50 auteurs européens dessinent l`Europe

50 auteurs européens dessinent l'Europe
Le Festival International de la Bande Dessinée d'Angoulême a réalisé une
exposition "L'Europe se dessine" qui rassemble la vision d'artistes de bande
dessinée issus des 27 pays membres sur près de 300 m². Montrée pour la
première fois à Angoulême du 26 au 29 janvier 2012, elle est destinée à
tourner dans tous les pays de la Communauté.
L'idée vient du ministre français Laurent Wauquiez alors chargé des Affaires
européennes. Ce passionné de bande dessinée avait mis sur pied une
première rencontres des festivals européens de bande dessinée en janvier
2012. Dans la foulée, l'idée avait alors germé de créer une exposition faisant
travailler des auteurs de BD de toute la communauté afin de promouvoir le
continent européen et lui donner une image plus positive que celles des
réunions d'urgence suscitées par la crise.
Mais pour cela, il fallait une figure qui puisse aller de pays en pays pour faire
découvrir la Communauté, un personnage fédérateur qui soit en quelque
sorte le fil rouge de cette enquête. Pour ce faire, le dessinateur français
Charles Berberian a créé le personnage d'une jeune blonde branchée et
curieuse, au doux prénom d'Iris qui ne se sépare jamais de son appareil
photo, et qui voyage au travers de l'ancien continent pour les besoins de ses
études d'architecture.
"Comment la bande dessinée peut-elle rendre compte de l’idée européenne?
De quelle façon ses auteurs pourraient-ils le mieux, par images interposées,
faire partager à tous et à chacun les rêves et les réalisations de l’Europe ?"
Telles sont les questions que se sont posées les organisateurs. Le principe de
travail a été d'essayer de dégager tous les thèmes permettant de caractériser
la construction européenne.
Le premier groupe de thèmes a tourné autour des "idées fondatrices" de
l'Europe, celles qui ont réussi à édifier la construction européenne autour
d'un écheveau invisible d'idéaux et de valeurs communes qui ont diffusé
dans le monde entier tout au long de l'histoire. Ces idées qui, depuis la
Seconde Guerre mondiale, font vivre les Européens dans la paix et fondent
les joyaux de sa civilisation : La démocratie, la justice, les droits de l’homme,
la notion de citoyenneté, ou encore cet outil de concorde, pourtant si
controversé, qu'est la monnaie commune. Chacun de ces éléments a fédéré
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l'idée européenne, du Nord au Sud, d'Est en Ouest, et la font rayonner jusqu'à
aujourd'hui.
La seconde thématique a porté sur les réalisations de l'Europe, dans ce
qu'elle avait de plus réussi et de plus spectaculaire. Les transports :
Arianespace, le réseau ferroviaire trans-européen ; sa politique agricole
commune, son label d’agriculture biologique ; ses normes de sécurité :
règlementation alimentaire commune, création d'un numéro d’appel
d'urgence commun ; ses avancées sociales : normalisation des congés payés,
du congé maternité, de l'assurance maladie ; ou sa politique éducative : la
mise en place des programmes Erasmus ou Leonardo...
L'exposition se conclut sur un troisième volet, et non le moindre : son avenir.
Le développement durable, l’indépendance énergétique, son multilinguisme
à l'heure de l'Internet à très haut débit et du multimédia, sont les enjeux du
futur qui se dessine.
Les organisateurs ont demandé à 50 artistes de 21 pays différents de
contribuer à cette exposition. Le Portugais Joao Chambel a choisi le thème de
la Démocratie qu'il voit comme un vieil arbre duquel pousse de jeunes
branches ; le Français Hervé Baru se montre un peu critique sur le thème de
l'élimination de la pauvreté : on voit des entreprises cherchant à vendre des
avions, des automobiles, des infrastructures tout en donnant l'aumône aux
pays du Sud ; le Français Alfred se fait plus métaphorique et voit les Droits de
l'homme comme un source de lumière ; l'Italien Milo Manara convoque
l'histoire de l'art et donne à la Grande Odalisque d'Ingres le visage de Dora
Maar de Picasso ; le Norvégien Ville Ranta en appelle à Jean-Sébastien Bach ;
le Hollandais Joost Swarte montre un personnage dormant paisiblement
grâce à la sécurité alimentaire ; le Polonais Jakub Rebelka s'est intéressé à la
libre circulation des biens et des personnes dans une scène où l'on voit la
jeune Iris photographier le même jour la Porte de Brandebourg à Berlin et la
Palais de la culture à Varsovie par un simple saut dans le train ; le Danois
Søren Mosdal s'est intéressé à l'une des thématiques européennes de 2012 :
L'année du vieillissement actif et de la solidarité intergénérationnelle ; le
Britannique Luke Pearson s'est investi dans Prix Sakharov pour la liberté de
l’esprit promu par le Parlement Européen ; les Tchèques Jaroslav Rudiš et
Jaromir Svejdik se sont penchés sur le système de positionnement européen
Galileo et son réseau de 30 satellites qui répondent aux GPS européens ;
l'Espagnol Miguelanxo Prado s'est interrogé sur l'élargissement des frontières
de l’Europe, montrant un marchand exhibant des produits venus aussi bien
d'Angleterre que de Turquie...
