Le royalisme en 1883 - Reseau

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Le royalisme en 1883 - Reseau
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çons de l’Histoire — Les leçons de l’Histoire — Les leçons de l’Histoire — Les leçons de l’Histoire — Les leçons
Mémoire du Royalisme 3/8
en 1883
E
n dix ans, une page était tournée. De 1873
à 1883, la République avait eu le temps de
faire la preuve de ses vertus bourgeoises.
Impuissant, le comte de Paris avait assisté à la
déconfiture du royalisme qui en 1881 n’avait
conservé que 42 députés sur les 400 de 1871.
Le comte de Paris
Face à la République de Jules Grévy, qui était
le nouveau chef de la Maison de France ? LouisPhilippe, Albert d’Orléans était né au Palais des
Tuileries le 24 août 1838. Son grand-père le roi
Louis-Philippe l’avait titré comte de Paris. À la
suite du décès dramatique de son père, il était devenu Prince Royal de 1842 à 1848. Lors de la révolution de 48, malgré son courage, sa mère
échoua dans sa résistance et dut l’emmener en sûreté en Allemagne. En 1850, à la mort en Angleterre de son grand-père Louis-Philippe, il était
devenu chef de la maison d’Orléans. Son oncle le
duc de Nemours (1) fut alors investi du rôle de
conseiller et de mentor. Rappelons que Nemours
était considéré comme le légitimiste de la famille
Bourbon-Orléans. Lorsque le comte de Paris eut
vingt ans, sa mère mourut. Son oncle Joinville décida de prendre en charge son éducation militaire.
Comme tous les Bourbon-Orléans, le jeune prince
était sensible au métier des armes. En 1861, Joinville ne voulant laisser passer aucune occasion
poussa Paris et son frère le duc de Chartres (2) à
combattre lors de la guerre de sécession américaine. L’engagement (3) du comte de Paris dans
l’armée nordiste, écrivit Karl Marx, avait impressionné le peuple français au point d’embarrasser
Napoléon III. En 1864 le comte de Paris avait
épousé une Espagnole au tempérament fort, sa
cousine Marie-Isabelle, princesse d’Orléans, infante d’Espagne (4), qui lui donnerait huit enfants.
Lors de la guerre franco-prussienne de 1870,
malgré ses efforts, tant Napoléon III que Gam-
betta l’avaient empêché de rejoindre les armées
françaises. De son exil londonien, il était rentré
en France en 1871 dès qu’il en avait eu la possibilité. Inquiet, le président Thiers l’avait jugé rusé,
ambitieux et celui des princes dont les républicains devaient le plus se méfier. Thiers avait raison car en 1873 le comte de Paris avait bien failli
réussir à placer sur le trône de France son cousin
le comte de Chambord. Dix ans plus tard, au
décès d’Henri V en 1883, le comte de Paris devenait à son tour le chef de la maison de France.
Qu’allait-il faire ?
Le comte de Paris savait qu’avant tout il lui fallait réconcilier les légitimistes et les orléanistes.
Dans ses recherches sur l’histoire sacrée, Henry
Montaigu a mis en lumière que « Toute la question était alors de savoir si les princes d’Orléans
entendaient tenir leurs droits de Henri V et selon
l’ordre traditionnel salique, ou s’ils entendaient
en même temps les tenir aussi de Louis-Philippe
et d’une adaptation au monde moderne de la
monarchie par une dynastie nouvelle excluant
tout caractère sacré. Le cas de Henri IV se renouvelait. » On le sait, le jeune comte de Paris trancha pour la tradition. Sa première mesure
politique fut de prendre le nom de Philippe VII et
non celui de Louis-Philippe II. Il expliqua à ses
oncles, « En 1830, on a voulu rompre avec la tradition et se rattacher à la Révolution. Il était naturel que mon grand-père prît le nom de
Louis-Philippe ; aujourd’hui il faut au contraire
renouer la tradition ! je ne dois m’appeler que
Philippe. » Par cette rupture avec l’orléanisme,
les légitimistes pouvaient massivement reconnaître le Bourbon-Orléans comme leur prince. Dix
ans après la fusion familiale de 1873, le comte
de Paris réalisait aussi la fusion des idées. La fusion, cette "pierre philosophale" que Karl Marx
avait prophétisée irréalisable au fait que « Si
Henri V mourrait demain, le comte de Paris n’en
deviendrait pas pour cela le roi des légitimistes,
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à moins qu’il ne cessât d’être le roi des orléanistes ». Justement Philippe VII allait dorénavant
tenir une ligne politique légitimiste et se dégager
de l’idéologie orléaniste. Voilà pourquoi ceux qui
jusqu’à présent profitaient de la division des royalistes affirmèrent que le comte de Paris, en acceptant l’héritage politique du comte de Chambord,
trahissait la mémoire et les enseignements de sa
famille. Cet agacement révélait le succès de la
rupture de Philippe VII ; et ce malgré les petites
frondes des "Blancs d’Espagne" et des derniers orléanistes.
