensure that they sustain this change over time (Izett and Toubia 1999, Mackie 2000). First we consider evaluations of two strategies that focus on changing the behaviors of key individuals in communities: traditional practitioners who carry 180 out the genital cutting; and health care providers who work in medical settings. Second, we present the findings from an evaluation of one of the best-known examples of a community-wide behavior change strategy. WHAT DO WE KNOW? Traditional Practitioners Traditional practitioners cut the vast majority of girls in Africa, even if a tendency to the medicalization of the practice has been observed. Traditional practitioners usually carry out the cutting with crude implements and in unhygienic conditions, so the health risks of the procedure are easily highlighted during healthoriented educational campaigns. Traditional practitioners are obvious targets for efforts to encourage abandonment of the practice, but only if it can be assumed that a strategy to decrease the supply of those doing the cutting will also reduce demand for the service. Several NGOs have developed and implemented strategies that seek to persuade traditional practitioners to stop responding to requests to cut girls. In brief, the strategies followed by the NGOs comprised the same two initial phases: Identifying traditional practitioners and educating them on the physiology of female genitalia, the harmful consequences of the practice, and their role in perpetuating it. Raising awareness in communities. Two of the NGOs then developed alternative income-generating activities for the practitioners, and one of them also provided them with financial assistance. Similar to the SNCTP experience in the Sudan, one NGO educated the practitioners to become change agents within their communities. Health oriented interventions In several countries, many families now seek the services of medical professionals in an attempt to avoid the dangers of unskilled practitioners performing FGM/C in unsanitary conditions (for Guinea, see Yoder et al. 1999; for Egypt, see El-Gibaly et al. 2001; for Nigeria, see Mandara 2002; for Kenya, see Shell-Duncan 2000, Njue and Askew 2004, and Jaldesa et al 2005). Health care workers find themselves under pressure from individuals and families to carry out FGM/C. While those who support the practice may willingly accede to the request, 181 even those who do not may find the financial incentive hard to resist. Medicalizing the procedure constitutes a violation of a girl’s right to bodily integrity and does not address the long-term sexual, reproductive, and mental health complications that may result from FGM/C. Virtually all international organizations are unequivocal in their opposition to medical providers engaging in the practice, and several are working to engage health care providers actively to oppose FGM/C within their clinics and communities (WHO 2001). Most importantly, this trend toward medicalization is contrary to the WHO statement that “female genital mutilation in any form should not be practiced by health professionals in any setting – including hospitals or other health establishments.” (WHO 2001d). Numerous other organizations have made explicit statements against medicalization, including the International Federation of Gynecology and Obstetrics, the Inter-African Committee, and the U.S. Agency for International Development (USAID). They unequivocally declare that no health professional should practice FGM/C in any setting – including nurses and midwives as well as physicians, and clinics as well as hospitals (WHO 1997). However, the issue remains contentious and complex (Shell-Duncan 2001; Shell-Duncan et al. 2000). Health care providers involvement in the practice is largely due to previous community intervention that constructed all the message around “the health related risks and consequences of the practice”. Social change approach Although FGM/C has been shown to have many harmful physical and emotional effects, the practice is sustained by a set of social rewards and punishments, including the idea that girls will face shame and social exclusion, including diminished marriage prospects, if they remain uncut. To this end, a number of culturally sensitive strategies are being encouraged in order to encourage large core groups to abandon FGM/C en masse. These strategies include community debates, garnering the support of stakeholders – especially professional associations, religious leaders, youth and civil society – and encouraging groups to commit to abandonment. One of the most successful approaches, based on community empowerment, guides communities to define the problems associated with FGM/C and envision their own solutions in order to ensure that they do not feel coerced or judged. The programme also encourages communities that have made the decision to abandon the practice to publicly declare their commitment and spread their message to their neighbours. Approaches that are based on the principles of human rights have demonstrated the greatest potential for promoting the abandonment of FGM/C. Rather than addressing FGM/C in isolation, these initiatives focus on building the 182 capacities of individuals, especially girls and women, to promote and safeguard their own human rights. The program consists of two interrelated components: a basic education program to raise women’s functional literacy, and through this to advance their understanding of reproductive health and basic human rights; and an awareness-raising and social mobilization process to educate local leaders and the whole community about the harmful consequences of FGM/C and encourage them to make a public declaration in favor of its abandonment. Social mobilization activities are then undertaken within each village, following which several villages are gathered together in order to debate issues concerning FGM/C, early marriage, and the use of family planning. Village committees play a key role in organizing these meetings, and women involved in the literacy program and their facilitators are bringing the issues to the debates. KEY FINDINGS FROM THE EVALUATIONS Traditional Practitioners continue to perform FGM/C despite making statements that they had abandoned the practice. Attempts to convince traditional practitioners to give up the practice were not successful. FGM/C was still being performed in all but one of the six sites visited for the evaluation, and in that site it had not been practiced for the past two years because it was not the traditional time for circumcision. Most people did not know of any practitioners who had stopped working, as they were still responding to requests from families. Out of 41 excisors interviewed, 29 declared that although they had been sensitized by the NGO, they were still performing the procedure when requested and were not convinced that what they were doing is wrong. Others explained that they had given up the practice but took it up again because the NGO did not provide them with the alternative sources of income they had been promised. The five practitioners who had genuinely discontinued FGM/C actually did so for reasons unrelated to the intervention: they retired because of advanced age or poor eyesight, and were replaced by their daughters. Most practitioners, however, remained unconvinced that FGM/C is harmful to women, and community members had no difficulty finding a replacement for any practitioner who gave up the practice, either through another traditional practitioner or a health provider. 183 Most health providers are opposed to FGM/C and are willing to play an active role in discouraging the practice. But many remain supportive and several continue to perform the procedure in medical facilities. Interventions targeted at health care professionals who work in medical settings have been more successful in influencing their knowledge and attitudes than in changing behavior. After the intervention, the majority of health providers supported efforts to encourage the abandonment of FGM/C in principle. The beliefs that uncut girls are immoral, that men prefer cut girls, and that FGM/C guarantees virginity until marriage decreased slightly among providers after the intervention. Nevertheless, 28 percent of them said that they were not really against the practice, and another 10 percent indicated support for its medicalization. While no training intervention is likely to influence the beliefs and attitudes of all health providers, this intervention did succeed in changing the opinions of the providers. The gap between what providers know is happening and what they admit to doing is as telling as the apparent medicalization of this harmful practice. Unless providers who actively oppose the practice persuade their colleagues to refuse to perform it, little headway will be made toward its abandonment. As a direct consequence of this research finding, the Malian Ministry of Health immediately issued a policy directive to all its providers explicitly banning the practice by MOH employees and in MOH premises. The Ministry of Women’s Affairs also circulated a decree to all its central and local service providers that they should be aware of the MOH policy and do their best to promote and reinforce it. Although providers’ knowledge of FGM/C increased as a result of training, they remained uncomfortable discussing FGM/C with their clients. The dramatic gain in health providers’ factual knowledge of the various types of FGM/C did not translate into their taking actions to discourage it among their clients. The proportion of providers who believed that FGM/C poses no significant risk to women’s health did not decrease much as a result of training, suggesting that medical information did not erase their support for the practice. Those professionals who were opposed to FGM/C and well aware of its health risks found few opportunities to talk with their patients about it. Most providers indicated that, because of the large number of clients during the morning clinic sessions, they felt too rushed to be able to spend time discussing FGM/C with their patients. Indeed, during exit interviews only 0.5 percent of women said that they had been counseled about FGM/C. However, more than one third of providers interviewed had referred a client for further treatment of complications resulting from FGM/C. Although health 184 professionals are better able to recognize those complications, providers acknowledged that they have limited competence in treating them and would appreciate further training. The Social change approach improved knowledge and attitudes concerning reproductive health, human rights, and gender relations. The evaluation of the Tostan programme shows tremendous improvements in awareness of reproductive health, human rights, and gender relations and the substantial shifts in attitudes toward FGM/C among women who participated in the basic education program in Senegal. The data demonstrate that women living in the intervention villages but who did not directly participate in the education program also gained greater awareness of these issues. Similar increases were found among men living in these villages, suggesting that the education program can also influence others, probably discussions between participants and non-participants which are actively encouraged by Tostan as part of the implementation process. The Program decreased the practice of FGM/C. There also appears to have been a significant improvement in terms of reducing the practice of FGM/C – for example, the prevalence of FGM/C reported among daughters aged 0 - 10 years decreased significantly among women that participated in the program from 54 to 40 percent, and also among women living in the same villages who did not participate directly in the program. The girls who were cut, however, were now being cut earlier than before, suggesting that those sticking with the tradition were taking steps to ensure that the girls would definitely be cut before they could oppose the decision. Social mobilization has been successful in leading to public declarations against FGM/C, as well as supporting other improvements in the position of women in civil society. In both Senegal and Burkina Faso, social mobilization strategies have been used to build on this increased awareness in the villages, by seeking to shift group attitudes in order to change behavior. Following these group discussions within the 90 villages in Senegal, these and over 200 other communities were brought together and publicly declared that they would no longer practice FGM/C on their daughters during a specially organized event. The additional villages participated because reconsideration of the value of FGM/C had diffused widely through the networking by participants from the intervention villages with their friends and 185 relatives in other villages; also each intervention village conducted social mobilization activities in two other villages of their choice. In addition to building a community-wide consensus to declare an end to FGM/C, the social mobilization strategy facilitated several other initiatives that have improved the position of women and girls in civil society. In Burkina Faso, the 23 project villages led movements to enroll girls in school, to register children so that they can get identity cards, and to organize campaigns for massive voter registration. For example, in one village 43 couples decided to get married legally; in another 10 villages it was decided that all families should receive an official family record book; and in all 23 villages environmental hygiene and health activities to improve living conditions were undertaken. LESSONS LEARNED Although research is often perceived as expensive and time-consuming, pilottesting strategies for encouraging abandonment of FGM/C and measuring their effectiveness can be a crucial step in developing a successful program of action that can then be implemented on a larger scale. The empirical information collected and insights generated through carefully documenting the process of implementing a strategy and systematically evaluating its effectiveness provides those responsible for developing, implementing, and funding anti-FGM/C programs with concrete evidence of what works, what does not, and why. The strategy of encouraging traditional practitioners to stop practicing FGM/C and to become change agents is simply not effective because so few permanently give up the practice. The practitioner is a community member, and her stopping the practice depends on the level of awareness within the community that FGM/C contravenes basic rights and can be harmful. As long as there is still community-level support for the practice, parents will continue to seek someone to do the cutting (including health providers who work in medical settings), and so it is much easier for a practitioner to maintain her practice than to stop. The low social status and relative poverty of traditional practitioners make the recognition they gain and the livelihood they earn through performing the procedure valuable personal assets. Since it is in their interest to continue the practice, they are in no position to influence the community to abandon FGM/C. Programs intended to furnish them with alternative sources of income have not been successful, as any alternative would also have to provide them with a level of social recognition similar to that enjoyed as a practitioner. In African societies, the power to influence communitywide behaviors, such as FGM/C, is vested in the chiefs and elders, so strategies 186 must address community support for the practice by persuading these groups to advocate against it, rather than trying to cut off the supply of practitioners with the expectation that this will also curtail demand. The results of this evaluation are similar to what has been observed in Northeastern Africa, which lead to the WHO recommendation that “while excisors should be included in programming, finding alternative income for excisors should not be the major strategy for change” (WHO 1999). The strategy of working with health care providers had two components: training them in basic skills to manage FGM/C - related medical complications; and educating them to become active advocates against the practice during consultations with their clients. There was a clear need to train health staff to identify when circumcision may have induced a medical problem and to provide the specific care needed. Health professionals’ lack of knowledge reflected the general lack of public awareness of the linkages between women’s reproductive health and the practice of FGM/C. Even relatively simple training significantly improved health care providers’ levels of knowledge about FGM/C and its complications. Consequently, it was recommended that such training be incorporated into pre-service medical training. It was not possible to document whether the training affected management of complications, but the proportion of providers identifying complications and referring patients for treatment increased. The research suggests that such training is essential, especially in countries where gynecological and obstetrical complications due to FGM/C are widespread. The strategy of using healthcare providers is complicated, however, by the fact that many of them support the practice, and in some cases actually circumcise girls themselves. For providers to be able to encourage change among their clients and the broader community, they themselves must first go through a process of attitudinal and behavioral change. Any strategy focused on using health professionals as agents to convince communities to abandon FGM/C that does not begin with activities to change their own attitudes and behavior will not achieve its objectives. Simply educating providers about the negative consequences of FGM/C is not particularly effective in changing attitudes and actions, as they need to be supported by other community actions. Health providers are an important potential resource in campaigns to abandon FGM/C, given their status in the community and influence among their clients, but a concerted and well-planned effort is needed to ensure that they can become effective change agents. The use of strategies like the social change approach show real promise, as their comprehensive approach addresses knowledge, attitudes, actions, and 187 communal support in an integrated manner. A comprehensive education program that includes human rights, reproductive health, and gender relations, and which is coupled with strategies that can give women more confidence and empower them to participate in community level discussions and activities concerning their bodily health and their position in society, is more likely to lead to changes in social behavior, as demonstrated by the study described here. The participatory methods used in the education program create an opportunity for self-determination; women themselves decided which actions they and the wider community should take. Because education on human rights and gender relations was included along with information about FGM/C, the women understand that this practice is not merely an individual concern or a health related problem, but must be viewed as an integral component of their rights, their roles in society and community development. The social change approach builds on the fact that, in these societies, as in most traditional African societies, the value of a public declaration is more important than individual expressions of opinion about a socially approved practice. These declarations are thought to be the most important factor facilitating abandonment of the practice according to the sociological principles on which the program is based (see Mackie 2000 for a detailed description of these principles). Put briefly, the normal lack of public discussion or debate about practices such as FGM/C makes it difficult for individual families to judge the opinions and expectations of others within their community, so they remain uncertain and anxious about others’ opinions when their own attitudes have shifted. Until the subject is brought into the open, people will not take risks with their reputation within their community, as would be the case with deciding to cease practicing FGM/C. Mackie argues, however, that the most important reference group against which their decision is judged is not the community as a whole, but the social grouping within which their family marries – the reason being because FGM/C is seen as a prerequisite for a socially acceptable marriage. Thus if there is a critical mass of families within a community, or within a group of families that marry among each other, who have individually come to the decision that they would like to abandon FGM/C, holding a public declaration against the practice by their representatives enables each of them to know that the majority holds the same view. In other words, what may have been perceived to be a minority view is now known to be a majority view; that is, it has now become the social convention for that group. 