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AV1 AT R069/E01
E
Jacques RIGAUD
M. Jacques Rigaud est né en 1924 en Gironde.
ENREGISTREMENT RÉALISÉ LE 12/06/2013 PAR MONSIEUR PANTÉLÉIMON
MAVRIOGIANNIS.
STATUT DU TÉMOIN
Cheminot pendant la Deuxième
Guerre mondiale
FONCTIONS À LA SNCF
Facteur, Facteur mixte, Facteur chef,
Contrôleur adjoint, Contrôleur,
Contrôleur principal, Sous-chef de
gare principal, Chef de gare, Chef de
gare principal, Chef de gare principal
hors-classe, Chef de gare principal
hors-classe honoraire
DATE D’ENTRÉE ET
DE DEPART DE LA SNCF
1940-1983
AXE DE L’ÉTUDE
Vie et travail au quotidien pendant la
Deuxième Guerre mondiale : mémoire
et récits de cheminots
SUJET PRINCIPAL
Parcours d’un jeune cheminot
résistant dans la Vienne
THÈMES ABORDÉS
Présentation et carrière à la SNCF
Vie quotidienne et professionnelle
pendant l’Occupation
Résistance et présence allemande
Libération et après-guerre
L’épuration et la Résistance
Motivations pour répondre à l’Appel à
témoins et la transmission de la
mémoire
OUTIL DE CONSULTATION
CD audio
MATÉRIEL D’ENREGISTREMENT
TASCAM DR-40
DURÉE DE L’ENREGISTREMENT
2 heures 13 minutes 10 secondes
DURÉE APRÈS TRAITEMENT DU SON
2 heures 05 minutes 53 secondes
Fiche chronothématique réalisée par Marie Burnel en décembre 2014.
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Communication
Le témoin autorise, à partir du 12 juin 2013, la copie, la consultation, l’exploitation pour des travaux
à caractère historique ou scientifique, la diffusion sonore et la publication de la transcription et de
l’enregistrement avec mention de son nom, par contrat passé avec l’AHICF à laquelle toute
demande d’utilisation à d’autres fins de l’enregistrement et de la présente analyse doit être
adressée.
Documents fournis par le témoin et consultable auprès du SARDO
Documents de carrière :
Certificat de travail SNCF, Admission au Comité Régional de Direction du Sud-Ouest, Nomination
Chef de gare hors classe honoraire.
Documents en lien avec la Résistance :
Carte d’identité Résistance Fer, Certificats d’appartenance aux FFI, Citation à l’Ordre du Régiment,
Ecrits personnels et ouvrages sur la Résistance dans la Vienne :
- Mémoires : Souvenirs personnels du témoin.
- Liste de cheminots résistants.
- Les Chemins de la Liberté autour de Civray.
- La Guerre à Saint-Saviol.
- Extrait du Livre Histoire de Civray de Jacques Bernier sur la Bataille de Civray.
- Hebdo de l’Association Amicale des Anciens Résistants et Maquisards du Civraisien.
- Jacques Rigaud : Guerre – Occupation – Résistance dans le Civraisien et ses environs (1940–
1944).
Compte rendu analytique
I - Présentation et carrière à la SNCF
(Plage 02) Le père de Jacques Rigaud était cheminot au service équipement [du PO, la Compagnie
du chemin de fer de Paris à Orléans], il y était entré après la Première Guerre Mondiale, avec
comme première affectation le secteur de Livourne [Gironde], Vayres [Gironde] puis il fut muté à sa
demande dans la région de Civray [Vienne]. Son père décéda d’une maladie contractée au travail
en 1938 [à l’âge de 54 ans]. (1min :47s)
(Plage 03) Jacques Rigaud entra à la SNCF en février 1940 [à l’âge de 17 ans]. Il fut affecté à la
gare de Civray [Vienne] pour remplacer les cheminots mobilisés pendant la guerre. Il passa ensuite
des examens, et à 18 ans il devint agent de circulation et fut affecté à Mignaloux-Nouaillé [Vienne].