L’orléanisme d’Aumale
En se choisissant Philippe VII et non Louis-Philippe II, le comte de Paris renouait la chaîne que
son grand-père, le roi des Français Louis-Philippe,
avait brisée en 1830. Il refusait l’orléanisme idéologique symbolisé par son oncle le duc d’Aumale.
La renommée d’Aumale était grande depuis
1843, car en Algérie il s’était emparé de la smalah d’Abd-el-Kader (5) par un incroyable coup
d’audace militaire. On se souvenait aussi de sa
brillante brochure (6) anti-bonapartiste de 1861,
interdite sur ordre de l’Empereur Napoléon III.
L’image de ce soldat hors pair avait encore progressé lorsqu’en 1873 il avait mené de façon
exemplaire le procès en trahison du général Bazaine. Sa nomination au commandement de la
7ème division avait inquiété Bismarck qui voyait
en lui l’instrument de la revanche française. Par
ailleurs il subventionnait un groupe de presse que
les conseillers du comte de Paris accusaient
d’être utilisé à propager le libéralisme et non la
cause royaliste. Ils le soupçonnaient d’œuvrer à
l’établissement d’une république princière et le
disaient "bleu" jusqu’aux moelles ! Beaucoup
plus que son père Louis-Philippe qui sous le libéral cachait le dictateur.
Avec le retour à la tradition opéré par son
neveu, le richissime duc d’Aumale reprocha à Philippe VII de renier son grand-père. Il rejoignait
Marx, estimant que la fusion ne serait « qu’une abdication volontaire de la maison d’Orléans, sa résignation légitimiste, son retour repentant de
l’Église protestante à l’Église catholique ». Il est
certain que Philippe VII signait l’acte de décès de
l’orléanisme idéologique car il voulait réconcilier
la royauté chrétienne des légitimistes et la parle-
mentaire des orléanistes. La mort du comte de
Chambord fit ainsi éclater la dissension latente qui
existait entre Aumale et Paris, quant aux buts de
la monarchie. Aumale s’entêta dans son opinion
mais s’inclina néanmoins devant son chef de famille qui lui dit « Ne prenez pas en mauvaise part,
mon oncle, qu’ayant écouté vos conseils, je ne les
suive pas ».
Par son retour à la tradition, Philippe VII savait
priver sa future stratégie de l’immense fortune
d’Aumale. Choix d’autant plus méritoire que dans
son testament, le comte de Chambord ne lui transmettait pas les fonds légitimistes que la banque
Rothschild de Londres allait restituer aux donateurs.
Les Blancs d’Espagne
En 1883 une fraction légitimiste aveuglée par
la haine des Orléans, se tourna vers la Maison
d’Espagne, qui sortait d’une confuse série d’abdications. Cette fraction niait le traité d’Utrecht
signé en 1713 par Louis XIV. Le Roi soleil ayant
envoyé son deuxième petit-fils, le duc d’Anjou,
régner en Espagne, le traité d’Utrecht exigeait
des Bourbons espagnols de renoncer au trône
de France et des princes français, de renoncer
au trône d’Espagne.
Où en étaient les Bourbons-Anjou ? En 1833
le très absolutiste roi d’Espagne Ferdinand VII
était décédé en laissant deux filles dont l’aînée
Isabelle n’avait que trois ans. Don Carlos (7) le
frère de Ferdinand avait alors refusé de reconnaître sa nièce et il avait réclamé le trône d’Espagne
en s’appuyant sur les traditionalistes. Entre 1833
et 1839 Don Carlos V avait alors dirigé la première guerre carliste. Le carlisme était un mouvement religieux, particulariste (pays Basque,
Navarre, Aragon et Catalogne), populaire, rural
et anti-libéral. Don Carlos V faillit réussir mais il
retraita devant Madrid pourtant sans défense.