188 CONCLUSION Since community-based programs to encourage the abandonment of FGM/C are relatively new and deal with a sensitive and deeply embedded cultural practice, it is crucial that their strategies are based on a comprehensive understanding of the values, beliefs, practices, and rules of social interaction that prevail at the community level. It is also important that their strategies are based on seeking ways of influencing social rather than individual behavior change, given that the practice is usually undertaken to ensure familial compliance with what is perceived to be a social convention within the communities with which the family is likely to marry. ACKNOWLEDGMENTS This essay is based a series of research studies undertaken by the Population Council through its operations research program in sub-Saharan Africa. 189 HOW TO ABANDON HARMFUL TRADITIONAL PRACTICES?1 ARCHANA MEHENDALE Ph.D., Child Rights Researcher, India Résumé Dans les contextes socio-culturellement hétérogènes, les pratiques traditionnelles préjudiciables sont généralement perpétrées contre les groupes les plus faibles de la société. Il faut donc renverser ces asymétries de pouvoir profondément enracinées, afin d’avoir une chance de venir à bout des PTP. La culture, qui est un produit à la fois de la dynamique institutionnelle, des structures politiques et des régulations légales, exerce une influence plus importante sur les comportements sociaux que celle des normes légales. Il est cependant important d’assurer que les pratiques préjudiciables soient reconnues comme illégales. L’auteur termine en considérant la dynamique entre la loi et les changements sociaux, ainsi qu’entre la loi coutumière et séculaire. Zusammenfassung In soziokulturell heterogenen Kontexten sind schädliche traditionelle Praktiken gegen die schwächsten Gruppen der Gesellschaft gerichtet. Diese tief verwurzelten Machtasymmetrien müssen umgestossen werden, damit eine Chance besteht, die STP zu überwinden. Die Kultur, die sich aus der institutionellen Dynamik, politischen Strukturen und gesetzlichen Regelungen zusammensetzt, übt einen viel grösseren Einfluss auf das Sozialverhalten aus als Rechtsnormen. Es ist allerdings dennoch wichtig, sicherzustellen, dass die schädlichen Praktiken als illegal anerkannt werden. Am Ende betrachtet die Autorin die Dynamik zwischen Gesetz und sozialem Wandel sowie zwischen Gewohnheitsrecht und säkularem Recht. Resumen En los contextos socioculturalmente heterogéneos, las prácticas tradicionales perjudiciales se perpetran generalmente contra los grupos más escasos de la 1 Paper prepared for the 15th Annual International Conference on Harmful Practices and Human Rights organized by International Institute for Rights of the Child (IDE), Sion, Switzerland, 10-13 October 2010. 190 sociedad. Pues se debe derribar estas asimetrías de poder profundamente arraigadas, para tener una oportunidad de acabar con las PTP. La cultura, que es un producto a la vez de la dinámica institucional, de las estructuras políticas y de los reglamentos legales, ejerce una influencia más importante sobre los comportamientos sociales que la de las normas legales. Es sin embargo importante garantizar que las prácticas perjudiciales se reconozcan como ilegales. El autor termina considerando entre la ley y los cambios sociales, así como entre la ley usual y secular. Summary In heterogeneous socio-cultural contexts, harmful traditional practices are generally enforced against the weakest groups of society. Deep rooted power asymmetries must therefore be broken in order to successfully address HTPs. Culture, the product of institutional arrangements, political structures, and legal regulations, exerts a greater influence on social behaviour than legal norms do. It is however important to ensure that harmful practices are recognized as illegal. The author finally deals with the dynamic between law and social change, and customary law and secular law. * * * 191 First of all, I would like to thank the International Institute for the Rights of the Child (IDE) for inviting me to introduce the panel session on ‘How to Abandon Harmful Traditional Practices?’ At the end of these very interesting and stimulating three days, it would be my privilege to share insights and perspectives on other harmful practices against children. I would be doing this because I have no direct experience of working on Female Genital Mutilation (FGM). Moreover I see some similarities and dissimilarities between FGM and other harmful practices, which may be useful for this discussion. Some of the other forms of harmful practices that I would like to comment on are devadasi system (wherein women from the devadasi communities are pledged to Goddess Yellamma and are then forced into prostitution), sati system (self-immolation of widows on husband’s funeral pyre), child marriage and forced marriage, honour killings, female infanticide and sex selective abortions. The harmful practices form a kind of a spectrum with practices ranging from those which are visible to public and often committed under public gaze at one end to those which are clandestine, are not visible or spoken about and hence not even included as part of our discourse on harmful practices. In heterogeneous socio-cultural contexts such as those seen in India and other parts of the world, the practices are sharply influenced and determined by prevailing power equations and hierarchies. Harmful traditional practices are generally enforced against the weakest and powerless groups of society, against those who are suppressed by the more powerful elements in the society. So, one of the foremost challenges in breaking the perpetuation of harmful traditional practices is to break the deep rooted power asymmetries. But this is easier said than done. Often, the victims are dependent on the perpetrators for different reasons and in such cases, simplistic solutions that are one-sided will not work. For instance, providing sex education or life skills education to girls may frustrate them further if it is not accompanied by efforts to challenge the power equations within the community and get the males included in these efforts. If the larger context is left unchanged and unchallenged, the girls often end up dismissing ‘rights’ as an alien concept. It is also important to note that patriarchy is manifested and perpetuated often through the women, the women excisors, birth attendants, mothers-in-law or mothers. In reality, women are being used to commit offences. For instance, in the case of female infanticide, the mothers would get penalized leaving the men/husbands scot-free. In the recent times, the presumption of innocence of a woman has been recognized in law against pre-natal sex determination in India. If we examine the triad of the state-family-child we also find that the policy on forced marriages is often ambiguous. It is either a hands-off policy wherein the state assumes the family to be the ultimate custodian and therefore would not 192 interfere in private matters such as marriage or it would intervene and send the girls to state run institutions wherein the situation is equally worse. Culture is another important variable for understanding and addressing harmful traditional practices. Seeing culture as a homogenous, integrated and consensual system can be problematic because it undermines the subtle tensions and dynamics that interplay within cultures. Cultures are not just the domains of beliefs and values, but also the product of institutional arrangements, political structures, and legal regulations. Changes in beliefs, values and practices can be brought through changes in institutional arrangements. The socialization processes within cultures often create unquestioning acceptance of practices among those affected. In order to protect their sense of social security, belongingness and social relationships, children abide by community norms and sanctions. Cultures often teach and expect girls and women to endure and tolerate pain and suffering and this slow internalization of cultural values contributes to silent perpetuation of harmful practices embedded in culture. It may be important to note in this context that in many cases, culture exerts a greater influence on social behaviour than legal norms. Culture is informal, tied to the immediate family and social groups whereas the force of law is formal, distant, including the language in which legal norms are expressed. But culture is not static and monolithic and the transformative nature of culture needs to be understood and utilized so as to challenge the harmful practices prevalent within certain cultures. The role of law in abolishing harmful practices needs to be understood more carefully. It is important to ensure that harmful practices are recognized as illegal and not only morally unacceptable. But we also see that if there is a moral outrage, it is easier to legally outlaw the practice and also mobilize social change. Religious and cultural leaders have an important role in building a climate of opinion. Legal abolition is a necessary but not a sufficient condition for abolishing social ills. Law creates a normative framework but it may not be adequate to steer the process of social change. The dynamic between law and social change is interesting. Legal norms get created through a process of social change but once we have social change, existence of law is in some sense redundant. In India, progressive law which prohibits harmful practices is hard to implement since social change is a slow incremental process. Weak law enforcement coupled with lack of accountability and negligence on the part of public servants to prevent the commission of offence are the main hurdles. Lack of political will to enforce legislation that prohibits harmful practices is another serious hurdle, especially when the political leadership is drawn from the same powerful, patriarchal, chauvinist social groups that condone harmful practices. In such cases, legislation should allow any person to file the complaint in public interest, since those with locus standi may be incapable or may choose not to complaint. Other issues with 193 regards to law include the clashes between customary law and secular law and mechanisms to resolve the differences if any. There is also a resistance from the State to create new or special legal norms when generic legal norms and sanctions are available. It is also not clear if it is beneficial to have special laws or use general penal laws that are available to try harmful offences. It is also important to note the limitations and challenges of relying on law alone to ensure medical ethics. Medical fraternity generally has the tendency to protect itself and very few members are likely to be barred from practices for committing harmful practices. Further, law is often unable to regulate what happens between doctor and patient and without affecting norms of confidentiality. Given the universality and indivisibility of rights, harmful practices need to be seen as violation of a cluster of rights that necessitate an integrated approach. Universal yardsticks to determine what is unacceptable and what should be illegal should look beyond the health implications of the practices and approach it as an issue of violence. If this stance is adopted, harmful practices cannot be explained, condoned, justified, rationalized or legitimized on the basis of cultural specificities. 194 ADDRESSING FEMALE GENITAL MUTILATION IN THE CONTEXT OF MIGRATION SYLVIA LOPEZ‐EKRA Gender Coordinator, International Organization for Migration, Geneva Résumé C’est un fait, les MGF se sont déplacées en Europe, en Amérique du Nord, en Australie et en Nouvelle-Zélande, mais les données sur leur prévalence sont basées sur des extrapolations. L’auteur énumère quatre différences entre les MGF dans le pays d’origine, et dans un pays d’accueil. Toute communauté qui les pratique en Europe vit dans un environnement différent : ce décalage culturel pré-existant rend impossible le déploiement de campagnes de sensibilisation massives, qui risqueraient d’aboutir à une stigmatisation. De plus, d’un point de vue psychologique, le retour à des comportements d’appartenances tels que la pratique des MGF, est très tentant pour les communautés coupées de leurs racines. Troisièmement, les MGF deviennent un problème d’intégration. Et finalement, l’accès à la santé peut être compromis, les médecins n’ayant aucune expérience de ce genre de soins. C’est pourquoi l’OIM a conçu une stratégie globale et qui comprend 4 volets, afin de prévenir efficacement les MGF, et faire face aux besoins des femmes et fillettes ayant été mutilées. Zusammenfassung Es ist eine Tatsache, dass WGV auch in Europa, Nordamerika, Australien und Neuseeland vorgenommen werden. Die Daten über ihre Verbreitung beruhen jedoch auf Hochrechnungen. Die Autorin zählt vier Unterschiede zwischen WGV in den Herkunftsländern und in den Gastländern auf. Alle Gemeinschaften, die WGV in Europa praktizieren, leben in einer anderen Umgebung: Der vorbestehende kulturelle Unterschied macht die Durchführung von massiven Sensibilisierungskampagnen unmöglich, da diese zu einer Stigmatisierung führen könnten. Ausserdem ist die Rückkehr zu Verhaltensweisen wie WGV, die eine Volkszugehörigkeit ausdrücken, aus psychologischer Sicht sehr verlockend für Gemeinschaften, die von ihren Wurzeln abgeschnitten sind. Drittens werden WGV zu einem Integrationsproblem. Schlussendlich kann der Zugang zum Gesundheitswesen gefährdet werden, da die Ärzte keine Erfahrung mit solcher 195 Pflege haben. Deshalb hat die IOM eine vierteilige globale Strategie entworfen, um WGV effizient vorzubeugen und den Bedürfnissen der verstümmelten Frauen und Mädchen entgegenzukommen. Resumen Es un hecho, las MGF se desplazaron en Europa, Norteamérica, Australia y en Nueva Zelanda, pero los datos sobre su predominio se basan en extrapolaciones. El autor enumera cuatro diferencias entre las MGF en el país de origen, y en un país de acogida. Toda comunidad que las práctica en Europa vive en un diferente medio ambiente: este desfase cultural preexistente hace imposible el despliegue de campañas de sensibilización masivas, que correrían el riesgo de conducir a una estigmatización. Además, desde un punto de vista psicológico, la vuelta a comportamientos de pertenencias como la práctica de las MGF puede ser muy tentadora para las comunidades cortadas de sus raíces. En tercer lugar, las MGF se convierten en un problema de integración. Y finalmente, el acceso a la salud puede comprometerse, los médicos teniendo ninguna experiencia de este tipo de operaciones. Estas son las razones por las cuales el OIM concibió una estrategia global y que incluye cuatro aspectos, con el fin de prevenir eficazmente las MGF y hacer frente a las necesidades de las mujeres y niñas mutiladas. Summary It is a fact that FGM has migrated Europe, Northern America, Australia and New Zealand, but data on prevalence are based on extrapolation. The author lists four differences between FGM in the country of origin and in a host country origin and differences. A practicing community in Europe is surrounded by an different environment: pre-existing cultural clashes makes it impossible to carry out massive awareness-raising campaigns, without taking the risk of stigmatization. Psychologically, moreover, going back to traditional means of belonging such as practicing FGM is ever so tempting for communities cut off from their roots. Thirdly, FGM becomes an integration issue. And finally, access to health care can be a delicate issue, practitioners having no experience of such care. As a result, IOM has devised a four-pronged comprehensive and human rights-based strategy to effectively prevent FGM and address the needs of women and girls already mutilated. * * * 196 I would like to thank and congratulate the International Institute for the Rights of the Child for organizing this event as well as for inviting IOM to speak about Female Genital Mutilation in the context of migration. We, at IOM, find it particularly important to regularly raise the issue of FGM in the context of migration because it is often assumed that FGM and its consequences and implications in countries of destination perfectly mirrors the situation in the countries of origin. However, if FGM in developed countries undeniably holds many similarities with FGM in Africa, the process of migration changes the context and by the same occasion, impacts programming. So if you allow me, I would like to use my 10 minutes to quickly take you through the specificities of FGM in the context of migration before reflecting upon implications in terms of strategies to achieve abandonment. So what do we know about FGM and migration? If today there is a large consensus around the fact that through movements of people, FGM has migrated to Europe, Northern America, Australia and New Zealand, data on prevalence is still scarce and based on extrapolations. According to some researchers, 5% of FGM victims reside in the North. The European Parliament in its 2009 resolution on combating female genital mutilation in the EU declared that some 500.000 cut women live in Europe and that every year approximately 180.000 woman and girl migrants undergo, or are in danger of undergoing, FGM. This is a first important difference between Europe and Africa. We do not have Demographic and Health Surveys or Multiple Indicator Cluster Surveys to give us a clear indication on the prevalence of FGM in Europe. Without accurate data, it is also difficult to monitor trends and progress. There are other significant differences. I can think of at least four important ones. First: the environment. Although it does happen in Africa to find practicing communities living nearby non-practicing communities, the situation experienced by practicing communities in Europe is very specific. The clash between cultural norms and values here is so intense that chances of stigmatization, total incomprehension and conflict are extremely high and a potential risk in programming. This for example means that one can not go out on the streets with massive information campaigns, posters, radio programmes and videos on television as it could result in stigmatization not only of practicing communities but of all African migrants in general. It also means that one has to be extra-careful with awareness-raising activities within the communities or run the risk of being perceived as judgmental or morally offensive and face rejection. Second: we know that FGM as a social norm is used to gain acceptance and recognition within one’s own community. It is used as a means of belonging and in 197 migration situations especially when a reassuring sense of belonging is lost, going back to traditional means of belonging such as practicing FGM is ever so tempting. This gives an additional motive to perpetuate the practice. Remember how foot binding lasted much longer among the Chinese of San Francisco in the United States than in urban China. The same can be true for FGM. Third: the culture clash I mentioned earlier coupled with expectations of assimilation by host societies, means that in the context of migration, in addition to being a health and human rights issue, FGM becomes an integration issue which adds another layer of complexity in terms of effective programming. Finally: although it may seem paradoxical, access to health care can be more limited than in countries of origin since, still too few practitioners in Europe and Northern America have experience in dealing with women who have undergone FGM. As you can imagine, all these elements constitute challenges to programming for the abandonment of the practice. As a result, IOM has devised a four-pronged comprehensive and human rights-based strategy to effectively prevent FGM and address the needs of women and girls who have already been cut. This approach is rooted in the Donors Working Group on Female Genital Mutilation/Cutting platform for action and builds upon good practices from Africa and Europe as well as on the social norms theory. We believe that the internationalization of the practice requires an integrated global approach that encompasses community empowerment, capacity-building of relevant professionals, awareness-raising, support to civil society and bridge-building across continents. When it comes to community empowerment, since FGM is an extreme manifestation of gender inequality, one essential element is women’s empowerment in general. In the case of women migrant, empowering activities can take the form of literacy training, pre-employment training or discussions on reproductive health and women’s rights… However the empowerment should not stop at women since FGM being a social norm, it is the whole community that needs to collectively decide to adopt a new behaviour. Activities must therefore reach all groups in the communities and lead to non-judgemental, non-directive, intra-group dialogue. Here, we take inspiration from community human rights education programmes that have been successfully implemented in Africa. The sensitization campaigns’ main objective is to deconstruct the myths that sustain FGM with all members of the communities, the ultimate objective being that they themselves progressively reach the conclusion that FGM should be collectively abandoned. In Europe and North America, this process greatly benefits from the identification and training of cultural mediators who act as sensitization intermediaries and work within the communities. 