Télécharger l`article au format PDF - Actecinq

Transcription

Télécharger l`article au format PDF - Actecinq
Page 1
Une avocate féministe qui défend les hommes
Une avocate féministe qui défend les hommes
CREUX-THOMAS Florence
04/02/2013
Avocate, féministe, Mary Plard publie "Paternités imposées" (Éd. LLL, janv. 2013) dans lequel elle interpelle le législateur et la société
sur un thème inédit : l'autorité judiciaire refuse au père la liberté de choisir de l'être.
IMG-3921.jpeg
C'est une femme charmante qui prend place à la buvette du Palais. Avocate depuis 30 ans, elle a étudié le
droit au moment de la loi Veil sur l'avortement. "Simone Veil, figure sacrée", tout comme Gisèle Halimi dont
elle suit les combats avec admiration. C'est une mère de 5 enfants qui a conjugué avec talent vie
professionnelle et familiale. À la tête de deux cabinets, à Nantes et à Paris, c'est une femme active, dédiée à
ses dossiers en droit de la famille, des personnes et en droit patrimonial. Quand en 2010, elle fait une
rencontre qui va bousculer ses convictions. À première vue, le dossier est ordinaire. Un homme vient
demander conseil : une femme avec qui il a eu une aventure éphémère lui a annoncé être enceinte de lui.
L'homme a 50 ans, une famille et pense qu'on, - la loi -, ne peut pas le contraindre à devenir père. Le
premier réflexe de l'avocate est de penser : "Monsieur, assumez !, la maternité est un droit sacré de la
femme et vous n'avez aucun droit sur l'embryon". Mais la détresse, la solitude et la culpabilité de cet homme
vont la pousser à explorer une zone d'ombre désertée par le droit : la femme s'est battue pour la
contraception, l'avortement, l'accouchement sous X, elle peut choisir d'avoir ou non un enfant, entamer une
action en recherche de paternité pendant 10 ans, demander une expertise biologique, - de droit depuis 2000
- et réclamer une pension alimentaire. En face, l'homme ne peut pas choisir d'être père ou de ne pas l'être "à
moins de choisir l'abstinence". Une fois posée cette équation, les choses ne paraissent plus si évidentes.
Mary Plard va appréhender "la maternité sous un angle élargi", lui donnant à voir l'autre volet : la paternité.
La femme peut-elle imposer une paternité quelles que soient les circonstances ? Si les droits des femmes
"mériteraient encore d'être améliorés", les hommes ont-ils des droits à faire valoir ?
Paternité, filiation, consentement, intérêt de l'enfant. Avec la nette impression d'un "éléphant dans un
magasin de porcelaine", Mary Plard explore les pistes juridiques : le Code civil, les lois bioéthiques, le Code
de la santé publique, le consentement qui, recueilli pour n'importe quel acte de consommation courante,
n'est pas exigé pour devenir père. Devant les tribunaux ses actions, pionnières, sont rejetées : "on me donne
des leçons de morale juridique". Seule la vérité biologique prime. La loi refuse au père le droit d'obtenir des
informations in utero, mais peut le condamner à verser, rétroactivement, une pension pour un enfant dont il
ne connaissait pas l'existence. En plein débat sur la famille, le mariage pour tous, l'adoption, la PMA, une
réflexion juridique sur la paternité ne paraît pas incongrue. Qu'est-ce qu'un père : "un père juridique, un père
biologique, un père affectif ?" questionne Mary Plard dans son ouvrage et invite au débat juridique autant
que philosophique. À la société de répondre à ces questions, estime le juge Van Ruymbecke dans sa
préface. Avec un vrai talent d'écrivain, Mary Plard raconte ces tranches de vie d'hommes "tout puissants
dans leur vie professionnelle et démunis dans leur fonction procréative". Elle nous conduit "inexorablement
dans l'impasse dont elle ne parvient pas à sortir. (...) N'est-il pas temps de légiférer pour combler le vide
juridique auquel se heurtent les pères piégés ?", suggère le juge Van Ruymbecke. Interrogé par le
Parlement, le CNB a précisé que "pour certains, la thèse de la vérité biologique serait actuellement
dépassée (...). Le retour à la vérité sociale impliquerait une refondation totale des textes sur la filiation". Mary
Plard ne prétend pas détenir de vérité. Elle est une femme d'aujourd'hui qui a progressivement épousé une
cause inattendue. "C'est à moi, quinqua, de défendre ces hommes". Un comble !
Page 2
Florence Creux-Thomas
Contenus LexisNexis
Jurisprudence :
- CA Caen, 29 mars 2012, n° 10/02442 : JurisData n° 2012-019170 : Dr. fam. 2012, comm. 168
- CEDH , 14 févr. 2012, n° 2151/10, A. M. M. c/ Roumanie : Dr. fam. 2012, comm. 69
- CEDH , 6 déc. 2011, n° 2899/05, Iyilik c/ Turquie : JCP G 2012, 296
- Chronique Droit de la famille : JCP G 2013, doctr., 38
Articles :
- De l'homoparentalité à l'homofiliation : quel dessein pour la famille ? : JCP N 2013, act. 142
- C. Neirinck, Accorder le mariage aux personnes de même sexe, oui. Reconnaître un droit à l'enfant, non !
Pourquoi ? : Dr. fam. 2013, Dossier 2
- A. Mirkovic, La situation juridique des enfants élevés par des personnes de même sexe : Dr. fam. 2013,
Dossier 6
- J. Hauser, L'adoption est-elle devenue le factotum de la filiation ? : JCP G 2012, doctr., 1429
- S. Mirabail, Repenser l'action à fins de subsides : JCP G 2011, 1063, Étude
- Action en recherche de paternité et délai de prescription : JCP G 2010, act., 557
JurisClasseurs :
- JCl. Civil Code, art. 318 à 324
- JCl. Civil Code, Art. 325, 326 et 328
- JCl. Civil Code, art. 327 et 328
Sur le web
- Projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe :
http://www.assemblee-nationale.fr/14/dossiers/mariage_personnes_meme_sexe.asp
Source
Mary Plard, "Paternités imposées"
Éd. LLL, janv. 2013
© LexisNexis SA

Documents pareils