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Synthèse thématique : poppers, colles et
autres solvants
Accès rapides :
- Présentation
- Production / offre
- Consommation
- Conséquences
- Cadre légal et orientations publiques récentes
- Sélection de documents
- Repères législatifs et réglementaires
Présentation
haut du document
Les poppers sont des préparations liquides très volatiles contenant des nitrites d’alkyle
aliphatiques ou cycliques (amyle, butyle, propyle, pentyle, cyclohexyle), conditionnées dans
de petits flacons de 10 à 15 ml, parfaitement adaptés à l’usage dans un contexte festif.
D'abord à usage médical pour certaines affections cardiaques, les ampoules contenant ces
nitrites produisaient à l'ouverture un bruit (" pop ") qui a donné le nom au produit.
Inhalés, les poppers engendrent, de manière immédiate, une sensation d’euphorie,
éventuellement accompagnée de rire, et une relaxation des fibres musculaires entraînant une
dilatation intense des vaisseaux. Ils peuvent produire une hypotension et une accélération du
rythme cardiaque. Ils sont utilisés notamment pour optimiser les performances sexuelles,
dans la mesure où l’usage par inhalation faciliterait l’érection, retarderait l’éjaculation et
accroîtrait les sensations orgasmiques. Leurs effets ne durent pas plus de 2 minutes [1, 2].
Les solvants organiques sont des produits chimiques, liquides ou gazeux, ayant la propriété
de solubiliser les corps gras. De nombreuses substances, vendues librement, sont
susceptibles d’être détournées de leur usage afin d’engendrer des effets psychotropes (éther,
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trichloréthylène, chloroforme, détachants, solvants de peinture, aérosols, protoxyde d’azote,
colles, etc.). Elles sont en général inhalées, par le biais d’un chiffon imbibé, parfois à l’aide
d’un sac en plastique pour accroître la concentration du produit, ou encore directement
pulvérisées dans le nez ou la gorge. Ils sont classés parmi les sédatifs.
L’intensité de leurs effets dépend des molécules entrant dans leur composition, de la
quantité inhalée (concentration des vapeurs et temps d’inhalation) et de l’éventuelle
tolérance développée par l’usager. Inhalés, les solvants agissent sur le système nerveux
central en induisant des manifestations ébrieuses. Chez certains consommateurs s’ensuivent
des troubles de la perception pouvant conduire à des hallucinations puis à une somnolence
allant parfois jusqu’à la perte de conscience. Sniffés, les solvants produisent des effets
extrêmement rapides où se succèdent une phase euphorique, des perturbations sensorielles
(allant parfois jusqu’à l’hallucination visuelle) et enfin, une phase de sédation, avec parfois
sommeil et coma. Ils peuvent donner lieu à une dépendance psychique et physique et à une
tolérance. Ils ont surtout un effet neurotoxique, entraînant une détérioration des capacités
mentales [2].
Production / offre
haut du document
Une offre qui persiste
Les interpellations pour usage ou trafic de solvants ou de poppers illicites sont
exceptionnelles, de même que les saisies (une trentaine de flacons entre 2000 et 2013) [3].
En effet, les colles et les solvants étant des produits répandus dont l'usage et la possession
sont licites, ils sont peu visibles des services de police et de gendarmerie. Concernant les
poppers, à la suite de l’interdiction intervenue en 2011, le site TREND de Paris a fait état de
petits trafics informels émergents, animés par d’anciens distributeurs ou producteurs,
écoulant leurs stocks en suivant une logique de réseau, via les sites de rencontres
notamment [4]. Certains sex-shops auraient aussi continué à en distribuer clandestinement.
L’annulation en 2013 de cet arrêté de 2011 pourrait modifier le marché français.
De plus, dans un contexte où l’offre de produits se développe sur Internet, la possibilité de
l’achat en ligne demeure bien présente, tout comme celle des achats lors des voyages à
l’étranger [2].
