Christian Montès, American capitals, a historical geography. 2014

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Christian Montès, American capitals, a historical geography. 2014
Territoire en mouvement Revue de
géographie et aménagement
Territory in movement Journal of geography and
planning
29 | 2016
Activités marchandes et pratiques de la frontière
Christian Montès, American capitals, a historical
geography
2014, Chicago & Londres, University of Chicago Press, 394 pages
Yves Boquet
Éditeur
Université des Sciences et Technologies de
Lille
Édition électronique
URL : http://tem.revues.org/3010
ISSN : 1950-5698
Référence électronique
Yves Boquet, « Christian Montès, American capitals, a historical geography », Territoire en mouvement
Revue de géographie et aménagement [En ligne], 29 | 2016, mis en ligne le 20 mai 2015, consulté le 30
octobre 2016. URL : http://tem.revues.org/3010
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Christian Montès, American capitals, a historical geography
Christian Montès, American capitals,
a historical geography
2014, Chicago & Londres, University of Chicago Press, 394 pages
Yves Boquet
RÉFÉRENCE
American capitals, a historical geography
Christian Montès, American capitals, a historical geography, 2014, Chicago & Londres,
University of Chicago Press, 394 pages
2014
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Prenant quelque peu à rebours l’intérêt manifesté par les géographes envers les grandes
métropoles des États-Unis comme Los Angeles, Christian Montès, professeur à l’université
Lyon 2, s’intéresse depuis plusieurs années aux petites villes américaines, volet souvent
oublié de l’armature urbaine outre-Atlantique. Dans cet essai, il se focalise sur les
cinquante capitales d’États, certaines grandes (Boston, Atlanta, Denver), d’autres petites
(Montpelier, Pierre, Salem).
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Après un chapitre introductif où il justifie le besoin d’apporter un nouvel éclairage, de
surcroît français, sur les villes américaines et les processus territoriaux, car ces capitales
d’États n’ont en fait jamais été étudiées comme un ensemble, il montre (chapitre 2) que
les capitales d’États sont des lieux de mémoire symbolisés par le caractère majestueux de
leurs capitoles, majoritairement inspirés de celui de la capitale fédérale Washington DC
où s’enracine l’histoire des États-Unis et de leur peuplement, tout particulièrement au
XIXème siècle, lorsque la conquête de l’espace américain s’est réalisée, période riche en
création de villes.
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Rares (huit sur cinquante) sont les capitales actuelles qui ont toujours été capitales de
leur État : Boston, St Paul, Cheyenne, Salt Lake City, Santa Fe, Carson City, Olympia et
Honolulu. En fait, presque partout, comme l’auteur le décrit de façon minutieuse
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(chapitre 3), il y a eu succession de capitales, jusqu'à sept (Californie, Géorgie, Louisiane)
et même neuf (Texas). Parfois du fait de la progression du peuplement vers l’Ouest (vingtdeux cas sur cinquante), de façon à garder une capitale d’État en position centrale,
comme dans le Tennessee (Rocky Mount, Knoxville, Murfreesboro, Nashville) ou en Iowa
(Burlington, Iowa City, Des Moines). Dans cinq États (Delaware, New Hampshire, Caroline
du Nord, Rhode Island, Vermont), le processus historique a été une rotation complexe de
la fonction de capitale entre plusieurs villes, avant qu’elle ne se fixe. Dans sept États
(Alaska, Colorado, Kentucky, Maryland, Montana, Oklahoma et Oregon), la capitale
actuelle est proche de la première ville choisie, suite à un « réajustement ». Enfin, pour
les autres états, dont la Californie (sept capitales en quatre ans au début de son histoire :
Monterey, San Jose, Vallejo, Sacramento, Vallejo, Benicia, Sacramento), le processus de
localisation des capitales semble défier toute explication spatiale logique, et reflète plutôt
des affrontements politiques ou des jeux spéculatifs de promoteurs.
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Dans les chapitres 4 et 5, Christian Montès cherche à dégager des éléments explicatifs à
cette instabilité : recherche d’une centralité spatiale (évidente à Indianapolis) ; rejet de la
grande ville conduisant à un choix de petites villes, correspondant à l’idéalisation
jeffersonienne de la « Main Street » du MiddleWest (Harrisburg plutôt que Philadelphie) ;
compromis entre deux villes importantes ; promotion territoriale (boosterism) comme
pour Little Rock, Denver, Boise ou Cheyenne ; créations spéculatives d’hommes d’affaires,
tandis que d’autres capitales ont été créées par des assemblées d’État (Annapolis, Austin,
Columbia, Columbus, Tallahasse, Indianapolis, Jackson, Jefferson City, Lansing, Lincoln,
Raleigh, Richmond, Salt Lake City), mais il était préférable que ces villes soient aussi des
centres de commerce. En fin de compte, le caractère très politique du choix de la capitale
a été un facteur important de la sélection des sites. Souvent, lors d’une âpre concurrence
pour la désignation d’une capitale (Fargo/Bismarck en Dakota du Nord, Olympia/
Vancouver en Washington), la ville perdante s’est vue octroyer un « lot de consolation » :
siège de l’université d’État (comme à Iowa City ou Moscow, Idaho), asile de fous (St Peter,
Minnesota) ou…. prison d’État (Stillwater, Minnesota ou Sioux Falls, Dakota du sud) !