198 The second component of the strategy is capacity-building. This capacitybuilding is targeted at professionals such as gynaecologists, midwives, paediatricians, psychologists, general practitioners, school nurses, teachers, child care professionals, social workers, police and the justice sector. The aim is to strengthen their ability to identify girls and women who may be in danger of being cut or who may have already been cut. They need to understand that they can build a privileged relation with the parents and work with the parents. So many campaigns have on purpose or as a side-effect depicted the parents as monsters that now many professionals feel uncomfortable not knowing how to talk with families, thinking that they are expected to despise the families, not knowing that a dialogue can be initiated, thinking that all they can do is turn the parents in. For health professionals in particular, they should be made aware that FGM is a violation of their patients’ human rights and that request for reinfibulation for example cannot be accepted on the basis of culture. They should be sensitive to the specific medical and psychological care needs and anxieties of migrant women and girls who are victims of FGM. They should be able to offer relief options such as defibulation outside pregnancies and delivery and reconstructive surgery, in accordance with the patients’ needs and aspirations. Now, awareness-raising and support to civil society. Here it is all about sensitizing government officials but also parliamentarians, professional organizations, NGOs, community groups and media professionals and international agencies to understand the specificities of FGM in the context of migration, adopt relevant national policies and legislations, develop holistic child protection framework and secure health care, social and psychological support for women and girls who have already undergone FGM. The final element of our approach is one that I see as particularly important. It is about building bridges across continents. Bridges so that government talk to each other and by that I do not only mean donor countries giving funding for FGM in Africa, what I have in mind is a dialogue that recognizes that countries in Europe and countries in Africa face the same problem and that what is happening in Africa should not be divorced from what is happening in Europe and vice versa. Building bridges also means creating opportunities for practitioners to exchange good practices, lessons learned and knowledge. Finally and may be most importantly, we need to create spaces for diaspora and communities back home to talk about FGM and that for many reasons. First as I said earlier, diaspora members can adopt a stricter application of practices such as FGM. They may not be aware that things have changed back home and this knowledge is definitely useful in helping them reassess the practice. Second, diaspora members may jeopardize efforts towards abandonment achieved at home. Because they were not involved in the process of change in the community of origin and also because they 199 are listened to as sender of remittances, they can argue that the tradition should be maintained for the sake of the group’s identity. We’ve already seen examples of that. Lastly, opposite to what I just said, some diaspora members are very active in promoting the abandonment of FGM. Their significant positive influence on social practices must be acknowledged and tapped into. 200 ROLE ET PLACE DES MEDIAS DANS L’ERADICATION DES PRATIQUES NEFASTES EL HADJI GORGUI WADE NDOYE Journaliste sénégalais accrédité au Palais des Nations Unies à Genève. Directeur du Magazine panafricain en ligne ContinentPremier.Com, correspondant de Walfadjri-Sénégal Résumé Mettant en avant l’essentielle liberté de la presse, l’auteur le rappelle : « Quand la presse est libre, cela peut être bon ou mauvais ; mais assurément, sans la liberté, la presse ne peut être que mauvaise ! ». Il relativise la neutralité journalistique et parle de la nécessité d’un engagement résolu lorsque la dignité de l’humain est violée. S’agissant des pratiques traditionnelles néfastes, il souligne leur caractère particulièrement sensible et le besoin de formation des journalistes à leur propos. Ceci dans l’optique de pouvoir ensuite informer individus, communautés, pays d’accueil, sur leurs aspects négatifs ou encore sur les chartes et conventions internationales y relatives. Partant d’exemples concrets, il relate le rôle joué par les médias dans la lutte contre les MGF, la responsabilité qui leur incombe, et détaille les obstacles majeurs à l’éradication des PTN. Zusammenfassung Der Autor betont die grundlegende Wichtigkeit der Pressefreiheit und ruft in Erinnerung: „Wenn die Presse frei ist, kann das gut oder schlecht sein, ohne Freiheit kann die Presse jedoch nur schlecht sein!“. Er relativiert die journalistische Neutralität und spricht von der Notwendigkeit eines entschlossenen Engagements, wenn die Würde des Menschen verletzt wird. Er unterstreicht den besonders heiklen Charakter der schädlichen traditionellen Praktiken und die Notwendigkeit, Journalisten spezifisch für diesen Bereich auszubilden. Dies soll mit dem Ziel geschehen, anschliessend Einzelpersonen, Gemeinschaften und Gastländer über die negativen Aspekte der STP oder auch über die Chartas und internationalen Konventionen zu dem Thema zu informieren. Anhand konkreter Beispiele erläutert er die Rolle der Medien im Kampf gegen WGV, die ihnen obliegende Verantwortung und beschreibt ausführlich die grössten Hindernisse bei der Beseitigung schädlicher traditioneller Praktiken. 201 Resumen Alegando la esencial libertad de la prensa, el autor recuerda: “Cuando la prensa es libre, eso puede ser bueno o malo; pero indudablemente, sin la libertad, la prensa no puede ser sino mala!” Relativiza la neutralidad periodística y habla de la necesidad de un compromiso resuelto cuando se viola la dignidad del ser humano. Tratándose de las prácticas tradicionales dañinas, destaca su carácter especialmente sensible y la necesidad de formación de los periodistas en la materia. Esto en la óptica de poder en el futuro informar individuos, comunidades, países acogedores, sobre sus aspectos negativos o también sobre las cartas y convenios internacionales allí relativos. A partir de ejemplos concretos, el autor relata el papel desempeñado por los medios de comunicación en la lucha contra las MGF, la responsabilidad que les incumbe, y detalla los obstáculos principales a la erradicación de las PTP. Summary Emphasizing the essential press freedom, the author claims: ”When the press is free, it can be good or bad. But for certain, without freedom, the press can only be bad!” He relativizes media neutrality, pointing out the necessity of a resolute commitment in the face of violations of human dignity. With regard to harmful traditional practices, he stresses their particularly sensitive aspect, and hence journalists’ need for training on them. This will allow them to inform individuals, communities, and host countries, on their negative aspects, as well as related international Charters and Conventions. Starting from concrete examples, he describes the role played by medias in the fight against FGM, their responsibility, and the major obstacles to HTP elimination. * * * 202 INTRODUCTION Nous sommes là pour déranger ? « Contre les abus, il faut une lutte démocratique, et pour une lutte démocratique, il faut avant tout l’information1 ». Démocratie et presse doivent aller ensemble mais le citoyen doit être librement informé. En effet, « quand la presse est libre, cela peut être bon ou mauvais; mais assurément, sans la liberté, la presse, ne peut être que mauvaise ! Pour la presse comme pour l’Homme, la liberté n’offre qu’une chance d’être meilleur, la servitude n’est que la certitude de devenir pire2. » Pourtant la liberté ne constitue pas un luxe pour la presse, mais une charge. « Cela aurait été un privilège ? Il serait exorbitant3. » Vous me permettrez, ab imo pectore, de remercier l’Institut international des Droits de l’Enfant (IDE) pour l’organisation de ce séminaire d’une grande importance et d’une grande qualité au vu des participants qui y ont été conviés. Ce qui augure, je n’en doute pas d’une bonne qualité dans nos différents débats et des résultats qui seront consignés, je l’espère, dans ce que je pourrai appeler les Actes ou Documents du Séminaire de l’IDE sur les pratiques traditionnelles préjudiciables. Etant, si je ne m’abuse, le seul journaliste invité à ce séminaire, je voudrais vous entretenir du rôle et de la place des medias dans l’éradication de ces pratiques néfastes. En effet « les représentants des médias jouent un rôle clé dans la modification des perceptions, l’élimination des préjugés, la correction des images “distorsionnées”, l’éducation du public sur la diversité culturelle et la promotion de la confiance entre les divers groupes de la société », rappelait Mme Doina Silistru, Membre de la Commission pour l’égalité des chances entre hommes et femmes du Sénat de la Roumanie. Comme pour le terrorisme et la lutte contre le Sida, en diffusant librement des informations et des idées en faveur de l’éradication des pratiques traditionnelles néfastes, les médias peuvent aussi contribuer, dans une mesure importante, à la prévention et à la lutte contre ces pratiques. 1 2 3 Levkowarski in Rencontre internationale de Genève sur le thème « Du pouvoir » 3 octobre 1977. Albert Camus voir aussi Jean Dacril – Nouvel Observateur 28 août 1987. in Jean Dumur (Salut journaliste, Ed Bertil, Gallimard 1976. 203 Comment, au-delà de la dénonciation ou de la stigmatisation communautaire, débarrasser notre 21e siècle des pratiques barbares ? Inspiré par de nombreux faits sociaux dégradants pour les femmes, les enfants et la dignité de l’humain tout court, j’ai écrit des articles ou participé à des conférences sur des thèmes relatifs à ce qu’il est convenu d’appeler « pratiques traditionnelles néfastes ». Ce sont donc un ensemble d’actes culturels ou cultuels qui se présentent comme un legs légitime et qui ont une incidence désastreuse sur l’intégrité psychique, physique ou morale de l’individu. Les plus grandes victimes de ces pratiques sont les enfants, notamment les fillettes ou les femmes, qui subissent un ordre patriarcal désuet qui les maintient dans un système de domination bien entretenu, et souvent par ses victimes (le cas de l’excision pour les femmes). Qu’il s’agisse donc des mutilations sexuelles féminines, des crimes d’honneur, du phénomène des talibés ou élèves apprenant le Coran et envoyés par leur maître quémander leur pitance quotidienne, une activité censée inculquer, auparavant, des valeurs de la modestie et de la simplicité à l’enfant et qui, aujourd’hui, est transformée en une véritable exploitation de l’enfance etc. Tous ces sujets ont en commun une charge émotionnelle intense du fait parfois de leur caractère traditionnellement sacré. Si, c’est en effet l’individu qui subit le mauvais sort, c’est toute la société qui garantit la pratique, la valorise et la défend comme faisant partie de son identité. Comment dès lors, tout en s’imprégnant de sa propre culture, la questionner, l’analyser et lui permettre d’évoluer en tenant compte des progrès humains et des valeurs universelles qui sont un héritage commun de toute l’Humanité ? Dans des sociétés où la communauté a encore une influence remarquable sur l’individu, parler de liberté de la presse ou de liberté simplement peut paraître paradoxal. Pourtant, de manière engagée, des journalistes africains ont soulevé l’oreiller de silence sous lequel s’adossaient confortablement des tabous en dénonçant leur propre société, parfois au prix de leur vie ! Il est clair que pour moi, il y a bien sûr des limites à la neutralité journalistique. Car à chaque fois que la dignité humaine est violée, notre conscience ne doit pas tergiverser sur la nécessité d’un engagement résolu pour que vive l’humain ! D’ailleurs mon credo est d’être le plus objectif possible dans l’expression de ma subjectivité. ERADIQUER LES NEFASTES (PTN) PRATIQUES TRADITIONNELLES Les PTN sont des sujets sensibles. Une sensibilité renforcée par leur actualité. En effet, l’Occident découvre, comme une montée de clameur, que l’excision, à titre d’illustration, se pratiquait aussi sur ses terres. Etonnement, branle bas de 204 combat ! On accuse les migrants incapables de s’adapter et de s’intégrer, à défaut d’assimiler la culture euro américaine. On crée des lois pour interdire des pratiques qui ont valeur de foi chez certains tenanciers. Les partis populistes sautent sur une belle occasion pour stigmatiser les migrants qu’il faut renvoyer chez eux. Alors pour défendre les droits de l’Homme, on en bafoue d’autres. Et c’est la quadrature du cercle. Les médias occidentaux, mal préparés, stigmatisent les populations migrantes ou font véhiculer des stéréotypes dégradants qui nuisent au vivre ensemble. Les journalistes conçoivent et ont entre leurs mains les outils de représentation collective que sont les médias. D’où la nécessité de bien les former. En effet, prenons l’exemple de l’image de l’Afrique en Occident. Il nous apparaît très souvent que les médias écrits et audiovisuels occidentaux nous apparaissent tels des prismes déformants quand ils traitent des réalités africaines. L’image qu’ils nous renvoient du continent, souvent avec condescendance, est généralement réductrice ou apocalyptique, selon les circonstances. Elle est, dans bien des cas, biaisée, parce que entachée, soit par de l’européocentrisme, soit par de l’afro-pessimisme. Il y a, bien entendu, des informations que nous recevons de l’Occident qui se démarquent de ces deux schémas. La formation est un enjeu social mondial. En réalité, il y a donc une responsabilité collective à assumer dans le cadre de l’information et de la lutte contre les pratiques traditionnelles néfastes. D’abord au niveau des organisations internationales, au niveau des partenariats que l’on peut avoir avec les médias, notamment avec les Etats – membres des Nations Unies pour promouvoir une information beaucoup plus objective, plus complète et permanente sur ces phénomènes. Il faudrait essayer de faire passer un message qui va conscientiser et responsabiliser et, j’insiste, l’Afrique n’a pas le monopole des pratiques traditionnelles néfastes. Je voudrais cependant souligner l’importance de démontrer que ces pratiques sont inopportunes aujourd’hui parce que dangereuses pour la santé des victimes et qu’elles vont à l’encontre de la Dignité humaine universellement reconnue. Il faudra pourtant créer un équilibre dans l’information et l’inscrire dans une « démarche participative et culturellement respectueuse » comme le suggère l’excellent texte-argumentaire de notre séminaire. Je ne doute pas par ailleurs que le Pr Abdoulaye Sow de la Mauritanie nous donnera des recettes quant à l’approche socio anthropologique à adopter avec la stratégie de la contre argumentation culturelle qu’il ne manquera pas de développer. Autant dans les pays porteurs de PTN que dans les pays d’accueil, la gangrène est la même et il faudrait donc, dans une cordiale entente, essayer d’y faire face. Le rôle des médias et des communicateurs est à ce titre très important pour former; informer et sensibiliser les individus des communautés sur les aspects 205 négatifs de ces pratiques, non seulement pour les communautés concernées, mais également pour les pays d’accueil. C’est pourquoi, je propose une approche inclusive pour permettre une réappropriation par les communautés des solutions envisagées. Ces méthodes d’éradication devront aussi adopter une démarche holistique en intégrant la multidisciplinarité (cadres légal, sanitaire, politique, médiatique etc.). Le rôle des médias dans la lutte contre l’excision L’Unicef note dans son rapport L’excision au Sénégal : sens, portée et enseignements tirés de la réponse nationale4 que « L’implication des médias a joué un grand rôle dans la sensibilisation, la plaidoirie, mais aussi dans la divulgation de cas clandestins d’excision, de tentatives d’excision, ou de complications liées à cette pratique ». A titre d’exemple, des émissions radio sont organisées dans les zones à forte prévalence. La télévision n’est pas en reste non plus. Elle couvre tout le pays et diffuse des spots TV et des émissions grand public sur cette pratique. La diffusion du film « Moolade » du cinéaste sénégalais Ousmane Sembène en est une grande illustration. Les auteurs du Rapport notent également à propos des émissions radiodiffusées en langue nationale que : « Des émissions radiodiffusées hebdomadaires du programme (ndlr du programme de TOSTAN5) dans chaque région contribueraient au renforcement des connaissances sur la démocratie, la santé et les droits humains. Ce type de mobilisation sociale aurait permis une large diffusion des informations et aurait encouragé les communautés enclavées à rejoindre le mouvement global de transformation sociale en cours dans leur région. C’est le cas, par exemple, des îles en Casamance. Au niveau régional, les villages du programme emploieraient des stratégies de mobilisation sociale pour rassembler la plus grande communauté possible dans 15 des villages environnants, diffusant ainsi les connaissances du programme dans toute la région ». En 1974, dans la dernière page du journal « le Monde », l’association « Terre des hommes » dénonce la pratique des MSF. Cet article a été à l’origine de la prise de conscience du problème en France. On rappelle que les pratiques d’excision sur le territoire français ont été révélées à la suite de décès de bébés qui ont donné lieu à des procès. 