Trahi, il abdiqua en 1845, en faveur de son fils
aîné Don Carlos VI (8).
Le théologien carliste, l’abbé Balmes, poussa
alors au mariage de la reine Isabelle II avec don
Carlos VI. Malheureusement cette fusion des deux
branches des Bourbons espagnols échoua. En
1846, furent célébrés à Madrid les mariages de la
jeune reine Isabelle II avec son cousin germain
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François d’Assise et celui de sa sœur avec le duc mistes. L’aîné des Bourbon-Anjou, libéral
de Montpensier, dernier des fils de Louis-Philippe, convaincu, ne s’était jamais entendu avec le comte
qui s’établissait en Espagne. C’est la fille de ces de Chambord dont il ne supportait pas la dévotion.
derniers qui se mariera avec le comte de Paris. Don Juan présida donc les obsèques du comte de
De 1847 à 1849, Don Carlos VI mena alors une Chambord, puis reprit sa vie discrète. Son fils Don
guérilla carliste en Catalogne. Fait prisonnier en Carlos VII déclara que c’était à l’Espagne seule
1860 il fut obligé de renoncer à la Couronne d’Es- qu’il appartenait. En fait les Bourbon-Anjou se
consacraient à la lutte carliste et portaient tous
pagne.
Profitant de la situation et tout en exprimant leurs titres espagnols. Pour ajouter à l’imbroglio,
son attachement à la démocratie, son frère Don la comtesse de Chambord favorisait Robert duc
Juan (9), joua sa propre carte et manœuvra auprès de Parme, son neveu issu du rameau italien de la
des Cortès pour réclamer ses droits au trône espa- branche espagnole. Dans son ombre le confesseur
et l’aumônier du comte de Chamgnol. Quelques mois plus tard, à la
bord
poussaient la candidature de
mort subite de Carlos VI, Don Juan,
Don Alfonso duc de San Jaime, préen tant qu’aîné des Bourbontextant la renonciation espagnole de
Anjou, devenait enfin le prétendant
don Juan pour reconnaître son secarliste sous le nom de Don Juan
cond fils. Tous comprenaient la siIII. Pétrifiés les carlistes refusaient
tuation absurde d’un don Carlos VII
ce prince libéral en distinguant sa
prétendant
en même temps aux
légitimité d’origine, de la légitimité
royaumes d’Espagne et de France.
d’exercice qu’il n’incarnait pas. Ils
Totalement incapables de s’engager
choisirent son fils, Don Carlos
sur un prince espagnol, les carlistes
VII (10) duc de Madrid, comme
français, se groupèrent donc autour
prétendant traditionaliste au trône
de
Joseph du Bourg et de Maurice
d’Espagne. En 1868 Don Juan III
d’Andigné., les seuls conseillers
abdiquait alors en faveur de son
Le comte de Chambord
d’Henri
V qui avaient refusé Phifils.
lippe VII.
Pendant ce temps le règne d’Isabelle II se terminait dans un contexte dégradé (11). La RépuLes survivantistes
blique espagnole naissait, exilant la reine en
Ce que Henri Montaigu a appelé les « Les chiFrance, qui en 1870 y abdiquait en faveur de son
canes
généalogiques en faveurs d’altesses de
fils, le futur Alfonso-Carlos XII. De son côté, l’aîné
des Bourbons espagnols, don Carlos VII mena la contrebande ou de hasard, de princes retrouvés
troisième guerre carliste, de 1872 à 1876. Le nord ou étrangers » préexistaient a l’apparition des
de l’Espagne conquis, il installa son gouverne- Blancs d’Espagne. Depuis la Restauration de
ment en Navarre. Il régna ainsi sur un cinquième Louis XVIII, il existait une mouvance survivantiste
de l’Espagne tandis que son père Don Juan et son (ou dauphinomane), qui niait la mort du petit roi
frère Don Alfonso rejoignaient son armée. Pour- martyr Louis XVII à la prison du Temple en 1795.
