1 Lutter contre la phobie sociale au quotidien Vous souffrez de
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1 Lutter contre la phobie sociale au quotidien Vous souffrez de
Lutter contre la phobie sociale au quotidien Vous souffrez de phobie sociale. Il est rare que la phobie sociale disparaisse d’elle-même. Une attitude active est nécessaire pour la faire reculer. On sait aujourd’hui quels sont les efforts à faire pour pouvoir surmonter et dépasser ce type de maladie psychologique. Voici quelques conseils, qui complèteront ceux délivrés par votre médecin ou psychothérapeute. N’hésitez pas à en reparler avec lui. 1. Ne plus accepter la phobie sociale Lorsque la phobie sociale est identifiée, cela fait en général plusieurs années que la personne en souffre. Elle a pris souvent l’habitude de se résigner et d’accepter les évitements, la honte, la peur, comme s’il s’agissait d’une malédiction ou d’une défaillance de sa personnalité, de sa volonté, de son émotivité sur laquelle il n’y aurait rien à faire. Il arrive même que certaines personnes phobiques sociales pensent que le problème ne vient pas d’elles mais des autres (qui seraient trop agressifs, égoïstes, ironiques, etc.). Parfois même, la personne phobique ne se rend plus compte de ses évitements, tant elle en a pris l’habitude. Dans tous les cas, on a alors tendance à se résigner et à accepter la maladie. Cette attitude doit être combattue : pour se débarrasser de la phobie sociale, il faut la considérer comme un hôte indésirable, qui se serait installé chez vous sans que vous l’ayez invité. Développez le réflexe de ne plus accepter d’obéir aux « ordres » que vous donne la phobie sociale : éviter des situations parce qu’on ressent de l’anxiété, fuir les autres parce qu’on ressent de la honte … Tout ceci doit se faire progressivement, inutile de vouloir tout résoudre en une seule fois. 1 2. Penser autrement a. Les erreurs psychologiques dues à la phobie sociale Les personnes souffrant de phobie sociale commettent souvent des erreurs dans leur façon d’analyser ce qui leur arrive. Elles ont souvent le sentiment que : - Leur malaise intérieur est totalement visible ; Leurs interlocuteurs vont les juger négativement à cause de leur émotivité ou de leurs limites ; Un éventuel jugement négatif sur elles est une catastrophe irrattrapable. En fait : - - - Le malaise que l’on ressent n’est pas toujours visible. Nos battements cardiaques ne s’entendent pas, et un éventuel rougissement ou tremblement n’est remarqué que si on se bloque sur lui au lieu de continuer la conversation ; Même si l’interlocuteur s’aperçoit d’un léger malaise chez la personne phobique sociale, il est tout à fait capable de moduler son jugement et de se dire : « Cette personne est émotive, mais sympathique, compétente, etc. » On n’est pas forcément rejeté parce qu’on se montre ému ou troublé ; Enfin, même si l’interlocuteur porte un jugement négatif (ce cas de figure est beaucoup plus rare que les phobiques sociaux ne le pensent), il ne faut pas le considérer comme une catastrophe irrattrapable. On ne peut pas être aimé et estimé toujours et par tout le monde ! b. Les exigences excessives dues à la phobie sociale Les personnes souffrant de phobie sociale sont en général trop sévères et exigeantes avec elles-mêmes. Beaucoup plus que les personnes non phobiques sociales, qui acceptent de ne pas être parfaites, de ne pas pouvoir plaire à tout le monde, etc. On retrouve, à cause de la phobie sociale, des croyances excessives, comme par exemple : - « Je dois toujours avoir quelque chose d’original à dire, sinon on va me prendre pour quelqu’un d’inintéressant » ; « Je ne dois jamais laisser voir que je suis mal à l’aise, sinon je serai rejeté » ; « La plupart des gens ne pensent qu’à humilier les faibles une fois qu’ils les ont repérés ». 2 Prendre conscience du caractère excessif de ces convictions et lutter contre elles est un aspect particulièrement important dans votre lutte contre la phobie sociale. Pour reprendre nos exemples, il faut « assouplir » ses croyances : - « Je dois accepter qu’il y ait parfois des blancs dans la conversation, ou que l’on parle de banalités, cela arrive à tout le monde » ; « Même si je suis ému, on peut quand même m’apprécier » ; « Les personnes agressives ne sont heureusement pas la majorité ». 3. Faire face aux émotions : la peur et la honte a. Affronter sa peur : La peur se manifeste souvent avant et pendant les situations sociales. Avant : on ressent de l’anxiété anticipatoire, on imagine à l’avance que cela va mal se passer, et on se projette un véritable film d’épouvante basé sur un « scénario catastrophe ». Pendant : dès qu’on commence à ressentir de la peur, on se concentre excessivement sur celle-ci, avec des questions du genre « est-ce que ça se voit ? », « et si l’angoisse ne s’arrête pas de monter ? ». A partir de ce moment, la personne phobique sociale n’est plus attentive à la situation mais à son angoisse, à ce qu’elle ressent et à ce que les autres pensent peut-être. En fait, les autres n’ont rien repéré, du moins au début ; au bout d’un certain temps, ils finissent parfois par remarquer que la personne est comme absente, préoccupée, mal à l’aise … Celle-ci est tout simplement en train de se noyer toute seule dans son anxiété sociale. Que faire ? Il est difficile de ne pas ressentir d’anxiété sociale ; même les personnes non phobiques sociales en éprouvent régulièrement. Par contre, il est tout à fait possible d’apprendre à agir malgré l’anxiété, avec cette anxiété. A condition de ne pas se focaliser sur elle, et de se concentrer sur la situation en cours, peu à peu, l’anxiété deviendra simplement un bruit de fond désagréable, puis finira par disparaître. 