Le Larzac, vaste plateau calcaire intrigue par son aspect désertique
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Le Larzac, vaste plateau calcaire intrigue par son aspect désertique
DOSSIER Le plateau du Larzac < présenté par Guy Cambéssèdes Un univers de solitude Le Larzac, vaste plateau calcaire intrigue par son aspect désertique, son immensité. Il dévoile une flore riche et raffinée. Son climat est rude, l’habitat diffus, une agriculture adaptée à ce biotope particulier y perdure. La brebis en est devenue l’emblème. L’eau, peu visible en surface, recèle une grande richesse. Ici plus qu’ailleurs, car c’est celle venue du ciel qui a constitué l’unique ressource, et ce, durant des siècles. SAINT-MARTIN-DU-LARZAC BRUNAS LES BASTIDESPRADINES LE DEVEZ-NOUVEL ITINÉRAIRE 4 LES LIQUISSES-BASSES LA CAVALERIE L’HOSPITALET-DU-LARZAC LA BLAQUERERIE VIALA-DU-PAS-DE-JAUX SAINT-PAUL-DES-FONDS ITINÉRAIRE 3 LA COUVERTOIRADE SAINTE-EULALIE-DE-CERNON SAINT-JEAN-D’ALCAS SAINT-BEAULIZE CORNUS LE CAYLAR LES RIVES VISSEC LA BAUME-AURIOL SORBS LE CROS ST-MICHELSAINT-MAURICED’ALAJOU NAVACELLES ITINÉRAIRE 1 SAINT-PIERRE-DE-LA-FAGE ITINÉRAIRE 2 LA VACQUERIE-ETST-MARTIN-DE-CASTRIES SAINT-PRIVAT LODÈVE 28 n° 662 • Novembre 2016 n° 662 • Novembre 2016 29 DOSSIER Le plateau du Larzac que la pâture cesse. Au nord du plateau, de grandes étendues quasi désertiques rappellent quelque peu les « steppes » d’Asie centrale. Une insignifiante pelouse disparate et une myriade de pierres confèrent à ces lieux un profond sentiment de solitude, d’isolement, voire d’abandon. Seules quelques profondes dolines à la terre arable, ensemencées de céréales ou de fourrage, délimitent l’espace entre le terrain asservi et cette terre que jamais personne n’a pu domestiquer. Vierge et rebelle, elle n’accepte que les caresses du vent et le délice des providentielles précipitations célestes, alors que le généreux soleil du Midi l’inonde, l’irradie, et ce parfois jusqu’à la brûlure extrême. Madame la lune, elle, lui offre en toute discrétion, la sublime lueur bleutée de l’éternité. Un pays envoûtant Une doline en culture. Causse, et pourtant… A Dans le langage courant des contrées méridionales ce mot est parfois utilisé avec une consonance péjorative. Et ce, afin de stigmatiser un lieu, un terroir désolé, sans grande attractivité. Et pourtant, c’est exactement l’inverse ; le causse regorge de richesses quelquefois dissimulées, un brin calfeutrées dans cet environnement dénudé. 30 n° 662 • Novembre 2016 Au XIXe siècle, le célèbre géographe Élisée Reclus définissait cette région des grands causses méridionaux (Sauveterre, Méjean, Larzac, Noir et Comtal) comme : « de hautes terres dont le pourtour est très nettement caractérisé par des remparts abrupts ». Ces plateaux dont l’altitude varie de 800 à 1 250 m sont entaillés par de profondes gorges (Jonte, Tarn, Dourbie et Vis). Le Larzac, lui, ne culmine qu’à 912 m au pic de la Cougouille. Façonné par l’eau et par l’homme C’est l’action de l’eau qui a profondément modelé les paysages. Elle a le pouvoir de dissoudre le calcaire, l’unique roche qui compose le causse. Au fil des millénaires, elle a patiemment sculpté les rochers, creusé des gorges et des grottes habitées dès la préhistoire. La flore du causse est d’une richesse insoupçonnée et sa faune s’adapte à ce climat aux étés brûlants et aux hivers rigoureux où pluie, neige et vents unissent cruellement leurs méfaits afin de rendre la survie pénible et précaire. L’homme a toujours habité cette terre pourtant d’apparence inhospitalière. Cette présence s’explique à chaque lecture de paysage. La moindre parcelle de cette immensité a reçu l’emprise de la main de l’homme. Le premier indice est bien visible même pour le profane qui