tant à partir de 1874, de nombreux carlistes aban- Effectivement ceux qui avaient eu intérêt à faire
donnaient Carlos VII au profit du roi Alphonse XII, évader l’enfant royal avaient été plus nombreux
qu’on ne le pense. Plusieurs réseaux royalistes
car il était d’une grande probité morale.
concurrents (12) avaient tenté l’affaire tandis que
En 1883, du côté français des Pyrénées, cerles révolutionnaires (13) avaient chercher a se
tains anti-Orléans forcenés se firent "Blancs d’Esmunir d’un otage précieux à mettre en lieu sûr.
pagne" et voulurent se réclamer d’un prince
L’hypothèse évasioniste allait susciter les maBourbon-Anjou, mais lequel ?
nœuvres de plusieurs faux dauphins (14).
Les carlistes espagnols s’étant débarrassé de
À partir de 1833 un groupe survivantiste (15),
Don Juan, celui-ci devenait en quelque sorte disvit en Karl-Wilhelm Naundorff (16), le véritable
ponible mais il n’avait rien pour plaire aux légitiLouis XVII. Leurs nombreux travaux faisaient pla-
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ner un doute lancinant sur la validité dynastique
de Louis XVIII et Charles X, qui avaient refusé
de recevoir les restes de l’enfant mort au Temple
et notamment son cœur. Ils rappelaient que la
famille royale avait mystérieusement octroyé
une rente à la veuve du geôlier Simon. Ils expliquaient l’assassinat du duc de Berry en 1820 par
sa volonté de rendre la couronne à Naundorff.
Ils expliquaient aussi l’attentisme du comte de
Chambord en 1873 par sa conviction de n’être
pas le premier successible dans l’ordre de primogéniture.
Si en 1883 les carlistes français commençaient
d’appuyer leurs prétentions sur la contestation du
traité d’Utrecht, les survivantistes contestaient depuis longtemps l’adage du royaume : « Le sang de
France ne se présume point ». À l’origine Naundorff et ses enfants s’étaient cantonnés aux revendications d’héritage (17) face aux Bourbon-Artois.
Puis leurs prétentions prirent une tournure dynastique. C’est pourquoi les naundorffistes se groupèrent autour du journal LA LEGITIMITE (18)
dirigé par l’abbé Dupuy. Pour eux les "Bourbons
de Hollande" étaient les véritables héritiers de
Louis XVII.
En 1883, profitant de la mort du comte de
Chambord, les naundorfistes semèrent un trouble supplémentaire. La fille aînée de Naundorff,
Johanna-Amélia, parvint à faire abjurer de sa foi
luthérienne Louis-Charles, le second Fils Naundorff (19). Par la proclamation de Teteringen de
décembre 1883, Louis-Charles consacrait la
France au Sacré-cœur, se convertissait au catholicisme et se titrait Charles XI (20). Cela déstabilisait certains légitimistes désorientés par le
libéral-catholicisme des Bourbon-Orléans et le
libéralisme du Bourbon-Anjou, Don Juan.
Puisque les lys n’avaient pas refleuri, en 1873
n’était-ce pas que le comte de Chambord n’était
pas légitime ?
1883 le nouveau clivage
L’année 1883 fut donc une année de recomposition pour le royalisme. L’opposition entre légitimistes et orléanistes perdait son sens et un
clivage nouveau se créait, où, pour certains,
l’apocalyptique se substituait au politique.
Instrumentalisant la production prophétique
des années 1820-1840, les Blancs d’Espagne et
les survivantistes allaient développer une sensibilité mystique autour du "Grand Monarque". Ce
mythe provenant des prophéties de saint Césaire,
de Nostradamus et d’Orval, avait été vulgarisé par
le légitimiste Adrien Péladan (21) qui avait aussi
popularisé les prophéties des Papes de Malachie
et du laboureur Martin de Gaillardon. Ainsi se développa la confusion du politique et du mystique.
Un certain légitimisme dériva imperceptiblement
vers le prophético-pessimisme ; voir l’illuminisme. Effectivement cette nouvelle sensibilité
royaliste, parfois brouillée par le martinisme de
nombreux Naundorfistes, s’appropria abusivement ‘l’histoire sacrée" en la transformant en un
mélange d’obscur et d’incertitude. De là, Blancs
d’Espagne et survivantistes développèrent un système de pensée faisant de la descendance de Philippe-Egalité, le Mal absolu.