Après la guerre, il fut intérimaire puis « technicien avec le chef d’agence » à Poitiers [Vienne] où il
s’occupait de « l’instruction professionnelle et de l’organisation des gares » du secteur. Il passa
ensuite les concours et fut affecté à Paris, Place Valhubert, au Poste de Commandement Régional
du secteur Sud-Ouest, puis il travailla à l’Inspection des gares « dans le domaine technique
ferroviaire ». Après avoir passé le concours d’inspecteur, il fut affecté à Rungis [Val-de-Marne]
« pour l’organisation du chantier de Rungis […], le marché d’intérêt national de Rungis qui avait des
installations ferroviaires importantes. J’étais chargé de l’organisation pendant les travaux. » Ensuite
il y fut chef de gare adjoint [1967], puis chef de gare [1969], ensuite adjoint au chef d’établissement,
puis chef d’établissement à Rungis [Val-de-Marne], où il resta jusqu’à sa retraite en 1983. Lorsque
Jacques Rigaud entra à la SNCF en 1940 il fut recruté avec le statut d’élève auxiliaire. Mais il faisait
le même travail que les agents mobilisés qu’il remplaçait. Tout au long de sa carrière il passa 11
examens et concours à la SNCF. (7min :01s)
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(Plage 04) Avant d’entrer à la SNCF [en 1940], Jacques Rigaud était scolarisé en 3e, mais suite au
décès de son père il dut travailler. Sa mère était déjà âgée, elle touchait une pension et travaillait.
Jacques Rigaud se dit socialiste depuis longtemps, mais ses parents n’étaient pas passionnés de
politique, ils étaient « très croyants, très religieux ». Son frère fut mobilisé, mais il avait une « santé
précaire », et fut affecté à l’usine d’armement de Châtellerault [Vienne]. Son beau-frère était
combattant, il fut envoyé au STO en Allemagne et il profita d’une permission pour rejoindre la
Résistance en juin 1944, dans le Maquis Bayard, Secteur D2 dans la région de Civray [Vienne].
(5min :05s)
II - Vie quotidienne et professionnelle pendant l’Occupation
(Plage 05) Jacques Rigaud se souvient de la « drôle de guerre » [3 septembre 1939, 10 mai 1940]
comme d’une période où il vivait difficilement avec sa mère grâce à la pension versée par la SNCF
depuis le décès de son père. Le jour de l’armistice il écoutait les informations à la radio chez son
frère. Il se souvient aussi avoir entendu une partie de l’appel [du 18 juin 1940] du Général de
Gaulle. Les premiers temps de l’occupation furent « assez décontractés », et peu perceptible en
dehors du couvre-feu et des défilés de troupes militaires. Mais progressivement les restrictions se
multiplièrent et ils les vécurent de plus en plus mal. Il n’y avait plus d’essence. Ils subsistaient grâce
aux tickets de rationnement et à des échanges avec les fermes de la région. Il pense n’avoir obtenu
un laissez-passer allemand qu’en 1943, mais sans voiture, ni pneus pour son vélo il ne pouvait se
déplacer. Pendant une partie de la guerre passait un wagon économat à Civray [Vienne]. Ils se
chauffaient au bois et ils avaient un potager privé. (6min :05s)
(Plage 06) (7min :32s) « Il y avait peu de fêtes, les jeunes on n’avait aucune distraction »,
seulement un cinéma qui passait « des films censurés ». Jacques Rigaud raconte qu’ils
organisaient avec les jeunes de son village des « sorties clandestines » dans les bois ou dans des
fermes isolées dans les environs de Civray [Vienne] ou Ruffec [Charente]. Ils devaient faire
attention à ne pas se faire prendre. Ils ont été dénoncés et on leur a interdit de recommencer. À
Mignaloux-Nouaillé [Vienne] [le témoin y travaillait en 1943], les jeunes se retrouvaient tous les
week-ends pour faire la fête, il y avait une très bonne ambiance. Il vivait alors dans la gare, et il lui
arrivait de devoir travailler jusqu’à 4 h du matin, sans manger, pendant l’hiver 1943-1944, qui fut
très rude. Il se souvient qu’il faisait tellement froid que les aiguillages gelaient. Dans ces cas-là, il ne
recevait aucune compensation de la SNCF, ni aucune paie pour les heures supplémentaires.