4 5 (UNICEF- Dakar- Août 2008 – « L’excision au Sénégal : sens, portée et enseignements tirés de la réponse nationale », Dominique GOMIS (socio anthropologue, chercheur en Sciences Sociales, Directeur de Human Africa) et Mamadou Moustapha WONE (Sociologue) Le programme de Tostan se décline sous forme de modules dispensés aux populations dans ces zones d’intervention, un peu partout au Sénégal. Ces modules constituent une abondance d’enseignements et d’information allant de l’apprentissage à lire et à compter jusqu’à l’information sur les droits de la femme et de l’enfant, en passant par des séances de sensibilisation à l’hygiène et à la santé.) 206 En Avril 1977, le mouvement international « Terre des hommes » lance depuis Genève une campagne de grande envergure visant à dénoncer l’excision en interpellant par lettre l’Organisation des Nations Unies. C’est lors de cette campagne que, le 20 décembre 1983, M. Edmond Kaiser a rencontré M. Thomas Sankara, le président du Burkina, sur la question de l’excision. Le chef de l’Etat avait promis de faire une déclaration sur la question à travers les ondes. La volonté affichée des premières autorités du pays pour l’émancipation et la protection de la femme a été un tournant décisif dans l’acceptation de la promotion de l’abandon de l’excision comme un problème qui mérite une attention toute particulière6. Obstacles majeurs à l’éradication des PTN 1. Instrumentalisation politique des PTN. « Mes longues années d’exercice du pouvoir dans mon pays m’ont, parfois avec dureté, confronté aux humeurs de l’opinion publique, à la raison d’Etat, aux pressions sociales, et même à la démagogie des politiciens », révélait le Président Abdou Diouf, actuel Secrétaire Général de la Francophonie, lors de la cérémonie d’ouverture du quatrième Congrès mondial contre la peine de mort organisé à Genève. Le Président Diouf s’est engagé très tôt à lutter contre l’excision ce qui lui a valu de perdre des voix lors des élections présidentielles de 2000, qu’il a perdues au profit de l’actuel Président Me Abdoulaye Wade, si l’on en croit le Pr Ndioro Ndiaye, ancienne directrice adjointe de l’organisation mondiale pour la migration (OMI). 2. Le poids des traditions dans les mentalités et chez des populations le plus souvent analphabètes 3. La peur de trahir l’ancêtre. 4. La difficulté de libérer les communautés de cette pesanteur de la tradition de l’ancêtre. 5. La difficulté de communiquer dans un environnement où règnent la monoculture médiatique et la pensée unique. 6. La difficulté d’obtenir l’engagement militant de la classe politique et des medias. 6 Analyse de l’évolution de la pratique de l’excision au Burkina Faso. L’environnement institutionnel, politique et programmatique de la lutte contre la pratique de l’excision. Source: (http://www.popcouncil.org/pdfs/RH_BurkinaFaso_FGMAnalyse_FR.pdf 207 LA NATURE DES MEDIAS ET LEUR RESPONSABILITE Nous avons des critères universels qui déterminent la qualité du travail journalistique : - rigueur dans l’établissement des faits - croisement des sources - souci de la qualité de l’expression qui permet de rendre compte de l’actualité sans approximation ni parti pris mensonger. « Mais nous sommes souvent plongés dans un flux constant d’informations, où les images se succèdent, rendant tout délai impossible. La multiplicité des sources, rend l’analyse plus difficile, et pourtant le temps laissé à l’analyse est de plus en plus court », analyse Hervé Bourges. Pourtant « Même si, aux heures de pointe, la rédaction quotidienne est assimilable au service des urgences chirurgicales d’un hôpital, à la fin du week-end de Pentecôte, il s’avère nécessaire, capital, dis-je, que le journaliste, même dans une situation apocalyptique – d’appliquer la check – list de l’honnêteté » écrit Béguin, l’auteur de Journaliste qui t’a fait roi ? « Les médias ont dans les sociétés modernes une responsabilité particulière, qui répond à deux évolutions fondamentales : la fluidité de l’information et le besoin de transparence exprimé par les citoyens » soutenait le spécialiste français de l’information. Tout le problème est de maintenir intacts les principes de déontologie et de responsabilité d’une profession confrontée aux contraintes de l’abondance et de la rapidité. La qualité des hommes et des femmes, dépend pour beaucoup de leur formation. Plus vrai pour l’Afrique qui reste dans une situation de dépendance médiatique vis à vis des pays développés. Car ce sont ces médias qui, pour une bonne part, déterminent la conscience collective de l’Humanité. Là où l’information était locale, au mieux nationale, elle est devenue internationale, par essence, elle dépasse les frontières et ses enjeux sont également continentaux voire mondiaux. Le journaliste doit expliquer les faits sociaux. Et pour expliquer, il faut comprendre. Comprendre, et expliquer, cela nécessite - du recul - de l’attention - de la réflexion. 208 FAIRE CONNAITRE PERTINENTS LES INSTRUMENTS JURIDIQUES Combien sont-ils, les gouvernements à ratifier la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme qui reconnaît la centralité du Droit à l’information et la liberté d’expression comme pierre angulaire de la Démocratie ? Cependant, même s’ils reconnaissent et crient haut et fort leur adhésion à ce droit inaliénable, beaucoup de gouvernants ne font aucun effort pour informer leurs populations des décisions qu’ils prennent à leur place. Le Droit à l’information L’accès à l’information est un droit humain inviolable. Sans une bonne information, il n’y a pas de transparence. Et sans cette dernière, il n y a pas de démocratie. Dans les « sociétés de l’information » d’aujourd’hui, les habitudes sociales et culturelles sont, pour une bonne part, une construction collective des médias. Ainsi, « la transparence peut être inconfortable pour les pouvoirs publics, mais nos sociétés peuvent d’autant moins y renoncer que la légitimité de leurs structures politiques et sociales en dépend », assène l’ancien président de l’association de la presse francophone. Hervé Bourges, qui s’exprimait dans le cadre du Séminaire de Dakar7 organisé par l’Unesco, à l’occasion de la célébration de la journée mondiale de la liberté de la presse autour du thème « Les médias et la bonne gouvernance », défendra plus loin que : « La bonne gouvernance est ainsi intrinsèquement liée à la communication des gouvernants, à la transparence des modes de décision politiques, à l’évidence de la séparation des pouvoirs et au bon contrôle que chacun peut exercer sur les autres, sous les yeux du “quatrième pouvoir”, celui des médias, c’est-à-dire sous les yeux de tous ». A l’issue de ce séminaire, la Déclaration de Dakar rendue publique notait entre autres recommandations : de faire largement connaître au public la législation et les politiques concernant l’accès à l’information détenue par les pouvoirs publics; de se conformer au principe qui veut que les travaux des organes 7 Les médias et la bonne gouvernance - Séminaire Unesco – Dakar - 1 au 3 mai 2005 209 législatifs soient ouverts au public; de favoriser une large participation du public aux processus de gouvernance, notamment grâce à des moyens tels que les TIC et l’administration en ligne etc. Est-ce-donc criminel pour un journaliste de rappeler aux Etats leurs obligations prises devant la communauté internationale. Est-ce-faire preuve de témérité que de rappeler que les enfants et les femmes ont des droits humains inaliénables, qui ne sont pas un cadeau qui leur est fait par les adultes hommes ? CHARTES ET CONVENTIONS INTERNATIONALES La Convention relative aux droits de l’enfant des Nations unies Elle dispose dans son article 24 que : « Les Etats parties reconnaissent le droit de l’enfant de jouir du meilleur état de santé possible et prennent toutes les mesures efficaces appropriées en vue d’abolir les pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé des enfants. » Nb : Cette convention a été ratifiée par tous les Etats sauf les Etats-Unis et la Somalie. La Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes Entrée en vigueur le 13 janvier 1984, elle dispose dans son article 2 que : « Les Etats parties s’engagent à prendre toutes les mesures appropriées, y compris les dispositions législatives, pour modifier ou abroger toute loi, disposition réglementaire, coutume ou pratique qui constitue une discrimination à l’égard des femmes. » Nb : Cette convention a été ratifiée par de nombreux pays africains dont ceux qui sont aujourd’hui des champions de l’excision et des discriminations faites aux femmes. La Chartre africaine des droits de l’homme et des peuples Entrée en vigueur le 21 octobre 1986, elle dispose dans son article 4 que : 210 « La personne humaine est inviolable. Tout être humain est inviolable. Tout être humain a droit au respect de sa vie et à l’intégrité physique et morale de sa personne. Nul ne peut être privé arbitrairement de ce droit. » Nb : Plus de cinquante Etats africains ont adhéré à cette charte. C’est dire la quasitotalité des pays du Continent. La charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant Entrée en vigueur le 29 novembre 1999, elle dispose dans son article 21 que : « Les Etats parties prennent toutes les mesures appropriées pour abolir les coutumes et les pratiques négatives, culturelles et sociales qui sont au détriment du bien-être, de la dignité, de la croissance et du développement normal de l’enfant, en particulier : Les coutumes et pratiques préjudiciables à la santé, voire à la vie de l’enfant » Protocole à la charte africaine des droits de l’homme et des peuples, relatif aux droits des femmes, adopté par l’Union Africaine le 11 juillet 2003 Dans son article 5 Elimination des pratiques néfastes, il déclare: « Les Etats interdisent et condamnent toutes les formes de pratiques néfastes qui affectent négativement les droits humains des femmes et qui sont contraires aux normes internationales. Les Etats prennent toutes les mesures législatives et autres mesures afin d’éradiquer ces pratiques et notamment : a) sensibiliser tous les secteurs de la société sur les pratiques néfastes par des campagnes et programmes d’information, d’éducation formelle et informelle et de communication ; b) interdire par des mesures législatives assorties de sanctions, toutes formes de mutilation génitale féminine, la scarification, la médicalisation et la paramédicalisation des mutilations génitales féminines et toutes les autres pratiques néfastes ; c) apporter le soutien nécessaire aux victimes des pratiques néfastes en leur assurant les services de base, tels que les services de santé, l’assistance juridique et judiciaire, les conseils, l’encadrement adéquat ainsi que la formation professionnelle pour leur permettre de se prendre en charge; d) protéger les femmes qui courent le risque de subir les pratiques néfastes ou toutes autres formes de violence, d’abus et d’intolérance » Dans son article 6 b (mariage), il déclare : « l’âge minimum de mariage pour la fille est de 18 ans. » 211 PRATIQUES L’ENFANCE JOURNALISTIQUES ET PROTECTION DE Combat contre l’excision/ le sens de ma démarche Concernant par exemple, l’excision, j’ai écrit un article inspiré d’une note du Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP) et du Fonds onusien pour l’enfance (UNICEF) faisant état des progrès réalisés dans la réduction de la pratique de l’excision au niveau international à l’occasion de la Journée mondiale du 6 février intitulée « Tolérance Zéro contre l’excision ». La circoncision féminine ou les mutilations génitales féminines (MGF) et les mariages d’enfants/précoces ou forcés, constitue une violation des droits humains et une forme de violence à l’encontre des femmes. Des millions d’enfants sont victimes de ce que les spécialistes appellent des pratiques traditionnelles préjudiciables ayant des conséquences diverses dans le domaine de la santé, de l’éducation, de la survie et du développement, qui sont souvent violentes et qui peuvent causer de grandes souffrances, voire même parfois la mort. L’excision est un sujet sensible qui interpelle notre conscience d’Homme. Pratiquée dans 28 pays en Afrique, elle touche le Canada, l’Europe etc. Elle pose un défi au respect de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, les droits liés à la vie, à l’égalité homme-femme, à la santé, à l’intégrité physique de la femme et bien sûr au développement. L’excision instaure une discrimination sexuelle dangereuse dont le but inavoué est d’assouvir la domination de l’homme sur la femme. Paradoxalement dans certaines sociétés dites « excisantes », des femmes poussent leurs fillettes à cette pratique, justifiée au nom de l’Honneur, de la Coutume ou de la Religion…Vraiment ? Alors en tant que journaliste et chercheur, je me devais d’aller à la source, comprendre les tenants et les aboutissants d’un tel acte. Par exemple, mon article présente l’ancrage de l’excision, les efforts fournis pour réduire son impact et la nécessité de développer une contre argumentation basée sur un savoir indigène pour aller vers son éradication. « Lutte contre l’excision : Le Sénégal cité en exemple par les Nations unies8 », publié par le quotidien privé Walfadjri-Dakar, également repris sur mon blog de la Tribune de Genève, http://gorguindoye.blog.tdg.ch, et sur le site du 8 Date de diffusion le 9 février 2010. Article imprimé par Walfadjri-Sénégal- Lien internet : http://www.walf.sn/societe/suite.php?rub=4&id_art=61957 Nb : également publié sur mon Blog de la Tribune de Genève sous le titre : Mutilations Génitales Féminines (MGF): Refuser le fatalisme. Lien: http://gorguindoye.blog.tdg.ch/archive/2010/02/09/mutilations-genitales-feminines-mgf-refuser-lefatalisme.html 212 magazine panafricain en ligne ContinentPremier.com sous le titre « Mutilations génitales féminines : Refuser le fatalisme. » Dans cet article, je défends une idée simple. Lors d’une conférence à l’Union interparlementaire sur l’excision, Ndioro Ndiaye, alors directrice adjointe de l’OIM et ancienne ministre du gouvernement d’Abdou Diouf, révélait que l’une des raisons pour lesquelles Diouf avait perdu le pouvoir en 2000 est liée à sa volonté de bannir l’excision. Cette reconnaissance du Sénégal est aussi sa victoire. Mais, tout dernièrement, un chef religieux d’une importante communauté invitait le gouvernement du Sénégal à reculer face à l’interdiction de l’excision. Je me devais alors de confronter des sources religieuses pour, non seulement combattre l’obscurantisme intéressé de cette famille religieuse, mais ouvrir un débat serein sur une pratique que je considère comme barbare et qui n’a rien à faire dans ma société. C’est pourquoi en chute de l’article j’ai interpellé Abdoulaye Wade, le Président du Sénégal, qui devra ainsi choisir entre l’épanouissement et l’intégrité de nos femmes, en refusant de céder face à cette pression ou à un calcul politique désastreux. C’est donc un choix pour le futur qui s’impose à lui, disais-je. Nous le savons « toutes les cultures fabriquent des bêtises », comme le rappelait l’anthropologue Abdoulaye Sow, invité à l’Université de Genève, dans le cadre d’une conférence débat sur l’engagement des hommes dans la lutte contre l’excision. M. Sow, ancien étudiant de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, défend cependant la nécessité de laisser aux Africains le soin et le temps de faire leur autocritique car, pour lui, « c’est la culture qui donne sens à notre vie ». Abdoulaye Sow entend ainsi éviter le braquage dont pourrait faire l’objet le continent noir. Pourtant, l’anthropologue a lui-même refusé que sa fille, qui porte le nom de sa mère, soit excisée. Il lui a donné le nom de sa mère pour perpétuer la mémoire familiale. Pourtant, c’est au nom de ce même héritage que certaines ethnies continuent encore à mutiler leurs filles. Seulement comparaison n’est pas raison, et le mal n’est pas le bien. C’est alors que je me suis demandé pourquoi excise-t-on alors ? ILLUSTRATIONS Mali : Une femme détruit l’argumentaire sur l’excision « Je rêve d’un monde juste où chacun aura la capacité intellectuelle et physique d’apprécier l’autre. Mon but dans la vie est que tous les Maliens et tous les Africains abandonnent l’excision et toutes les formes de pratiques dégradantes pour l’être humain. » 213 Elle s’appelle Kadidia Sidibé-Aoudou. Née à Gao (Mali), il y a 65 ans, Kadidia Sidibé-Aoudou est directrice de l’Association Malienne pour le Suivi et l’Orientation des Pratiques Traditionnelles (AMSOPT). Trop instruite, elle échappe à un mariage arrangé dès sa naissance et devient professeur d’anglais. Lorsqu’à 26 ans, elle prend conscience du problème de l’excision, elle en fait son combat. C’est à cette dame qui osa cette phrase : « Je me pose beaucoup de questions sur cette femme à qui le secret de l’enfantement a été confié. Cette femme qui durant toute son enfance jusqu’à l’âge adulte se laisse diriger par l’homme » que la revue Tout pour les femmes a consacré un reportage dans le cadre de sa série de portraits de ces femmes qui font bouger l’Afrique, paru le 30 juillet 2009. Mme Aoudou, déclarait : « Ceux qui pratiquent l’excision avancent souvent des arguments religieux. Or, il n’a jamais été dit dans le Coran que la femme doit être excisée, d’ailleurs toutes les religions en Afrique ne pratiquent pas l’excision, après cela dépend des ethnies. Chez nous, cela ne se fait pas. » Et de poursuivre : « Je suis fortement imprégnée par la religion musulmane, mais j’ai été choquée par des prêches contradictoires et sexistes sur la femme et toujours mis « sur le compte de Dieu. » En effet, l’analyse de ces prêches laisse croire que l’homme est une passerelle pour la femme pour aller au Paradis. « Cet aspect contradictoire m’a amenée beaucoup à lire la Bible, la Cabale des juifs, le Coran afin de mieux saisir le concept de Dieu que je me représente comme bon et juste», confie-t-elle à Femmes en Afrique. « Comment l’excision, pratiquée sur des femmes et par les femmes, a-t-elle été maintenue pendant des siècles ? C’est la femme qui excise, en tant que mère, grand-mère, tante, belle-soeur, qui s’implique fortement pour imposer la pratique aux mères qui n’en veulent pas. La femme porte une responsabilité dans cette pratique avec des arguments stupides comme ceux d’atténuer la sensibilité de la femme, embellir son sexe, empêcher les mauvaises odeurs. » Pour elle, l’influence socioculturelle religieuse a modelé les individus au point de bloquer tout esprit critique et d’analyse chez eux. 214 « Un conformisme aveugle dicte tous leurs comportements. L’analphabétisme et la pauvreté viennent renforcer tout ceci » a-t-elle martelé et de suggérer : « Un grand travail doit être fait dans la prise de conscience des femmes dans la gestion de leurs corps et leur propre estime. Et cela ne peut être atteint qu’à travers des séances d’information, d’alphabétisation et de lutte contre la pauvreté. Quand les besoins de l’être humain restent des besoins non satisfaits, son esprit ne peut être productif. C’est pour cela que le combat des femmes doit être soutenu matériellement et financièrement afin de pouvoir atteindre un changement de comportement. Le changement de comportement demande du temps, de la patience des stratégies, de l’argent mais surtout beaucoup de conviction!9» Sénégal : Média et protection de l’enfance : Un spécialiste dénonce la posture désavantageuse des enfants dans les journaux Le journaliste-consultant Mame Less Camara a déploré, le 27 août 2010, à l’occasion de L’atelier de partage et de planification avec les médias publics sur la maltraitance des enfants, organisé à Saly Portudal (Mbour), « les postures souvent désavantageuses des enfants dans les médias, en bute à des règles prévues pour une société d’adultes. » «La course entre les médias concurrents réduit le temps de la collecte et du traitement de l’information», a-t-il expliqué, soulignant que les questions relatives aux enfants ne sont pas « toujours événementielles ». Selon Mame Less Camara, qui faisait une communication portant sur : Les médias sénégalais et la maltraitance des enfants : analyse et leçons apprises, comme tous les faits sociaux, « les questions relatives à l’enfant s’inscrivent dans des durées plus longues, selon un rythme d’évolution plus lent ». « Il faut donc