Texte d`une étude doctrinale « Ministère – Ordination
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Texte d`une étude doctrinale « Ministère – Ordination
7.2 Assemblée des délégués des 11 et 12 novembre 2013 à Berne Communion d’Eglises Protestantes en Europe (CEPE) Texte d’une étude doctrinale « Ministère – Ordination – Episkopé » Proposition L’Assemblée des délégués prend connaissance du résultat d’une étude doctrinale de la CEPE sur le sujet « Ministère – Ordination – Episkopé ». Berne, le 11 septembre 2013 Fédération des Eglises protestantes de Suisse Le Conseil Le président Gottfried Locher Le directeur du Secrétariat Philippe Woodtli 1. Explications au sujet de la motion Préhistoire de l’étude doctrinale au sein de la CEPE : dans la Concorde de Leuenberg de 1973 la question de l’ordination est classée parmi les différences de doctrine n’engendrant pas de séparation des Eglises (Concorde de Leuenberg CL 39). Car selon la Concorde, ce qui est nécessaire à l’unité de l’Eglise, ce sont uniquement l’accord sur la juste doctrine de l’Evangile et la juste administration des sacrements (CL 2). Pourtant, l’Assemblée plénière de la CEPE à Budapest en 2006 décida de la mise en route d’une étude doctrinale sur le sujet « Ministère, ordination, épiskopé ». La raison figure dans son rapport final qui précise : « La compréhension du ministère, de l’ordination et de la direction spirituelle de l’Eglise (épiskopé) fait partie des enjeux centraux de la discussion œcuménique. Ceci ne vaut pas seulement face à des Eglises qui ne sont pas issues de la Réforme, mais aussi – comme le montre le débat sur l’ordination des femmes – au sein de la CEPE. Aussi la Concorde de Leuenberg 39 mentionne-t-elle le ministère et l’ordination comme un des thèmes à approfondir. »1 L’étude doctrinale fut menée par des délégués des Eglises membres pendant les années 20072011, et elle fut structurée en différentes phases (groupe de mise en route, groupe de discussion doctrinale, groupe de rédaction, processus de prises de position). Dans le groupe d’étude doctrinale et celui de rédaction, la FEPS était représentée par le pasteur Dr. Martin Hirzel. En 2011, la FEPS a eu l’occasion de prendre position sur un à un résultat intermédiaire de l’étude doctrinale. Par la suite, le secrétariat de la FEPS a fait élaborer un projet de prise de position qu’elle a envoyé en consultation à toutes ses Eglises membres, ceci dans l’intention de soumettre à la CEPE à Vienne un avis le plus largement représentatif. Préalablement elle avait demandé une expertise à un théologien d’une de ses Eglises membres. Quatorze d’entre elles ont répondu à la demande. Sur cette base, la prise de position de la FEPS a été retravaillée et ensuite acceptée par son Conseil à l’intention de la CEPE. C’est à la 7e Assemblée plénière à Florence que fut présenté le texte retravaillé sur la base des prises de position des Eglises de la CEPE. Voici la réaction de l’Assemblée plénière : « L’Assemblée plénière accepte la déclaration et ses recommandations, elle les adopte et les recommande à l’attention des Eglises les documents qui les accompagnent. » Et puis : « L’Assemblée plénière demande aux Eglises de recevoir les résultats de l’étude doctrinale et d’en tenir compte dans la suite de leurs travaux tant à l’interne que dans leurs discussions avec d’autres Eglises et traditions. » 2 Au vu de l’importance pour la vie de l’Eglise des thèmes abordés que sont « le Ministère, l’ordination, l’épiscopé » d’une part, au vu de la représentativité des résultats des dialogues et de la haute estime qu’ils ont recueillis à l’Assemblée plénière d’autre part, le Conseil de la FEPS a décidé de faire connaître l’étude doctrinale à ses Eglises membres. Il en fait donc part à l’Assemblée des délégués de la FEPS sous forme d’une prise de connaissance