découvre cette contrée. Ce sont les « clapas », ces tas de pierres qui dominent pelouses et buissons. Ils résultent d’un long travail d’épierrement afin de rendre le sol plus fécond, plus prolifique aux végétaux qui composent l’alimentation des brebis. Une pelouse rase et des pierres Le Larzac est une terre à moutons ! Au fil du temps, il s’identifie même à ce quadrupède qui sait mieux que quiconque s’adapter à ce milieu difficile. Le passage régulier du troupeau sous la conduite du berger permet aux espaces de rester ouverts. Sinon la forêt regagne rapidement les terrains délaissés : chênes blancs, buis et cornouillers colonisent dès Autre élément indissociable du Larzac, c’est le silence. Il est présent à chaque instant, à chaque pas. Il vous envoûte, vous ensorcelle à un tel point qu’il vous entoure de murs invisibles. En quelque sorte, vous en devenez son prisonnier, son esclave et c’est à ce prix qu’il est possible d’appréhender ce milieu minéral, les femmes et les hommes qui y vivent ainsi que leur langage. Ce merveilleux Occitan à la chaude sonorité, aux tournures imagées qui s’enracine dans cette terre depuis la nuit des temps… Mais outre les dolines nourricières et ces collines pelées comme chien galeux subsistent aussi des reliefs ruiniformes et des reculées karstiques qui feront le bonheur du cyclotouriste. Il faut une certaine volonté pour découvrir sur deux roues un tel pays. Aux heures chaudes de l’été, il conviendra d’être prudent face à l’astre solaire. Le vent a aussi ses habitudes sur le plateau, il saura mettre en péril votre opiniâtreté. En ces lieux l’humilité est une bonne conseillère. Mais au cours de ces interminables échappées visuelles, il n’est pas rare d’apercevoir un mas, une ferme fortifiée, un hameau et même quelques villages. Car malgré tous ces qualificatifs, ce pays, cette terre n’est pas un désert ! Sur le Larzac vous rencontrerez les natifs du plateau qui de générations en générations y perpétuent une présence, et puis celles et ceux qui en ont fait un choix de vie. Chacun y apporte sa pierre, son labeur, ses croyances et ses espérances. Un étonnant sous-sol Le Larzac n’échappe pas à la règle des grands causses. Il n’y a pas de rivière, les eaux venues du ciel s’infiltrent dans le sol. De nombreuses vallées fertiles INFOS DIVERSES À voir, à visiter… LA CARDABELLE La carline à feuilles d’acanthe (Carlina acanthifolia) est une plante appartenant au genre Carlina et à la feuille des Astéracées ou Composées. Mais en terre occitane elle est appelée « cardabelle ». Elle fleurit en été. Les causses méridionaux sont un terrain de prédilection pour cette plante rasante ; elle en est devenue le symbole. On la retrouve séchée et clouée sur les portes des maisons en décoration, mais aussi comme baromètre. Elle est désormais protégée, ne l’emportez pas si vous la rencontrez. < Les cités templières et hospitalières < Le Caylar et son Roc Castel < Le cirque de Navacelles < La vallée de la Dourbie (chapelle des Cuns, moulin de Corps, La Roque-SainteMarguerite) < La vallée de la Sorgues (Cornus, Fondamente, Saint-Félix-de-Sorgues) < L’Abbaye de Sylvanès et les rougiers de Camarès < Millau et son viaduc < Le vélo-rail du Larzac À goûter, à déguster… < Les caves de Roquefort < Marché paysan à Potensac et Montredon (juillet-août de 18 h à 22 h) < Les vins de la Vacquerie et de Soubès < Le marché de Millau (vendredi matin) < Coopérative fromagère à La Cavalerie www.bergersdularzac.fr < La Jasse du Larzac – en bordure RD809 entre Millau et La Cavalerie < Les aromatiques du Larzac à la ferme des Homs • www.aromatiques-homs.fr Animations Parmi les diverses manifestations proposées tout au long de la période estivale, l’une d’entre elles ne peut échapper à l’œil du