Consommation
haut du document
Des expérimentations fréquentes chez les plus jeunes
Poppers
En 2014, les poppers constituent, chez les 18-64 ans, la deuxième substance illicite la plus
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expérimentée, derrière le cannabis, avec 7,3 % de personnes concernées [5]. C’est dans les
tranches d’âge les plus jeunes que ce produit est le plus souvent essayé. Ainsi, plus d’une
personne sur dix âgée de 18 à 25 ans en a consommé au moins une fois dans sa vie (11,7 %).
Les poppers sont plus souvent expérimentés par les hommes (9,9 %) que par les femmes (4,7
%). Si l’usage au cours de l’année s’avère plus faible (0,9 %), il s’est stabilisé chez les 18-25
ans depuis 2010, passant de 2,9 % à 2,5%. En outre, les poppers représentent la première
drogue illicite consommée au cours de l’année après le cannabis.
Chez les jeunes de 17 ans, en 2014, l’expérimentation est inférieure à celle des adultes (5,4
% contre 7,3 %) [6]. Toutefois, les niveaux d’expérimentation, qui avaient connu un pic brutal
en 2008 (13,7 %), sont en forte baisse depuis. Le niveau observé en 2008 pourrait s’expliquer
par la volonté des vendeurs d’écouler rapidement leurs stocks après (et en dépit de)
l’interdiction de vente de 2007 et peut-être aussi par un effet de mode lié à la médiatisation
du débat sur cette interdiction.
Colles et autres solvants
Les niveaux d’usage de colles et de solvants sont peu élevés dans la population adulte. En
2014, 2,2 % des 18-64 ans en avaient expérimenté et 0,1 % en avaient fait un usage durant
l’année [5]]. Les niveaux d’expérimentation et d’usage dans l’année les plus élevés se
retrouvent parmi les tranches d’âge des 18-25 ans (respectivement 2,5 % et 0,3 %) et des
26-34 ans (2,5 % et 0,1 %). Ces produits sont 3 fois plus expérimentés par les hommes (3,1 %)
que par les femmes (1,4 %). La tendance de la consommation de ces produits est à la hausse
puisque, entre 2010 et 2014, les usages dans l’année ont tendance à baisser (0,4 % contre
0,1 %).
Chez les jeunes de 17 ans, les niveaux d’expérimentation de produits à inhaler (hors poppers)
en 2014 sont plus importants (4,3 % chez les filles et 4,2 % chez les garçons) que dans la
population adulte [6]. Par rapport à 2011, ces chiffres apparaissent en nette baisse pour les
filles (5,6 %) mais en baisse notable pour les garçons (5,4 % en 2011).
Des usages majoritairement récréatifs
À la différence des autres solvants, les poppers sont très présents dans les consommations de
psychotropes de l’espace festif proche de la musique techno. Ainsi, entre 2003 et 2005, avant
l’intervention du législateur interdisant la mise en vente de certaines formes du produit, plus
de 50 % des personnes côtoyant l’espace festif électro déclaraient avoir expérimenté les
poppers, pourcentage atteignant près de 60 % pour les personnes fréquentant les clubs (soit
un peu moins que le cannabis). S’agissant de l’usage récent, plus de 17 % des personnes
fréquentant le milieu des clubs déclaraient en avoir consommé [7]. En contexte festif, il est
fréquemment consommé en groupe, notamment par les plus jeunes.
Cependant, des usages plus réguliers concernent la population homosexuelle masculine qui
fréquente les lieux de rencontres festives ou sexuelles. Si l’usage de poppers y demeure
attaché à la fête, il semble que le produit soit utilisé majoritairement dans un contexte sexuel
où, malgré l’interdiction du produit, son usage est banalisé. Dans ce cadre, certains usagers
ressentent une quasi-dépendance vis-à-vis du produit pour la réalisation d’actes sexuels [8].