(7min :32s)
(Plage 07) Les conditions de travail à la SNCF pendant la guerre étaient difficiles, Jacques Rigaud
se
souvient
en
1943
avoir
fait
des
journées
de
douze
heures,
de
7 h à 19 h, et de 19 h à 7 h. Il travaillait six jours et avait droit à un jour de repos, où il travaillait sept
nuits puis avait droit à deux jours de repos. Il n’avait pas de congés pendant l’été. Après la
libération la première amélioration fut le passage des horaires de nuit de douze à huit heures. Il
s’est marié en 1945, sa femme était comptable dans un garage. Après la Libération, la SNCF lui a
offert un bon d’achat pour un vélo neuf, car il habitait loin de son lieu de travail. Il est allé le
chercher en train à l’économat de Bordeaux [Gironde]. Il habitait à dix kilomètres de son poste de
travail et il faisait 40 minutes de vélo pour se rendre à son travail. Le témoin parle des conditions de
travail et des syndicats à Rungis [Val-de-Marne] dans les années 1960-1970. Il évoque ensuite des
conditions de vie à la gare de Mignaloux-Nouaillé [Vienne] pendant la guerre, où son chef de gare
se livrait à des activités de braconnage. (4min :37s)
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(Plage 08) L’ambiance de travail au sein de la SNCF est décrite par Jacques Rigaud comme
« formidable », tout au long de sa carrière et même pendant la guerre. Le témoin raconte par
exemple qu’il était de service la nuit de son mariage en août 1945 et que se sont ses amis qui l’ont
remplacé. Ils parlaient de la guerre entre cheminots mais avec méfiance, sans se livrer. Le témoin
évoque son entrée dans la Résistance, et sa radiation des cadres de la SNCF « pour abandon de
poste ». À la Libération il a touché un rappel de son salaire pour les mois pendant lesquels il était
engagé dans la Résistance, et les mentions de radiations de poste furent rayées de son dossier. « Il
y avait beaucoup de dénonciations », et les gens étaient très méfiants, « tout le monde n’était pas
résistant ». Il n’a pas connu de collaborateurs personnellement au sein de la SNCF, il pense qu’on
les trouvait « plutôt dans les cadres, cadres supérieurs ». Il évoque de la présence de
collaborateurs et de résistants en gare de Tours pendant la guerre. (5min :33s)
(Plage 09) Après la Libération, les communistes ont souvent subi des « brimades » au sein de la
SNCF, Jacques Rigaud raconte qu’il a lui-même été changé de poste lorsqu’il était au Poste de
Commandement de Paris-Sud-Ouest parce qu’on le considérait comme syndicaliste CGT, et
comme un homme de gauche et qu’on ne voulait pas le laisser dans un service où il pouvait avoir
accès à « des secrets militaires », c’était « autour de [19]60 ». Il fut affecté sans rétrogradation au
service de l’inspection des gares. Il le vécut comme « une vexation ». Il fut syndiqué à la CGT
pendant quelques années après la guerre. Les syndicats cheminots se sont développés après la
Libération. Lui a mûri politiquement lors de son passage dans la Résistance, qui a fait de lui un
homme de gauche. (7min :33s)
(Plage 10) Pendant la guerre, Jacques Rigaud eu « des difficultés à survivre ». Et notamment à se
nourrir, car il n’arrivait pas à se faire prendre en pension. Dans celle qu’il trouva finalement, il côtoya
des chasseurs alpins qui menaient des actions de résistance. Il ne recevait aucune aide au
logement de la SNCF, il se souvient qu’à l’époque les jeunes dormaient dans les gares, par
exemple dans le salon des Premières Classes à Mignaloux-Nouaillé [Vienne], où il se lavait à la
pompe à eau. Les cheminots qui habitaient trop loin pour rentrer chez eux le soir se débrouillaient,