en vue de promouvoir ainsi sa réception dans les Eglises membres. Il y est autorisé par la constitution de la 1 Approfondir la communion - le profil protestant en Europe, textes de la 6e Assemblée plénière de la Communion d’Eglises portestantes en Europe – CEPE - à Budapest, 12 - 18 septembre 2006 2 Frei für die Zukunft. Evangelische Kirchen in Europa. Texte der 7. Vollversammlung der Gemeinschaft Kirchen in Europa GEKE in Florenz, Italien, 20. – 26. September 2012, hg. von Michael Bünker/Bernd Jaeger, Leipzig 2013, 30 – en français: http://www.leuenberg.eu/sites/default/files/MinistereFinalFlorence2012.pdf. Page 2/5 07_2_CEPE_Ministère_ordination_épiskopé.docx FEPS qui, à l’article 14b, parmi les attributions du Conseil, précise : « Il suggère aux membres de la FEPS ce qui peut être utile au développement de leur vie spirituelle et à l’accomplissement de leur tâche ». En recommandant le texte à ses Eglises membres, le Conseil de la FEPS se conforme également aux décisions de l’Assemblée plénière de la CEPE de 2012 qui, comme déjà mentionné, demande que les résultats de l’étude doctrinale soient discutés et qu’il en soit tenu compte tant à l’interne que dans les relations avec d’autres Eglises et d’autres traditions. 2. A propos du texte de l’étude doctrinale Les résultats de l’étude doctrinale sur le thème « Ministère – Ordination – Episkopé » représentent un essai d’approfondir, parmi les Eglises protestantes d’Europe, une compréhension commune du ministère. L’idée de rechercher le dialogue également sur le plan œcuménique a été évoquée, mais n’était pas coordonnée comme un objectif immédiat. Le texte est composé de trois parties. L’introduction (1) explicite la situation de départ et les préliminaires herméneutiques. La déclaration (2) acceptée par l’Assemblé plénière cherche à définir une position commune de la CEPE. Des recommandations (3) concernent la réception et la suite du travail sur le sujet ; elles explicitent quelques conséquences liées à la position commune et cherchent à favoriser la poursuite du dialogue au sein de la CEPE. Les documents annexés (4) approfondissent les accords exprimés dans la déclaration. Au sujet du consensus atteint dans la « Déclaration », voici trois remarques préliminaires : Premièrement : « Ce consensus est certes modulé. Alors que les convictions fondamentales sont communes, ou néanmoins, peuvent être harmonisées, les types de ministère, les règlements concernant l’ordination et les autres formes de délégation ministérielle, l’organisation de l’épiskopé diffèrent souvent de manière prononcée. Des suggestions de pratique plus conforme sont avancées, sans toutefois prétendre contraindre les Eglises de la CEPE à renoncer à des convictions qui leur tiennent à cœur » (§13). « L’objectif principal des efforts herméneutiques n’est pas d’unifier les structures, les appellations utilisées pour désigner le ministère, pour elles-mêmes, mais de parvenir à une compréhension œcuménique plus profonde des réalités spirituelles communes » (§ 20). Une des conséquences peut en être qu’une reconnaissance mutuelle de l’ordination amène à des conséquences pratiques. Deuxièmement : la déclaration évoque aussi les limites de la diversité : « En fait, la diversité ne devrait ni jeter une ombre sur le fondement de l’Eglise ni contredire sa mission » (§ 19). Traduit en termes de la CEPE : les limites de la diversité se situent là où la compréhension commune de l’Evangile est remise en question, menaçant ainsi la communion des Eglises. Troisièmement : il faut se souvenir d’une distinction qui a joué un rôle important déjà dans l’étude de la CEPE de 1995, intitulée « L’Eglise de Jésus-Christ » et qui reflète une conviction de base des Réformateurs. Il s’agit de la distinction entre le fondement de l’Eglise, la forme de l’Eglise et la mission de l’Eglise. La forme de l’Eglise doit correspondre à son fondement. Ce fondement est posé par Dieu à travers son agir salutaire en Jésus-Christ. La forme de l’Eglise peut être diverse, elle contient une pluralité dont participe aussi le ministère. « La mission de l’Eglise est de rendre témoignage à l’humanité entière, en paroles et en actes, de l’Evangile de la venue du Royaume de Dieu » (§ 16). 