Sources et intensité lumineuses

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Sources et intensité lumineuses
Ch. O1 : Sources et intensité lumineuses
CHAPITRE 1
SOURCES ET IN T ENSI T É LUM INEUSES
1.
MODELE SCALAIRE DE LA LUMIERE
1.1.
Amplitude et intensité lumineuses
La lumière possède un double aspect :
- corpusculaire : les photons sont des « grains » de lumière
- ondulatoire : la lumière est une onde électromagnétique à laquelle est associé un champ
électromagnétique sinusoïdal ( E; B )
On peut retenir dès à présent le domaine de fréquences dans lequel se situent les ondes lumineuses :
celles-ci correspondent à des fréquences de !
l'ordre de 1014 Hz. Plus précisément, notre oeil (qui est un
instrument d'optique particulier), est sensible aux ondes lumineuses dont la fréquence est comprise
entre 4.10 14 et 7,5.10 14 Hz, qu'il " interprète " en termes de couleurs différentes allant du violet au
rouge. Ce domaine est appelé tout naturellement " le visible ". Aux fréquences plus hautes débute le
domaine des ultraviolets (UV) et aux fréquences plus basses, celui des infrarouges (IR).
Spectre en fréquence des ondes électromagnétiques
En outre, comme toute onde électromagnétique, la lumière transporte de l'énergie.
A toute source lumineuse correspond une puissance moyenne (il s’agit d’une moyenne temporelle
relative au caractère sinusoïdal de la source). Cette puissance, transportée par le faisceau lumineux, est
répartie : à une ampoule de 100 W par exemple rayonnant dans toutes les directions, est associée une
répartition de sa puissance sur des sphères centrées sur l’ampoule et de rayon de plus en plus grand. On
retrouve la puissance d’un faisceau parallèle sur toute section droite du faisceau :
-1-
1
Ch. O1 : Sources et intensité lumineuses
P et I identiques
S
P identique
I décroissante
détecteur de surface S
Faisceau parallèle
Faisceau sphérique
Dans le premier cas, la puissance totale restant conservée, la puissance moyenne par unité de surface
diminue au fur et à mesure qu’on s’éloigne de la source (l’onde lumineuse est sphérique). Dans le
second cas, l’étendue du faisceau ne variant pas, la puissance moyenne surfacique est elle-même
partout identique (l’onde lumineuse est plane).
Nous appellerons dorénavant intensité lumineuse I(M) en un point M de l’espace la
puissance moyenne surfacique associée à une onde lumineuse en ce point ( donc
exprimée en W.m-2 ) .
Tous les phénomènes que nous décrirons dans les chapitres suivants apparaîtront toujours « à travers
le filtre » d’un (ou plusieurs) récepteur (écran + oeil, photodétecteur ...) sensible à l’énergie transportée
par l’onde lumineuse qu’il intercepte. Ce détecteur, de surface donnée, va « emmagasiner » et mesurer
cette énergie pendant un temps donné (temps d’acquisition du détecteur, grand par rapport à la période
sinusoïdale de l’onde). Il apparaît clairement que cette mesure est alors proportionnelle à l’intensité
précédemment définie.
Rq. Le récepteur possède une certaine sensibilité (laquelle peut d'ailleurs varier suivant la fréquence
de l'onde : on parle alors de sensibilité spectrale). Notre œil par exemple est un récepteur sensible dans
la gamme du visible, et plus particulièrement sensible au jaune dans cette gamme...Il existe des
récepteurs sensibles dans l'infrarouge ou l'ultraviolet, qui absorbent l'énergie associée à ces fréquences
(les corps phosphorescents réémettent d’ailleurs cette énergie sous forme d'ondes lumineuses dans le
visible...) D'autres récepteurs transformeront l'énergie lumineuse en énergie électrocinétique en
délivrant un courant par exemple.
La « constante » de proportionnalité entre l’énergie mesurée par le détecteur et l’intensité de l’onde
intègre ce facteur de sensibilité propre au détecteur. On définit l’éclairement comme le produit de
l’intensité par le facteur de sensibilité du détecteur : pour une même intensité lumineuse, l’éclairement
varie d’un écran à l’autre suivant sa qualité, mais aussi d’un observateur à l’autre suivant son œil !
Nous emploierons cependant indifféremment dans la suite du cours les termes d'intensité ou
d'éclairement qui ne diffèrent que d’un facteur multiplicatif...
