préservatifs

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GRAND ANGLE
GRAND ANGLE
LE MATIN MARDI 16 AOÛT 2016
MARDI 16 AOÛT 2016 LE MATIN
DES JEUX
ET DU
SEXE
JO A Rio, les athlètes font surchauffer
l’application de rencontre Tinder. Une ambiance
festive qui ne nuit pas forcément à la
performance, AMOUR, SEXE ET DRAGUE RYTHMENT
AUSSI LES JEUX OLYMPIQUES
selon les
spécialistes.
I
l n’y a pas que les médailles
qui les intéressent. Apparemment, les plus de 11 000
athlètes présents à Rio en ce
moment cherchent aussi à
faire des rencontres. «L’usage de
Tinder a explosé à Rio de Janeiro»,
déclarait la semaine passée Rosette
Pambakian, porte-parole de l’application. Quelques jours après le
début des Jeux, le nombre de
«match» (coup de cœur) a déjà plus
que doublé au sein du village olympique. En 2014, à Sotchi (Rus), l’application avait également connu un
succès certain auprès des sportifs.
Autre exemple de cet intérêt pour
les rencontres, l’exclusion de la
plongeuse brésilienne Ingrid Oliveira. Celle-ci a fait monter un autre
athlète dans sa chambre la nuit précédant sa compétition.
«C’est vrai que les athlètes jeunes ou ceux pour qui c’est déjà une
consécration d’être qualifiés peuvent avoir tendance à se disperser
dans le village olympique», raconte
Magali Di Marco-Messmer. L’extriathlète, médaillée de bronze en
LE COUP D’UN SOIR
La plongeuse Ingrid Oliveira a
été exclue de l’équipe brésilienne
après avoir fait monter un autre
athlète de sa délégation dans sa
chambre. Il faut dire qu’elle avait
une finale à disputer le lendemain et qu’elle a terminé dernière. Pire encore, pour avoir
plus d’intimité, Ingrid Oliveira
a mis à la porte la sportive
qui partageait sa chambre.
LA DEMANDE EN MARIAGE
Tout juste médaillée d’argent, la
Chinoise He Zi a vu son compatriote Qin Kai, lui aussi médaillé
à Rio, s’agenouiller devant elle
pour lui demander sa main.
Après quelques secondes
d’émotion, la plongeuse
a dit oui. La joueuse de rugby
brésilienne Isadora Cerullo,
avait fait de même la semaine
passée avec sa fiancée Marjorie.
LA RENCONTRE RATÉE
«Mon coup de cœur Tinder
vient de gagner le 100 m
papillon en battant Michael
Phelps», a tweeté Sabryna
Salazar, une étudiante texane.
Le nageur en question se
prénomme Joseph Schooling
et elle l’avait snobé cinq jours
plus tôt sur l’application.
L’histoire ne dit pas si elle
a repris contact depuis.
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Les athlètes ont fait
exploser l’utilisation
de Tinder au sein
du village olympique.
Photos Stefan Wermuth/Reuters, Leon Neal/AFP, Instagram, Alessandro Bianchi/Reuters, Christophe Simon/AFP, Fotolia
2000, souligne que l’immense majorité des participants restent focalisés sur leur objectif. En tout cas
jusqu’à la compétition. «Quand
c’est fini, tu te lâches. Tu as été tellement concentré pendant des années, tu as besoin de décompresser», détaille-t-elle. Magali Di
Marco décrit notamment les soirées
festives organisées par certains
sponsors. «Pour beaucoup, c’est le
début des vacances. Certains sont
dans les extrêmes. Ils boivent, fument, couchent…»
Sergei Aschwanden a connu les
villages olympiques de Sydney,
d’Athènes et de Pékin. «Nous
n’avions pas encore Tinder, mais je
ne crois pas que cela change grandchose. Les athlètes se sacrifient
pendant quatre ans pour répondre
aux exigences. Ils auraient tort de
ne pas profiter une fois la compétition terminée», assure-t-il. L’exjudoka rappelle que la majorité des
participants helvétiques ne peuvent pas vivre de leur sport. «La
moindre des choses, c’est de les
laisser profiter de ces moments
450 000
préservatifs
ont été distribués aux athlètes pour
la durée des Jeux olympiques. 175 000
doses de lubrifiant les accompagnent.
inoubliables. C’est l’occasion de
découvrir d’autres athlètes et
d’autres disciplines sportives.»
Pour la psychiatre et sexologue
Juliette Buffat, la drague entre athlètes n’a rien d’étonnant. «Vous
réunissez des jeunes gens beaux et
sportifs qui sortent d’un entraînement ardu et souvent solitaire. For-
cément qu’il va y avoir beaucoup de
tentations», analyse-t-elle. Elle
met aussi en avant un aspect purement biologique. «Chez les hommes comme chez les femmes,
l’exercice physique et le développement de la masse musculaire élèvent le taux de testostérone, l’hormone du désir.»
D’ailleurs, elle regrette les velléités des coaches qui interdisent les
relations sexuelles avant une compétition. «Ils craignent la déconcentration ou l’épuisement, alors
que faire l’amour peut aussi détendre et redonner de l’énergie. Chacun sait comment il réagit et les
sportifs connaissent bien leur
corps», observe la sexologue.
Le préparateur physique Florian
Lorimier abonde. «Cela peut s’avérer plutôt bénéfique. Le sexe a un
effet calmant qui peut aider à passer
une bonne nuit», affirme celui qui a
notamment travaillé avec Didier
Cuche pendant douze ans. Il souligne que le mythe date de l’Antiquité
et a la vie dure. «Dans les années
1980, l’abstinence était presque
Athlètes forcés au coming out
COUAC La semaine passée, le webjournal américain The Daily Beast a
décidé de tester Grindr, l’application
de rencontre pour personnes de
même sexe, au cœur du village olympique. Sauf que le média a dévoilé
des informations permettant
d’identifier les athlètes l’utilisant.
une règle. Aujourd’hui, c’est de plus
en plus libre», constate-t-il.
Il admet d’ailleurs qu’il utilise la
vie sexuelle des athlètes qu’il accompagne comme un indicateur
important. «S’ils me disent qu’ils
ont une baisse de libido, c’est mauvais signe. Cela montre qu’ils ont
trop de pression ou qu’ils souffrent
de surentraînement», précise le
préparateur physique. En revanche, il rappelle que les ébats sexuels
ne doivent pas empiéter sur le sommeil du sportif. «Forcément, si
c’est les JO dans la chambre et que
l’athlète ne dort pas, la perfor-
Problème, l’homosexualité est encore mal acceptée, voire illégale
dans les pays d’origine de certains
des sportifs concernés. Le tollé déclenché sur les réseaux sociaux a
conduit à la suppression de l’article
et le journal a dû présenter des excuses publiques. ●
mance va s’en ressentir.» Magali Di
Marco va dans le même sens. «Le
sexe, cela n’a pas d’impact. C’est
plutôt la drague, le fait d’avoir la
tête ailleurs, qui pourrait être mauvaise», détaille l’ancienne triathlète. Selon elle, les victimes des festivités dans le village olympique ne
sont pas forcément ceux qu’on
croit. «Le plus compliqué, c’est
pour ceux qui ont des épreuves à la
fin. C’est connu que c’est dans les
derniers jours que cela commence à
être le plus dépravé», sourit-elle.
● FABIEN FEISSLI
[email protected]

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