07_2_CEPE_Ministère_ordination_épiskopé.docx Page 3/5 La déclaration débute par la définition de la raison d’être de l’Eglise : « L’Eglise est destinée à être en ce monde, en tant que témoin de l’Evangile, instrument de Dieu en vue de la réalisation de sa volonté salvatrice universelle » (§ 32). « Les pratiques du ministère, de l’ordination et de l’épiskopé dans nos Eglises doivent donc être pensées en vue d’équiper les Eglises pour leur témoignage commun et leur service de l’humanité dans son ensemble » (§ 35). Y sont ajoutées quelques exigences contextuelles : « Cela implique que le ministère de l’Eglise doive donc répondre aux défis de la société contemporaine, tels que justice dans les relations entre les sexes, dans les droits des minorités et dans la sauvegarde de la création ainsi que par rapport à la marginalisation de la foi et de l’Eglise » (§ 35). La déclaration souligne ensuite qu’il existe un ministère de l’ensemble du peuple de Dieu, qui a ainsi part à la mission de Dieu. « Chaque chrétien baptisé est appelé à une vie de témoignage et de service » (§ 38). La déclaration reconnaît un consensus œcuménique dans la description de cet appel en tant que participation à un « sacerdoce royal », en se référant à 1Pi 2,9. Cela représente une référence importante pour la notion du « sacerdoce universel des croyants », expression qui ne se trouve pas telle quelle dans les écrits des Réformateurs, mais qui est néanmoins fondamentale pour la compréhension du ministère réformée. A côté de cela il y a un second théologoumène qui entre en ligne de compte, il s’agit de l’enseignement paulinien sur les charismes : « Tous les membres du corps du Christ ont reçu des dons complémentaires (charismata) pour leur service » (§ 38). Selon l’enseignement sur les charismes, la pluralité des ministères/services s’explique par la pluralité des dons.3 Il s’agit là d’une définition pneumatologique du/des ministères, à côté de laquelle nous trouvons une définition christologique : « Les ministères dans l’Eglise s’enracinent dans le triple ministère du Christ, ministères de prophète, prêtre et roi ». […] « Ces charismes permettent de renouveler ces ministères, et, réciproquement, les charismes sont à leur tour portés par les ministères » (§39). Par la suite, la déclaration développe la notion de ministère dans l’Eglise. Elle parle d’un « ordre des ministères ». Celui-ci résulterait du fait qu’« il est de la volonté de Dieu que certaines personnes, exerçant des fonctions spécifiques, équipent les saints en vue du ministère et que cette édification de l’Eglise se fasse dans l’ordre » (§ 39). (Voir Eph 4,11s ; 1Cor 14,12. 26. 40) Une telle notion s’apparente au concept calvinien d’un ministère organisé ou différencié. Par ailleurs elle est aussi conciliable avec l’enseignement luthérien selon lequel, à côté du ministère ordonné, on trouve de nombreux autres services ou ministères dans l’Eglise. De quelle manière la déclaration définit-elle la question de l’ordre des ministères et de leur structure ? (§ 44). Selon la déclaration il y a, au sein du ministère de tous les chrétiens « certains ministères [qui] sont indispensables pour la vie et l’ordre de l’Eglise : le ministère de la Parole et des Sacrements, le ministère de la diakonia et le ministère d’épiskopé. On trouve par ailleurs dans les Eglises d’autres types de services et de ministères qui enrichissent la vie de l’Eglise » (§ 40). Au sujet des