3 b. Lutter contre la honte La honte est une émotion particulièrement pénible et fréquente dans la phobie sociale. Elle se manifeste le plus souvent pendant et après les situations sociales. Pendant : on a le sentiment que tout ce que l’on dit, fait, montre … est ridicule et nous infériorise. Pour tenter de faire comprendre cette honte à des non-phobiques sociaux, il faut leur demander dans quel état ils seraient s’ils se retrouvaient complètement nus lors d’une soirée ou d’un entretien avec quelqu’un. Après : on ressasse ses erreurs et bêtises supposées (« je n’aurais pas dû faire ça, dire ça, me comporter comme ça, tout le monde l’a vu, et en aura pensé du mal, on a dû me mépriser … »). Que faire ? Comme l’angoisse, la honte est difficile à supprimer au début. Il faut surtout se battre pour en éliminer la portée et les conséquences. En éliminer la portée, c’est-à-dire ne pas accepter de « généraliser » à outrance : ce n’est pas parce qu’on a été mal à l’aise lors d’une soirée que « tout est fichu », que « tout le monde nous méprise », et que « toute notre personne est pathétique et minable ». Il est bon de se critiquer de façon constructive (« la prochaine fois, je dois essayer de parler davantage, à plus de monde, etc.), pas de se « massacrer » soi-même. Comment parleriez-vous à un de vos meilleurs amis s’il se trouvait dans votre situation ? Sans doute en essayant de ne pas dramatiser, de lui rappeler aussi ses qualités, et de l’aider à mieux se préparer pour la prochaine fois. Et si vous en faisiez de même pour vous ? Attention aussi aux conséquences de la honte : le réflexe d’une personne honteuse d’elle-même, c’est de s’isoler, de se cacher. Or, pour un phobique social, cela va aggraver son problème, puisqu’il va se couper encore plus des autres (par exemple, certaines personnes ne veulent plus revoir des gens devant lesquels elles ont rougi), et surtout s’isoler dans ses convictions : si on ne fait pas l’effort de recueillir d’autres points de vue que le sien, on restera persuadé qu’on a été lamentable, là où les autres nous auront trouvé normal, ou à peine gêné. 4 4. Ne plus fuir a. Les évitements Fuir les situations qui nous mettent mal à l’aise peut paraître logique : on s’évite ainsi de souffrir. Pourtant, on sait aujourd’hui que chaque évitement aggrave ou maintient la phobie sociale. Plus je fuis les situations, plus je maintiens ma vulnérabilité face à celles-ci. Il existe deux sortes d’évitements : - Les évitements de situations (ne pas aller à une soirée, éviter de déjeuner avec des collègues …) Les évitements « subtils » ou discrets (dans les situations que l’on n’a pas pu éviter, tout faire pour éviter de montrer sa vulnérabilité, par exemple ne pas regarder dans les yeux, ne pas prendre la parole, ne pas saisir d’objet si on a peur de trembler …). b. Affronter les situations sociales Eviter aggrave ou chronicise. Se confronter permet peu à peu de prendre le dessus de la phobie sociale. Encore faut-il respecter certaines règles lorsqu’on veut faire ce que les thérapeutes appellent des « exercices d’exposition » : - - - S’exposer assez longtemps aux situations angoissantes ; c’est-à-dire, chaque fois que possible, au moins 30 à 45 minutes. En effet, une confrontation trop courte ne permet pas à l’anxiété de diminuer. S’exposer régulièrement. Une fois ne suffit pas, il faut que les confrontations soient répétées à de nombreuses reprises pour que l’anxiété recule nettement et durablement. S’exposer progressivement. Pour les phobiques sociaux, c’est très douloureux, pénible et épuisant de se confronter à leurs peurs. C’est pourquoi on leur recommande de commencer par des exercices assez simples, et d’augmenter progressivement la difficulté. c. Comment s’exposer en pratique Lorsque vous vous confrontez à des situations sociales angoissantes pour vous, pensez à certaines règles : - Ne vous concentrez pas sur votre anxiété, mais sur la situation ; Rappelez-vous que même si vous ressentez très fortement votre malaise, les autres ne sont pas dans votre peau, et que souvent ils ne remarquent pas votre anxiété ; 5 - Après les exercices, ne vous jugez pas en tout ou rien, félicitez-vous d’avoir osé ou essayé, et réfléchissez à ce qui pourra être amélioré la prochaine fois. Pour conclure Tous les conseils donnés ici ne seront pas forcément faciles à appliquer dans votre cas. Il sera alors nécessaire de solliciter l’aide de votre médecin ou d’un psychothérapeute. De très nombreux patients dans le monde ont déjà bénéficié de ces techniques, et elles pourront vous aider vous aussi. Pensez aussi très simplement à prendre des résolutions pour modifier votre vie quotidienne. Si vous avez décidé de changer, concrétisez-le : téléphonez (ou écrivez, si c’est trop dur) à des amis que vous n’avez pas contactés depuis longtemps, remettez-vous à inviter des proches chez vous, faites l’effort d’échanger deux ou trois mots (pas plus au début !) avec commerçants et voisins, marchez la tête haute au lieu de fuir les regards … C’est cette somme de petits combats quotidiens (même si vous ne les gagnez pas toujours) qui va vous aider à faire reculer la phobie sociale. Bon courage ! Extrait : La peur des autres ; Trac, timidité et phobie sociale, Christophe André et Patrick Légeron, Odile Jacob, 2003. 6