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Conséquences
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Approche clinique : les effets de la consommation de poppers et de solvants
La prise de solvants, quels qu’ils soient, comporte un risque aigu de mort subite par
trouble du rythme cardiaque. Lors de prises répétées, les solvants peuvent engendrer
des lésions neurologiques (notamment des polynévrites), des lésions rénales, gastriques
ou encore pneumologiques.
S’agissant des poppers, une prise peut fréquemment s’accompagner de nausées, de
vomissements ou de céphalées Une intoxication aiguë peut entraîner une hypotension
artérielle et des troubles cardio-vasculaires potentiellement mortels, dont le risque
s’accroît lors de la prise concomitante de certains médicaments comme le Viagra®. Elle
peut en outre engendrer une anémie aiguë et grave par altération des globules rouges
(méthémoglobinémie) et des cas de perte prolongée de l’acuité visuelle par atteinte de la
rétine ont été recensés. Les prises répétées peuvent, en particulier, être à l’origine de
lésions nasales ou du visage (croûtes jaunâtres caractéristiques) ou encore de lésions
hépatiques [2, 9].
Entre 1999 et mars 2011, 940 cas d’exposition aux poppers ont été recensés principalement
par les réseaux de toxicovigilance (Centre Antipoison et de Toxicovigilance) et
d’addictovigilance (Centre d’Evaluation et d’Information sur la Pharmacodépendance), dont
146 considérés comme graves, les pathologies les plus retrouvées étant la
méthémoglobinémie et les cyanoses, troubles respiratoires et cardiaques et coma. Six d’entre
eux ont conduit au décès [10, 12]. En 2012, les poppers sont impliqués dans deux décès
supplémentaires [11]. En outre, parmi les cas enregistrés sur la période 1999-2010, 34
concernaient des atteintes oculaires se traduisant principalement par une baisse d’acuité
visuelle [12].
Cadre légal et orientations publiques
récentes
haut du document
Poppers et législation
Colles, solvants et poppers (nitrites d'alkyle aliphatiques) sont soumis au régime juridique
applicable aux produits classés stupéfiants. Ils relèvent en effet des substances identifiées
par l'Organisation mondiale de la santé comme susceptibles d'engendrer une dépendance
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aux solvants volatils.
Le décret du 26 mars 1990 a d'abord interdit la vente et la distribution gratuite au public de
certains poppers, ceux à base de nitrites de butyle et de pentyle ou leurs isomères. D'autres
types de poppers, en revanche, à base de nitrites d'amyle ou de propyle, n'étaient pas
mentionnés dans le décret d'interdiction et échappaient ainsi à la réglementation : ils étaient
donc disponibles dans certains établissements (sex-shops, saunas, clubs et bars gays).
Le décret du 20 novembre 2007, qui abroge le décret de 1990, élargit le cadre d'interdiction.
Il interdit non plus seulement la commercialisation et la distribution à titre gratuit mais aussi
la fabrication, l'importation, l'exportation, l'offre, la détention en vue de la vente ou de la
distribution à titre gratuit de tous les produits relevant du terme générique de " poppers ". Il
étend donc le champ des substances prohibées aux nitrites d'amyle et de propyle et leurs
isomères. Ce décret a été annulé par le Conseil d'État le 15 mai 2009 sur la requête du
principal distributeur du produit en France (Men's Club), du fabriquant (France
Conditionnement Création) et de plusieurs associations.
L’arrêté du 29 juin 2011 a de nouveau entraîné l’interdiction de vente et de cession au public
des produits, à l’exception des médicaments contenant des nitrites d’alkyle aliphatiques,
cycliques ou hétérocycliques et leurs isomères, en raison de leur toxicité importante et de
leurs effets psychoactifs. Mais le 3 juin 2013, le Conseil d’État a annulé cet arrêté de 2011 :
la fabrication et la commercialisation de ces poppers (à base de nitrites d'amyle et de propyle)
ne sont donc plus désormais sous le régime de l’interdiction.
Sélection de documents
haut du document
[1] Cadet-Taïrou A., Lahaie E. et Gandilhon M., Note relative à l’usage des « poppers »
Saint-Denis, OFDT, 2009, 6 p.