cyclotouriste avisé, c’est le festival du Roc Castel au Caylar. Organisé fin juillet-début août, il fait l’éloge du voyage lent. www.festival-roc-castel.eu Cartes routières Michelin n° 339 - Gard-Hérault IGN – Aveyron (Réf.D721212) - Hérault (Réf. D721234) Offices de Tourisme < O.T. du Lodévois et Larzac 04 67 88 86 44 • [email protected] < O.T de La Cavalerie • 05 65 62 78 73 www.lacavalerie.fr < O.T. de Millau • 05 65 60 02 42 www.millau-viaduc-tourisme.fr Le Caylar, lieu de départ privilégié. et riantes l’entourent, elles viendront égayer vos pédalées tout en vous proposant une alternance paysagère. Son emprise est d’environ un millier de kilomètres carrés, elle représente un des maillons sud du Massif central, entre les Cévennes et l’Espinouse. Les départements de l’Hérault et de l’Aveyron se partagent ce territoire. Avec une certaine nébulosité, la ligne de partage des eaux divise le plateau ; seule la destinée des cours d’eaux adjacents autorise une réponse. La richesse des sous-sols a toujours attiré la curiosité. La spéléologie y a connu ses heures de gloire, elle est d’ailleurs toujours bien présente. À ce titre, Édouard-Alfred Martel, en son temps, avait qualifié les grands causses de « causses majeurs ». Le plateau du Larzac s’offre donc à vos roues, à votre regard, à votre esprit vagabond. Que ce soit au cours d’une prompte traversée ou bien lors d’un séjour plus approfondi, il ne vous laissera pas insensible. Sa lumière, sa rudesse et son histoire parfois violente et tourmentée, répondront comme un écho à votre discrète trajectoire. n < Textes et photos : Guy Cambéssèdes n° 662 • Novembre 2016 31 DOSSIER Le plateau du Larzac < Itinéraire 1 < Itinéraire 2 74 km – Dénivelé 676 m 88 km • Dénivelé 1 519 m LA BAUME-AURIOL LE CAYLAR LE CROS ST-MICHELD’ALAJOU SAINT-MAURICENAVACELLES LE CAYLAR VISSEC SORBS LE CROS LES RIVES LA VACQUERIE-ETST-MARTIN-DE-CASTRIES SAINT-PIERRE-DE-LA-FAGE LA VACQUERIE-ETST-MARTIN-DE-CASTRIES SAINT-PRIVAT LODÈVE Saint-Pierre-de-la-Fage, son moulin à vent et sa superbe croix de pierre. UNE FENÊTRE SUR LE LANGUEDOC C’est l’extrémité sud du plateau qui sera mise en exergue sur ce parcours relativement court mais pourvu de deux sites touristiques d’exception. L Le village de Saint-Michel-d’Alajou vous propose une première halte. Le point d’eau central, vestige des temps anciens, amène à la réflexion. L’eau, cet élément vital, a toujours reçu tous les égards de la part des Caussenards. Saint-Pierre-dela-Fage comblera le photographe avec son moulin à vent et sa superbe croix de pierre. Les plus curieux pousseront leur chemin jusqu’au cirque du bout du monde. Après la Vacquerie, juste avant le col du Vent, sur la gauche une minuscule route permet l’accès au mont Saint-Baudille (847 m) ; les derniers hectomètres particulièrement ardus demandent force et ténacité. Mais la récompense est proportionnelle à l’effort accompli avec un panorama allant du mont Ventoux au Canigou. À vos pieds, c’est l’immense plaine languedocienne avec son vignoble. Celui-là même qui vit naître la révolte des vignerons de 1905 mais aussi, toutes les crises viticoles qui secouent régulièrement la profession. En Languedoc les hommes, la vigne et le vin ont écrit au fil des siècles une histoire d’amour passionnée et tumultueuse. Prenez le temps de contempler ce large espace ouvert sur la Méditerranée, Sète et le mont Saint-Clair sont tout proches. Et au nord, le Larzac n’en finit pas de dérouler son décor rocailleux et chaloupé. Aux abords du Coulet, dolmens et menhirs de tailles respectables ne peuvent passer inaperçus. Saint-MauriceNavacelles offrira un temps de repos, avec la visite du village et de son espace culturel Paul Dardé. Quelques menus kilomètres en allerretour suffiront