À cause de ce manichéisme, certains royalistes français se reconstituèrent artificiellement
une fidélité sur une branche de la Maison d’Espagne. Cette vision du Prince réellement et symboliquement éloigné, allait les pousser, dira Jean
Sevillia « à une fuite devant la politique
concrète et ses difficultés, masquée souvent
d’alibis pseudo-religieux ». Leur royalisme devenait une prise de position esthétique et sentimentale.
Du coté orléaniste l’année 1883 fut celle de
la fusion politique avec la grande majorité des
légitimistes. Pourquoi ?
Tout d’abord parce que les prétentions espagnoles (Bourbon-Anjou) et hollandaise (Naundorff) eurent un impact extrêmement réduit sur
les légitimistes. À la mort d’Henri V, l’organe officiel du comte de Chambord, l’UNION, annonça que sa mission était finie et salua dans le
comte de Paris le chef de la maison de France.
Par ailleurs le marquis de Dreux-Brezé ordonna
la dissolution de tous les comités légitimistes.
Massivement les légitimistes se rallièrent sans arrière-pensée, ou se résignèrent de bonne grâce.
Ensuite et surtout, la Maison d’Orléans devenant Maison de France, elle oublia son idéologie
libérale pour adopter l’histoire et la tradition des
rois dont elle héritait. En 1883 Philippe VII ne se
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contentait pas d’être l’héritier salique des Bourbons ; il refusait l’adaptation bourgeoise de la
Monarchie française. Ceux qui n’avaient vu dans
l’acte de Philippe VII que la clôture d’une querelle dynastique opposant une usurpation à un
droit légitime s’étaient trompés. Louis-Philippe
n’avait pas été un usurpateur mais il avait voulu
comme Napoléon, créer une nouvelle dynastie
intégrant la Révolution. L’acte du comte de Paris
était donc véritablement traditionnel, même si
certains légitimistes qui ne discutaient pas ses
droits espéraient un acte plus marqué par rapport
à la vocation spirituelle de la France.
En 1883, le royalisme renouait avec la combativité.
Philippe Lallement (à suivre)
1. Louis, Charles, Philippe, Raphaël d’Orléans (1814-1896),
duc de Nemours. En 1870, respectant le traité d’Utrecht, son
fils le duc d’Alençon (1844-1820) avait refusé la couronne
d’Espagne.
2. Robert, Philippe, Louis, Eugène, Ferdinand d’Orléans, duc
de Chartres (1840-1910). En 1870 il était parvenu à ce procurer un faux état civil et sous le nom de Robert le Fort avait
dirigé cinquante cavaliers français dans la guerre de francstireurs en Normandie.
3. État-major de l’Armée du Potomac 1861 (Springfield, Manassas), 1862 (Yorktown, Williamsburg, Fair Oaks). Personnellement engagé lors de la sanglante bataille de Gaines Mill.
4. Marie-Isabelle (1848-1919) née à Séville, fille d’Antoine
d’Orléans, duc de Montpensier (1824-1890) et de MarieLouise de Bourbon et Bourbon.
5. Le 16 mai 1843, un escadron de 500 hommes commandé
par Aumale enleva la smala d’Abd el-Kader. Une ville itinérante de 30.000 personnes où Aumale fit 3.000 prisonniers
et remporta un immense butin.
6. LETTRE SUR L’HISTOIRE DE France, réponse d’Aumale à
Napoléon Joseph Charles Paul Bonaparte dit « le Prince Jérôme ou Plon plon » (1822-1891). Fils de Jérôme Bonaparte
(1784-1860), Roi de Westphalie et frère de Napoléon 1er. Il
fut un farouche partisan de la révolution de 1848, surnommé
le "Prince Rouge" tant ses idées étaient à gauche.
7. Carlos V, Maria Isidro de Borbon (1788-1855) se déclara don
Carlos V roi d’Espagne, en 1833 à la mort de son frère Ferdinand, dont la femme Marie-Christine se faisait déclarer reine
gouvernante au nom de sa fille Isabelle II. Il se titra comte
de Molina.