[2] Gandilhon M. et Cadet-Taïrou A., « Poppers, colles et autres solvants » dans OFDT,
Drogues et addictions, données essentielles
Saint-Denis, OFDT, 2013, pp. 273-277
[3] Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants (OCRTIS), données 2010
à 2013, non publiées
[4] Pfau G. et Péquart C., Phénomènes émergents liés aux drogues. Tendances récentes sur
les usages de drogues à Paris : état des lieux en 2011-2012
Saint-Denis, OFDT ; Paris, Association Charonne, 2014, 112 p.
[5] Beck F., Richard J.-B., Guignard R., Le Nézet O. et Spilka S., Les niveaux d’usage des
drogues en France en 2014, exploitation des données du Baromètre santé 2014
Tendances, n°99, 2015, 8 p.
[6] Spilka S., Le Nézet O., Ngantcha M. et Beck F., Les drogues à 17 ans : Analyse de
l’enquête ESCAPAD 2014
Tendances, n°100, 2015, 8 p.
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[7] Reynaud-Maurupt C. et Cadet-Taïrou A., Substances psychoactives chez les amateurs de
l'espace festif électro
Tendances, n°56, 2007, 4 p.
[8] Fournier S. et Escots S., « Les milieux festifs gays : des usages spécifiques ? », dans
COSTES J.M. (dir.), Les usages de drogues illicites en France depuis 1999 vus au travers du
dispositif TREND
Saint-Denis, OFDT, 2010, pp. 106-113
[9] Richard D., Senon J.L. et Valleur M., Dictionnaire des drogues et des dépendances
Paris, Larousse, coll. In Extenso, 2004, 626 p.
[10] Ferrari L., Saviuc P. et Gazin V., Intoxication par les poppers. Analyse préliminaire des
données de la BNCI, 1999-2009. Rapport fait à la demande de l'Afssaps
Comité de coordination de toxicovigilance, 2009, 27 p.
[11] CEIP de Grenoble, Décès en relation avec l'abus de médicaments et de substances
(DRAMES) 2012, Compte rendu de la séance n°6 du 20 mars 2014 de la Commission des
stupéfiants et psychotropes
Saint-Denis, ANSM, 2014
[12] Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé, Risques liés à
l’utilisation des « poppers »
Point d'information du 07/10/2014
Repères législatifs et réglementaires
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- Loi n°70-1320 du 31 décembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la
toxicomanie et la répression du trafic et de l’usage de substances vénéneuses, JORF du 2
janvier 1971 ; NOR JUSD0530061C
- Décret n°90-274 du 26 mars 1990 relatif aux produits dits "poppers" contenant des nitrites
de butyle et de pentyle, JORF du 28 mars 1990 ; NOR SPSP90000016D
- Décret n°2007-1636 du 20 novembre 2007 relatif aux produits contenant des nitrites
d'alkyle aliphatiques, cycliques, hétérocycliques ou leurs isomères destinés au consommateur
et ne bénéficiant pas d'une autorisation de mise sur le marché, JORF du 22 novembre 2007 ;
NOR ECEC0764037D
- Arrêt du Conseil d’État du 15 mai 2009 annulant le décret du 22 novembre 2007 visant
divers poppers (CE, 15 mai 2009, Société France Conditionnement Création et autres,
Recueil Lebon, requête n°312449, 312454, 312485)
- Arrêté du 29 juin 2011 portant application d'une partie de la réglementation des
stupéfiants aux produits contenant des nitrites d'alkyle aliphatiques, cycliques ou
hétérocycliques et leurs isomères, JORF du 7 juillet 2011, NOR ETSP1117877A
- Arrêt n°352484 du Conseil d'État du 3 juin 2013 : Annulation de l'arrêté du 29 juin 2011
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portant application d'une partie de la réglementation des stupéfiants aux produits contenant
des nitrites d'alkyle aliphatiques, cycliques ou hétérocycliques et leurs isomères
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