afin d’atteindre l’une des merveilles des causses méridionaux : le cirque de Navacelles. Un décor à couper le souffle, une fois de plus la nature saura vous éblouir avec cette curiosité hors du commun. L’eau a patiemment creusé gorges et méandres. La Vis, après un parcours souterrain, retrouve en ces lieux toute sa force et sa splendeur. Tout en bas, Vissec. PRIEURÉ, CATHÉDRALE ET TEMPLE Le belvédère de la Baume Auriol propose, outre un impressionnant à-pic, une approche naturaliste de ce site. La fin de cette randonnée s’effectuera sur de toutes petites routes bucoliques et d’un calme absolu. Elles s’ouvrent sur des horizons cévenols et passent par les hameaux et villages du Viala, de Soulagets et de Saint-Michel. LES LAVAGNES OU LAVOGNES De forme circulaire, elles sont bâties par couches de lauzes successives, liées par de l’argile. Elles reçoivent les eaux pluviales et de ruissellement, situées bien souvent proche des lieux de vie. Créées par la main de l’homme, elles servent à abreuver les troupeaux. Elles sont également des points de fixation de la faune sauvage qui vient s’y désaltérer. Pendant des siècles, sur le causse, l’eau n’est venue que du ciel… « Il était une fois… le Larzac. Là passa le grand vent de Dieu ». Ces quelques mots du poète occitan Max Rouquette reflètent parfaitement l’esprit de cette balade dans l’ombre d’une certaine spiritualité. L Les premières pédalées n’offrent que peu de résistance. La bourgade de Sorbs avec son château qui embrasse tout l’espace ne peut échapper à l’objectif du randonneur. La dégringolade en fond de vallée sera rapide. Là, convergent plusieurs cours d’eau au destin étrange. Ils ne présentent que des lits de cailloux asséchés. C’est seulement après d’abondantes précipitations que l’eau rejaillit, de façon sporadique. Le village se nomme Vissec et la rivière, un temps côtoyée, la Vis. Nul besoin d’être géographe pour comprendre cette hydrographie bien particulière ! L’ascension qui suit permet d’observer la complexité de ce cours d’eau capricieux mais aussi l’architecture de ce village construit en retrait de la furie des violentes crues d’équinoxe. Une fois sur le plateau, la route file vers La Vacquerie, puis s’élève un tantinet afin de passer à la Trivalle et au col du Vent. La descente se fait au travers d’un couvert végétal méditerranéen, puis vignes et oliviers apparaissent sur de larges terrasses soigneusement entretenues du côté de Saint-Privat. Au faîte d’une colline un chemin mène au prieuré Saint-Michel-de-Grandmont, site du XIIe siècle qui abrita les frères ermites de cet ordre religieux. L’église, le cloître et les bâtiments conventuels subsistent dans leur intégralité et dépouillement originel. Sur les bords de la Lergue, Lodève apparaît et la cathédrale SaintFulcran s’impose au regard. Bâtiment majestueux et austère, typique du gothique méridional, il présente un chœur à nef unique, très large, avec une abside polygonale à neuf pans, éclairé par neuf fenêtres gothiques dotées de remarquables vitraux. À voir également à proximité, le monument aux morts : une œuvre du sculpteur Paul Dardé. Après s’être reposé, il convient d’aborder l’ultime ascension : celle du col du Perthus sur les flancs du plateau du Grésac. Aux confins de l’Escandorgue et du Larzac, quelques drapeaux de prière hissés vers le ciel, alerteront le voyageur sur la présence du temple bouddhiste de Comberedonde. Sa vision, sa taille et ses couleurs vives peuvent surprendre, et même interroger. Mais l’espace est vaste et la parole divine ouverte à l’écho de tous les vents. Le village des Rives semble anodin, pourtant de temps à autre un lac naturel se forme à ses abords sur plusieurs hectares, et ce, pendant quelques semaines. Phénomène étrange dans