échos d`une Journée pédagogique à Chavannes, 2006
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échos d`une Journée pédagogique à Chavannes, 2006
Ecole et religions Echos d'une Journée pédagogique Le 10 novembre 2006, la direction de l’école de La Planta à Chavannes-près-Renens a sollicité l’Arzillier pour organiser une journée pédagogique à destination des enseignants autour du thème : croyances/religions et l’école. Après une mise au point par Mme Weill, député, du processus de la discussion au Grand Conseil concernant les lois de reconnaissance des communautés religieuses dans le canton de Vaud, Mme Choukroun de la Direction générale de l’enseignement obligatoire a fait le tour des lois qui concerne le sujet. La constitution exprime que l’état doit « protéger l’ordre, la santé, la morale et les intérêts publiques ». D’après une jurisprudence du Tribunal fédéral, la liberté religieuse inscrite dans la constitution fédérale n’est pas absolue, peut être restreinte selon ces protections publiques mentionnées. Il s’agit de pondérer les intérêts, ceux de la protection de la liberté individuelle avec ceux de la population en générale. Le Tribunal fédéral distingue encore entre les enseignants qui représentent l’Etat et peuvent influencer les élèves, et qui doivent montrer une certaine retenue quant à leurs convictions notamment religieuses, et les élèvent qui ne représentent qu’eux-mêmes et n’ont pas le même pouvoir sur d’autres, et peuvent donc faire part de leurs convictions religieuses. La juriste citait le cas de l’enseignante genevoise qui a décidé d’enseigner avec un voile. L’école publique genevoise étant laïque, et que l’enseignante représente par sa fonction aussi cette conception de l’état, n’a pas eu gain de cause et doit enseigner sans le foulard islamique. Quant aux dispenses que la direction des écoles peut accorder, elles dispensent du cours demandé, mais pas de l’obligation d’être à l’école, donc les élèves dispensés d’un cours d’histoire biblique ou de gymnastique, doivent poursuivre des heures de cours dans une autre classe. Finalement, Mme Choukroun cite encore l’article 261bis du Code pénal qui interdit l’incitation publique à la haine, à la discrimination et au dénigrement publiques. Sur ce point, le bulletin d’octobre de la Commission fédérale contre le racisme fait état d’un nombre croissant et inquiétant de racisme dans l’espace publique1. Puis, les enseignants se sont répartis dans des ateliers de parole, où les questions concrètes sont notées, en voici quelques unes : - - 1 autour de l’Histoire biblique : un malaise double : personne ne devrait être dispensée de ce cours, c’est de la connaissance culturelle importante et utile pour l’intégration, par contre il faudra le renommer et donner un contenu plus multireligieux. Les parents connaissent mal l’objectif de ce cours et le confondent avec le catéchisme chrétien. La visite d’églises lors d’une excursion culturelle : certains élèves musulmans ont manifesté leur désir de ne pas entrer dans une église. Jusqu’où accueillir ce genre de demandes, surtout quand l’intervenant musulman à la table ronde l’après-midi explique que les musulmans ont le droit d’entrer dans une église, en citant l’exemple À commander ou télécharger sur www.ekr-cfr.ch ou 031 324 12 93. - - du deuxième successeur du Prophète. Le rabbin précisait que c’est pareil pour les juifs, sauf s’il s’agit d’une célébration, les musulmans sont aussi d’accord sur cette approche : oui pour une visite culturelle, non pour participer à une célébration chrétienne. La dissections d’animaux : est-ce un problème pour ceux qui croient à la réincarnation ? Le lama à la table ronde ne pense pas. Le Ramadan : les élèves montrent une baisse de concentration. Doivent-ils faire le ramadan ? A partir de quel âge ? Y a-t-il des accommodations possibles ? L’imam répond que le musulman doit pouvoir faire son travail comme d’habitude même pendant le ramadan, et s’il ne le peut pas, il doit faire un ramadan partiel, pour acquérir la force nécessaire. C’est la responsabilité des parents de « jauger » si les enfants sont aptes ou non à accomplir un ramadan complet. La vie de l’être humain est plus importante que toute loi religieuse. En accordant des dispenses pour certains cours, est-ce que l’école remplit encore sa mission ? Est-ce que l’apprentissage de la culture générale prime sur des considérations religieuses ou le contraire ? Dans les cours d’art visuel, travailler son propre portrait pose-t-il des problèmes pour certains croyants ? La théorie de l’évolution de la vie et de l’être humain : peut-on la laisser questionner notamment par des courants évangéliques (dont certains sont créationnistes) ? Comment se fait-il que la grande majorité des élèves, toutes