13 Plusieurs milliers d`opposants au nucléaire, surtout allemands, s

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13 Plusieurs milliers d`opposants au nucléaire, surtout allemands, s
Région
Q LUNDI 25 AVRIL 2016
13
COMMÉMORATION 30 ans après la plus grave catastrophe nucléaire
Tchernobyl, Fessenheim,
même combat
Plusieurs milliers d’opposants au nucléaire, surtout allemands, s’étaient donné rendez-vous hier sur les ponts du Rhin pour
commémorer les 30 ans de la catastrophe de Tchernobyl. Et exiger la fermeture de la centrale de Fessenheim.
C’
est sans doute sur le pont
du Rhin entre Vogelgrun et
Breisach que l’affluence
des antinucléaires a été la
plus importante hier à midi. Plus de
1 500 manifestants y ont été comptés
par la police allemande tandis qu’un
millier de personnes s’étaient rassemblées sur le pont du Rhin au niveau de
Marckolsheim et quelque 300 à Chalampé. Plus au nord, les opposants au
nucléaire étaient moins nombreux
(une centaine à Gerstheim, trois cents
entre Strasbourg et Kehl) mais la détermination était la même sur l’ensemble
des sept ponts du Rhin (dont deux en
Suisse) pour dénoncer le risque nucléaire, vilipender le lobby de l’atome
et réclamer la fermeture de la centrale
de Fessenheim.
Les militants de Stop Transports-Halte
au nucléaire, du réseau Sortir du nucléaire, de Stop Fessenheim, du CSFR
ou d’Alsace Nature étaient tous sur le
pont en ce dimanche mais ce sont
surtout des Allemands qui sont venus
à l’appel du mouvement de protection
de l’environnement Bund et des associations antinucléaires du Bade-Wurtemberg, excédés par les tergiversations françaises autour de la centrale
de Fessenheim.
À Gerstheim par exemple, les Alsaciens n’étaient guère qu’une poignée
au milieu de dizaines d’Allemands
scandant « Fermons Fessenheim
maintenant ».
La centrale alsacienne ?
« Une vieille
cochonnerie »
Contrairement au panache radioactif,
le militantisme ne connaît pas de limite. « Nous sommes présents ici à l’endroit où le nuage de Tchernobyl s’est
Les Allemands, sous les vents dominants de Fessenheim, demandent la fermeture de la centrale alsacienne « pour éviter le pire ».
arrêté il y a trente ans, a ironisé sur le
pont de l’Europe entre Strasbourg et
Kehl, Jean-Marie Brom, de Stop transports - Halte au nucléaire. Mais la frontière n’arrête pas les antinucléaires. »
Qualifiant la centrale de Fessenheim
de « vieille cochonnerie », le physicien
estime que « le gouvernement ne veut
pas sortir du nucléaire ». « En France
nous sommes habitués aux mensonges du nucléaire, ajoute-t-il, et aux
promesses de François Hollande » qui
« LES ALLEMANDS SONT UN PEU SECOUÉS PAR LES DÉCLARATIONS »
« Bonjour, amis français ! », sourit malicieusement la militante allemande qui
vient de franchir, peu après midi, un des
deux points de contrôle mis en place par
les autorités françaises, au centre du
pont reliant les communes françaises de
Chalampé et allemande de Neuenburg.
« Après tout, elles ont arrêté le nuage
radioactif à la frontière, de la même
façon, en 1986 », ironise un des manifestants présents. « La préfecture avait
prévenu. C’est en raison de l’état d’urgence », relativise Gilles Barthe, membre du
comité pour la sauvegarde de Fessen-
Les 250 manifestants venus de Neuenburg côté allemand ont dû présenter
leurs papiers d’identité avant de pouvoir rejoindre leurs voisins alsaciens
sur le pont de Chalampé. Un contrôle accepté dans la bonne humeur. PHOTO
DNA - S.F.
heim et de la plaine du Rhin (C.S.F.R), un
des porte-parole des associations antinucléaires qui s’étaient donné rendez-vous
sur un des sept ponts du Rhin.
Ce « filtrage », qui n’a pas empêché les
manifestants de se retrouver devant le
podium associatif, aura au moins permis
d’établir une comptabilité précise des
manifestants : quelque 250 personnes
venues du côté allemand, une cinquantaine du côté français. « Nos voisins
allemands ont toujours été plus nombreux que nous », reprend Gilles Barthe.
« Ils sont un peu secoués par les déclarations gouvernementales françaises.
Contrairement à nous, qui n’avons jamais
cru aux promesses de François Hollande. » Il se souvient et sourit : « Pour
l’occasion, ils avaient même sorti une
demi-bouteille d’un grand cru. Je leur ai
dit que j’étais prêt à trinquer avec eux
pour n’importe quoi, mais pas pour ça. »
Quatre ans plus tard, les slogans n’ont
effectivement pas changé. « Centrale
nucléaire/Fessenheim : Stilllegen ! Fermeture définitive ! », peut-on lire sur une
des pancartes affichées sur le dos d’une
militante, venue écouter les discours des
organisateurs et participer à la minute de
silence donnée en hommage aux victimes passées et présentes de Tchernobyl.
Le pont a lui été rendu à la circulation
peu après 12 h 40.
S.F.
avait annoncé la fermeture de Fessenheim avant la fin de son mandat.
Les manifestants se sont allongés sur
le pont avant de jeter des fleurs dans le
Rhin, symbolisant leurs « espoirs pour
l’avenir » mais aussi « les 600 000 à
700 000 personnes qui souffrent encore aujourd’hui, trente ans après la
catastrophe de Tchernobyl. Dans le nucléaire, quand un accident démarre,
on ne peut plus l’arrêter. À Tchernobyl,
il continue encore aujourd’hui. »
« À quand la prochaine
catastrophe ? »
Même discours sur le pont de Marckolsheim, où Axel Mayer le vice-président du Bund de Fribourg-en-Brisgau a
lancé une virulente adresse au prési-
MARC ROLLMANN DNA
dent Hollande pour lui demander de
respecter sa promesse de fermer Fessenheim. Claude Ledergerber, viceprésident de l’association trinationale
TRAS-ATPN a renchéri : « Combien de
temps nous sépare de la prochaine
catastrophe ? » Il a rappelé qu’un accident nucléaire hypothèque l’avenir de
tout un pays et a assimilé cela à un
crime contre l’humanité. « Le monde
nucléaire ment, désinforme ou omet
tout simplement », a-t-il encore affirmé dans son discours sur le pont du
Rhin. Après avoir fait observer une
minute de silence pour les morts des
différentes catastrophes, la manifestation s’est dispersée et le pont a été
rouvert à la circulation.
A.P. ET G.R.
R
Sur le pont entre Strasbourg et Kehl, un die in et une minute de silence en
mémoire des victimes de la catastrophe du 26 avril 1986. MARC ROLLMANN DNA