cet univers dolomitique. Comme quoi la nature nous surprendra toujours. Avec le Roc Castel en point de mire, le retour sur le Caylar ne sera qu’une formalité sur une belle chaussée très roulante. L’ORDRE DES TEMPLIERS ET DES HOSPITALIERS Après la conquête de Jérusalem en 1099, lors de la première croisade, les seigneurs ayant participé à celle-ci décidèrent pour certains d’entre eux de rester à Jérusalem et fondèrent le royaume de Jérusalem. C’est ainsi que vont être créés ces deux ordres religieux. Celui des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem (1113) avec pour mission l’hébergement et le soin aux pèlerins et plus tard l’ordre du Temple (1120) qui assurera la sécurité des pèlerins en terre sainte. Accusés d’idolâtrie, de rites secrets et donc d’hérésie, les Templiers sont arrêtés en 1307, l’ordre aboli en 1312. Le cirque de Navacelles. 32 n° 662 • Novembre 2016 n° 662 • Novembre 2016 33 DOSSIER Le plateau du Larzac < Itinéraire 3 < Itinéraire 4 90 km – Dénivelé 1 306 m VIALA-DU-PAS-DE-JAUX L’HOSPITALET-DU-LARZAC SAINT-MARTIN DU LARZAC BRUNAS LA BLAQUERERIE SAINT-PAUL-DES-FONDS SAINT-JEAND’ALCAS SAINT-BEAULIZE 88 km • Dénivelé 1 025 m LA COUVERTOIRADE LE DEVEZ-NOUVEL LES BASTIDESPRADINES CORNUS LES LIQUISSES-BASSES LA CAVALERIE SAINTE-EULALIE-DE-CERNON LE CAYLAR La cité templière de La Couvertoirade. Un troupeau dans la vallée CAUSSE ET VALLÉES Ce tracé déborde du plateau afin d’aborder quelques curiosités. Le site de Roquefort-sur-Soulzon attirera le collectionneur de BPF ainsi que le cyclotouriste avide de connaissance. Le trésor du Combalou, ce fromage de brebis mondialement connu, mérite une visite, et bien entendu une dégustation. L L’entame de la randonnée est paisible, elle serpente avec de belles ouvertures sur des horizons lointains. De La Pezade à Cornus la chaussée borde une forêt de feuillus d’où s’échappent de temps à autre lièvres et cervidés. La confidentielle vallée de la Sorgues ne réclame que peu d’effort, c’est un pur bonheur. La bourgade de Fondamente rappelle le cyclotouriste à ses obligations, finie la rêverie, la route s’élève progressivement vers Saint-Beaulize. Elle fait parfois cause commune avec le chemin de fer qui relie la plaine languedocienne aux 34 n° 662 • Novembre 2016 montagnes de l’Auvergne. Niché dans un cirque rocheux, le coquet village de Saint-Paul-des-Fonts nécessite un allerretour. Il abrite le petit musée retraçant l’œuvre de l’abbé Coste. Saint-Jean-d’Alcas, cité templière très bien conservée, comblera la curiosité du randonneur. C’est à cet instant qu’un petit détour par Roquefort doit se décider. Par le biais de quelques pédalées soutenues le causse réapparaît au Viala-Pas-du-Jaux. Une aire de repos vous retiendra quelques instants face à l’imposante tour-grenier. Ensuite l’itinéraire épouse les vallonnements du terrain l’Hospitalet, la Blaquèrerie et puis enfin La Couvertoirade. Une pause salvatrice permettra de découvrir la cité templière avec LES BALCONS DU LARZAC Les monolytes de La Blaqueterie. les venelles caladées, les remparts, l’église et son cimetière parsemé de stèles discoïdales. Les derniers kilomètres sans difficulté vous ramènent au Caylar, au pied du Roc Castel. Celui-ci propose un panorama à 360°, mais l’ascension se fait uniquement à pied. Sur la place principale trônent les vestiges d’un arbre. La main de l’homme en a fait une monumentale sculpture. L’ÉPOPÉE BOTANIQUE DE L’ABBÉ COSTE Hippolyte Jacques Coste a été un curé et un botaniste français né en 1858 à Balaguier-sur-Rance (Aveyron), il est décédé en 1924. Passionné par la nature et particulièrement les plantes, il herborise dès ses jeunes années. En 1882, il rencontre le chanoine Joseph Revel de Villefranche-de-Rouergue qui le convainc de