Le fantôme des ruines Au cours d`une récente ren
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Le fantôme des ruines Au cours d`une récente ren
Le fantôme des ruines Au cours d'une récente ren- contre de Sociétés bibliques, Arshavir Kapoudjian, directeur de la Société biblique arménienne, a écouté attentivement un message biblique qui portait sur la reconstruction des murail- les de Jérusalem dans Néhémie : il y était question de participation, de responsabilité, de dur labeur, d’unité dans le travail et même de séparation. De retour chez lui, ces paroles résonnaient encore dans son esprit. Elles sont devenues une réalité lors d’une visite que j’ai effectuée par la suite dans un village arménien, dans le cadre de notre projet Moving Gospel. Dans cet endroit, j’ai compris le vrai sens du passage de Néhémie, lorsque l’écho de ces paroles a rencontré la réalité, alors que je me trouvais face à ce village en ruine. Ce passage avait été choisi pour moi, pour mes concitoyens qui vivaient dans ce village. Des décombres, des maisons en ruine, des clôtures à terre… Il n’y a pas que le bétail qui va et vient, il y a aussi un fantôme qui erre dans ce lieu… le fantôme de l’abandon et de l’oubli… On pourrait s’arrêter là, si le fantôme n’errait pas au milieu des âmes en ruine. Hovik est un jeune garçon de 13 ans qui garde le bétail de ses voisins. Non, ce n’est pas un berger : c’est un élève de l’enseignement secondaire public qui fait l’école buissonnière, une brebis perdue. Au collège sont réunis la directrice, l’agent de police, la mère d’Hovik et le curé. La discussion porte sur les absences répétées du jeune garçon. L’accusé comparaissant devant ce petit tribunal n’est pas Hovik, mais sa mère. Elle soutient son fils avec fermeté, s’efforçant de justifier le fait de ne pas l’envoyer au collège : "Mon fils ne veut pas aller à l’école. Je ne l’y enverrai pas. Je ne veux pas qu’il meure." Mais la directrice du collège se comporte également comme une mère vis-à-vis du jeune garçon. Inquiète, elle fait tout son possible pour que l’enfant retrouve le chemin du collège. Deux mères ? Oui, l’une et l’autre sont des mères face à leur inquiétude. Je ne suis pas le Sage Salomon pour discerner laquelle des deux est la vraie "mère". Je me sens complètement à l’écart du bruit et du sujet qui donne lieu à une discussion si animée. Je trouve les paroles de la mère d’Hovik terrifiantes. On comprend aisément pourquoi les ruines tombent sur les ruines, et rien n’est fait pour tenter de remettre une pierre à sa place. Mais laquelle ? Il y en a tant. Il semble que le fantôme ait ensorcelé l’esprit des ruines et les âmes en ruine. Qui ramènera cet "humain-pierre" ? La mère, l’agent de police, la directrice, le curé… ou moi ? Je suis un homme qui aime relever les défis, mais en cet instant je me sens vaincu. J’éprouve un sentiment de défaite au-dedans de moi, la défaite de celui qui a tellement envie de faire quelque chose mais qui n’y parvient pas. J’éprouve un sentiment de vide au-dedans de moi, car je tente vainement de combler un vide mais je n’y parviens pas. Tenant entre les mains une Bible pour enfants, je m’approche de la mère d’Hovik et lui dis : "S’il vous plaît, donnez-lui ce livre. Laissez-le venir à l’école. Il n’y mourra pas." La mère d’Hovik est une de ces pierres tombées sur des ruines. Elle attend que son fils revienne des pâturages pour trouver dans ses yeux la vérité concernant les deux chemins. La tête baissée, je me tiens au milieu du village. Et une autre pierre tombe… elle tombe dans mon âme, faisant écho au nom invisible et à la voix muette d’Hovik. Au milieu des ruines il y a des fleurs… Au milieu des ruines il y a des paroles. Quand les fleurs se fanent, arrosez-les, n’accusez pas les autres. Quand vous voyez qu’une pierre est tombée, remettez-la à sa place, n’attendez pas que les autres le fassent. Arshavir Kapoudjian Directeur de la Société biblique arménienne Témoignage paru initialement dans le Bulletin de nouvelles de la Société biblique arménienne, n° 7, juillet 2014. Reproduit avec permission.