Tombe la neige Communique de presse Fichier PDF

Transcription

Tombe la neige Communique de presse Fichier PDF
6, rue Jacques Callot
75006 Paris
t +33 1 53 10 85 68
f +33 1 53 10 89 72
[email protected]
www.loevenbruck.com
ARNAUD LABELLE-ROJOUX
Tombe la neige
12.12.2014 - 31.01.2015
Vernissage le jeudi 11 décembre 2014, à partir de 18h.
Tombe la neige
Si surprenant que cela puisse paraître, l’idée de l’exposition que je propose pour
décembre prochain à la galerie Loevenbruck ne trouve pas son origine dans la belle
et déchirante chanson sentimentale d’Adamo, Tombe la neige, qui lui donne son titre.
Elle est née du souvenir, au contraire très lumineux, d’une représentation à l’Opéra
des Indes galantes de Rameau lorsque j’étais enfant. Quel âge avais-je ? Dix ans,
douze peut-être. Si je ne me souviens guère de ce que je vis, et encore moins de
ce que j’entendis, j’ai en mémoire un éblouissement constant. Un éblouissement
d’opérette façon Châtelet. Le peintre Jean Carzou, gloire académique des années 1950 oubliée de tous sauf de John Armleder, était l’auteur d’une toile peinte
évoquant le Pérou des Incas. Il y avait un volcan, et, dans ma mémoire, la scène
se confond avec celle, célèbre, du Temple du Soleil au cours de laquelle Tintin,
Haddock et Tournesol, déguisés en Incas de carnaval, sont condamnés à être
sacrifiés au dieu Pachacamac. L’œuvre, dont la thématique galante, XVIIIe siècle en diable, très Watteau, très Fragonard, est placée sous des cieux exotiques,
découpée en tableaux (Turquie de fantaisie, Perse imaginaire, Pérou précolombien
donc, et Indiens du Nouveau Continent), réclame une machinerie spectaculaire,
des costumes flamboyants, des décors monumentaux, des interprètes nombreux.
Repensant aux Indes galantes, ce n’est en réalité pas à l’œuvre de Rameau que
je songe, mais à un spectacle à l’inverse sans moyens, et sans rapport apparent, de Mike Kelley, To Be Read Aloud, présenté à Angoulême en 2000. De quoi
s’agissait-il ? Pareillement découpé en quatre tableaux, évoquant cette fois le
western (plutôt « spaghetti »), l’Orient des Mille et Une Nuits, le carnaval de Venise
(version déco de pizzeria) et une Antiquité de péplums, à partir d’éléments de scène piteux empruntés à des compagnies de théâtre amateur, Mike Kelley « donnait
à entendre » une conversation à bâtons rompus avec Franz West rejouée par des
trois malheureux acteurs, que le séquençage faussement illustratif plaçait dans
une perspective critique.
Mon projet consiste – la façade vitrée de la galerie Loevenbruck se prêtant par
ailleurs à l’idée de vitrine de Noël – à produire une sorte d’apparition théâtrale crépusculaire, sorte d’Indes galantes hivernales de pacotille. Qu’est-ce à dire ? À la
place du soleil des Indes galantes et des stéréotypes culturels de To Be Read Aloud,
il y aura en effet la neige, son « impassible manège », et quelques figures spectrales moins funèbres que parodiques (Watteau !). Quiconque regarde tomber la neige
ne pense pas forcément aux joies des sports d’hiver, aux paquets-cadeaux amoncelés devant la cheminée, à la pureté des jeunes filles aux lèvres rouges comme le
sang. Certains pensent à la mort, au linceul, au froid. Et aux vivants qui restent à
regarder la neige. Comme dans la scène finale de « Le Mort », l’ultime nouvelle de
Gens de Dublin, de Joyce : « Il s’était mis à neiger. Il regarda dans un demi-sommeil
les flocons argentés ou sombres tomber obliquement contre les réverbères. […]
Elle [la neige] tombait sur la plaine centrale et sombre, sur les collines sans arbres,
tombait mollement sur la tourbière d’Allen et plus loin, à l’occident, mollement tombait sur les vagues rebelles et sombres du Shannon. […] Elle s’était amassée sur
les croix tordues et les pierres tombales, sur les fers de lance de la petite grille, sur
les broussailles dépouillées. Son âme s’évanouissait peu à peu comme il entendait
la neige s’épandre faiblement sur tout l’univers comme à la venue de la dernière
heure sur tous les vivants et les morts. »
La neige est un spectacle.
Arnaud Labelle-Rojoux
Contact presse :
Alexandra Schillinger, [email protected], t 01 82 28 38 22,
Horaires de la galerie : Mar - Sam, 11h-19h et sur rendez-vous