religions confondues, soient si peu au fait des principes de leur religion et de sa culture ? La matinée s’est terminée par un exposé sur les différentes communautés religieuses installées dans le canton de Vaud, un tour d’horizon d’un monde souvent ignoré ou mal connu. L’après-midi une table ronde de représentants de différentes traditions religieuses a dialogué avec les enseignants. Les invités étaient : M. Brocard, éducateur et évangélique, Gabriele Mafli, pasteure réformée, Wangmo Lodreu, lama bouddhiste, le rabbin Alain Naccache, communauté juive de Lausanne, Carole Zerika, musulmane d’origine vaudoise, Pedro Espinoza, agent pastoral catholique et franciscain, Mostari ben Nasr, musulman et chercher en sciences religieuses. Voici quelques extraits de leurs propos : La lama s’interroge : comment aider les enfants à connaître d’autres religions dans le but d’ouvrir les horizons, la religion peut être un levier pour mieux connaître l’autre. Est-ce que ce serait possible d’expliquer les religions par les personnes concernées elles-mêmes, mais que celles-ci le fassent sans prosélytisme ? Le représentant de la mouvance évangélique se demande comment l’école pourrait aussi traiter des questions spirituelles mais sans pressions prosélytes ? Les jeunes ont des questions et l’école peut jouer un rôle dans les réponses. IL y a des questions, ajoute-t-il, qui amènent une certaine crispation et peuvent conduire à des fractions. Se donner les moyens d’avoir des espaces de parole libres seraient un bon moyen de désamorcer des tensions. En plus, il pense que certaines idées à priori choquantes le sont moins si on se donne les moyens de se connaître mieux, de s’expliquer. Le rabbin de Lausanne propose un renforcement à l’école du travail sur les différences, pour qu’elles fassent moins peur. Souvent par souci d’harmonie, on insiste sur ce qui rassemble. Mais il y des irréductibles, qui font partie de l’identité religieuse, d’où la nécessité de creuser la manière de vivre positivement les différences. Sur la question du respect des règles alimentaires et de l’isolement apparent d’un élève qui ne peut pas manger avec les autres, le rabbin fait état de sa propre expérience où il a bien sûr participé aux repas des cantines, mais avec son repas personnel kasher. Cela ne l’a pas isolé, bien au contraire, a animé des débats intéressant parmi les élèves. L’intervenant musulman a eu le plus à répondre. Il rappelle quelques principes : ce qui est donné en islam c’est le Coran et les paroles du Prophète (hadiths), mais ce qui est propre à chaque pays et moment de l’histoire, c’est comment le musulman interprète ces sources. Il doit le faire en interaction avec le monde dans lequel il vit. Sur les questions concrètes, il rappelle que l’islam n’interdit pas le sport ! Mais il y a une difficulté autour du sport, douche et habillement, pour laquelle on peut trouver des solutions pragmatiques. En réalité, le plus grand problème, c’est que les uns et les autres ne se connaissent pas, donc vivent sur des préjugés. La jeune musulmane maman de deux enfants est encore plus concrète et parle de la manière dont les enseignants devraient aborder les familles musulmanes lorsqu’ils téléphonent pour signaler une difficulté. La communauté musulmane se sent déjà globalement accusée, une voix brusque peut encore fragiliser les musulmans et ceux-ci peuvent alors répondre d’une manière inadéquate. Elle demande qu’il n’y ait pas de perdants dans les négociations autour des questions pratiques, mais qu’on applique le système des « gagnants gagnants ». La pasteure de Chavannes a découvert la diversité d’interprétations de l’islam et est devenue consciente qu’un précepte chez les uns n’est pas pareil chez d’autres musulmans. Dans la conclusion de cette journée riche et utile, l’animateur de la table ronde, Fabien Hünenberger, journaliste à la RSR, se demande comment « débriefer » l’accumulation de petites frustrations et blessures ? Des enseignants réagissent : pourquoi être blessé par les différences ? Ne sommes-nous pas capables d’accepter positivement les différences ? Ceux qui vivent des coutumes différentes doivent aussi l’3expléiquer, prendre de l’avance sur une tension possible, par exemple dire qu’une dame ne serre pas la main à l’enseignant, au lieu de le laisser dans l’embarras quand la main n’accueille pas une autre. Globalement, l’école La Planta aborde les questions que peuvent susciter les pratiques religieuses avec beaucoup de bon sens et de pragmatisme. L’ouverture du directeur de comprendre ces questions est aussi fondamentale. Mais les enseignants sentent aussi le besoin d’être mieux formé en interculturalité voir en connaissances des traditions religieuses présentent à l’école. Résumé par Martin Burkhard