Procès et pétitions ont souvent accompagné et contesté ces choix.
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Après avoir examiné la création de ces capitales d’États, l’auteur présente au chapitre 6
leur évolution jusqu’aux années 1950, souvent marquée par de nombreuses difficultés
(« années de purgatoire ») : difficultés financières pour l’achèvement des grandioses
capitoles, faiblesses économiques face aux villes industrielles ou de navigation fluviale
(Columbus vs. Cleveland et Cincinnati en Ohio), du fait du caractère trop peu diversifié
(monofonction gouvernementale) de l’économie de nombreuses capitales. La vie
culturelle et intellectuelle n’était pas inexistante dans les capitales d’États dotées
d’universités (Chillicothe, Ohio fut surnommée « Athènes de l’Ouest, et Nashville
« Athènes du Sud »), mais on était loin de retrouver Boston ou Philadelphie à Helena,
Montana ou Pierre, Dakota du Sud. En fait, comme d’autres petites villes, un certain
nombre de capitales américaines, ont connu un recul démographique, absolu ou relatif
par rapport aux autres villes américaines : Albany était la 9ème ville du pays en 1840, la 69
ème
en 1950, Providence 9 ème en 1790, 43 ème en 1950, Richmond 12 ème en 1820, 46 ème en
1960. Certaines vicissitudes économiques les ont affectées (abandon de lignes de chemin
de fer, comme à Guthrie, Oklahoma). Cependant Denver, Atlanta, Indianapolis, Des
Moines, Columbus, Oklahoma City et Salt Lake City ont progressé dans la hiérarchie
urbaine nationale. Après la seconde guerre mondiale, par contre, on assiste (chapitre 7) à
une véritable renaissance des villes capitales. « India-no-Place » redevient une métropole
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bruissante d’activité. Columbus, longtemps en retrait de Cleveland et Cincinnati, prospère
alors que ses rivales en Ohio déclinent. La professionnalisation du personnel politique
amène à de meilleures pratiques de gouvernance et une affirmation du dynamisme local.
La fonction universitaire, souvent avec des établissements réputés (Madison, Austin)
permet le développement de stratégies économiques associant centres de recherche et
développement des industries de pointe, comme à Austin. De nouveaux aéroports ont été
développés par la reconversion de bases aériennes dont l’emplacement était lié à la
fonction capitale (Austin, à nouveau, ou Columbus). Le tourisme, misant sur l’histoire
locale, a revivifié nombre de villes, où les capitoles, soit les bâtiments actuels soit ceux
d’antan, abritent des musées. Springfield, la ville d’Abraham Lincoln, en est un bel
exemple. L’évolution de trois capitales, Columbus, Des Moines et Frankfort (chap. 8)
permet à C. Montès d’affiner ses hypothèses sur les mécanismes d’évolution des villes
capitales.
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Le dernier chapitre avant la conclusion jette un regard sur les villes qui furent un
moment capitales et ne le sont plus ; de Cahawba (Alabama) à Detroit (Michigan).
Kaskaskia (Illinois) avait 32 habitants en 1990, 14 en en 2010….. Si Pawnee Rock City
(Kansas), végète à 252 habitants, Houston dépasse les deux millions d’habitants dans la
seule municipalité et New York 8,2 millions. Toutes les anciennes capitales d’États ontelles souffert de leur perte de ce statut ?. La réponse est bien évidemment variable selon
les villes. Certaines sont des banlieues de grandes métropoles (Elisabeth NJ, Chillicothe
OH, Vallejo CA), d’autres des métropoles régionales aux activités diversifiées (Omaha),
d’autres encore des bourgades endormies (Corydon IN) qui essaient de se relancer par le
tourisme (St Augustine FL, Guthrie OK, Golden CO) ou l’accueil de retraités (Prescott AZ).
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Symboles de la démocratie américaine, ces capitales d’États fournissent ainsi à l’auteur,
dans un travail admirablement référencé et érudit, mais toujours de lecture aisée,
agrémenté de pointes d’humour, et appuyé sur de nombreuses enquêtes de terrain,
l’occasion de présenter une nouvelle vision de la richesse de la vie urbaine américaine.
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S’il fallait formuler quelques regrets, peut-être aurait-on aimé davantage de
comparaisons avec La capitale des États-Unis, Washington DC, ne serait-ce que dans les
processus de choix d’une capitale fédérale à la fin du XVIIIème siècle et sa langueur
économique jusqu’au New Deal. De même, la monumentalité de l’urbanisme et de
l’architecture de Washington, inspirée tant par Versailles que par la première capitale de
Virginie (Williamsburg), a servi de modèle à nombre de capitales américaines. Si l’auteur
dessine remarquablement la carte des capitales à l’échelle des États, l’ouvrage ne présente
pas assez, à nos yeux, leur structuration spatiale à l’échelle fine de l’espace urbain.
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Il convient cependant de saluer à sa juste valeur la qualité du travail de Christian Montès
qui a su convaincre un éditeur américain de renom de permettre à un Français s’exprimer
sur les États-Unis. Un beau travail.
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AUTEURS
YVES BOQUET
Université de Bourgogne
Territoire en mouvement Revue de géographie et aménagement, 29 | 2016
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