certains étaient logés dans les logements de passage à niveau vacants. À l’époque le personnel de
gare devait effectuer une permanence, et donc vivre près de la gare. (4min :43s)
III - Résistance et présence allemande
(Plage 11) Jacques Rigaud a participé à des sabotages, mais il les a aussi observés. Il a constaté
qu’on avait fait sauter des voies à plusieurs reprises, notamment à Épanvilliers [Vienne], sans
savoir par qui ces actions étaient menées. Il a parfois été interrogé par les Allemands ou les
gendarmes, sans être inquiété. Après le Débarquement [du 6 juin 1944], Jacques Rigaud a luimême participé à des sabotages, notamment les aiguillages de Saint-Saviol [Vienne]. Il était
éclaireur et partait à pied avec cinq à six résistants et son « barda sur le dos », la mitraillette et les
explosifs à 30 kilomètres de distance. Il se souvient d’un sabotage où les Allemands étaient
proches. Ils partirent de leur base près de Charroux [Vienne] dans les bois en fin d’après-midi, firent
sauter les voies dans la nuit et se cachèrent la journée suivante pour faire le trajet du retour vers
leur base la nuit suivante. Souvent sur le retour ils étaient hébergés par des sympathisants dans les
fermes alentours. (8min :07s)
(Plage 12) Le témoin évoque ensuite une mission interalliée et les « receveuses de la poste ».
Certaines de ces femmes écoutaient les communications qui passaient par leur standard et les
rapportaient à la Résistance. Il a lui-même été sauvé par une receveuse qui l’a prévenu d’un
barrage allemand. (6min :26s)
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(Plage 13) Jacques Rigaud avait des contacts avec les cheminots qui lui fournissaient des
informations sur les trains programmés. Mais les résistants choisissaient les trains à saboter sans
savoir ce qu’il y avait précisément à l’intérieur. Quand des trains stationnaient à Saint-Saviol
[Vienne], il se déplaçait lui-même pour observer l’importance des convois et transmettre les
informations recueillies à la Résistance. Selon la nature du convoi l’État-Major décidait d’une
éventuelle intervention. La liaison avec Londres [Royaume-Uni] se faisait par radio, et si le convoi
était très important ils pouvaient demander un renfort aérien. Il y avait beaucoup de convois de
matériel qui transitaient vers le front de la Normandie. Il dit n’avoir jamais vu passer de trains de
prisonniers. Le camp du Vigeant [Vienne] abritait des prisonniers politiques dont certains convois
sont passés par Saint-Saviol [Vienne], mais il n’était pas possible de les approcher, ils étaient
gardés par des Allemands ou par la milice, et personne ne savait qui était à l’intérieur. (9min :50s)
(Plage 14) Jacques Rigaud indique qu’à Saint-Saviol [Vienne] « à certaines périodes de la journée il
y avait un chef de gare allemand », « mais il ne faisait pas grand-chose, y a que si il y avait des
convois importants qui stationnaient ou des trucs particuliers ». La présence allemande était surtout
visible par les troupes qui gardaient les installations de la gare. La présence de cheminots
allemands était rare et réservée à certains trains. Cette présence allemande était notable à SaintSaviol du fait de l’importance de la gare disposant de « voies de stationnement », mais ce n’était
pas le cas de toutes les gares du réseau. Lorsque la voie de chemin de fer était coupée, les convois
de véhicules rejoignaient la route nationale 10 [Bordeaux-Paris], c’est pourquoi le maquis D2Bayard s’était installé tout autour. Le témoin raconte l’attaque par le maquis d’un convoi allemand
qui après la destruction de la gare de Saint-Saviol [par mitraillage allié le 26 aout 1944] cherchait à
rejoindre cette route nationale. (5min :46s)
