Conjoncture L`industrie alsacienne reste en forme

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Conjoncture L`industrie alsacienne reste en forme
Région économie
Conjoncture L’industrie alsacienne reste en forme
VENDREDI 17 JUIN 2011 41
Social Grogne et grève chez Automobiles Dangel à Sentheim
Arrêt de production hier,
chez Dangel à Sentheim.
En cause, les cadences.
Une partie des salariés de Dangel, essentiellement ceux de la
production, ont cessé le travail
hier matin pour protester contre la décision de la direction
d’augmenter les cadences sans
contrepartie financière.
« Il faudrait travailler plus sans
gagner plus », résume Olivier
Delacourt (CFDT), qui précise
que les salariés, déterminés à
obtenir satisfaction, exigent
une augmentation générale de
5 %. Une revendication
d’autant plus justifiée à leurs
yeux que les négociations salariales obligatoires 2011 ont capoté, faute d’un accord sur le
projet d’annualisation des horaires de travail souhaité par la
direction pour tenir compte du
caractère cyclique de l’activité.
L’industrie alsacienne
a enregistré
une croissance
modérée en mai.
Effet d’aubaine ?
Signe d’une reprise durable ou
simple effet d’aubaine ? Si la production industrielle alsacienne a
légèrement augmenté au mois
de mai, la délégation régionale de
la Banque de France l’estime tirée
en partie par la constitution de
stocks en prévision des mois d’été
et de la fermeture programmée
de nombreuses entreprises.
Le taux d’utilisation des capacités
de production s’est néanmoins
redressé à 81 %, retrouvant son
niveau d’avant la crise, tandis que
la demande est restée orientée à
la hausse, « à rythme modéré et
variable selon les entreprises ». Début juin, les stocks étaient toujours bien maîtrisés, « proches de
la cible souhaitée » et les carnets de
commande jugés supérieurs à la
normale, à l’exception du secteur
agroalimentaire où la demande
semble manquer un peu de relief, « en dehors des actions promotionnelles de la grande
Ajuster les moyens
Le secteur automobile a clairement souffert du tsunami japonais.
distribution ».
Particulièrement dynamique, le
secteur des biens d’équipements
électriques et mécaniques affiche
FRebond des services
La situation est plus favorable dans les services marchands,
avec un mois de mai marqué par un net rebond dans la quasitotalité des secteurs, publicité mise à part « où le
ralentissement est assez prononcé depuis quelques mois ».
Selon la Banque de France, l’amélioration de la conjoncture
est régulière dans l’hôtellerie, les activités d’ingénierie
technique et les travaux de nettoyage, plus variable dans
les autres activités. Cerise sur le gâteau, cette croissance
s’accompagne d’un « léger mouvement de réévaluation
des tarifs et d’assouplissement des trésoreries qui
se rapprochent de l’équilibre », à l’exception du transport
routier de marchandises. Les métiers de l’informatique,
de la réparation automobile et du travail temporaire
sont les plus actifs. Pour la BdF, l’activité devrait encore
se renforcer à court terme, dans la plupart des services,
ce qui permettra de nouvelles embauches.
mois après mois le meilleur taux
d’utilisation des capacités de production. Après une pause en
avril, les commandes ont renoué
avec la croissance, surtout à
l’export. D’où des carnets bien
garnis et une visibilité satisfaisante pour les trois prochains mois.
Dans ce secteur, note la Banque
de France, « le recours accru à l’intérim pourrait se transformer en embauches fermes si la vigueur de la
demande ne se dément pas au cours
de la période estivale ».
Prudence de mise
À l’inverse, le matériel de transport a été pénalisé par des problèmes d’approvisionnement et
dispose de marges de progression importantes. On sait par
exemple que le site PSA Peugeot
Citroën de Mulhouse a dû sup-
Photo Dom Poirier
primer plusieurs séances de travail faute d’avoir été livré en
composants électroniques importés du Japon.
De fait, la Banque de France joue
la prudence, qui juge les perspectives de croissance de la production désormais plus modestes
sur fond de besoins en personnel
stabilisés et prédit un fléchissement du rythme de croissance
d’ici à la fin du 3e trimestre. En
début d’année, elle estimait que
2011 devrait permettre de consolider la croissance enregistrée en
2010, mais à un rythme plus modéré. Ainsi, dans l’industrie, la
croissance ne dépasserait 3,5 %
en raison du ralentissement attendu des exportations mais, en
regain de confiance, les entreprises devraient relancer des investissements de productivité.
Jacques Prost
L’analyse est logiquement différente côté direction : « Il ne
s’agit en aucun cas d’une augmentation des cadences mais
d’une réorganisation du travail lié
à une évolution technologique »,
assure Pascal Buzon, le directeur général de Dangel qui explique avoir réussi à gagner
peu ou prou une heure sur le
temps de montage d’un des véhicules assemblés à Sentheim
et que, partant, deux options
étaient possibles : « Réduire l’effectif pour optimiser le gain de
productivité ou faire davantage de
véhicules à effectif maintenu.