leur consacrer du temps pour les spécifier, les examiner et les comprendre. Les médias n’ont pas cette patience », a assuré Mame Less Camara. Face à cette situation, le journaliste a noté, entre autres, le déficit de formation des journalistes dont la majeure partie est formée par 9 Source/ Tout pour les femmes- http://www.toutpourlesfemmes.com/conseil/Kadidia-Sidibe-Aoudou-Luttecontre.html?decoupe_recherche=kadidia%20sidibe%20aoudou 215 la pratique en tentant d’imiter ce que font ceux qu’ils ont trouvés sur place. Toutefois, « les mêmes carences sont visibles dans l’approche et le traitement des questions relatives à l’enfant par les journalistes issus d’écoles de formation », a précisé M. Camara, notant ainsi que les programmes déroulés par celles-ci ne font pas état des droits des enfants. « L’audiovisuel, plus proche des sources de l’oralité, a encore du mal à traiter les nouvelles relatives aux abus sexuels faits aux enfants », a-t-il dit. Il a donné en exemple les radios qui, lorsqu’elles consentent à aborder ces sujets, « se perdent dans d’interminables périphrases et ne trouvent même pas les mots justes pour désigner les violences sexuelles faites aux enfants ». C’est pourquoi, il s’est demandé devant les journalistes participants, s’il s’agit d’une question de pudeur, d’influence culturelle ou religieuse. Au niveau de la presse, les informations relatives à l’enfant sont publiées de manière générale dans les pages « faits divers » ou « société », mais il arrive assez souvent qu’elles « soient disséminées dans des pages habituellement dévolues à d’autres rubriques. » Qualifiant l’enfant « d’acteur muet » dans la presse, Mame Less Camara estime que celui-ci est « rarement en position d’interlocuteur, encore moins un sujet de premier ordre dans la hiérarchie des informations traitées dans les médias. » Dans sa communication, il a ainsi servi quelques articles de la presse qui ne «participent pas à la protection des enfants et au respect de leurs droits». Pour le journaliste, formateur au Centre d’études des sciences et techniques de l’information (Cesti), il est important de rappeler que les médias participent grandement à la construction de l’image de l’enfant. «La méconnaissance des droits de l’enfant et l’inexistence d’une approche informée transforment les médias en instruments d’amplification des préjugés et des stéréotypes», a-t-il dit. Selon Mame Less Camara, dans ce cas, 216 «l’enfant n’apparaît que lorsqu’il est impliqué dans des affaires criminelles ou est victime d’abus sexuels». Il a aussi soulevé une « question fondamentale », liée à la nécessité de formation des personnels de Rédaction sur les questions relatives aux droits de l’enfant, « quelle que soit la position occupée dans la hiérarchie ». Cela s’impose aussi aux photographes et cameramen, selon toujours Mame Less Camara10. Propositions Je voudrais présenter quelques suggestions personnelles ou parfois empruntées et adaptées à des méthodes déjà prouvées efficaces dans la lutte contre l’excision dans de nombreux pays en Afrique : 1. Implication des médias et de l’Internet à travers la création d’un portail web ? dans la sensibilisation pour l’abandon des PTN. Car il faut aller plus loin dans l’information des médias c’est-à-dire former les journalistes, créer un réseau de journalistes et ou de communicateurs contre les pratiques traditionnelles néfastes. 2. Renforcer les capacités des journalistes regroupés autour d’un Réseau de journalistes contre les PTN. 3. Impliquer les médias dans l’éducation pour l’abandon des PTN en vue d’une large information des populations sur ces questions. 4. Amener les professionnels des médias formés à impliquer d’autres canaux dans l’éducation pour l’abandon des PTN. 5. Amener les communautés à adopter des changements de comportements en faveur de l’abandon des PTN. 6. Dynamiser l’échange de communication et le partage des expériences positives d’abandon des PTN et de plaidoyer auprès des décideurs politiques. 7. Permettre aux groupes vulnérables d’exprimer leurs droits. 8. Sensibiliser la société sur la nature grave et les conséquences des PTN. 9. Éduquer les jeunes par la promotion de leurs droits. 10 Source/ Dépêche Agence de Presse du Sénégal (APS)- Sénégal. 217 10. Mobiliser les dirigeants religieux et communautaires pour faire cesser ces PTN. 11. Organiser et soutenir des campagnes de sensibilisation et des programmes d’éducation sur les effets négatifs des PTN. 12. Travailler avec les parents, les adultes et les garçons pour promouvoir l’égalité, le respect et l’autonomie des filles, et avoir une tolérance zéro pour la violence contre les femmes et les jeunes filles. 13. Exploiter les nouveaux réseaux sociaux pour mieux atteindre le public jeune. 14. Favoriser l’éducation aux droits et à la protection des enfants. 15. Favoriser l’écriture de mémoires d’étudiants et de thèses sur les PTN. 16. Faire témoigner les jeunes filles victimes de ces PTN de même que les garçons. Leur donner la parole est très efficace pour faire tomber les voiles car les sociétés ont souvent honte d’entendre certaines vérités de la bouche de leurs propres enfants. On rejette de prime abord et ensuite le lendemain après avoir bien discuté avec son oreiller, on revient à de meilleurs sentiments. 17. Montrer par des reportages les histoires réussies « success stories ». Là où des progrès tangibles ont été réalisés et leur impact sur la société et le bien être des enfants. Il est bon de parler des problèmes mais il est aussi important de relever les perles. CONCLUSION Je crois qu’il faut continuer à être journaliste. Je trouve que le journalisme aujourd’hui est plus que jamais une profession d’engagement, ce n’est pas simplement un travail salarié. C’est un métier d’engagement qui vous projette où vous n’étiez pas destiné à aller. C’est continuer à être dérouté par des situations, c’est refuser de dire « je sais tout », « je connais cette situation, je vais vous expliquer », toutes ces formules qui font que les journalistes sont quelquefois compliqués. Aujourd’hui, un journaliste honnête est un journaliste qui accepte de dire « je ne sais pas », de poser une question et ne pas trouver de réponse. Je crois qu’il faut vraiment rester dans ces limites-là et ne pas arriver avec des convictions toutes faites et avec des chars d’assaut, me confiait dans un entretien à Genève, ma collègue Florence Aubenas, journaliste à Libération. En réalité, 218 « Emporté par le flot de l’action quotidienne; (le journaliste) il se trouve, harcelé par les délais, seul avec son intuition, balancé entre les réminiscences de règles déontologiques et la propension naturelle à se laisser aller à sa pente ». Faudrait-il le rappeler : « La liberté de la presse est la pierre angulaire de la démocratie ». A ce titre les médias ont l’impérieux devoir de participer en toute responsabilité à la construction de notre humanité. Les médias, parce qu’ils sont détenteurs de la parole libre, peuvent ainsi jouer un rôle de surveillance de l’application des droits humains en livrant au public des informations exactes sur la nature de ses droits et leur violation le cas échéant. C’est ce qui fait que toute stratégie pour lutter contre les pratiques traditionnelles néfastes devrait prendre en compte un volet information, éducation et communication. L’Observation commune entre le CRC et le CEDAW qui devrait naître prochainement, et dont notre séminaire se veut être une contribution scientifique à l’élaboration, devrait donc donner une place au volet IEC. La production et la multiplication des outils d’IEC avec comme objectif : Produire des outils pour la réalisation les activités à partir de support IEC. Les outils IEC élaborés tels des livrets éducatifs, des cassettes audio et visuelles, des affiches, des outils GRAAP (groupe de recherche et d’appui à l’autopromotion des populations), des bandes dessinées sur les pratiques traditionnelles néfastes et leurs conséquences, des manuels sur les droits des enfants, des droits humains etc. Ces outils bien connus des spécialistes, pourront ainsi être distribués aux groupements de femmes et d’hommes ainsi qu’aux différentes associations et ONG actives en matière des droits de l’Homme, aux médias etc. Je voudrais à ce titre rappeler que la Journée internationale de lutte contre l’excision du 6 février 2006 avait pour thème « La place et le rôle des communicateurs dans l’abandon de la pratique de l’excision ». Car bien entendu on ne peut apporter un changement de qualité sans les communicateurs modernes et traditionnels. On sait qu’il y a quelques années, il était pratiquement impossible d’aborder ouvertement certaines questions comme l’excision, le crime d’honneur, les mariages forcés etc., dans les médias. Le pluralisme médiatique né de la démocratisation des pays africains a ainsi constitué comme un coup de tonnerre dans l’alerte de nos sociétés sur leurs pratiques néfastes, qu’une certaine pudeur n’autorisait pas à crever l’abcès et à extirper la gangrène. Beaucoup de pratiques sont solidement ancrées dans les coutumes des pays et la préservation de la paix sociale reléguait à une date ultérieure le vrai combat pour 219 l’avènement et la jouissance de tous et de toutes de ses droits fondamentaux qui préservent la Dignité humaine. Je l’ai rappelé à l’IUP : La liberté est le fruit d’une pensée libre. Si les hommes politiques ont besoin de promouvoir leurs propres causes et leur carrière, le rôle des journalistes n’est pas de les flatter, d’inciter la population à la haine ou se mêler de propagande. Les journalistes doivent user de leur liberté de façon responsable, et bien qu’ils puissent inviter le public à débattre de questions politiques, ils doivent rester dans les limites de leur code de déontologie. Il faut comprendre que le journalisme est une profession, et comprendre aussi le rôle du journaliste dans la société. Les journalistes ne sont pas les adversaires des hommes politiques; ce sont plutôt des médiateurs sociaux, dont la mission est de tenir le public informé. La façon la plus efficace d’instaurer un journalisme démocratique est de laisser une liberté totale aux journalistes, mais de veiller à ce qu’ils exercent leur métier de façon responsable11. De manière générale, et de l’avis de tous les spécialistes, le véritable enjeu pour une véritablement démocratique et respectueuse des droits fondamentaux de chaque être humain est de permettre à la presse d’exécuter sa mission irremplaçable, de formateur de l’opinion dans des conditions de rigueur, d’honnêteté intellectuelle et morale, de professionnalisme avéré tel que l’exige le noble métier de journaliste. Profondément ancrée dans l’imaginaire des sociétés « excisantes », l’excision est présentée comme un moyen de préserver la virginité de la fille. C’est donc une question d’honneur ou de honte. L’honneur ou la honte de toute une famille à préserver jusqu’à justifier le meurtre de jeunes filles par leur propre cousin ou frère ! Et souvent, la justification donnée est que la religion, en occurrence l’Islam, autorise cette pratique. En vérité, il n’y a aucun verset du Coran ni un ‘hadith’ ou parole du Prophète Muhammad (Paix et Salut sur Lui) qui valide l’excision. En réalité, des prêcheurs et autres fervents défenseurs d’une certaine culture profitent de l’ignorance des populations pour perpétuer leur forfait, en maintenant des millions d’individus dans l’obscurantisme. En Arabie Saoudite, on n’excise pas. En Indonésie, premier pays musulman au monde, on n’excise pas, ni en Tunisie. L’Islam ne peut donc servir de prétexte à une telle pratique qui engendre des complications graves lors de l’accouchement, qui crée des infections (kystes, etc.), qui facilite la transmission des maladies sexuellement transmissibles, qui réduit le plaisir des femmes lors de l’acte sexuel. L’excision n’est donc qu’une pratique pathologique dont il faut raisonnablement et rapidement se débarrasser. Et comme le disait le sage Amadou Hampaté BA: 11 Source/ El hadji Gorgui Wade Ndoye, « Parlement et Médias : Ensemble pour la Tolérance » - Séminaire à l’intention des Présidents et membres des instances parlementaires des droits de l’Homme- UIP/ Document No40. 220 « il y a des pratiques que nos ancêtres eux-mêmes, s’ils revenaient à la vie, trouveraient caduques et dépassées ». D’où l’impérieuse urgence pour les Africains, notamment, de faire l’inventaire de leur culture et d’en tirer les conclusions idoines. 221 HOW TO ABANDON FGM? THE CONTEMPORARY CAMPAIGN TO ABANDON FGM: A LOOK AT THE SUDANESE EXPERIENCE. MUSTAFA HASSAN Program Advisor, Terre des hommes – Child Relief, Sri-Lanka Résumé Le conflit entre les droits humains individuels et les pratiques traditionnelles ou droits des groupes est une préoccupation centrale dans le discours des droits humains. La lutte contre les MGF a-t-elle été conceptualisée comme une lutte contre la culture ? L’auteur se penche sur le passage d’une approche sanitaire des MGF, à une approche droits humains. La “Platform for Action Towards the Abandonment of Female Genital Mutilation/Cutting”, sous la direction de l’UNICEF, est le fer-de-lance de cette approche. Sous l’égide de l’ONU, la lutte contre les MGF a passé, du recours exclusif à des messages négatifs et aux risques pour la santé, a une stratégie globale. La présentation se termine avec l’évocation de la campagne pour l’abandon des MGF au Soudan. Zusammenfassung Der Konflikt zwischen den Menschenrechten jedes Einzelnen und den traditionellen Praktiken oder den Rechten von Gruppen ist ein zentrales Anliegen des Menschenrechtsdiskurses. Wurde die Bekämpfung von WGV als Kampf gegen die Kultur konzeptualisiert? Der Autor beschäftigt sich mit dem Übergang von einem Zugang aus gesundheitlicher Sicht zu WGV zu einem menschenrechtlichen Zugang. Die Platform for Action Towards the Abandonment of Female Genital Mutilation/Cutting, unter der Leitung des UNICEF, stellt die Speerspitze dieses Zugangs dar. Unter der Schirmherrschaft der UNO, hat sich der Kampf gegen WGV vom Einsatz ausschliesslich negativer Nachrichten und dem Bezug auf die Risiken für die Gesundheit zu einer globalen Strategie gewandelt. Am Schluss der Präsentation wird auf die Kampagne zur Abschaffung von WGV im Sudan hingewiesen. 222 Resumen El conflicto entre los derechos humanos individuales y las prácticas tradicionales o derechos de los grupos es una preocupación central en el discurso de los derechos humanos. ¿La lucha contra las MGF se conceptuó como una lucha contra la cultura? El autor examina el paso de un enfoque sanitario de las MGF a un enfoque derechos humanos. La “Platform for Action Towards the Abandonment of Female Genital Mutilation/Cutting”, bajo la dirección del UNICEF, está a la punta de este enfoque. Bajo los auspicios de la ONU, la lucha contra las MGF pasó, del recurso exclusivo a mensajes negativos y a los riesgos para la salud, a una estrategia global. La presentación se termina con la evocación de la campaña para el abandono de las MGF en Sudán. Summary The conflict between the individual human rights and the traditional practices or group rights is a meticulous concern in the human rights discourse. Has the struggle against FGM been conceptualized as one against culture? The author observes the shift from the health approach to the human rights approach with regard to FGM. The “Platform for Action Towards the Abandonment of Female Genital Mutilation/Cutting” led by UNICEF is the frontline promoter of this rightsbased approach. Under the leadership of the United Nations, the fight against FGM has moved from the sole reliance on the negative messaging and health hazards of FGM towards a comprehensive strategy. The presentation ends with the evocation of the campaign to abandon FGM in Sudan. * * * 223 The issue of harmful traditional practices is one of the most controversial issues in the universalism/relativism debate. These traditional practices are considered by many of the members of the practicing group as harmless and normal, or even useful and vital, and often possess distinctive positive values in the cultural context. But outsiders, and some members of the practicing group, consider them as violations of human rights. The contradictory views are reflected in the conflict between cultural or group rights and individual human rights. This conflict between the individual human rights and the traditional practices or group rights is a meticulous concern in the human rights discourse, especially in the African context. The dilemma regarding this conflict was summarized by Brems (2001: 168) in the question: “What should prevail? The right of the group to maintain its culture and tradition, or the right of the individual?” The dominant position in the African human rights view is in favor of preserving traditions that reflect “positive African values” while respecting the individual human rights. This position brings another dilemma as it depends on value judgment and who is qualified to evaluate certain traditional practices whether harmful (negative) or positive. In this regard, the most controversial practice is female genital mutilation (FGM). However, the use of the term FGM to describe such practice is subject to a debate. Shell-Duncan and Hernlund considered the choice of terminology to describe such practice as “fraught with political landmines”. They rejected the term “female circumcision” (FC) for de-emphasizing the severity of the practice, by comparing it to the removal of the foreskin in males. They also rejected the term “genital surgery” for lending the practice “an air of legitimacy or medical necessity”. However, they agreed with the argument that the term mutilation in FGM denotes condemnation. Instead Shell-Duncan and Hernlund used the term female “circumcision” with connotations to acknowledge the imprecision of this term (2000: 6-7). Rahman and Toubia (2001: X) choose another way of compromise by using the dual term FC/FGM “in order to acknowledge the validity of both expressions: that the intent of the procedure is circumcision and the effect is mutilation”. The term FGM is in use since the late 1970s. It was adopted by the 3 rd conference of the Inter-African Committee on Traditional Practices Affecting the Health of Women and Children, in Addis Ababa, Ethiopia 1990 and then recommended for the United Nations by the World Health Organization (WHO) in 1991. According to the Interagency Statement on Eliminating Female Genital Mutilation (WHO, 2008a), the choice of the term “mutilation” reinforces that the practice is a violation of girls’ and women’s rights. In addition it aims at the promotion of its abandonment. However, the use of the term “female genital mutilation/cutting” (FGM/C) from the late 1990s is explained by the dissatisfaction 224 with the negative association attached to the term “mutilation”, possibly deterring the process of social change aiming at the elimination of the practice by alienating the practicing communities. “To capture the significance of the term "mutilation" at the policy level and, at the same time, to use less judgmental terminology for practicing communities, the expression "female genital mutilation/cutting" is used by UNICEF and UNFPA”. The term used in this contribution is FGM, in agreement with the WHO recommendation. Also to emphasize on the importance of making value judgment on practices that violate human rights. It is important to note that, while traditional practices and group rights should be respected as one of the components of human rights, no practice should be exempted from criticism. In this regard universal efforts should continue to find a comprehensive answer to the question: how to abandon FGM? HOW TO ABANDON FGM? FGM became widely known thanks to an active campaign initiated mainly by Western feminists who saw the practice in some African countries, in isolation of its cultural context, as a region-specific anti-woman practice. This understanding gave rise to the idea that culture is a problem for human rights. Merry (2003: 16) related this idea of culture as a barrier to women’s equality to a more general tendency to culturalize problems. “This means that it is a way to interpret women’s subordination