LA PSYCHOLOGIE POSITIVE
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LA PSYCHOLOGIE POSITIVE
ÉCLAIRAGE LA PSYCHOLOGIE POSITIVE La psychologie positive est un mouvement qui prend de l’ampleur. Il s’intéresse à l’état optimal de l’être humain. Au lieu de se centrer sur la résolution de problèmes, le trouble, le manque, il étudie ce qui favorise le bien-être, en faisant appel à nos capacités de résilience. Et dans cette voie, le chemin parcouru s’avère plus important que le but. Loin d’être une «méthode Coué», la psychologie positive s’intéresse à l’«étude des conditions et processus qui contribuent à l’épanouissement ou au fonctionnement optimal des individus, des groupes et des institutions», selon les chercheurs Shelly Gable et Jonathan Haidt. Pourquoi, depuis un siècle, ne nous étions-nous intéressés qu’à l’étude de ce qui dysfonctionne? Cette nouvelle discipline ouvre une voie qui nous permet d’apprendre à construire notre propre bonheur, celuici étant en lien direct avec une dimension collective, voire sociétale. Officiellement née en 1998 dans un discours de Martin Seligman, alors président de l’American Psychological Association, la psychologie positive prend racine dans ce constat: depuis cent ans que la psychologie moderne existe, la définition de la santé mentale ne s’est concentrée que sur la «réduction des troubles neuropsychiatriques». La psychologie positive poursuit un autre objectif et annonce une nouvelle ère: celle où nous nous intéressons à l’«étude scientifique du fonctionnement humain optimal*». Il ne s’agit plus d’accompagner les gens pour qu’ils passent d’un état de souffrance à un état «neutre», mais d’un état «neutre» à un état de satisfaction. Cette nouvelle discipline a fait l’objet d’un workshop animé par le professeur Michael F. Steger, de l’Université d’Etat du Colorado, lors de la 17e Conférence européenne sur la personnalité, qui s’est tenue pour la première fois en Suisse en juillet dernier. Cette édition, présidée par les professeurs et docteurs Jérôme Rossier et Marina Fiori, a accueilli plus de 500 professionnels de la psychologie à l’Université de Lausanne. Quelque 80 conférences et présentations réparties sur cinq jours ont offert un riche panel d’activités et de rencontres aux participants venus du monde entier. LA QUESTION DU SENS Loin de la méthode Coué ou d’un positivisme forcé, la psychologie positive s’appuie sur les forces et les vertus qui permettent aux individus et aux communautés de prospérer. Elle part du principe que l’étude de la maladie et du malheur nous permet de savoir comment guérir et que celle du bonheur et de la satisfaction nous permet de savoir comment grandir et nous épanouir. «Nous devons accepter le fait que les réponses d’hier ne sont plus celles d’aujourd’hui.» Cette science s’intéresse principalement au développement de notre capacité à aimer et à être aimés, à notre résilience, à la responsabilité de nos actions et à leur sens. Cette question du sens est prépondérante dans le travail du professeur Steger: «Ce qui m’a conduit au sens n’est pas une finalité positive, heureuse ou empreinte de succès. Le sens se trouve en faisant face aux épreuves, au malheur ou à l’échec. En fait, la plupart des grands penseurs, au fil du temps, sont arrivés à la même conclusion: le sens n’est pas quelque chose que nous trouvons une fois pour toutes, il se révèle dans chaque pas que nous faisons.» ni l’obtention du résultat exact qu’ils avaient imaginé. Non, l’important est qu’ils soient conscients du fait qu’ils s’efforcent de faire quelque chose de difficile. Il y a un sens profond à cette démarche — qu’il y a toujours eu, à travers l’histoire de l’humanité —, mais nous avons tendance à l’oublier. Nous oublions qu’être signifie poursuivre sa route, quoi qu’il advienne.» LE TRÉSOR DES PROFONDEURS La psychologie positive telle que pratiquée par le professeur Steger propose donc des apprentissages essentiels que nous ne trouverons dans aucun livre, ni aucune école de pensée positive: «En cherchant, peut-être pourrons-nous découvrir au plus profond de nousmêmes une perspective et une richesse de vie qui ne peut venir que d’un vrai face-à-face avec nous-mêmes. Et qu’il n’y a pas d’autre moyen d’y accéder.» Et le professeur Steger de conclure: «La quintessence de l’être humain se trouve dans la capacité qu’il a de tirer le meilleur de ce qui lui arrive, ainsi que celle de s’adapter. Ce que nous pensons de nous-mêmes, nos talents naturels et notre capacité à surmonter les choses forment ce qui peut nous aider à nous élever et à nous récompenser, ainsi qu’à élever et à récompenser les autres.» UN CHANGEMENT DE PENSÉE Le professeur Steger précise: «Voilà qui introduit un changement de pensée aujourd’hui nécessaire. Souvent, nous fixons notre attention sur le bonheur, la satisfaction ou l’épanouissement comme résultats, comme une destination que nous pourrions atteindre pour y rester. Mais voilà, même dans les meilleures circonstances possibles, notre vie est en perpétuel changement. Nous devons dès lors accepter le fait que les réponses d’hier ne sont plus celles d’aujourd’hui. Ceci concerne en particulier ceux d’entre nous qui tentent de guérir ou de se reconstruire: c’est le processus qui les guide qui importe, et non pas la rapidité avec laquelle ils parviennent à un résultat, Graap-Fondation Martine Corthésy * Selon le «Manifeste de la psychologie positive» créé en 2000 par les auteurs Ken Sheldon, Barbara Fredrickson, Kevin Rathunde, Mike Csikszentmihalyi et Jon Haidt. Pour plus d’infos: www.unil.ch/ecp17 www.michaelfsteger.com (en anglais) www.psychologie-positive.com /// Diagonales 104 /// Mars-avril 2015 /// 13