(Plage 15) Lorsque Jacques Rigaud a intégré la SNCF [en 1940] comme élève au bureau il n’a pas
reçu de formation. Pendant l’occupation il a été formé sur le tas, il « faisait tout, même la
comptabilité ». Les Allemands souhaitaient seulement que le travail soit fait. Les voies autour de
Saint-Saviol [Vienne] étaient gardées par des civils sur les secteurs importants, que les Allemands
avaient contraints la population à défricher. (3min :35s)
IV - Libération et après-guerre
(Plage 16) Après le Débarquement [du 6 juin 1944, et la libération] des prisonniers allemands furent
affectés au nettoyage et à la reconstruction des routes et des voies ferrées. Ils étaient gardés par
des militaires français dans des casernes, notamment à Poitiers [Vienne]. La priorité était la
reconstruction du réseau des transports. Jacques Rigaud avait signé un engagement militaire pour
la durée de la guerre en septembre 1944, mais à la libération de la Vienne l’ordre fut donner aux
cheminots de quitter l’armée pour réintégrer leur poste à la SNCF afin de participer à la
reconstruction du réseau ferré. Il était entré en Résistance le 10 juin 1944, la Vienne fut libérée le 5
septembre 1944 et il réintégra la SNCF à la fin du mois d’octobre 1944. (3min :56s)
(Plage 17) Jacques Rigaud fut réintégré automatiquement à la SNCF, « sans commentaires », avec
versement de son salaire de juin à août 1944. Il sut qu’il avait été radié car sa mère avait dut signer
un document le déclarant « déserteur », mais cela ne figura jamais dans son dossier. Il retrouva son
poste à Épanvilliers [Vienne]. Il suivit ensuite une formation militaire car il n’avait pas fait son service
militaire avant la guerre et fut admis à l’École des Officiers. Il ne put suivre l’avancée de la libération
de la France, étant à ce moment-là cantonné, et il n’eut pas l’occasion de s’intéresser à la vie
politique au moment de la Libération. Il fut syndiqué à la CGT après la Libération lors de la création
d’un syndicat à Saint-Saviol [Vienne]. (5min :24s)
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(Plage 18) Jacques Rigaud se souvient de la grève des cheminots de 1947 comme d’un moment
« assez dur », car le mouvement fut mal perçu par la population et il y eu « des altercations ». À
Saint-Saviol [Vienne], « les gens sortaient d’une mauvaise période, ils n’acceptaient pas cette
grève ». Il considère que ce mouvement était plus une protestation politique qu’un mouvement de
défense des droits des cheminots à proprement parler. Il n’a pas eu à travailler avec les Alliés par le
biais de la SNCF, uniquement pendant qu’il était dans le maquis. Il évoque notamment le
parachutage d’« une commission interalliée » [la mission est envoyée en Charente en juin 1944 afin
de superviser l’action des maquis] composée notamment du commandant américain Jo Gildee et
du capitaine français Delorme. (3min :08s)
(Plage 19) Jacques Rigaud pense que la population a « reconnu l’utilité de la SNCF pendant la
guerre », et ce « aussitôt après la guerre ». « C’est grâce à elle si les gens ont quand même eu à
peu près ce qu’ils avaient besoin », dit-il. Elle a fait le lien, cela a permis des échanges de
marchandises, et le transport des personnes avant le développement du réseau routier. Il évoque le
cas de la gare de Saint-Saviol [Vienne], où pendant la guerre travaillaient 15 agents. Il pense que la
SNCF « a fait vivre le pays » et il est « choqué » et ça le « heurte » lorsqu’il entend dire que la
Résistance aurait dû empêcher les déportations alors que ce n’était pas possible. (4min :05s)
V - L’épuration et la Résistance
(Plage 20) Jacques Rigaud évoque l’épuration en regrettant certains actes comme les tontes