En outre, l’intensité lumineuse est elle-même calculable à partir d’un scalaire appelé amplitude
lumineuse, selon la formule I = <a2> :
L’intensité représente la valeur moyenne temporelle du carré de
l’amplitude : I = <a2>
-2-
2
Ch. O1 : Sources et intensité lumineuses
3
La signification physique de l’amplitude apparaîtra plus clairement après l’étude des ondes
électromagnétiques : elle est en fait directement reliée à la norme du champ électrique associé à l’onde
lumineuse.
Le modèle scalaire de la lumière consiste à « oublier » en quelque sorte son caractère vectoriel
(couple ( E; B )) et lui associer directement le scalaire amplitude afin de calculer l’intensité lumineuse.
une source lumineuse monochromatique, ( c’est-à-dire de fréquence, donc de couleur
a02
« unique » ), est associée l’amplitude : a = a0 cos ωt, et donc l’intensité I = 2 . Dans la suite des
calculs, nous utiliserons beaucoup, sans lui associer de symbole particulier, la notation complexe en
écrivant : a = a0 e jωt. Comme en électricité avec l’expression de la puissance, ne pas faire d’erreur sur
1
le calcul de l’intensité impose de définir celle-ci comme : I = 2 aa* , où a* représente le complexe
conjugué de a...
!
1
En notation complexe l’intensité s’écrit : I = 2 aa*
Pourquoi définir une amplitude et ne pas se contenter de l’intensité à laquelle sont sensibles
les récepteurs ? Ce point fondamental sera exposé au paragraphe 2.2
1.2.
Chemin optique
1.2.1. Propagation de la lumière dans le vide
Comme toute onde électromagnétique, dans le vide illimité, la lumière se propage à la vitesse
c
c = 3 10 8 m.s-1. On peut alors associer à chaque fréquence ν une nouvelle grandeur λ0 = ν , appelée
longueur d'onde dans le vide. Nous reviendrons bien sûr abondamment sur ces notions, mais on
comprend que la longueur d'onde dans le vide caractérise une onde lumineuse aussi bien que sa
fréquence. En termes de longueurs d'onde, le spectre du visible est :
c
λ 0 = ν longueur d’onde dans le vide
λ 0 < 400 nm λ 0 = 500 nm
UV
bleu
λ 0 = 520 nm
λ 0 = 550 nm λ 0 = 630 nm λ 0 > 750 nm
vert
jaune
rouge
IR
Physiquement, la longueur d’onde représente la distance parcourue par la lumière pendant une
période temporelle T, puisque λ = cT. C’est donc en fait une période spatiale tout autant
représentative de l’onde lumineuse monochromatique que sa période temporelle T.
-3-
Ch. O1 : Sources et intensité lumineuses
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Spectre en longueur d’onde des ondes électromagnétiques
1.2.2. Propagation de la lumière dans un milieu linéaire homogène isotrope
Dans un milieu transparent linéaire homogène isotrope, la vitesse de propagation de la lumière
c
devient v = n où n est un nombre sans dimensions ( presque toujours supérieur à 1 ), appelé indice
optique du milieu. D’autre part, la vitesse de propagation dépend de la fréquence de l’onde : v(ν), ou,
ce qui revient au même, de sa longueur d’onde dans le vide λ0. C’est donc aussi le cas de l’indice du
milieu : n(λ0).
c
n(λ 0) = v(λ 0)
La dépendance de l’indice vis à vis de la longueur d’onde dans le vide de la lumière qui s’y propage
indique le caractère dispersif du milieu : une lumière polychromatique y voit ses différentes
composantes monochromatiques se propager à des vitesses différentes. S’il y a réfraction de l’onde
lumineuse à l’entrée dans le milieu, l’angle de réfraction, d’après le lois de Descartes, dépend de n
donc de λ0. Les angles de réfraction sont différents pour les « couleurs » composant la lumière
polychromatique qui est donc « dispersée », et par conséquent analysée vis à vis de sa composition
chromatique. C’est tout l’intérêt d’un dispositif tel que le prisme...
Parmi plusieurs formules approchées donnant la dépendance de n vis à vis de λ0, citons la formule
de Cauchy, de la forme :
B
n =A + λ 0 2 formule de Cauchy
où A et B sont des constantes caractéristiques du milieu.
