RGGPP2 et Braderie des monuments historiques

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RGGPP2 et Braderie des monuments historiques
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ENTRE RGPP ACTE 2 ET BRADERIE DES MONUMENTS HISTORIQUES ….
Frédéric Mitterrand reçoit les organisations syndicales ce 2 décembre. La date est bien choisie ! Le jour même du coup d’Etat
de Louis-Napoléon Bonaparte, le ministre va nous faire part de nouvelles mesures visant à vider un peu plus le ministère de
sa substance.
MONUMENTS HISTORIQUES : RELANCE DE LA GRANDE BRADERIE !
L'un des fondements de notre ministère est d'entretenir le patrimoine qui lui a été confié pour le transmettre en bon état aux
générations futures.
La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et
responsabilités locales, permettant de transférer aux
collectivités locales des monuments historiques
appartenant à l’État ou au Centre des Monuments
Nationaux, avait ouvert une première brèche dans cette
mission de service public. Cette possibilité était limitée,
dans le temps, aux 176 sites issus de la commission
Rémond. Bien que le ministère n’ait pas été
particulièrement regardant sur le devenir des monuments
transférés, l’opération n’a pas eu le succès escompté,
puisque seules 56 conventions de transfert ont été
signées et 9 sont en cours de signature. Mais des
monuments prestigieux, comme le château du HautKoenigsbourg, repris par le conseil général du Bas-Rhin,
ne font désormais plus partie du patrimoine de l’Etat.
Aujourd’hui, avec l’article 52 du projet de loi de finances
pour 2010, qui reprend une proposition de loi de Philippe
Richert, sénateur du Bas-Rhin déposée en octobre 2008,
prévoit de relancer furtivement ces transferts. Ceux-ci
seront pérennisés, sans limite temporelle, le champ des
immeubles concernés serait étendu à l’ensemble des
éléments du patrimoine de l’État et de tous ses
établissements publics. De plus, des transferts partiels
seraient possibles.
Bien entendu, cet article a été adopté sans aucune
concertation préalable, alors que le ministre de la culture
lui-même s’était préalablement prononcé pour la
réalisation d’une étude qui devait durer au moins six mois.
Mais on a déjà pu s’apercevoir que Frédéric Mitterrand
comptait pour du beurre et n’était pas à une couleuvre
près. Pire, ses services compétents n’auront même pas
leur mot à dire sur les futurs transferts puisque c’est le
préfet qui jugera seul si le monument concerné doit rester
dans le patrimoine de l’État. Seul garde-fou : le transfert
pourra être refusé sur la base de critères tirés de l'intérêt
des finances publiques, des conséquences statutaires
pour les personnels concernés, du projet scientifique de
l'établissement ou de l'importance qui s'attache à ce que
l'élément de patrimoine demeure au sein de l'Etat.
C’est ainsi que va pouvoir s’organiser une braderie
générale des monuments historiques. Ainsi, le Mont Saint
Michel, le Domaine de Saint-Cloud (convoité
particulièrement pour satisfaire les délires pharaoniens du
conseil général des Hauts de Seine) et, pourquoi pas
Versailles, pourront être transférés par des collectivités
territoriales désireuses avant tout de se les accaparer
pour récupérer à leur profit les recettes du tourisme. Nous
sommes bien loin de l'intérêt général.
Avec cet article 52, c’est la cohérence et la visibilité de la
politique patrimoniale qui sont menacées. Au-delà, c’est
aussi une prérogative fondamentale du ministère, telle
qu’elle est énoncée par le titre II du livre VI du code du
patrimoine qui se trouve battue en brèche. Il serait peutêtre temps que le ministre réagisse enfin contre le
dépeçage du ministère dont il a reçu la charge !
Et que dit notre ministre ? « il est tout à fait favorable à la
réforme … en gardant à l'esprit la nécessité de conserver
une présence directe de l'Etat sur tout le territoire ainsi
que la cohérence de la politique culturelle générale »
affirmation dénuée de toute crédibilité puisque le ministre
de la Culture perd toute prérogative dans ces processus.
Ajoutons que rien n’interdira aux collectivités de revendre
ce patrimoine au privé au cas où leurs moyens ne leur
permettraient plus de l'entretenir. C’est-à-dire
probablement dès 2011 quand ne seront plus exactement
compensées les recettes liées à la Taxe Professionnelle.
RGPP ACTE 2 : SUS AUX OPERATEURS1 DU MINISTERE
Après être passé en force pour en finir avec l’acte 1 de la
RGPP, Frédéric Mitterrand vient de lancer l’acte 2. Les
prochaines victimes ? : les 78 opérateurs du Ministère de
la Culture et ses 22 000 ETP (Equivalents-temps-plein)
qui représentent pourtant un enjeu essentiel pour le
maintien d'une réelle politique culturelle ! Pierre Hanotaux,
directeur du Cabinet de Frédéric Mitterrand, a été
1 Dans le jargon technocratique et managérial en vigueur,
« opérateur » est l’appellation donnée aux établissements culturels
relevant du ministère.
parfaitement clair : cette deuxième vague de dérégulation
a pour objectif unique d’adapter les opérateurs au dogme
du non remplacement d'un départ à la retraite sur deux et
de faire face à la baisse des ressources publiques qui leur
seront affectées.
