Christian Paix

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Christian Paix
déCouvrir vitrines
Christian Paix
Modelage et pointe d’humour
Dans la boutique d’un opticien rue du Cadran Saint-Pierre, chez un fleuriste de la place du
Forum, dans le cabinet d’un médecin du centre-ville, mais aussi aux États-Unis, au Japon, au
Maroc, en Europe occidentale, trônent en bonne place les œuvres de cet artiste inclassable.
Catherine landron
C
hristian Paix a inventé il y a plus
de vingt ans un genre artistique
tellement singulier qu’on ne sait
comment en nommer le produit. Tableau ? Installation ? Maquette ? En se
creusant la tête, il propose « illustrations
humoristiques de la vie ». L’ex-étudiant des
Beaux-Arts de Reims s’amuse à reconstituer
des scènes de vie dans les micro-théâtres de
notre quotidien : un garage, un cabinet dentaire, une cuisine, des toilettes publiques, un
bar, un atelier de sculpteur, un cabinet de
gynéco, un bureau de banque, le fournil du
boulanger, une station de métro, etc.
Le détaiL qui crée L’ambiance
« J’ai commencé par travailler sur les visages,
les expressions en créant des masques. Ce sont
mes clients qui m’ont demandé de faire des
corps sous les visages. Alors je me suis mis en
1983 à modeler des personnages. Après quoi
j’ai voulu leur donner du mouvement. Cela fait
dix ans que je fais des panneaux. Plus le temps
passe, plus j’entre dans le détail. » Et voilà le
résultat : une planche de BD en 3D sans
phylactère, qui rappelle l’humour de Gotlib,
la précision de Serre et les ventres replets des
Bidochon de Binet.
Grand observateur du comportement, Christian
Paix reproduit ce qu’il voit, ou plus exactement
il caricature, il grossit le trait, il accentue une
particularité physique, pour faire sourire. Le
réalisme poussé à l’extrême a tendance à agir
sur les sens : dans cette auberge de montagne,
on croit sentir l’odeur entêtante de la fondue ;
dans la scène du garage, on entend presque le
bruit du marteau sur le bloc moteur ; dans les
toilettes pour hommes, les jets explicites de
l’urinoir forment des glouglous dans l’oreille…
Son secret ? « Quand je réalise une pièce, je
m’imagine dedans. » La porte bringuebalante,
le carreau fendu, l’usure de la tablette de la
caisse, la peinture écaillée participent aussi à
l’ambiance.
un monde caché
Et pour donner forme au moindre détail, il est
prêt à remuer ciel et terre, à fouiller dans son
stock d’objets de récupération (une boîte de
conserve consommée devient un bidon
d’huile de vidange), à obliger ses copains à
piller le coffre à jouets des enfants. Encore
que, le plus souvent, il fabrique lui-même le
bidule. Comme tout le reste : il construit l’encadrement en contreplaqué, pétrit, cuit et
peint les personnages, moules les radiateurs,
les chasses d’eau, les jerricanes, les assiettes,
les verres, fait des recherches avant de façonner un profil de Ferrari crédible aux yeux d’un
tifosi, installe l’électricité. C’est le client qui
choisit le décor et fait part de ses voeux à la
commande. L’artiste écoute, jette trois mots
sur un papier, dresse la liste des accessoires,
parfois amorce une vague esquisse, et c’est
parti. En quinze jours, il achève un panneau
de taille standard. Il y ajoute à la demande (et
la demande est de plus en plus fréquente) un
20 z Reflets actuels z numéro 25 z décembre 2009 z www.refletsactuels.fr
étage souterrain, ce qu’il appelle « le monde
caché », où tout un peuple de souris grises
mène sa propre vie active, contemplative et
amoureuse…
Si la notoriété de Christian Paix a depuis
longtemps dépassé le cadre local et s’il peut
vivre de son art, c’est grâce au salon Maison &
Objet de Paris où il expose deux fois par an
quelques nouveautés qui font en général
l’aller mais jamais le retour. Le carnet de commandes se remplit là-bas et lui assure du travail pour les six mois suivants z

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