Notons enfin que, numériquement, les variations de n restent faibles. Par exemple, l’indice d’un
verre (crown) pourra varier entre 1,511 et 1,528 et dans la bande du visible, soit une variation relative
de l’ordre de 1%....
On peut donner quelques ordres de grandeur d’indices pour une longueur d’onde située au milieu du
visible:
air
n≈1
pour un gaz dilué, n-1 est proportionnel au rapport de P sur T s
eau
n = 1,33
verres n varie de 1, 5 (verres peu denses ou crowns) à 1,8 ( verres denses ou flints)
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v
Dans un milieu différent du vide, la longueur d’onde, définie par λ = ν , est reliée à la longueur
d’onde λ0 dans le vide par la relation :
λ0
λ = n(λ 0) longueur d’onde dans un milieu d’indice n : il s’agit de la
période spatiale de l’onde dans le milieu d’indice n
Rq. Une lumière monochromatique possède une caractéristique propre qui est sa longueur d’onde
dans le vide (sa fréquence, en fait), mais autant de longueurs d’onde que de milieux de propagation
considérés, ces longueurs d’onde étant caractéristiques du couple onde monochromatique - milieu.
1.2.3. Terme de phase : chemin optique
Considérons une source S, émettant au point O de l’espace, pris comme origine, une onde lumineuse
d’amplitude a(O) = a0 e jωt. En l’absence de toute absorption par le milieu dans lequel l’onde se propage
pour aller de O en un point M de l’espace susceptible d’être atteint, on pourrait penser que l’amplitude
reçue en M est identique à celle émise en O. Cependant, les variations temporelles de l’onde lumineuse
ne peuvent être instantanément transmises en M : l’amplitude en M doit présenter un retard de phase
par rapport à l’amplitude en O, retard dû au nécessaire temps de propagation entre O et M. Ce retard
dépend lui-même de la vitesse de l’onde dans le milieu considéré et de la distance à parcourir entre O
et M.
Par conséquent l’amplitude reçue en M sera de la forme :
On appelle chemin optique [OM] le produit de la distance OM par l’indice n du milieu.
Plus généralement encore, pour un milieu éventuellement inhomogène, où l’indice n(M) varie
suivant le point M, le chemin optique associé à une courbe quelconque C reliant deux points A et B est
défini par :
∫
L(C) = C n(M) dl
Interprétation physique simple du chemin optique :
Le chemin optique serait la distance parcourue dans le vide par l’onde pendant le temps qu’elle met
à parcourir le chemin réel dans le milieu considéré.
Retenons ce résultat très important pour la suite du cours :
Si on note a(O) = a0 e jωt l’amplitude d’une onde lumineuse en O, l’amplitude correspondante
2π
2π
en M s’écrit : a(M) = a0 e jω(t - φ(Μ) avec φ(M) = λ 0 [OM] = λ 0 n OM.
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Ch. O1 : Sources et intensité lumineuses
1.3.
6
Théorème de Malus
1.3.1. Expression
Définissons tout d’abord les surfaces d’onde : ce sont les lieux des points de l’espace distants d’un
même chemin optique d’un point donné.
Si à ce point se trouve une source lumineuse émettant une amplitude donnée, tous les points de la surface
d’onde seront donc caractérisés par une même valeur du déphasage (on appelle parfois les surfaces d’onde
surfaces de phase ou surfaces équiphase...).
Nous énoncerons le théorème de Malus sans démonstration :
Les surfaces d’onde sont orthogonales aux rayons lumineux.
1.3.2. Utilisation dans la détermination des chemins optiques
Le théorème de Malus est quasiment intuitif dans le cas de rayons lumineux émis par un point
source dans un milieu homogène :
Tous les points situés sur une même sphère de centre O sont caractérisés par le même chemin
optique...
Une lentille mince donnant une image ponctuelle A’ d’un point source A transforme le faisceau
lumineux divergent issu de A en un faisceau convergent en A’ : en suivant les surfaces d’onde de A à
A’, il apparaît qu’à tous les rayons joignant A à A’ est associée une même valeur du chemin optique.
Ce fait peut paraître paradoxal sur un dessin qui « oublie » le trajet à l’intérieur de la lentille qui
permet cette égalité...