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Comme on le voit, les angles de vue sont très éclectiques. Les ministres
européens commanditaires de cette exposition se félicitent de cette
initiative : " La dimension européenne de la bande dessinée est évidente.
Notre continent a accompagné la naissance et l’expansion de la bande
dessinée au XIXe siècle. La France, la Belgique, l’Italie, l’Allemagne et les
Pays-Bas, plus d’un siècle avant de s’unir politiquement et économiquement
pour créer l’Union européenne, ont ainsi compté parmi les premiers berceaux
de la bande dessinée", dit Jean Leonetti, ministre auprès du ministre d’Etat,
ministre des Affaires étrangères et européennes, chargé des Affaires
européennes, dans son discours d'inauguration de la cérémonie d'ouverture
de l'exposition en janvier dernier à Angoulême.
Il ajoute : " En dessinant l’Europe ensemble, la cinquantaine d’artistes
européens ici rassemblée nous offre un précieux témoignage de ce que «
l’union dans la diversité » nous a apporté depuis plus d’un demi-siècle. Elle
nous trace également un beau dessin de l’Europe de demain, une Europe
encore plus forte et intégrée et toujours porteuse d’espoir."
Quant à Madame Reding, vice-présidente commissaire européenne en charge
de la Justice, des droits fondamentaux et de la citoyenneté, elle a souhaité
que cette exposition voyage dans les capitales européennes : " La variété des
dessins et des planches que nous proposent 50 auteurs de bande dessinée
issus de différents pays de l'Union européenne en est la preuve éclatante. Ils
illustrent le projet européen qui les réunit, quoique chacun avec son propre
regard et sa sensibilité personnelle. Ils nous présentent, par ce langage
universel qu'est le dessin et singulièrement la bande dessinée par ses
scénarios toujours plus affûtés, ses jeux de cadrage et de couleurs, aussi bien
les grands idéaux sur lesquels est fondée la construction européenne que ses
réalisations concrètes. Ces deux approches sont étroitement liées: il faut une
vision pour rassembler, il faut des résultats pour convaincre."
Certains observateurs n'ont pas manqué de remarquer la faiblesse de d'esprit
critique des dessinateurs pressentis, un peu comme s'ils avaient été
anesthésiés par un travail de commande institutionnel. Charles Berberian se
porte en faux contre cette interprétation : "L'Europe est critiquée de toutes
parts comme un truc supra-national et sans âme, nous dit-il, nous avons
voulu donner d'elle une image plus positive que celle que l'on peut voir
d'ordinaire dans les médias."
Didier Pasamonik
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Éditeur, journaliste, commissaire d’expositions d’origine belge, DIDIER
PASAMONIK est un spécialiste reconnu de la bande dessinée écrivant pour de
nombreux journaux et l’auteur de plusieurs ouvrages sur la caricature, la
bande dessinée et la culture populaire. Il est éditeur-délégué d’ActuaBD.com
le premier site d’information sur la BD francophone. Il est également
conférencier au Mémorial de la Shoah à Paris.
DIDIER PASAMONIK is a Belgian publisher, journalist and curator. He is a
well-known expert in comics, who contributes to a variety of magazines and
newspapers. Pasamonik is the author of several essays about caricature,
comics and popular culture. In addition to being the CEO of ActuaBD.com, the
first website of reference on comics in France, he also teaches at the
Holocaust Memorial in Paris.
Le dessinateur français Hervé Baru s'est montré parmi les plus critiques,
stigmatisant l'attitude des pays riches par rapport aux pays pauvres (DR © Festival
de la BD d'Angoulême)
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Le dessinateur Alfred devant sa représentation des Droits de l'Homme en Europe
(Photo ©: D. Pasamonik)
Charles Berberian, créateur de l'héroïne Iris, fil rouge de l'expo (Photo © : D.
Pasamonik)
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Iris, l'héroïne inventée par Charles Berberian (DR © Festival de la BD d'Angoulême)
Lors de l'inauguration à Angoulême : face à Charles Berberian, le ministre des
Affaires européennes, Jean Léonetti, à sa droite, Laurent Wauquier, ministre de
l’Enseignement supérieur et de la Recherche, et le sénateur Michel Boutant,
président du Conseil général de la Charente et président de la Cité de la bande
dessinée (Photo ©: D. Pasamonik)
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