ENS DE LYON - Concours Lettres et sciences humaines

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ENS DE LYON - Concours Lettres et sciences humaines
ENS DE LYON - Concours Lettres et sciences humaines
Session 2015
Épreuve d’admission : EPREUVE ORALE DE SOCIOLOGIE
Jury : Frédérique Giraud / Abir Krefa
Dossier n°11
A L’ATTENTION DU (DE LA) CANDIDAT(E)
Vous devez impérativement :
1- écrire lisiblement vos noms et prénoms,
2- signer, ci-dessous,
3- remettre votre sujet au jury et lui présenter votre pièce d’identité munie d’une
photographie.
Si plusieurs sujets sont proposés, vous effectuerez votre choix pendant le temps de
préparation. Vous signalerez le sujet choisi en l’entourant ou en barrant l’autre ou les deux
autres.
Nom :
Prénom :
Signature :
Sujet :
ENS DE LYON - Concours Lettres et sciences humaines
Session 2015
Épreuve d’admission : EPREUVE ORALE DE SOCIOLOGIE
Jury : Frédérique Giraud / Abir Krefa
Dossier n°11
Suicide et intégration sociale
Sources
Baudelot Christian, Establet Roger, « Suicide : l’évolution séculaire d’un fait social »,
Economie et Statistique, 168, 1984, p. 62
De Singly François, « Mariage, dot scolaire et position sociale », Economie et Statistique,
142, 1982, p. 10
Bourdieu Pierre, « Célibat et condition paysanne », Etudes rurales, n°5-6, 1962, p.97-98.
Ce dossier comporte 4 documents numérotés de 1 à 4.
Ens de Lyon / Sciences sociales
Epreuve orale de sociologie / session 2015
Document 1
Ens de Lyon / Sciences sociales
Epreuve orale de sociologie / session 2015
Document 2
Ens de Lyon / Sciences sociales
Epreuve orale de sociologie / session 2015
Document 3
Ens de Lyon / Sciences sociales
Epreuve orale de sociologie / session 2015
Document 4
Tandis que dans la société ancienne le mariage était surtout l’affaire de la famille, la
recherche du partenaire est laissée aujourd’hui, on le sait, à l’initiative de l’individu. Ce qu’il
s’agit de comprendre mieux, c’est pourquoi la paysan des hameaux est intrinsèquement
défavorisé dans cette compétition ; et, plus précisément, pourquoi il se montre aussi peu
adapté, aussi déconcerté, dans les occasions institutionnalisées de rencontre entre les sexes.
Etant donné la séparation tranchée entre la société masculine et la société féminine, étant
donné la disparition des intermédiaires et le relâchement des liens sociaux traditionnels, les
bals qui se tiennent périodiquement au bourg ou dans les villages voisins sont devenus la
seule occasion de rencontre socialement approuvée. Par suite, ils fournissent une occasion
privilégiée de saisir la racine des tensions et des conflits.
Le bal de Noël se tient dans l’arrière-salle d’un café. Au centre de la piste, une dizaine de
couples dansent avec beaucoup d’aisance les danses à la mode. Ce sont surtout des
« étudiants » (lous estudians), c’est-à-dire les élèves de cours complémentaire ou des collèges
des villes voisines, pour la plupart originaires du bourg. Il y a aussi quelques parachutistes
sûrs d’eux-mêmes et de jeunes citadins, ouvriers ou employés ; deux ou trois d’entre eux sont
coiffés du chapeau tyrolien et portent blue-jeans et blouson de cuir noir. Parmi les danseuses,
plusieurs filles venues du fin fond des hameaux les plus reculés, habillées et coiffées avec
élégance, parfois avec recherche, et aussi quelques natives de Lesquire qui travaillent à Pau
ou à Paris, couturières, bonnes ou vendeuses. Elles ont tous les dehors de la citadine. Des
jeunes filles et même des fillettes d’une douzaine d’années, dansent entre elles, tandis que de
jeunes garçons se poursuivent et se bousculent entre les couples danseurs.
Debout au bord de la piste, formant une masse sombre, un groupe de spectateurs, plus âgés,
observent sans parler. Comme happés par la tentation d’entrer dans la danse, ils avancent et
resserrent l’espace laissé aux danseurs. Ils sont tous là, tous célibataires. Les hommes de leur
âge qui sont déjà mariés ne sont plus au bal. Ils y vont seulement lors de la grande fête du
village, le comice agricole. Ce jour là, tout le monde est « sur la Promenade », et tout le
monde danse, même les « vieux ». Les célibataires, eux, ne dansent pas davantage. Ce soirs
là, on les remarque moins, parce qu’hommes et femmes du village sont tous venus, les uns
pour bavarder avec les amis, les autres pour épier, cancaner et faire mille conjecture sur les
mariages possibles. Mais dans les petits bals comme celui de Noël ou du Premier de l’An, ils
n’ont rien à faire. Ce sont des bals où l’on vient pour danser.