Enfin, dans le cas d’une source placée au foyer objet d’une lentille mince convergente, le faisceau
devient parallèle après la lentille : les surfaces d’onde sont donc
-6-
Ch. O1 : Sources et intensité lumineuses
2.
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MECANISMES D’EMISSION DE LA LUMIERE COHERENCE
Comme nous l’avons vu, les périodes mises en jeu par les ondes lumineuses sont beaucoup plus
faibles (environ 10-14 s) que les temps de réponse des détecteurs usuels (œil, photodiodes …) : nous sommes
donc obligés de raisonner sur les moyennes temporelles des puissances afin de déterminer les intensités
lumineuses perçues.
Mais ce n’est pas la seule chose qui différencie les phénomènes observés pour les ondes lumineuses et
ceux que nous pourrions observer avec une cuve à ondes :
Dans ce cas, non seulement nous pouvons « suivre » la propagation des ondes et ainsi distinguer les
zones de maximas et de minimas d’amplitude (inutile ici, de considérer les moyennes temporelles des
signaux), mais de plus, les vibreurs venant frapper la surface de l’eau le font régulièrement et
« indéfiniment » (du moins le font-ils sur le temps de l’expérience).
Aussi est-il facile, dans une cuve à ondes, de créer un phénomène d’interférences entre deux ondes
issues de deux sources de vibrations mécaniques.
Le phénomène d’émission de lumière, comme nous allons le voir, n’est pas continu. C’est ce qui fait,
outre les périodes très courtes de leurs phénomènes vibratoires, toute la difficulté de l’obtention des
interférences lumineuses.
2.1.
Sources lumineuses
♦ Les mécanismes d’émission de la lumière sont essentiellement microscopiques : par un apport
d’énergie extérieure, des atomes sont excités, c’est-à-dire acquièrent un niveau d’énergie supérieur à
leur niveau d’énergie « au repos ». Ils reviennent à ce niveau plus stable en restituant l’énergie par
émission d’une onde lumineuse.
♦ On peut distinguer des sources à spectres de raies et des sources à spectre continu :
On trouve les premières dans les lampes à décharge par exemple : une ampoule contient une
vapeur d’un corps pur (Na, Hg...) à faible pression. On soumet cette ampoule à des décharges
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Ch. O1 : Sources et intensité lumineuses 8
électriques : la lumière émise correspond à des différences entre des niveaux discrets d’énergie
caractéristiques du corps considéré. C’est une lumière polychromatique, composée de plusieurs
radiations quasi-monochromatiques. Un dispositif tel que le spectroscope à prisme permet d’obtenir
des spectres de raies lumineuses sur fond sombre.
Le soleil est un exemple de source à spectre continu, basé sur le rayonnement du corps noir : un
corps porté à une température T émet des ondes lumineuses contenant toutes les longueurs d’onde
situées dans une certaine bande dépendant de T.
Dans les deux exemples de sources évoqués, l’émission de lumière est influencée par les collisions
entre atomes et présente un caractère temporel très aléatoire : l’émission est dite spontanée.
♦ Dans les lasers (light amplification by stimulated emission of radiation), l’émission est induite
(ou stimulée), c’est-à-dire provoquée par une onde incidente qui produit une nouvelle émission de
lumière correspondant à une désexcitation synchronisée des atomes. Cette lumière est en outre
amplifiée dans une cavité résonante.
♦ Le caractère aléatoire et discontinu de l’émission spontanée a deux conséquences liées :
1) l’émission d’une lumière de fréquence donnée ne peut être représentée par une fonction
sinusoïdale continue mais par des trains d’onde, dont l’espacement et la durée correspondent aux
phases d’excitation et désexcitation des atomes émetteurs et sont du même ordre de grandeur τ ≈ 10-11
s pour une lampe spectrale classique. On peut tout de suite remarquer que τ est grand devant la période
(≈10-14s) des ondes lumineuses et petit devant le temps de réponse des détecteurs (lui-même faible
devant le temps d’intégration sur lequel s’effectue la moyenne de a2 qui définit l’éclairement (ou
intensité lumineuse))
amplitude
lumineuse
!
t
2) Cette émission par trains d’onde peut être interprétée en termes de non monochromaticité
de la source. On associe à τ un intervalle Δν autour de la fréquence ν de la lumière émise. On parle de
la largeur de raie Δν de la raie de fréquence ν. τ et Δν sont liés par une relation de la forme :
τ. Δν ≈ 1
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Ch. O1 : Sources et intensité lumineuses
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La mécanique quantique prévoit que cette largeur naturelle de raie est reliée à une connaissance
non parfaite mais probabiliste des niveaux d’énergie (principe d’incertitude d’Heisenberg).