Nous avons choisi cette seconde
option. Mais la porte reste ouverte
à des discussions… »
Aujourd’hui, sorti d’une période de sauvegarde imposée par
une trésorerie moribonde,
Automobiles Dangel espère retrouver cette année son niveau
d’activité d’avant la crise, soit
un chiffre d’affaires de 15 millions d’euros et quelque 2 400
véhicules transformés en 4x4
cette année. « Tout le problème
dans ce métier, nous confiait récemment Pascal Buzon (L’Alsace du 19 juin), est d’ajuster nos
moyens à une activité évoluant
très rapidement, à la hausse ou à
la baisse. »
J. P.
Imprimerie Culture Papier en Alsace
Après la région Rhône-Alpes, c’est en Alsace que l’association
Culture Papier a fait étape pour voir naître une de ses premières
délégations régionales. Hier après-midi, dans les locaux d’une
imprimerie d’Illkirch-Graffenstaden, Culture Papier Alsace a été
officiellement lancée en partenariat avec La Poste et l’Unic (Union
nationale de l’imprimerie et de la communication) Alsace.
Culture Papier a été créée en 2008. Son but est « de promouvoir le
papier et l’imprimé, et de leur donner une image plus valorisante.
Mais en complémentarité avec le numérique », rappelle Jean-Philippe Zappa, délégué général de l’association parisienne. Laquelle vise
aussi à « sensibiliser l’opinion publique, les pouvoirs publics, les
décideurs économiques » sur les « réalités sociales, économiques et
culturelles du papier et de l’imprimé ». Culture Papier souhaite
également stopper les « idées reçues » portant sur le lien entre
usage du papier et déforestation, par exemple. L’une des missions
de l’association consiste « à recueillir toutes les études scientifiques
relatives à l’impact environnemental du papier en France, en
Europe et partout dans le monde », insiste Jean-Philippe Zappa. Et
de préciser aussi que la « filière papier représente 500 000 emplois » dans notre pays.
L’association est présidée par le journaliste et éditeur Laurent de
Gaulle, arrière-petit-neveu du général. Ses membres fondateurs
sont notamment des imprimeurs, des routeurs, des agences de
communication, La Poste et des députés. Elle compte parmi ses
quelque 200 membres WWF ou le Centre national du livre.
Spatial Clemessy renouvelle « Bacchus » pour Ariane
Viticulture Le Civa veut protéger les grands crus alsaciens
Nouveau contrat
Ariane pour Clemessy,
avec cette fois un
dispositif embarqué.
Lors de l’assemblée
générale du Civa,
le président Rémy
Gresser, réélu pour
un 2e mandat, a
notamment insisté sur
la nécessité de protéger
les 51 lieux-dits de l’AOC
« Alsace grand cru »
et de garder le système
de droits de plantation.
La société Astrium Space Transportation (groupe EADS) et le
Centre national d’études spatiales (Cnes) viennent de confier
au groupe mulhousien Clemessy le projet de renouvellement
de la nouvelle génération de
« Bacchus » — pour « Boîtier
d’alimentation et de conditionnement des capteurs de niveau
d’huile par ultrasons ». Ce dispositif mesure le niveau d’huile
de systèmes embarqués entrant
dans la chaîne de pilotage du
lanceur Ariane 5, afin de garantir un embarquement optimal
de l’énergie hydraulique nécessaire à l’activation des tuyères
du moteur principal et de celles
des propulseurs à poudre.
Financés par l’Agence spatiale
européenne et donc impliquant
plusieurs pays européens, ces
systèmes seront installés en
Guyane sur l’ensemble de lancement Ariane 5, ainsi que sur
les sites de fabrication européens, et mis en œuvre à chaque campagne de lancement.
Depuis 1965
« Ce contrat témoigne du savoirfaire de Clemessy en matière de
contrôle non destructif », résume
Simon Klingler, le directeur
commercial du département aéronautique et spatial (AS) du
groupe mulhousien, qui évoque
Entre Ariane et Clemessy, l’aventure dure depuis des années. DR
deux années de travail pour développer ce projet portant sur la
fourniture de plusieurs équipements dont deux tables de lancement à Kourou. On sait que
Clemessy est installé en Guyane
depuis 1965.
« Le fait remarquable est que Clemessy, jusque-là spécialisé dans les
systèmes de contrôle-commande
au sol, travaille aujourd’hui sur un
dispositif embarqué », note Simon Klingler qui, sans citer de
chiffres, évoque un contrat « important », valorisant tant en chiffre d’affaires qu’en terme
d’image. Le projet est piloté depuis Mulhouse, base arrière de
la branche AS de Clemessy, avec
un développement (électronique, logiciels) et une validation
avant expédition à Kourou assurés sur le site des Ulis, en région
parisienne.