8. Carlos VI, Luis Maria Ferdinand de Bourbon (1818-1861),
né au Palais Royal de Madrid. Le premier fils de don Carlos
V se titra comte de Montemolin.
9. Juan III, deuxième fils de don Carlos V, Juan Carlos Maria Isidore de Bourbon (1822-1887) était né au palais d’Aranjuez.
Il se maria avec l’archiduchesse Béatrice d’Autriche-Este, fille
du duc François de Modène dont l’autre fille épousa le comte
de Chambord. Il se titra comte de Montizon.
10. Carlos VII, Maria-de-los-Dolores Franscisco de Bourbon
(1848-1909). Il se titra duc de Madrid.
11. Se terminant par une révolte menée par l’amiral Topete et
les généraux Prim et Serrano.
12. Répartis entre résistants royalistes de l’intérieur et émigrés
du “parti des oncles" Artois et Provence (réseaux d’Antraigues, de Breteuil, Atkins-Cormier, Frotté, de Puisaye…).
13. On croit pouvoir identifier trois tentatives d’évasion : Chaumette, Robespierre et Barras.
14. Hervagault (dès 1 796), Mathurin Bruneau (1813) et Richemont (1814)…
15. Pezold, Morel, Martin de Gallardon, de Joly, Mme
de Rambaud, Mme de Générés, Bourbon-Leblanc ;
les frères Laprade, de Cosson, Gozzoli, Gruau,
Dupuy…
16. Le prussien Karl-Wilhelm Naundorf vécut à Berlin, Spandau, puis Brandebourg où en 1828 il se
fit passer pour Louis XVII évadé du Temple. Il se
rendit à Paris et en 1836, il assigna en justice les
Bourbon-Artois afin d’obtenir les biens royaux ;
Expulsé de France il s’établit en Hollande où il
mourut en 1845. À partir de 1834 il eut des visions et fonda la religion catholique évangélique.
17. Assignation de 1836 contre la duchesse d’Angoulême et le roi Charles X en exil à Prague. Procès de
1851 contre duchesse d’Angoulême, Henri V et duchesse de Parme ; l’avocat républicain Jules Favre
refusa ses honoraires mais accepta une bague de
Naundorff ; qu’il utilisa comme sceau pour les préliminaires de l’armistice de 1871.Procès de 1874
contre Henri V. Assignation de 1881 contre Henri V.
18. LEGITIMITE (1883-1940) fondée par JohannaAmélia Naundorff fut ensuite dirigée par Albert Renard puis Louis Champion.
19. En 1866 Karl-Eduard Naundorff, le fils aîné était
décédé sans postérité. En 1877, le troisième fils KarlEdmund avait cédé ses droits au quatrième fils Adelberth. Mais à la mort d’Henri V en 1883, seul
Karl-Edmund était catholique et deux branches s’opposèrent. Contre Adelberth, La LÉGITIMITÉ, pris
parti pour Karl-Edmund qui mourrait en octobre. En
novembre Louis-Charles, second fils et chef de la famille, renonçait également à ses droits en faveur
d’Adelberth. En décembre 1883 Johanna-Amélia
parvint pourtant à faire prétendre Louis-Charles.
20. dans sa tombe Karl-Eduard Naundorff (1821-1866)
devenait "Charles X", comme si le comte d’Artois
n’avait jamais régné sur la France.
21. Adrien Péladan (1815-1890) dont l’ouvrage DERNIER MOT DES PROPHETIES (1878) a connu un
grand succès.
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ANNEXE
L e B a r o n Tr i s t a n L a m b e r t
Philippe Lallement a bien résumé ci-avant l’essentiel de la situation très complexe à laquelle le
royalisme français s’est trouvé confronté à la mort
d’Henri V, le 24 août 1883 à 7 heures 27.
Ce même jour, mon grand-père, qui est directeur
du journal La Défense de Seine-et-Marne reçoit à
Fontainebleau quatre de ces télégrammes que l’on
appelait à l’époque des petits bleus. Deux proviennent de Wiener Neustadt en Autriche ; ils sont signés
Blacas et Dreux-Brézé ; ils disent l’heure de la mort
et que, sur le désir formel de la comtesse de Chambord, aucune cérémonie publique n’aura lieu à
Frohsdorf et que les obsèques se feront à Goritz
mais pas avant huit jours. Les sentiments religieux
de Dreux-Brézé sont-ils plus intenses que ceux de
son collègue ? C’est lui qui ajoute sous sa propre signature : prions et demandons des prières pour
Monseigneur et pour Madame la comtesse de
Chambord.