Enfin, de nombreux effets aboutissent à un élargissement des raies spectrales. Parmi eux, citons
l’effet Doppler : la lumière est émise par des atomes en mouvement, ce qui provoque des variations
de la fréquence. Ces variations seront d’autant plus sensibles que la vitesse des atomes, donc leur
température est élevée : dans les lampes dites haute pression, les raies spectrales d’un même corps sont
plus larges que dans les lampes basse pression de température moins élevée...
Δν
Typiquement, dans une lampe spectrale le terme ν est de l’ordre de 10-7 . Pour un laser ( He-Ne
Δν
par exemple ) ν ≈ 10 - 10.
Nous avons également vu que la transformée de Fourier d’une sinusoïde de fréquence ν0 et de durée
limitée τ, était une fonction « sinc », qui du point de vue de l’interprétation spectrale, correspondait à
une raie centrée autour de ν0 et de largeur Δν=1/τ.
2.2.
Condition d’obtention d’interférences lumineuses
Comme nous allons le voir, les conditions sont strictes : il faut en effet, afin d’obtenir une figure
d’interférence avec 2 ondes lumineuses, que :
- les deux sources lumineuses soient mutuellement cohérentes.
- les deux sources soient d’extension spectrale limitée.
- les deux sources soient d’extension spatiale limitée.
2.2.1. Cas d’une ou de plusieurs sources mutuellement incohérentes
Nous admettons ici un principe de superposition pour les différentes sources : l’amplitude
résultante est la somme des amplitudes de toutes les sources.
Ce principe est facilement admissible si l’on garde à l’esprit l’idée que l’amplitude représente, à un
facteur multiplicatif près, le module du champ électrique de l’onde : on applique en fait le principe de
superposition au champ électrique lui-même (on confond ici module du champ et vecteur champ, et
donc addition des modules et addition vectorielle. Cette approximation sera discutée lors de l’étude
des ondes électromagnétiques).
Cependant pour modéliser cette somme, nous ne devons pas oublier le mécanisme d’émission par
trains d’onde. Les amplitudes composantes ont donc l’allure suivante :
-9-
Ch. O1 : Sources et intensité lumineuses
t
10
t'
Nous prenons ici le cas d’une source de fréquence centrale f. A un instant t donné, on doit donc
sommer un certain nombre d’amplitudes de même pulsation, de même module, mais déphasées
aléatoirement, le déphasage dépendant d’ailleurs de l’instant considéré :
N
a=
!
a0 exp(jωt) exp[jφi]
i =1
L’intensité correspondante, obtenue en effectuant une moyenne temporelle sur une période de
l’onde lumineuse, est donnée par :
N
N
1
1
1
I = 2 aa* = 2 a02 ! exp[jφi]. ! exp[- jφj] = 2 Na02 + a02
i =1
j= 1
N
!
cos[φi - φj]
i, j< i
Le terme somme un nombre immense de cosinus de nombres totalement aléatoires : la fonction
cosinus ayant une valeur moyenne nulle, on obtient évidemment 0.
Nous arrivons donc au résultat remarquable suivant : I = NI02, c’est-à-dire à une simple
superposition des intensités...
Rq1. Nous avons effectué une moyenne temporelle sur un temps de l’ordre de la période de l’onde
pour calculer l’intensité. N’oublions pas qu’un détecteur mesurera une énergie en effectuant, lui, une
moyenne sur un temps beaucoup plus grand, ce qui ne changera évidemment rien au résultat précédent
...
Rq2. Dans le cas de deux sources mutuellement incohérentes, la moyenne temporelle sur une
période donnerait comme résultat :
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1
I = 2 aa* = a02 + a02 cos[φi - φj]
Mais, la différence φi - φj variant aléatoirement au cours du temps (les trains d’onde des 2 sources
sont émis indépendamment les uns des autres avec des déphasages aléatoires), si on effectue une moyenne
temporelle sur une durée beaucoup plus longue (temps de réponse du détecteur), la somme des cos[φi - φj]
ferait à nouveau 0.