Faisant fi des multiples audits sur les opérateurs qui
encombrent les tiroirs de Matignon, le Premier ministre a
lancé une nouvelle mission d'audit, pompeusement
baptisé « Audit Flash ». Elle est assistée par
l’incontournable Capgémini, bénéficiaire à de multiples
reprises de contrats juteux avec le ministère et l'un des
instigateurs de la destruction du service public de la
culture. Cette mission, dont on ignore le cahier des
charges est censée rendre, avant la fin du mois de
novembre, ses conclusions. Elles seront examinées par
un prochain Conseil de Modernisation des Politiques
Publiques programmé fin décembre ou début janvier.
Dans l’immédiat, il nous a été impossible d’être
destinataire de la lettre de mission servant de base à cet
audit qui va donc se dérouler sans réelle transparence visà-vis des personnels concernés.
Sans être devin, nous pouvons anticiper les résultats de
ce nouvel audit : réduction du nombre des opérateurs,
transfert éventuel de certains musées nationaux aux
collectivités locales, « modernisation » de la tutelle,
externalisation de missions, systématisation des
« contrats de performance », accroissement de la part des
ressources propres, mutualisation des fonctions support,
maîtrise des coûts, augmentation de la productivité,
« modernisation » de la gestion des emplois,
généralisation de la rémunération au mérite,
encouragement à la mobilité des agents. C’est dans ce
dernier exercice que pourra d’ailleurs pleinement
s’appliquer la loi sur la mobilité des fonctionnaires adoptée
cet été dans l'indifférence généralisée et avec la
complaisance complice des médias : départs volontaires
avec indemnités, primes à la mobilité, réorientation
professionnelle, licenciement pur et simple au bout de
trois nouvelles affectations refusées.
La RGPP 2 entend poursuivre la RGPP1 qui a rapproché
de manière arbitraire plusieurs établissements publics.
Une RGPP1 qui se trouvait elle-même dans la logique des
réformes engagées depuis 2004 : éclatement du réseau
des musées et autonomie croissante accordée aux plus
grands d’entre eux (Louvre, Orsay, Versailles et Guimet).
Cette politique de balkanisation a contribué à substituer
aux politiques mutualistes et scientifiques basées sur la
conservation, la recherche et une large diffusion, une
conception essentiellement mercantile, s'appuyant de plus
en plus sur le développement à tout prix des ressources
propres de ces établissements.
En raison même de la structure des opérateurs, de la
dissémination des sites culturels sur le territoire, une
baisse des effectifs irait à l’encontre du maintien d’un
véritable service public de la culture. 450 sites ont moins
de 10 agents, 250 sites, moins de 4 agents. Les
« économies » d'emplois sont donc impossibles, sauf à
fermer des sites ou accélérer la politique de
décentralisation et d’externalisation. Par ailleurs, les
effectifs du ministère sont dispersés sur un grand nombre
de métiers : conservateur, architecte, archéologue,
enseignant, archiviste, bibliothécaire, chercheur, artiste,
lissier, doreur, jardinier d’art, agent d’accueil et de
surveillance, agent des services techniques, métiers de
l’administration… La multitude de ces métiers peu
substituables et répartis sur tout le territoire rend
particulièrement difficiles les redéploiements d’effectifs.
Annoncées avec la RGPP1, mises en sommeil depuis
quelques mois, les attaques contre la RMN vont pouvoir
reprendre de plus belle. Rappelons-les : absorption par la
RMN d’un maximum de musées à « Service Compétence
Nationale », politique de filialisation, voire de privatisation
de certaines des activités RMN (réseau des boutiques,
activités d'édition, agence photographique,…). Toutes ces
mesures sont porteuses de lourdes menaces sur les
personnels, les effectifs et les statuts.
A l’évidence, de nouvelles mobilisations
nécessaires pour contrer ces projets funestes.
seront
C’est ce qu’ont commencé les personnels du Centre
Pompidou qui ont voté lundi la grève pour refuser les
réductions d’effectifs, la baisse de la subvention de l’Etat
et de véritables négociations salariales. Ils seront rejoints
le 30 novembre par le personnel de la Bibliothèque
Publique d’Information. Ce mouvement local a relancé
une dynamique intersyndicale qui vient de déposer un
préavis de grève reconductible à compter du mercredi 2
décembre. Au-delà des personnels des établissements
publics, tous sont concernés. Ceux des administrations
centrales qui subissent déjà les effets destructeurs de la
RGPP1, mais aussi ceux des Services à Compétence
Nationale et des Directions Régionales des Affaires
Culturelles qui les subiront ces prochains mois. Avec
l’intersyndicale, nous appelons à la tenue d’Assemblées
Générales sur les lieux de travail pour organiser cette
grève.
Frédéric Mitterrand doit savoir que notre combat ne
cessera pas tant que nous n’aurons pas obtenu
satisfaction sur ces points aussi essentiels pour l’avenir du
service public culturel de ce pays et, par voie de
conséquence, pour tous ses agents.
SUD Culture Solidaires, le 27 novembre 2009