réaliser un herbier de France. C’est l’éditeur genevois Paul Klincksieck qui fait appel à l’abbé Coste afin de réaliser ce travail qui deviendra l’œuvre d’une vie. La « Flore de France » commence à paraître en 1900 et s’achève en 1906. Elle est illustrée de 4 800 figures originales d’une très grande précision. Cette flore va être un ouvrage de référence pour de nombreuses générations de botanistes et encore de nos jours. Au départ de La Cavalerie, la lecture de carte est peu engageante : un camp militaire, une autoroute, des échangeurs et une voie rapide… Et pourtant cet itinéraire tient toutes ses promesses. L Les tout premiers kilomètres ondulent sur une route rectiligne faisant face aux Cévennes. Elle jouxte les installations militaires qui n’ont rien de bien esthétique ! Peu après les LiquissesBasses, elle oblique sur la gauche et s’enfonce dans une forêt où se mêlent feuillus et résineux, puis le hameau de Montredon se dévoile. À la rupture de pente, en surplomb des gorges de la Dourbie et au terme d’une longue ligne droite, le village de Pierrefiche donne une impression de « bout du monde ». Aux Baumes, l’habitat troglodytique se fond avec la falaise, il retiendra quelques instants le regard du promeneur. SaintMartin-du-Larzac, en léger retrait de la route, mérite une pause. Son architecture caussenarde massive et trapue sublime la pierre de calcaire ; c’est aussi un lieu de mémoire pour tous ceux qui ont défendu cette terre… À Potensac, une magnifique « bouissière » rappelle les dures conditions de vie du temps jadis. Il s’agit de hautes haies de buis formant un tunnel végétal protégeant berger et brebis de l’âpreté des vents dominants. La partie nordouest du Larzac offre l’immensité des grands espaces avec des paysages de steppe. La fine ligne d’horizon se fond dans la douceur des courbures des collines. Elle joue même parfois avec la course des nuages dans ce ciel pur, immense et lumineux à hauteur de Brunas, une superbe « lavagne » entourée de cerisiers attend le passant. Émergeant d’une herbe folle sous l’ombre protectrice des fruitiers, quelques blocs de pierre autorisent un temps de méditation. Le modeste chemin bitumé s’élève encore un peu afin d’admirer le viaduc de Millau, cette audacieuse prouesse technologique ! L’itinéraire musarde, Devez-Nouvel puis Labro qui s’ouvre sur la reculée de Saint-Geniez-de-Bertrand. Quelques sobres pédalées afin de découvrir la ferme fortifiée de Brouzes, avant de plonger dans la vallée du Cernon. La Bastide-Pradines et puis bien sûr, Sainte- Eulalie-de-Cernon, la cité des Hospitaliers propose de revisiter un pan de l’histoire de France. Plaisante et enrichissante balade dans les ruelles du bourg fortifié à la découverte d’un GARDARÈM LO LARZAC La lutte du Larzac est un mouvement de désobéissance civile non violente contre l’extension du camp militaire existant. Elle a duré une décennie (1971 – 1981). L’opposition s’est d’abord organisée autour de cent trois paysans qui se sont soulevés contre l’expropriation de leurs terres suite à un projet ministériel. Le camp devait passer de 3 000 à 17 000 hectares, douze communes étaient concernées. Les étés 73 et 74 ont vu défiler des dizaines de milliers de personnes de différents courants sur le plateau du Larzac pour soutenir les paysans et former un mouvement hétéroclite qui livrera une guerre d’usure aux pouvoirs publics. Au bout de dix ans, ayant tenté tous les recours possibles, et organisé de nombreuses actions, à bout de souffle, le conflit se termine, sur un « coup de dés » avec l’élection présidentielle de 1981. riche patrimoine. Une route en corniche permet de s’extraire du vallon afin de rejoindre La Cavalerie qui présente aussi une enceinte fortifiée. n° 662 • Novembre 2016 35