Pour 2 sources mutuellement cohérentes, on obtient donc également I = 2I0.
2.2.2. Cas de 2 sources de fréquences différentes
Nous envisageons ici la contribution à l’amplitude totale de 2 sources microscopiques composantes
d’amplitudes a1 = a01 cosω1t et a2 = a02 cosω2t en gardant des notations réelles. L’amplitude résultante
est a = a1 + a2 et l’intensité associée :
I = < a2 > = a201 < cos2ω1t > + a202 < cos2ω2t > + 2a01a02 < cosω1t cosω2t >
1
1
I = 2 a201 + 2 a202 + a01a02 < (cos [ω1 + ω2]t + cos [ω1 - ω2]t) > = I1 + I2
Une fois encore, le dernier terme étant nul, l’intensité résultante se réduit à la somme des intensités.
Ce résultat se généralise évidemment à un grand nombre d’amplitudes et plusieurs pulsations
différentes...
2.3.
Sources ponctuelles mutuellement cohérentes (corrélées)
2.3.1. Cas de sources ponctuelles corrélées
Imaginons N sources qui ne soient pas indépendantes les unes des autres, mais dérivées d’une
source primitive : pensons par exemple à un système optique qui donnerait d’une même source S, N
images S1, ...SN. Ces sources sont alors en quelque sorte « jumelles ». Elles sont mutuellement
cohérentes (on dit encore qu’elles sont corrélées ).
Chaque fois que cette source émet un train d’onde, les autres émettent le même train d’onde
au même instant : tous ces trains d’onde sont donc parfaitement en phase à l’émission.
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Ch. O1 : Sources et intensité lumineuses
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Source SN
Sources corrélées
trains d'onde
émis en phase
M
source S1
trains d'onde reçus
déphasés
trains d'onde
source
émis en phase
microscopique
interne
source S2
A la réception en M, ils sont en revanche déphasés, mais d’une valeur bien déterminée qui ne
dépend que de la position de M vis à vis des différentes sources. Ces déphasages sont en outre les
mêmes pour toutes les sources microscopiques situées « aux mêmes points Si ».
Il en résulte que dans le calcul de l’intensité interviendront des termes supplémentaires à la
somme des intensités de chaque source, termes qui ne s’annuleront plus car non aléatoires : on
dit que les sources corrélées interférent en M.
Nous n’effectuerons pas ici un calcul complet qui sera longuement développé dans le cas de 2
sources au chapitre suivant.
2.3.2. Cas de sources ponctuelles polychromatiques
N’oublions pas enfin que nous avons supposé les sources monochromatiques. Un calcul précédent
nous a montré qu’il ne pouvait pas y avoir interférences entre deux sources de pulsations différentes :
l’intensité se réduit à la somme des intensités.
Par conséquent, si les sources sont polychromatiques, l’intensité totale donnée par les différentes
longueurs d’onde composantes est la somme des intensités dues à chaque longueur d’onde, chacune de
ces intensités comportant, elle, un terme d’interférences.
2.3.3. Cas de sources non ponctuelles monochromatiques
Une source non ponctuelle peut-être considérée comme constituée d’une infinité de sources
ponctuelles microscopiques, indépendantes les unes des autres. Un calcul précédent nous a montré
qu’il ne pouvait pas y avoir interférences entre deux sources indépendantes : l’intensité se réduit à la
somme des intensités.
Par conséquent, si les sources ont une certaine étendue spatiale, l’intensité totale donnée par les
différentes sources composantes est la somme des intensités dues à chacune d’entre elles, chacune de
ces intensités comportant, elle, un terme d’interférences.
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Ch. O1 : Sources et intensité lumineuses
2.4.
13
Critère de cohérence temporelle
D’après le paragraphe précédent, des sources sont soit indépendantes, soit parfaitement corrélées. Il
faut nuancer cette dernière affirmation.
2.4.1. Expérience
Rappelons que 2 sources sont mutuellement cohérentes si elles sont issues d’une même source mère
(S), ponctuelle monochromatique. Pour que l’éclairement dépende des points (M) de l’espace, il est
nécessaire que les ondes issues de ces deux sources suivent des trajets différents entre la source (S) et
le point (M).