in terms of cultural practices that suppress them rather than economic or political problems their communities face”. In other words, the struggle against FGM has been conceptualized as one against culture. In her analysis of the African views on human rights and FGM in particular, Brems concluded that FGM is rarely defended among African intellectuals but among those who oppose it there is no agreement on its qualification as a human rights violation. She mentioned the 1980 report of the Minority Rights Group which in her view presented two conclusions: one, FGM should be treated as a health issue and two, alarmism and righteous indignation will not help. She noted that the question of treating FGM as a human rights violation was not mentioned (2001: 176-177). However, it is important to note that, this report was published under the title of “Female Circumcision, Excision and Infibulations: The facts and proposal for change” in December 1980, with revised editions in March 1983 and July 1985, was published in April 1993 (Dorkenoo and Elworthy, 1993), under the title “Female Genital Mutilation: a proposal for change. The new report started by listing articles from the Declaration on the Elimination of Discrimination Against Women 1967, Declaration on the Protection of all Persons from being Subjected to 225 Torture and other Cruel, Humiliating or Degrading Treatment or Punishment, 1975 and the Declaration on the Right to Development,1986. Moreover, the preface of the 1993 report stated that the issue of FGM “needed to be placed on the programs of the international agencies and on the human rights agenda”. It also emphasized that “Female genital mutilation is a complex and painful issue which embraces aspects of sexuality, health, education, human rights, the rights of women and children, and the right to development”. The changes in the report of Minority Rights Group regarding FGM from 1980 to 1993, as reflected in the title and content indicates a change from the health approach to human rights approach in the fight against FGM. Shell-Duncan explained how, since the early 1990s, the global campaign against FGM “has actively attempted to divorce itself from health approach” and adopting a human rights framework. This shift is justified by several reasons. First, health approach failed to motivate large-scale behavior change due to the strong belief in the social and cultural importance of the practice of FGM in addition to the medicalization of the practice reflected in the rise of the percentage of medical persons involved. Second, the questioned credibility of the health information often derived from extreme case studies, sometimes seen as exaggerations of health risks. Finally, the unintentional conceptualization of the practice as a health issue subject to treatment through medical care, which was refused by the anti-FGM activities (2008: 225227). The adoption of a human rights approach was not free of criticism. The approach faced several challenges such as the effectiveness of legal reform to combat FGM and the risk of victimization or undermining children’s and women’s agency. The main challenge within the universalism/relativism debate is the question of imposing Western norms on other cultures or the ability to maintain a balance between group rights and individual rights. The difficulty in maintaining this balance was noted by Brems as one of the precautions for “inclusive universality” (2001:488-491). The indivisibility and interdependence of all human rights, in her view, does not mean that the violation of one right cannot be justified by the realization or violation of another right. Accordingly, collective rights must not substitute or undermine individual rights. She wrote: The problem is that traditional cultural practices and rules may be of such nature that –at least for those who do not accept their positive meaning in the cultural context- they are at odds with individual human rights: these are the so called “harmful cultural practices” in a broad sense. How can a conflict between a collective cultural right endorsing traditional practice and an individual right that is harmed by the same practice be solved in the light of inclusive universality? 226 The answer offered by Brems, is to guarantee the individual who refuses to participate in the cultural practice the right to “opt out”. The same idea, “opt out” was suggested by Rhoda Howard and quoted by Donnelly (1984: 418-419). He wrote: Where practical, guaranteeing a right to “opt out” of traditional practices in favor of “universal” human rights or alternative human rights interpretations seems ideal, for it permits an individual in effect to choose his or her culture, or the terms on which he or she will participate in the traditional culture. Sometimes, however, allowing such choice is impossible, because the conflicting practices are irreconcilable. To illustrate this limitation, Donnelly gave examples of private ownership of means of production and freedom of religion. Another example can be added is FGM, particularly in the case of the girl child and the difficulty related to the consent of the child on the practice and the right of parents to decide on what they consider is the best interest of their children. It is important to note that the human rights approach is not limited to legal reform, but should be seen as a comprehensive approach that promotes social change and the adoption of the culture of human rights. This comprehensive approach was promoted by the UN and reflected in several documents on FGM, published recently. The documents showed a common agreement on understanding the practice as a self-enforcing social convention or social norm. With human rights as an overarching framework, a programmatic approach that combines community-led efforts for social change and legal reform was endorsed. The “Platform for Action Towards the Abandonment of Female Genital Mutilation/Cutting” (UNICEF, 2008) emphasized that from the perspective of those who practice FGM, it is a must to raise a girl properly, without which “shame and social exclusion” will happen to the girl and her family. The report of the Secretary-General of the UN on the girl child (UN, 2009), stressed on the importance of “appreciation of local culture” as a base for human rights education. Through the human rights discourse, a new dimension is added to the discussions with the practicing communities to abandon FGM: The discussion does not focus on the “eradication” of “bad” traditions, but instead focuses on building a positive vision of girls and women, encouraging their active role in society and enabling them to maintain their traditional values without being subjected to female genital mutilation/cutting. Individuals are not rejecting the bad, but are embracing the good. When the value-based discourse is associated with public commitments that encompass appropriate social networks, it can leverage massive collective change (UN, paragraph 70). In another document published by UNICEF in 2009 (Ahmed et al: 10) one of the important steps in the campaign to abandon FGM was 227 ... to stop framing FGM/C as a problem, but rather recognize the practice as an integral part of a community’s traditions and values. Since FGM/C is a community practice, it was also necessary to support communities to act together to create new social practices and to empower them to develop their own solutions. Realizing the limitation of the health approach in the fight against FGM, UNICEF stated that a gradual shift towards medicalization of FGM in many countries served as a tool to “perpetuate and legitimize this practice” and presented an enormous challenge to advocacy efforts. The technical note on “Coordinated Strategy to Abandon Female Genital Mutilation/Cutting in One Generation” stated that: Currently, the dominant communication paradigm is health education through the design and delivery of messages. The messages are usually delivered in time-bound campaigns and are designed to persuade people to comply with health-seeking behaviours. In the case of FGM/C, these campaigns often build knowledge in their target audiences but fail to convert that knowledge into widespread abandonment (UNICEF, 2007: 25). The Sixty-first World Health Assembly recognized this shift towards medicalization and expressed concerns about “emerging evidence of an increase in carrying out female genital mutilation by medical personnel in all regions where it is practiced”. In its resolution WHA61.16, on female genital mutilation, the Assembly urged all member States to enact and enforce legislation to “prohibiting female genital mutilation by any person, including medical professionals” and to “support and enhance community-based efforts to eliminate the practice” (WHO, 2008b). A working paper on Sudan (Ahmed et. al), noted a shift from the sole reliance on the negative messaging and health hazards of FGM towards a comprehensive strategy. According to the paper, the National Council for Child Welfare, supported by UNICEF, developed an awareness campaign on child protection issues which helped to transform the way FGM/C was presented by including information on human rights, women’s rights, and child rights. The theoretical background of the shift in the approach of the campaign against FGM relies on the social convention theory promoted by the UN documents. One of these documents is titled “Changing a Harmful Social Convention: Female Genital Mutilation/Cutting” (UNICEF, 2005). Regardless to the justification given for FGM, all are devices to preserve the social convention of the practice. By transforming this social convention, real and lasting change in behavior is most likely to result. To provide more comprehensive understanding of FGM as a social convention an in-depth examination of this document was 228 included in the “Coordinated Strategy to Abandon Female Genital Mutilation/Cutting in One Generation” published by UNICEF in 2007. The Platform for Action (UNICEF, 2008) endorsed the idea of the selfenforced social convention and explained that a collective and coordinated choice to abandon FGM by a significant number of families within a community is a requirement for changing this social convention. “Programmes that have led to abandonment of FGM/C on a significant scale have been systemic and have stimulated and supported large-scale social transformation where overcoming gender roles and stereotypes and empowering women and girls was of fundamental importance” Such programs were appraised by the report of the Secretary-General of the UN on the girl child. The report asserted that the recognition of FGM as “a selfenforcing social convention or social norm has led to innovative programming efforts”. According to the report with such programs “community-led, rapid social change does take place and can be effectively promoted” (UN, 2009: paragraph 72). In the case of Sudan, the working paper (Ahmed et al) emphasized on the role of “high-level” political commitment to end FGM in helping to transform the social convention. But more emphases were made on the role of religious leaders in the campaign to abandon FGM and de-linking the practice from Islam as an important strategy. This strategy is not particular to Sudan as it was mentioned in most of the reviewed documents and widely used by anti-FGM activists at the national and international levels. The authors of “Changing a Harmful Social Convention” (UNICEF, 2005), stressed on the idea that “FGM/C is not prescribed by any religion”. They argued that although there is a theological branch of Islam that supports FGM/C of the Sunna type, this claim is not supported by a text from Quran. The argument is based on the existence of the practice before Islam as well as non-prevalence of FGM among the majority of Muslims in the world. To add more emphasis, a “Statement from Islamic and Coptic church leaders” de-linking the practice to Islam and Christianity, was added to the document (page 12, Box 4). In the Coordinated Strategy to Abandon FGM (UNICEF 2007) a segmentation approach was highlighted. According to this approach, six blocks of countries have been identified for immediate acceleration. Sudan was included in the fourth block identified “along ethnic lines and shared additional perpetrating factors” with Djibouti, Somalia and Kenya (Somali). In the rationale behind this segmentation the following statement was included: A religious movement is unfolding in Sudan to disconnect FGM/C from religious teachings, which may have an overall impact in the Eastern African region and on this block of 229 countries in particular. As religious duty is a separate causal factor, supporting religious authorities to make FGM/C unnecessary is a key element to increasing the speed of the abandonment process (UNICEF, 2007: 32). The emphasis on the role of religious leaders came out twice in the Report on the fifty-second session, the UN Commission on the Status of Women (2008). In paragraph 2, emphasis was put on the importance of mobilization, education and training of religious leaders, among other key actors to “work to eliminate attitudes and harmful practices that negatively affect girls”. Paragraph 3 calls upon the states to engage religious leaders, among others in “developing preventive and elimination programmes to address harmful traditional practices, especially female genital mutilation”. De-linking FGM from religion was also accentuated in the Interagency Statement (WHO, 2008a: 17-19). The importance of including both religious and secular leaders in the advocacy to abandon FGM was highlighted, nevertheless the statement recognized that: The role of religious leaders varies. Those who support the practice tend either to consider it a religious act, or to see efforts aimed at eliminating the practice as a threat to culture and religion. Other religious leaders support and participate in efforts to eliminate the practice. When religious leaders are unclear or avoid the issue, they may be perceived as being in favour of female genital mutilation. While recognizing the validity and importance of the current approach to abandon FGM, it is important to review its action strategies. One of the areas to be reviewed is the attempts to de-link FGM from religion. More specifically, delinking FGM from Islam, which is one on the main strategies to encourage collective abandon of FGM in Muslim communities. The case of Sudan provides a good example. The campaign to abandon FGM in Sudan emphasized on mobilization of religious leaders and successfully managed to motivate some prominent religious leaders to publicly declare that FGM is not a religious requirement. But another group of religious leaders and others worked actively against the campaign and promoted the practice of the Sunna type (FGM type I) as a religious requirement. This group was mostly ignored, however, its growing influence became apparent during the drafting of the Children’s Act which included an article (13) that prohibits and criminalizes all types of FGM. In February 2009, the Council of Ministers dropped the article (13) of the draft Children’s Act of 2009. The decision took into account the advisory opinion of Mugammaa Al-Fiqh Al-Islami, which distinguishes between “harmful circumcision or infibulation (Pharaonic circumcision) and the circumcision of 230 Sunna” (Sudan Tribune, 2009). This decision is a culmination of the anti-anti-FGM campaign; however, the importance is not limited to the influence on the government, which committed itself to support the efforts to abandon FGM, but to the significance of such campaign. The campaign to promote the, so called, sunna circumcision is not focusing only on the claims of linking the practice to Islam. In addition to the support of famous religious leaders, the campaign mobilized prominent figures from different disciplines, but more notably, some female Muslim gynecologists. The argument led by this group is that sunna circumcision is not only a religious requirement, but a medical necessity. Several articles and books were devoted for such argument and sometimes including a detailed description on the procedures of the surgery. For example, “Khitan Al-inath Al-Sharei” (In Arabic: Legitimate Female Circumcision). The de-linking strategy appeared to be successful but it had two major negative consequences. The first is the tendency of the international organizations and civil society to adopt a specific interpretation of Islam. By doing so the organizations are jeopardizing the basic principles of the humanitarian work, specifically neutrality. Secondly, emphasizing on the religious side of the problem, especially in communities where religious plays an important role in the life of the individual, marginalizes the importance of the human rights. When a person is confused with two religious messages, one against all types of FGM and another supporting a specific type, s/he is compelled to choose. Most probably the choice will be in favor of a long established cultural practice supported by a religious leader rather than abandoning the practice based on religious interpretation by an outsider or a religious leader associated with international organization. How to abandon FGM? There is no easy answer to this difficult question; however more considerations should be given to the importance of understanding a cultural practice rather than adopting a position from within this culture. The focus should be on disseminating universal human rights messages to promote a culture of human rights. Moreover, attention should be given to the anti-anti-FGM movement by confronting the claims of the medical advantages of any type of FGM. REFERENCES Ahmed, S., Al Hebshi, S. and Nylundc, B. V. (2009). Sudan: An In-Depth Analysis of the Social Dynamics of Abandonment of FGM/C. Special Series on Social Norms and Harmful Practices, Innocenti Working Paper No. 2009-08. Florence: UNICEF Innocenti Research Centre. 231 Ali, S. K. M. (2008). “Khitan Al-inath Al-Sharei” (In Arabic) (Legitimate Female Circumcision), 3rd edition. Khartoum: Alsadad Press. Brems, E. (2001). Human Rights: Universality and Diversity. The Netherlands: Martinus Nijhoff Publishers. Donnelly, J. (1984). Cultural Universalism and Universal Human Right. In Human Rights Quarterly 6(4), 400-417. Dorkenoo, E. and Elworthy, S. (1993), Female Genital Mutilation: Proposals for Change. London: Minority Rights Group. Merry, S. A. (2003). Human Rights Law and the Demonization of Culture (And Anthropology Along the Way). In Political and Legal Anthropology Review PoLAR. 26(1), 55-77. Rahman, A. and Toubia, N. (2001). Female Genital Mutilation: A Guide to Laws and Policies Worldwide. New York: RAINBO. Shell-Duncan, B. & Hernlund, Y. (2000). Female “Circumcision” in Africa: Dimensions of the Practice and Debate. In B. Shell-Duncan, and Y. Hernlund. Female “Circumcision” in Africa: Culture, Controversy, and Change (PP. 1-40). USA: Lynne Rienner Publishers. Shell-Duncan, B. (2008). From Health to Human Rights: Female Genital Cutting and the Politics of Intervention. In American Anthropologists 110(2), 225-236. Sudan Tribune. (2009). Sudanese activists slam government position on female genital cutting. Sunday 8 February 2009. Retrieved September 2, 2010 from http://www.sudantribune.com/spip.php?article30099 UN. (2008). Commission on the Status of Women, Report on the fifty-second session (25 February-7 and 13 March 2008).Economic and Social Council. Official Records, 2008, Supplement No. 7. (E/2008/27 E/CN.6/2008/11). UN. (2009), Report of the Secretary-General on the Girl Child for the 64 session of the General Assembly. A/64/315. UNICEF. (2005). 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The Sixty-first World Health Assembly, resolution WHA61.16 on Female genital mutilation. 