Le secteur AS de Clemessy emploie environ 400 personnes
pour un chiffre d’affaires de l’ordre de 65 M€ (millions d’euros)
— à rapprocher des 5 000 salariés et 571 M€ enregistrés en
2010 par le groupe mulhousien.
Deux spécialités : les systèmes
de contrôle-commande (sol, exploitation et maintenance, sécurité, distribution d’énergie…) et
les bancs d’essais.
Ce département a notamment
remporté un contrat de maintenance et développement de cinq
ans avec Astrium, portant sur
les moyens d’essais et d’intégration du véhicule spatial ATV
(Automated transfert vehicle)
assurant le transport du fret entre la Terre et la Station spatiale
internationale (ISS).
J. P.
Une première pour le Conseil
interprofessionnel des vins d’Alsace (Civa) : Pierre-Etienne Bisch,
le préfet de région, et Alain Perret, préfet du Haut-Rhin, ont assisté à son assemblée générale.
Réélu pour un 2e mandat, le président Rémy Gresser s’est inquiété du devenir des fonds d’État et
européens destinés à soutenir les
investissements, notamment les
actions de recherche et développement ou de promotion sous la
houlette de l’OCM (Organisation
commune du marché) viti-vinicole.
Autre sujet de préoccupation : la
protection des noms géographiques, en particulier des 51 lieuxdits de l’AOC Alsace grand cru. La
crainte est de ne voir protégé que
le terme « Alsace grand cru », et
pas les noms des lieux-dits. Avec
la réforme de 2008 et la mise en
place de la classification des vins
en AOP (appellation d’origine
protégée), IGP (indication géographique protégée) ou VSIG
(vins sans indication géographique), « la protection de ces fleurons
du vignoble nécessite une mobilisation des services de l’Inao [Institut
national de l’origine et de la qualité] et du ministère de l’Agriculture »,
estime Rémy Gresser.
Le président du Civa est aussi
revenu sur l’affaire de la liste nationale des cépages « qui permet
aujourd’hui la plantation de n’importe quel cépage n’importe où ».
L’Alsace a demandé la réservation
des cépages sylvaner, riesling et
gewurztraminer sur l’étiquetage
des seules AOC « Alsace » et
« Alsace grand cru ».
La qualité d’abord
Le décret correspondant est sur le
point de sortir, mais il n’interdira
l’indication de ces trois cépages
qu’aux VSIG et n’empêchera pas
les vins d’AOC ou IGP qui le
souhaiteront de les inscrire dans
leurs cahiers des charges.
« Veillons au contraire à ce que leur
utilisation soit conditionnée par de
véritables orientations qualitatives », a estimé Rémy Gresser. La
nouvelle classification européenne autorise désormais les VSIG à
faire référence au cépage, au millésime et à l’État membre (Vin de
France), instaurant « un risque de
confusion sur le marché ».
Plus grave, selon lui, est « le projet
de suppression du système de droits
de plantation en 2015 ou 2018 à
l’échelle européenne, alors qu’il constitue le principal facteur de régulation de la filière viticole ».
Aujourd’hui, 10 États membres
sur 27 vont dans le sens des professionnels alsaciens. Mais si le
projet devait quand même pas-
ser, « la vigne déserterait progressivement les coteaux pour reconquérir
la plaine du Rhin, plus facile à
travailler mais pour donner quel
produit ? »
L’économie du vignoble a également été évoquée par les jeunes
agriculteurs. Les porte-parole des
jeunes producteurs ont insisté
sur la nécessité de « progresser sur
la question des contrats entre producteurs et acheteurs ». En effet,
des raisins sont cédés sans que le
viticulteur ne connaisse ni le moment où il va être rémunéré, ni le
prix qui va lui être payé. Des
« usages ancestraux appliqués en
Alsace, sans d’ailleurs qu’il y ait
particulièrement de dérapages »,
freinent la mise en route des nouvelles dispositions de la loi de
modernisation agricole de 2009.
« Il ne doit pas y avoir de vente sans
contrat », insistent les jeunes agriculteurs. Une règle qui a déjà été
adoptée dans d’autres régions et
par les producteurs de lait et de
fruits.
Denis Ritzenthaler
Repères
La récolte 2010 a été faible,
avec un retrait de 20 %
par rapport à la récolte
précédente, mais les stocks
de fin d’exercice permettent
d’assurer des disponibilités
suffisantes. Pourtant, sur les
quatre premiers mois de l’année
2011, les ventes reculent de
6,3 %, les portant sur 12 mois
à 1 080 000 hl, soit une baisse
de 2,9 % par rapport
aux 12 mois précédents.