Les dispositifs interférométriques peuvent être classés en 2 catégories :
- Les dispositifs à division du front d’onde comme les miroirs de Fresnel ou les trous
d’Young
- Les dispositifs à division d’amplitude comme l’interféromètre de Michelson (ou la
lame séparatrice donne, à partir d’une onde incidente d’amplitude A0 , naissance à une onde réfléchie
(d’amplitude rA0) et à une onde transmise (d’amplitude tA0).
M
S
e
Dans ce dernier dispositif (qui fera l’objet d’un TP cours)
on peut obtenir une configuration « lame d’air »
équivalente à la figure ci-contre, où S1 et S2 sont les
images géométriques de S par les systèmes optiques
présents sur les deux trajets possibles dans
l’interféromètre.
Lorsqu’on augmente l’épaisseur e de la lame d’air, les
franges d’interférence se brouillent au delà d’une valeur
critique.
S1
S2
2.4.2. Interprétation – Longueur de cohérence
Lorsque la différence de marche S2M-S1M devient grande devant la longueur l* des trains d’onde,
deux trains se recouvrant en M ne sont pas des trains « jumeaux ».
L’écart temporel d’émission entre deux trains d’onde étant aléatoire, les trains d’onde se recouvrant
alors en M sont décalés aléatoirement.
l*=cτ est de l’ordre de quelques mm pour une lampe spectrale usuelle, quelques centaines de nm
pour une lampe blanche, quelques centimètres (voir plus) pour un laser.
Plus une source est monochromatique, plus sa longueur de cohérence temporelle est grande : on
dira aussi qu’elle est plus cohérente.
L’expérience précédente a permis de mettre en évidence le défaut de cohérence temporelle de la
source.
Toute source, même dite monochromatiques, est en fait polychromatique et comporte toutes les
longueurs d’onde comprises dans un intervalle Δλ autour d'une longueur d'onde λ0, avec un profil
donné ( Gaussien par exemple ). On doit donc sommer toutes les intensités correspondant à ces
différentes longueurs d’onde. Ces intensités sont voisines, mais légèrement différentes de celle
associée à la longueur d’onde principale λ0.
- 13 -
Ch. O1 : Sources et intensité lumineuses
14
Une fois encore nous n’effectuerons pas ici un calcul complet. Admettons simplement pour
l’instant que le calcul conduit à introduire un terme correctif dans la formule obtenue pour l’intensité
en considérant les sources comme purement monochromatiques. Ce terme correctif peut toutefois
devenir important et même supprimer le terme d’interférences si le point M est très éloigné des
sources : on retrouve l’idée précédente de sources alors décorrélées.
2.5.
Incohérence spatiale des sources étendues
Nous avons supposé jusqu’à présent les sources ponctuelles. Si cette condition n’est pas respectée,
on peut décomposer des sources étendues en sources ponctuelles, mais celles-ci ne sont plus corrélées
entre elles : on obtient en fait plusieurs systèmes indépendants de sources corrélées :
S1, S2...SN
S’1, S’2...S’N
S’’1, S’’2...S’’N
etc...
Il y a encore perte de cohérence du système, mais cette fois ci d’un point de vue spatial. En effet,
nous devrons ajouter les intensités dues à chaque système de sources. Ces intensités seront à priori
différentes car les chemins SiM, S’iM, S’’iM... sont eux-mêmes différents. Si les sources sont peu
étendues, les différentes intensités restent voisines, et là encore, le calcul introduira un terme correctif
par rapport à un système de sources ponctuelles.
Cependant, comme dans le cas de la cohérence temporelle, mais beaucoup plus rapidement, le
calcul entraînera la suppression du terme d’interférences : c’est un facteur limitatif très contraignant
car l’utilisation de sources très peu étendues limite la luminosité des phénomènes observés;
Source !N
Sources corrélées
étendues
M
source !1
sources
ponctuelles
composantes
source !2
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Ch. O1 : Sources et intensité lumineuses
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Toutefois, dans quelques cas, la géométrie des systèmes envisagés permettra d’étendre les sources
sans perdre la « lisibilité » des phénomènes (comme nous le verrons dans le cas des fentes d’Young
éclairées par une fente source qui lui est parallèle).
Dans d’autres cas enfin, l’emploi de sources étendues limitera l’observation des phénomènes à des
régions bien précises de l’espace : on dira alors que les phénomènes d’interférences sont localisés
(comme nous le verrons dans le cas de l’interféromètre de Michelson).
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