233 PRATIQUES TRADITIONELLES PREJUDICIABLES : LE POINT DE VUE DU MEDECIN RICHARD BEDDOCK Gynécologue, Vice président exécutif de Gynécologie Sans Frontières, Paris, France Résumé La prise en charge médicale des Pratiques Traditionnelles Préjudiciables (PTP) pose aux soignants des pays « d’origine » ou des pays « d’accueil », de multiples problèmes, variables selon le lieu où ils exercent. L’auteur clarifie la définition médicale des PTP, puis explicite plusieurs types de pratiques traditionnelles préjudiciables et leurs conséquences médicales. Il fait également le point sur les Mutilations Génitales Féminines en 2010, constatant une stagnation de la pratique de l’excision, laquelle contraste avec les déclarations d’intention des pays concernés et de la communauté internationale. Les complications médicales, immédiates, infectieuses ou tardives des MGF sont rappelées. Enfin, la focalisation est faite sur les développements majeurs dans la prise en charge, plus particulièrement en France. Le rôle du soignant devra se polariser sur la dispense de soins destinés au seul bien du patient, insensible à toute pression sociale, économique, religieuse ou politique. Zusammenfassung Die ärztliche Betreuung der schädlichen traditionellen Praktiken (STP) stellt das Pflegepersonal in den Herkunftsländern sowie in den Gastländern vor zahlreiche, je nach Ort unterschiedliche Probleme. Der Autor erläutert die medizinische Definition der STP und verdeutlicht anschliessend mehrere Arten der schädlichen traditionellen Praktiken sowie ihre medizinischen Folgen. Er zieht Bilanz über die weiblichen Genitalverstümmelungen im Jahr 2010 und stellt dabei eine Stagnation der Beschneidungen fest, die im Gegensatz zu den Absichtserklärungen der betroffenen Länder und der internationalen Gemeinschaft steht. Er erinnert auch an die sofortigen, infektiösen und verzögerten medizinischen Komplikationen von WGV. Schliesslich legt der Autor den Schwerpunkt auf die wichtigsten Entwicklungen bei der Betreuung von WGV, besonders in Frankreich. Das Pflegepersonal sollte sich ausschliesslich auf das 234 Wohl des Patienten konzentrieren, unabhängig von jeglichem sozialen, wirtschaftlichen, religiösen oder politischen Druck. Resumen La toma a cargo medica de las Prácticas Tradicionales Perjudiciales (PTP) plantea al personal médico de los países “de origen” o de los países “de recepción”, múltiples problemas, variables según el lugar donde ejercen. El autor clarifica la definición médica de las PTP, luego explícita varios tipos de prácticas tradicionales perjudiciales y sus consecuencias médicas. Hace también el punto sobre las Mutilaciones Genitales Femeninas en 2010, constatando un estancamiento de la práctica de la excisión, que contrasta con las declaraciones de intención de los países en cuestión y de la comunidad internacional. Las complicaciones médicas, inmediatas, infecciosas o tardías de las MGF son recordadas. Por fin, la focalización se hace sobre las evoluciones principales de la toma a cargo medica, más particularmente en Francia. El papel del médico deberá polarizarse sobre la administración de cuidados destinados solamente al bien del paciente, insensible a cual quiera presión social, económica, religiosa o política. Summary Applying healthcare to Harmful Traditional Practices (HTPs) raises many issues for caregivers in countries “of origin” or in “host countries”, varying according to the setting in which they work. The author gives a clear medical definition of HTPs, and puts several types of harmful traditional practices in regard to their medical sequels. He describes the 2010 state of Female Genital Mutilation, and observes a stagnation of this practice, contrasting with the declarations of intention of concerned countries, and of the international community. After lingering on FGM complications (be they immediate, infectious, or belated), the text focuses on the major developments of intervention, mainly in France. The health care professional’s role has to be centred on patient care, turning a deaf ear to social, economic, religious or political pressure. * * * 235 La prise en charge médicale des Pratiques Traditionnelles Préjudiciables (PTP) pose aux soignants de multiples problèmes variables selon leur pays d’exercice. Dans les pays « d’origine » leur place est complexe, partagés entre leurs croyances individuelles, leur obligation de soigner dans le respect du contact individuel soumis au secret, leur besoin économique de travailler, le désir de conserver un statut socio-économique voire politique souvent élevé et leur aspiration à l’amélioration des conditions sanitaires de leur population. Dans les pays « d’accueil » l’ignorance des soignants pour ces pathologies « exotiques » constitue l’obstacle majeur d’une bonne prise en charge de ces affections. DEFINITIONS Pratique Préjudiciable : qui porte atteinte à la santé physique ou mentale Cette définition médicale est réductrice mais constitue pour nous soignants la meilleure façon d’appréhender ce problème. LES PRATIQUES TRADITIONNELLES CONSEQUENCES MEDICALES ET LEURS Les mariages précoces induisent des grossesses chez des fillettes qui comportent : - un risque de mortalité maternelle multiplié par 5 - un risque de mortalité néonatale multiplié par 60 Les mariages forcés (parce que précoces et arrangés) s’assimilent lors des rapports sexuels à des viols, le plus souvent sur mineurs. L’avortement sélectif des fœtus de sexe féminin constitue une pratique répandue (en Chine et en Inde en particulier) qui outre cette inégalité originelle d’êtres humains tués pour leur seule faute d’être de sexe féminin, induisent des complications médicales mortelles (60’000 femmes meurent chaque année des complications d’avortement dans le monde). Le gavage, les scarifications, le « repassage des seins », les enfants girafe et les anneaux labiaux sont autant de pratiques comportant des lésions physiques et psychologiques connues. 236 Les crimes d’honneur constituent un véritable fléau dans certains pays (une étude récente dans la revue Lancet évaluait le nombre de décès annuel à 160’000 dont 60’000 femmes âgées de 15 à 35 ans en 2001) Les derniers chiffres de l’OMS concernant la mortalité maternelle rappellent que 1’000 femmes meurent chaque jour dans le monde du fait de leur grossesse, une proportion importante de ces grossesses fatales est liée aux PTP. Les derniers rapports relèvent un nombre stable de Mutilations Sexuelles Féminines à 130 millions de victimes dans le monde et 2 à 3 millions de nouveaux cas chaque année. LE POINT SUR LES MUTILATIONS SEXUELLES FEMININES (MSF) EN 2010 On constate donc au niveau mondial une stagnation des pratiques de l’excision qui contraste avec les déclarations d’intention des pays concernés et de la communauté internationale. Dans les « pays asile » européens notamment, malgré une amélioration des connaissances, on déplore par endroits une stagnation des pratiques; ainsi de multiples sources dénoncent la pratique d’excision actuellement dans la banlieue Londonienne. On estime actuellement en France qu’il existe entre 45 et 60’000 femmes excisées ou susceptibles de l’être. On rappelle les complications médicales des MSF : immédiates (décès par hémorragie [mais aussi par choc anesthésique comme récemment lors d’une excision « médicalisée »]-complications infectieuses [HIV-hépatite B-tétanos]stress aigu). Les complications tardives (douleurs chroniques-complications obstétricales [dont les lésions périnéales graves conduisant aux fistules] et les conséquences psychologiques). La prise en charge médico-chirurgicale des MSF a connu des développements récents majeurs permettant notamment la réparation chirurgicale avec la technique de clitoridoplastie développée en France par l’urologue Pierre Foldes. Des centres de prise en charge « globale » sont actuellement mis en place dans les régions permettant une prise en charge assurée de façon multidisciplinaire (chirurgiens – sexologues-psychologues - sages femmes – ethnopsychiatres et relais communautaires) 237 Initiée en France depuis 2004 dans le cadre d’un programme national « violence et santé », la formation des soignants sur les MSF a été relayée par Gynécologie Sans Frontières qui a organisé des colloques de formation et sensibilisation dans toutes les régions de France et réalisé un CD destiné à la formation initiale des soignants (gynécologues - généralistes - sages femmes et infirmières) car jusqu’alors les MSF ne figuraient pas dans la maquette de formation. En France la criminalisation accompagnée de procès avec condamnations a conduit à l’éradication des excisions pratiquées sur le sol français. CONCLUSION De l’obligation à se former dans les pays d’asile au devoir de lutter contre une pratique néfaste dont ses proches ont souvent été victimes dans les pays d’origine, la place du soignant revêt différentes formes. On ne peut non plus ignorer que parfois les soignants participent à la poursuite de ces pratiques le plus souvent par intérêt économique : médicalisation des MSF- « kit » de diagnostic précoce du sexe fœtal avec interruption de la grossesse des fœtus de sexe féminin… Le rôle du soignant est universel et il devra s’efforcer de se polariser sur la dispense de soins honnêtes et sincères destinés au seul bien du patient dans le respect du secret médical et insensible à toute pression sociale, économique, religieuse ou politique. Ce principe est simple à formuler, simple à appliquer dans nos pays, il est bien plus compliqué à appliquer dans les pays les plus touchés… c’est pourtant l’endroit où la parole médicale est écoutée et devrait s’exprimer de façon forte. Lutter contre les PTP, en plus de lutter pour l’égalité des sexes, équivaut à lutter contre la mortalité maternelle : il s’agit d’une priorité sanitaire mondiale devant laquelle le soignant ne peut s’en sortir tout seul; il doit être secondé par l’ensemble des intervenants de la société, des responsables traditionnels – religieux - politiques et juridiques soutenus par l’ensemble de la communauté internationale. 238 QUATRIÈME PARTIE CONCLUSIONS 239 RAPPORT DES GROUPES DE TRAVAIL ET RECOMMANDATIONS GROUP 1 We note with great concern a resurgence of violence and discrimination against women and girls which is the backdrop of the continuation of harmful practices all over the world, notably female genital mutilation, early and forced marriages, honour killings, gender-based violence, forced feeding and other inhumane and cruel practices. We agree that these harmful practices against girls and women need to be firmly opposed and abandoned and that this is best done if agreed upon collectively – by the local, national and international communities – and approached in a holistic, multi-pronged and multi-stakeholder way. We take account of the fact that these practices have economic, social and cultural determinants that need to be well understood. These practices represent violations to women and girls´ rights and have serious and grave consequences to their mental and physical health, their education and development and their contribution to society. We urge all States to fully assume their responsibility to: a) create the legal and administrative framework, b) ensure the resources, c) enforce the laws that enable the end of harmful practices against girls and women, working in consonance with civil society organizations and, d) ensure that quality and empowering education is available to all and that it includes education on human rights and parental education. Training on human rights is essential for professionals and service providers, particularly those in the health sector and in the judiciary. Ending harmful practices against girls and women requires that civil society organizations mobilize leaders and opinion-makers, men, women and youth, and their social networks, at local, national and international levels. NGOs can support and conduct research and disseminate knowledge; work with communities and health workers, youth, religious and community leaders to help create the critical mass for positive social change; and, communicate and lobby with decision-makers and international cooperation. 240 The media also has a critical role to play in supporting and sustaining the movement to eliminate harmful practices against girls and women. 241 GROUP 2 Main topics raised during discussion Relatively low rate of implementation of CRC and CEDAW Committee recommendations on the topic of harmful practices: Many factors contribute to this, starting with weak or nonexistent enforcement mechanisms. The Committees’ recommendations are directed to State Parties as the main dutybearers, but to effectively address harmful practices it is imperative that recommendations and actions reach all the way down to practicing communities. The Committees don’t have this reach by themselves and even the State might not be able to effectively reach these communities due to political, capacity and other factors, which necessitates the involvement of other actors such as NGOs. The first step would be to make the Conventions and Committee recommendations well known and disseminated to all stakeholders in the country coupled with actions to create political will to address the issue. The group also entered into a discussion on the weak enforcement measures in international human rights law, concluding that a strict legal approach is not likely to be enough. Definition and nomenclature: The group addressed the problematic and unclear terminology surrounding these practices. The basis for discussion was the term “harmful practices” and the group attempted to dissect this in order to define the practices covered as well as to analyze whether the term was appropriate to describe these. o Harmful: After a long discussion, the group concluded that this word was both useful and appropriate. It should be interpreted to include practices that constitute violations of core human rights principles; the right to life and development, dignity, bodily integrity, equality/nondiscrimination and best interest. o Traditional: This has negative connotations, pointing to certain parts of the world, excluding new types of harmful practices as well as equating tradition/culture with negative practices – the group thus suggests it should be dropped. o Practices: The group concluded that this word is appropriate and indicates some kind of continuity as well as certain prevalence. However, the group noted that there are often adverse social consequences for girls, 242 families and communities that do not perform or are abandoning the practice. The Group therefore agreed that the term “Harmful Practices” should be used in the future. The group identified the following harmful practices as priorities to address (list is not meant to be exhaustive): - Female genital mutilation/Cutting - Forced marriage - Early/child marriage - Honor crimes - Virginity tests Conclusion States have legal obligations to protect their people from, and promote the abandonment of, harmful practices. CEDAW, CRC and other treaty bodies have consistently issued recommendations to States to implement these obligations and many States have put criminal legislation in place to combat the practices. So far this has not achieved the objective of eradicating these practices. Other measures are clearly needed to complement existing legislative approaches. The Group stressed the importance of education and awareness raising measures as well as engaging with all stakeholders and not simply focus on the States. Awareness raising can be costly, in terms of human, technical and financial costs as well as time consuming, but this cannot be used as an excuse. The actual costs for society of continuing with these practices are currently not known, but they are likely to be higher than the costs of promoting abandonment. The awareness raising should focus on changing social norms, including gender discrimination, that underpin the practices and focus on the positive values that motivate these practices, such as families wanting the best for their girlchildren in terms of marriage, beauty or status. The collection of good and reliable data, performing a full stakeholder analysis and using this to inform programmes, policies and legislation is necessary. Recommendation Reliable data (evidence) on harmful practices needs to be collected. This data needs to be disaggregated (inter alia by age, sex, educational and ruralurban backgrounds), analyzed and used: 243 - to inform and evaluate policy, programmes and implementation of measures - to monitor implementation and assure accountability of the States for failures in implementation of international human rights obligations regarding harmful practices Rapport de discussion du groupe 2, session 2 Concernant la première question qui consistait à savoir s’il y aurait des expériences à grande échelle qui témoignent de l’abandon des pratiques préjudiciables, les membres du groupes ont estimé que le que l’expression « grande échelle » est polysémiques et mérite d’être clarifié. Pour apprécier si les résultats atteints sont réellement a grande échelle, il a été admis qu’ils seront considérés comme tel si et seulement si elle porte sur un espace culturel suffisamment grand et si l’approche épidémiologique permet de dégager une différence substantielle entre l’état initial et l’état actuel. Les cas qui ont été retenus, au regard de ces critères haut énoncés, sont notamment le Sénégal et la Mauritanie. Les éléments qui ont contribué à ces avancées sont entre autres : 1. La volonté politique qui s’est traduite par une implication des autorités politiques et administratives à tous les niveaux; 2. La collaboration de plusieurs acteurs (gouvernement, ONGs et communautés); 3. La mise à contributions des acteurs-clés influents comme les Oulémas; 4. L’implication de la communauté internationale; 5. La coordination des acteurs et la mise en place d’un plan d’action commun et consensuel. S’agissant de la question relative aux approches qui promeuvent le respect des droits humains mise en œuvre, on aura remarqué que la Mauritanie aurait privilégié une approche holistique tandis que le Sénégal a combiné une approche holistique et sectorielle. La recommandation retenue est la suivante A fin de parvenir à l’abandon effectif des MGF et autres pratiques préjudiciables, il serait préférable d’utiliser, selon le groupe socioculturel et ethnique considéré, l’approche réceptive la plus appropriée soit holistique et ou sectorielle et les 244 leaders des différentes communautés. Le tout devrait se faire sous la responsabilité de l’Etat. 245 GROUPE 3 Recommandation Beaucoup d’Etats ont légiféré en matière de PTPs, avant tout dans le domaine des MGFs; leur approche est généralement pénale. Tout en redisant le rôle essentiel et symbolique du cadre légal, il est recommandé aux Etats de prendre, en amont, d’autres mesures sous formes de lois, plans et programmes de prévention, de protection et d’assistance adéquates des victimes et de mise en place un cadre général favorable au changement des habitudes et des comportements, la mise en avant des valeurs culturelles positives et le respect de la dignité des personnes. Cette approche holistique basée sur une connaissance de la réalité du terrain et des communautés, portée par ces dernières et soutenue de manière durable, doit inclure : a) Une participation inclusive de tous les membres des communautés concernées (hommes et femmes, jeunes et aînés, y compris les grands mères, professionnels et leaders) au dialogue critique sur ces pratiques et à la recherche de solutions acceptables et appropriées; b) Une place privilégiée pour l’éducation et l’accès à des informations adéquates et complètes sur les droits humains, les effets néfastes des pratiques, les lois et les autres mesures proposées par la société concernée en vue du respect des droits humains de tous; c) L’amélioration continue des systèmes de recueil d’informations civiles (naissance, mariage, divorce, décès); d) Des études plus poussées sur les raisons qui ont conduit aux pratiques préjudiciables dans le contexte. S’agissant de l’approche holistique, elle devrait favoriser une approche des communautés concernées par un point d’entrée large et non ciblée uniquement sur les PTPs, utilisant un langage simple et adapté au public pour que tous les acteur publics, privés et ONGs s’approprient les démarches pour aboutir à des décisions collectives d’abandon de toutes formes de pratiques