publiques des femmes, une « idiotie » selon lui. Pour lui, elles n’avaient rien fait de pire que « nos
prisonniers français [qui] ont couchés avec des Allemandes ». Il pense que cela « a été exagéré »
et déclare que « c’était indigne de nous et de la résistance ». Selon lui, ce sont les femmes qui
poussaient à ces actions de tonte. À la Libération, il se souvient d’« une commission » composée
de « notre état-major de la Résistance » qui a condamné à mort et fusillé après jugement des
collaborateurs notoires « des types qui avaient fait du mal ». Il n’a pas connu de cas d’épuration
administrative à la SNCF. Il cite des noms de résistants qu’il a connus. (5min :52s)
(Plage 21) Jacques Rigaud revient sur le cas de femmes « qui collaboraient » et qui ont été
tondues. Il parle de « jalousie de femmes », des femmes poussaient à ce que ces femmes soient
tondues. Il raconte une anecdote sur une jeune fille qui était à l’époque pour la tonte des
collaboratrices, et qui reconnaît aujourd’hui que ce n’était pas si important. Il insiste sur le fait que
jamais on n’a pu prouver que ces femmes qui avaient des relations avec les Allemands avaient
dénoncé des gens, et qu’au contraire certaines ont aidé la Résistance en partageant des
confidences recueillies « sur l’oreiller ». Il est « étonné qu’il n’y ait pas eu plus de dégâts que ça » à
la Libération. Il raconte ensuite la dénonciation et la déportation d’André Ravarit, résistant du MUR
[Mouvements Unis de Résistance] et qui appartenaient aussi au réseau Louis Renard de Poitiers.
(6min :33s)
(Plage 22) Jacques Rigaud insiste pour remercier les gens qui ont aidé la Résistance, et
notamment les agriculteurs, les gendarmes et les habitants du secteur de Civray [Vienne].
(1min :46s)
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VI - Motivations pour répondre à l’Appel à témoins et la transmission de la mémoire
(Plage 23) Jacques Rigaud a vu l’appel à témoins dans La Vie du Rail, et il a tout de suite eu envie
de participer. « Pour moi, c’est important de communiquer ce qu’on a fait. » Depuis qu’il est à la
retraite il consacre beaucoup de temps à parler de son vécu notamment dans les écoles. Il est
attristé de voir que les gens s’intéressent moins à cette histoire et qu’il y a de moins en moins de
personnes aux commémorations, et de moins en moins de jeunes. Il note cependant que les écoles
s’intéressent à la Résistance, et que tous les ans on lui demande des renseignements. Il évoque
son travail au sein du VRID [site internet Vienne Résistance Internement Déportation, http://vridmemorial.com]. (4min :40s)
(Plage 24) Jacques Rigaud fait partie de l’ANACR [Association Nationale des Amis et des Anciens
Combattants de la Résistance], il a été président du VRID [Vienne Résistance Internement
Déportation] et en est maintenant le vice-président. Il est vice-président départemental des
médaillés de la Résistance, et il est aussi investi dans d’autres associations locales, notamment à
Civray [Vienne]. Il essaie de continuer à maintenir la mémoire de ces évènements également à
travers ses écrits. (3min :18s)
(Plage 25) Jacques Rigaud a essayé de faire reconnaitre la mémoire de la Résistance dès la
Libération, notamment par le biais de l’association des anciens résistants locale. Depuis son retour
dans le Civraisien [Vienne] en 1985, au moment de son départ en retraite, il participe à l’animation
des associations locales, ce dont il « retire beaucoup de plaisir ». Il s’exprime souvent devant les
lycées et les collèges, mais aussi à l’école primaire de Civray [Vienne]. (3min :28s)
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