Les deux autres petits bleus viennent de Paris.
L’un annonce que le journal Le Gaulois a mis en tête
et en grosses lettres : Henri V est mort, Vive Philippe VII. Et l’autre : prévenez Tristan que Monsieur
le comte de Chambord est mort…
Ces quatre documents, aussi laconiques que se
doivent d’être des télégrammes, résument et illustrent un aspect particulier du royalisme français que
Philippe Lallement n’a pas voulu traiter car il n’est
qu’un détail dans l’histoire de la fusion des deux
branches. Mais ce n’est pas la première fois qu’un
détail fait couler un peu d’encre !
Tristan est le prénom du troisième baron Lambert.
Né en 1846, il a passé son enfance et sa jeunesse
dans l’intimité de la famille impériale. L’impératrice
lui témoigne une profonde affection ; ils ont en commun leur foi catholique intransigeante et une rigoureuse piété. Il a tenu à partager la captivité de
l’Empereur. Ami intime, de dix ans son aîné, il a été
très lié au Prince Impérial en qui il voyait le type
même du Prince Chrétien. Député catholique et bonapartiste, tous ses rêves se sont effondrés quand son
ami a été tué au Zoulouland en 1879. En effet, le
nouveau prétendant à l’Empire, le prince Jérôme, est
un homme de gauche, anticlérical, aux antipodes de
ce qu’était le Prince Impérial ! C’est pourquoi le
baron Lambert se rallie au comte de Chambord et
fonde, avec mon grand père, un journal dont la de-
vise était : Dieu et le Roi. Puis en 1883, persuadé, à
raison ou à tort, que le Droit historique l’exige, il
soutient la cause des Orléans, tout en combattant
énergiquement l’esprit orléaniste.
C’est la raison pour laquelle Tristan Lambert symbolise parfaitement ce malaise latent, parfois masqué, parfois déclaré, qui ne cessera de rendre
difficile le soutient qu’apportent les royalistes catholiques, quand ils le sont avec intransigeance, à la
cause des Orléans. Il en eût été tout autrement si le
duc de Nemours et son fils, le duc d’Alençon,
avaient été les aînés !
En prenant un peu d’avance sur le déroulement
des articles de Philippe Lallement, et sans écarter la
possibilité de revenir sur ce moment de notre histoire politique qui n’est pas sans analogie avec celui
que nous vivons, voici un extrait d’une lettre que le
baron Lambert adressa au comte de Paris le 1er décembre 1888 et dont il remit copie à mon grandpère. Dans la belle et libre et vigoureuse tradition de
l’ancienne France, il s’agit d’une véritable
Remontrance au Roi :
« […] le dernier coup nous a été porté par Votre
réception récente des agriculteurs du Calvados.
Voici des braves gens qui viennent Vous déclarer
spontanément qu’ils veulent pouvoir élever chrétiennement leurs enfants dans des écoles d’où Dieu
ne sera pas banni, et Monseigneur ne leur répond
rien à ce sujet, passe cette revendication si juste, si
capitale, qui est le vœu, non seulement de tous les
Catholiques, mais encore de tous les braves gens de
France, totalement sous silence ! l’élimine ! n’y répond Rien ! et se borne à traiter des intérêts agricoles, […] Ceci, c’est le comble, et là, il est
impossible de Vous défendre. […] Votre branche et
Vous, avez des gages à donner aux Catholiques, aux
Légitimistes, aux Autoritaires. Vous Vous refusez à
le comprendre. Vous ne tarderez pas à en voir la démonstration, car, Vous Vous tromperiez étrangement
si Vous pensiez que nous remettrons nos Droits les
plus chers et les plus sacrés à ceux qui, taisant toujours le Nom de Dieu […] n’ont à la bouche que :
"89, Consultation nationale, erreurs et équivoques".
Nos mesures sont prises, et le seront, pour qu’aux
élections prochaines, notre généreux suicide de Goritz ne soit point renouvelé. […] »
Bernard Poyet
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Réseau-Regain (reseau-regain.net)
6/6