préjudiciable. Résumés Le 11 octobre 246 Le groupe est parti du constat que les pratiques préjudiciables reposent très souvent sur des croyances religieuses erronées et sur des principes supposés supérieurs comme le meilleur intérêt de la personne et que ni les personnes ni les communautés n’ont l’intention de porter préjudice à leurs enfants. Les Etats disposent de lois, avant tout pénales qui stipulent l’interdiction, la poursuite de cas individuels et la criminalisation des actes de PTPs; par contre la protection adéquate des victimes n’est pas toujours très bien assurée et les mesures de protection devraient être accompagnées, en amont, par des mesures favorisant le changement des habitudes et des comportements et la valorisation d’autres ressources du milieu, notamment des pratiques culturelles positives. On insiste sur la prévention et sur le fait de créer un cadre législatif clair et propice On pense donc à une approche plus holistique, qui devrait être basée sur la connaissance de la réalité du terrain et des communautés. Cette approche devrait inclure: a) Des activités de lobbying et de plaidoyer, b) Des informations constantes des communautés, c) Des contrôles, lors des déclarations d’abandon, d) Des études plus poussées sur les raisons justifiant les pratiques préjudiciables dans le contexte, e) Une participation inclusive de tous les membres des communautés concernées (hommes et femmes, jeunes et aînés, professionnels et leaders) au dialogue critique sur ces pratiques et à la recherche de solutions acceptables et appropriées, f) L’amélioration continue des systèmes de recueil d’informations civiles (naissance, mariage, divorce, décès), g) Une place privilégiée à l’éducation et à l’accès à des informations adéquates et complètes sur les droits humains, les effets néfastes des pratiques, les lois et les autres mesures proposées par la société concernée pour la réalisation des droits humains de tous. Ces mesures coûtent cher, sont souvent pour de courtes périodes et sont souvent dépendantes de l’aide internationale. Une partie du temps de discussion du groupe a été consacré aux châtiments corporels, qui peuvent être assimilés à des HTPs, vu leur aspect d’être ancrés dans la tradition, de faire l’objet d’une large acceptation sociale et d’être infligés dans un esprit « positif », comme une moyen de discipline. Cette forme est certainement la plus universellement connue et touche davantage les garçons que les filles. Elle 247 s’exerce aussi bien à la maison, à l’école et dans les institutions de l’Etats ou privées. Le 12 octobre La discussion a plutôt porté sur le comment mettre en place une approche holistique, sur la base d’exemples venus de Mauritanie (MGFs et gavage, mais aussi mariage précoce), du Niger (surtout mariage précoce), du Mali et de l’exemple du « projet Grand-Mère » (projet de vivifier le dialogue intergénérationnel, tout en soulignant le rôle important de la grand’mère africaine). On s’aperçoit que ce qui marche bien sont les projets qui sont discutés de manière large par la communauté, avec une approche peu agressive et largement ouverte. Entrer dans ce domaine en parlant directement des HTPs est vécu souvent comme une agression. L’idée d’arriver à des décisions collectives d’abandon est bonne. Il faut néanmoins savoir que cela peut prendre beaucoup de temps et que l’on doit viser le long terme, ce que de nombreux bailleurs de fonds ont de la peine à comprendre. L’aspect économique des projets / programmes a aussi été évoqué; il faut à la fois répondre à la pauvreté des populations (le mariage à 18 ans en Afrique est un luxe !) et à la nécessité de mettre en place des moyens, notamment pour favoriser la scolarité secondaire des adolescentes, moyen efficace et reconnu de prévention contre le mariage précoce. Les projets proposés ne sont pas toujours durables. Enfin l’approche holistique n’est pas exclusivement réservée aux HTPs, mais à toutes formes de violations des droits humains. Les populations doivent devenir les actrices de leur propre changement. 248 GROUP 4 Governments should abandon harmful practices by employing an holistic approach, including the following elements: a) National action plans and funding b) Adoption, implementation and promotion of laws that are aligned with CEDAW and CRC, c) Establishment of mechanisms for co-ordination and networking d) Capacity building and education at all levels e) Evaluation, monitoring, research and data-collection f) In developing dynamic interactive and long term intervention Align national laws with international law, CEDAW and CRC Plan of action Ensure funding Community capacity building with knowledge of health risks, human rights and international laws Mechanisms' for coordination and networking Capacity building of authorities and service providers Situational analysis, monitoring, evaluation, readjustment Afin de favoriser l’abandon des pratiques traditionnelles préjudiciables, les Etats parties devraient utiliser une approche holistique basée sur : - l’élaboration de plans d’actions et la mobilisation de ressources, - une législation harmonisée avec la CEDAW et la CDE, - le renforcement des capacités des acteurs à tous les niveaux, - la mise en place de mécanismes de coordination et de réseautage - la réalisation d’études, de suivis et d’évaluations systématiques. 249 1. Laws against harmful practices should be aligned with international law, human rights regulations in CEDAW and CRC. Information and capacity building of these laws should be disseminated and translated and adapted to local communities and their languages and specific contests. A system of implementation of the law and training of duty bears as well as reach out to victims should be developed combining legal and local resources. 2. Stimulate and support community capacity building, including professional and different levels of leaders, to identify and reflect over positive and negative aspects of harmful practices in light of factual knowledge of health risks, human rights and international law. 3. Studies and surveillance of practices and interventions to monitor problems, changes and to enable adjustment and improvement of interventions. Data should also be obtained directly from the children themselves. Such monitoring is important to maximize results and ensure sustained efforts in the time necessary to ensure abandonment of harmful practices. 4. Capacity building and training of all key stake holders, in government as well as service providers, development of professional standards and guidelines and support systems. 5. Plan of action and budgeting must be in place. Planned activities must be based on evidence knowledge on what works and what doesn’t and adapted to the local context, and updated and adjusted according to accommodate knew knowledge, experiences, changes in the situation and other changes. Report from the discussion First there was a question on how the CEDAW and human rights courts operate, and it was specified that they are a place of appeal after national law has failed to solve the issue. The discussion took many rounds: The focus on community empowerment was all over emphasised, and the challenges, necessity and possibilities of going through local leaders, including religious leaders. It was emphasised that to target these diverse practise one has to target the root causes, which is based on gender discrimination and “age” discrimination against children, particularly the girl child. Since these practices are tied up with the local perspectives of women, seen as objects in an often sexist culture, the question was how to change that, and not only target the visual results, such as FGM. Changing the mentality and changing the 250 paradigm was discussed. One participant emphasised the importance of interactions between men and women, and it was discussed how this could be facilitated in different communities with different ideas of who has the right to make her voice heard. Age and gender seriously affect the right to talk and be heard in most communities. One intervention focused on the large gaps that exist between international law and human rights that governments sign “to please” or “because it is a faction”, but rarely invest much resources in. The recommendations are not put into action. On the second level you have the communities that have practiced these harmful practices for generations and lack knowledge or belief in health risks, and do not see the government as an entity that has any right to interfere with their life, or their “property”, such as their children. Information and education must also focus on the rights of individuals, as one cannot fight for rights one does not know that one has. And for an individual to fight for her right, she needs the support of the community to succeed, hence communities must change- community based interventions is the key. How different interventions should be adapted to local variations in cultural and social etc situation was repeatedly emphasised. The terminology was discussed: not all harmful practices are traditional. For example, accusing children of being witches and chasing them from the household is more common in towns, and might be something new. Also some said that using the word “discriminatory” or “tradition” would not be well taken by the community. If one focus on harmful traditions, it could be interpreted so that all traditions area harmful, and therefore a critic one has to defend against. Similarity, the concept of “discrimination” could be badly taken, and people go into defence. But if one focus on “harmful practices” it means singling out some practices that are harmful, and helping people to abandon them. Examples of harmful practices that was highlighted was breast ironing, or breast tying, accusing children of witchcraft, young women pressurised to infanticide for adolescent pregnancy, and “talib”, religious “begging” and serving for the mosque, including sexual abuse and other abuse of often poor and additional vulnerable children. It was emphasised that the motivation of parents who subject daughters/sons to harmful practices, often was motivated by a wish to protect their girls, help them integrate, or to secure some education and food. The role of religious leaders was again discussed, how they sometimes supported harmful practices because it was criticized by “the whites”, not because they appreciated the practice as such. Networks and exchange of religious leaders between different countries was also emphasises as important to enhance their 251 knowledge and network and support. Some suggested it important to go through the religious leaders to reach the community. Alternative training or income to circumcisers was briefly discussed, and their eventual potential role as agents of change, but the main focus was on the importance of curbing the demand. Furthermore, it was intervened that with more than 18% of FGM cases being done by health care providers, it would not be logical to give them alternative occupation. It was further pointed to studies that show that this method does not have good effect, neither in reducing the prevalence, nor always to stop the circumcisers. Alternative income can be additional income, and many who stop go back to practice. Legal: It was argued that the implementation of laws would be more easy in urban than in rural areas. Implementers of law are far away, and knowledge of the law less accessible. It was emphasised that information and communication is not something to be “delivered to” the community, but should sort of come out of their own assisted research of their situation. And with them finding the solution. "Outsiders" can offer facts of knowledge, legal, statistics, health risks etc, but it has to be owned by the local communities. This includes local communities of health workers, schools, lawyers etc, not only communities in the sense of villages. Recommendation Reliable data (evidence) on harmful practices needs to be collected. This data needs to be disaggregated, analyzed and used: to inform and evaluate policy, programmes and implementation of measures to monitor implementation of international human rights obligations regarding harmful practices and ensure accountability of the States for failures in this regard. Background • Lack of awareness, knowledge and dissemination • Terminology Harmful traditional Practices – Harmful: It should be interpreted to include practices that constitute violations of core human rights principles; the right to life and development, dignity, bodily integrity, equality and non-discrimination. Crucial elements for successful approaches Political will 252 Collaboration of multiple actors (Government, NGOs and communities) Involvement of all key actors Cooperation with international community Coordination of all actors and put into place a community action plan based on consensus. State responsibility 253 GROUP 5 First I would like to thank everyone in the WG 5 for the spirit with witch everyone participated in its work and in elaborating the recommendation. Recommends that the States Parties to the CRC and CEDAW Convention should: take leadership at all levels of government, including development/strengthening of public discourse/dialogue in the using a positive approach that highlights benefits of abandoning harmful practices and gives visibility to positive experiences of abandonment and engaging a multitude of social networks, especially of boys and men to lead to collective decisions of abandonment of harmful practices within society. 254 CLOSING REMARKS RENATE WINTER Judge, former President of the UN Appeal Chamber and of the Special Court for Sierra Leone Once again, the International Institute for Child Rights has prepared a memorable four-days event in the beautiful region of the Valais. Once again it was a great chance for all of us to meet and to discuss an important subject from many different angles. Once again, I think I must congratulate each and everyone for the great job done at the International Conference on Harmful Practices and Human Rights. The speakers, representing different professions as well as different institutions did their best to enlighten us on many aspects of harm done especially to children in the name of traditions and cultural values. The crew of IDE with its director, Jean Zermatten, had prepared a very warm welcome with three documentaries, “mutilated women, never again”, “forced marriage, never again” and “walking the Path of Unity”-, to show atrocious problems as well as ways found to overcome them. The workshop chairs and the participants were heavily engaged during afternoon sessions in elaborating the subjects of the morning interventions and in finding recommendations for a better future where harmful practices could be eliminated. Interventions reflected theoretical and practical aspects of ongoing problematic practices, panels allowed for seeing the points of view of different professions and the workshops gave a voice to many international institutions (CRC, CEDAW, OHCHR, CEDH, OMS, UNFPA, etc.), but as well to representatives of different regions across the world. It was a perfect match for all participants where everyone completed everyone. I apologise for not resuming in detail what has been said and done, as all this will be part of the seminars documentation. I rather would like to reflect a bit on the outcome of this seminar and to give a few comments instead of resuming. I will try to find common points relating to the findings of speakers, panellists and workshop participants; to see the reasons for harming people, especially children for the sake of so called cultural heritage; the social, medical gender related conditions for them and the strategies found to combat the harm. 255 Using harmful practices calling them traditions and customs. Pretending that there is a right, a basic human right, granted by the UN Charter, to have such practices respected and continuously using them. What is the legal position in this regard? All documents dealing with Human Rights are adamant on stating that traditions and local customs have to be respected if they are in line with international Human Rights. There are no human rights that would allow mutilations or practices harmful to the full development of a child. Thus there cannot be a practice under the trademark of “tradition” or “culture” acceptable under a Human Rights charter if this practice is a harmful one. Discussions about the reasons for such practices deduct very quickly one notion common to them: it is POWER, legal, political, economic, religious power that wishes to strengthen its grip on people. To find the reason for such behaviour, one has to look for those who benefit from it. Who benefits from allowing 10 year old girls to become mothers, risking their health and life and those of their babies? Who benefits from the “right” of the father to give his child into bondage? Who benefits from the right to force boys and girls into marriage, to use child soldiers, to sanction corporal punishment, to slaughter children in the name of witchcraft, to determine the right to life for a child depending on his/her sex? Finding the answers to these questions made it possible for the participants to discuss strategies for the solution of the problems. The most discussed issue was the one of female genital mutilation, as it is a major problem, occurring almost everywhere due to migration and because it is a “typical” problem, demonstrating all so called traditional and pseudo religious reasons (one of the speakers quoted in this regard a statement by a religious leader as an answer to religious arguments: “God has made us the way we are. Who has the right to change us?”) Female gender mutilation forced us as well to discuss its consequences concerning health, economy, development, asylum, migration and adaptation to receiving countries. Strategies were developed for countries at war, post war and in transition to determine where harmful practices such as the use of child soldiers and the use of girls given to combatants as “bush wives“ would lead after the end of armed conflicts and the enormous costs of reintegration. Long term strategies were recommended in workshops as well concerning harmful practices against children in countries plagued by hunger (sale of children as right of the family), plagued by fear, superstition and ignorance (sacrifice of children in voodoo ceremonies) and in countries receiving migrants with different cultural background who claim their right to harmful practices as a right to conserve cultural identity. 256 Following all work done during the seminar, one issue became abundantly clear: it needs first education and second education and third education to implement long term strategies, as a critical mass of persons is needed for any change, including changes in traditional behaviour. A leader of an African tribe phrased it the following way when his tribe abandoned the practice of FGM: ”There are practices that would be called useless and outdated even by our ancestors if the would come back to life”. His tribe understood immediately and perfectly well… Coming to an end of my remarks, please allow me to mention one issue, dear to me, as I am a judge: Very often justice is asked to solve social problems by legal force, for instance to punish persons harming children in the name of their traditions and thus violating human rights. Justice should never be the first answer to such behaviour, rather the last one, if nothing else, -discussion, education, assistance etc, - has worked. A legal response is a necessary option to combat harmful practices constituting human rights violations. Punishment though must remain the very last option, as punishment never solves a problem and certainly not such a controversial one as “traditional harmful practices against Human Rights.” 257 Cet ouvrage : « Pratiques préjudiciables et droits humains. » sera accessible sur le site : www.childsrights.org Octobre 2012 This book: « Harmful Practices and Human Rights. » will be available on our Website : www.childsrights.org October 2012