différents « ministères » dans « l’ordre des ministères » : Le premier des ministères indispensable est le ministère de la Parole et des Sacrements. Sa particularité est fondée sur le fait que l’Eglise, en tant que creatura verbi, dépend dans son essence-même de l’annonce de l’Evangile et de l’administration des sacrements. Même si la 3 Voir en allemand H.J. Koertner, Amt – Ordination – Episkopé. Zum Stand der Diskussion in der Gemeinschaft Evangelischer Kirchen in Europa (GEKE), in: MD 5/011, 83-90, S. 89. Page 4/5 07_2_CEPE_Ministère_ordination_épiskopé.docx communauté toute entière est responsable de la manière dont ce service est garanti, la déclaration souligne la nécessité de ce ministère, qui doit être à la fois une fonction à l’intérieur de la communauté et une entité qui se situe face à la communauté. Cela implique que l’entrée dans ce ministère présuppose une vocation (vocatio interna et externa). En ce qui concerne l’exercice pratique de ce ministère, la déclaration estime que « les formes traditionnelles et historiques contingentes de ministère paroissial ne constituent pas les seules formes possibles pour garantir un ministère divinement institué de la parole et des sacrements. Ce ministère peut être exercé en des modes différents d’emploi et pour des fonctions et des champs de service spécifiquement désignés. » (§ 44). Le deuxième ministère indispensable est le ministère de la diaconie. Il prolonge le service de chaque croyant dans la vie quotidienne ainsi que les « actions diaconales au cours desquelles le ministère de la parole et des sacrements a été exercé »(§ 49). « Il ne s’agit pas simplement d’un service humain accompli dans le monde. Il s’agit du témoignage de l’Eglise rendu à la grâce prévenante de Dieu, à la compassion du Christ, à la puissance libératrice de l’Esprit Saint » (§49). Le ministère de la Parole et celui de la diaconie se complètent mutuellement. Le troisième service indispensable est celui de l’épiskopé. Dans la tradition réformée, il s’est structuré en particulier autour du « ministère des anciens constituant une partie intégrale de l’ordre des ministères » (§ 52). Mais au-delà de cet aspect, la déclaration parle d’épiskopé de manière bien plus générale. A la différence du document de Lima « Baptême, Eucharistie, Ministère », où l’episkopé est liée exclusivement au ministère de l’évêque et à sa fonction de vigilance pastorale, la déclaration inclut la direction d’Eglise, qu’elle soit d’ordre spirituel ou autre, p.ex. la surveillance de la prédication, de la liturgie et de l’activité pastorale, la gestion des ressources en personnes et des ressources financières. Le ministère de l’épiskopé s’exerce dans des formes différentes. Un large consensus s’est manifesté pour reconnaître que « l’épiskopé doit s’exercer à la fois de manière personnelle, collégiale [synodale] et communautaire » (§ 77). Cela n’empêche pas la déclaration de constater que « les liens entre ces trois pôles varient considérablement » (§ 77). Un autre consensus de base porte sur le fait qu’il existe « une responsabilité partagée entre ordonnés et non-ordonnés dans l’épiskopé » (§ 79). Cet ordre des ministères ne doit pas être un ordre hiérarchique, et peut être changeant à travers les circonstances de l’histoire. Et cela même s’il est précisé que la question des « niveaux de responsabilité » est importante. « Les divers ministères doivent être ordonnés et vécus comme des services, dans un esprit de mutualité et non comme des droits exclusifs ou une domination » (§ 39). La CEPE est consciente que, avec cette déclaration au sujet des ministères, le travail n’est pas terminé ; il doit se poursuivre, notamment en ce qui concerne l’approfondissement de « l’ordre des ministères » et du ministère de la diaconie. 07_2_CEPE_Ministère_ordination_épiskopé.docx Page 5/5