Contrefaçons : La chasse est ouverte

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Contrefaçons : La chasse est ouverte
Industrie Labos
DR
Contrefaçons
JEAN-FRANÇOIS DEHECQ,
PRÉSIDENT DE SANOFI-AVENTIS,
ESTIME QUE « LE NORD DOIT
PAYER POUR LE SUD ».
La chasse
est ouverte
Sanofi-Aventis vient d’inaugurer, à Tours,
un laboratoire spécialisé dans la lutte
mondiale contre les médicaments contrefaits.
L
e Laboratoire central anti-con- opérations « terroristes ou de crime
trefaçon (LCAC) du groupe Sa- organisé. » Il a réclamé une harmoninofi-Aventis, installé sur son site sation internationale des peines envers
pharmaceutique de Tours, a été les contrefacteurs. « Il y a un énorme
inauguré en septembre dernier par son effort répressif et pénal à accomplir
président, Jean-François Dehecq, en dans certains pays, relève-t-il. Le gars
présence d’Hervé Novelli, secrétaire qui vend des médicaments contrefaits
d’Etat au Commerce. La contrefaçon qui deviennent mortels pour la popude médicaments représente en 2006 lation n’est pas plus pénalisé que s’il
plus de 10 % du marché pharmaceuti- avait vendu un tee-shirt. »
que mondial, soit près de 45 milliards
d’euros. En 2007, pas moins de quatre Vers un plan de lutte
millions d’unités de produits médi- européen
caux ont été saisis aux fronLe laboratoire de Tours grâce à
tières douanières de l’UE,
ses analyses pourra fournir
rappelle à Paris en juin
à la justice les éléments
dernier le patron du
constitutifs de l’infracIl y a un
groupe français qui
tion pour démanteler
pilote le dossier à
les réseaux : « C’est
énorme
effort
l’EFPIA1. Et le phéune industrie extrêrépressif et pénal mement lucrative. »
nomène ne fait que
s’amplifier. Le laboDeux pays producà accomplir
ratoire de Tours a une
teurs de contrefaçons
vocation internationale
ont été mis sur la selpour détecter les contrelette : l’Inde et la Chine.
façons pharmaceutiques. Il
Mais sur l’Empire du Milieu,
vérifiera si les produits contiennent Jean-François Dehecq a tempéré :
des principes actifs ou des toxiques. « A chaque fois qu’on a amené un dosLes échantillons sont fournis par les sier bien ficelé, les autorités chinoises ont
douanes, des particuliers, médecins bien réagi. La Chine est très mobilisée.
ou malades. « Il s’agit d’un problème En 2006, elle a connu 135 000 morts à
urgent de santé publique », a plaidé cause de médicaments contrefaits. »
Jean-François Dehecq. Le président a Pour Jean-François Dehecq, lutter
largement développé un sujet auquel il contre la contrefaçon, c’est aussi proest très attaché, qu’il a qualifié de vé- poser l’accès aux soins aux plus pauritable « fléau », évoquant des réseaux vres en abaissant les prix. « Il faut que
de blanchiment d’argent finançant des les populations aient un accès aux
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PHARMACEUTIQUES - OCTOBRE 2008
soins, prévient-il. C’est préparer l’avenir de la maison. Ils se souviendront
du nom de Sanofi. C’est un investissement humanitaire sur le long terme. »
Il confesse volontiers faire « partie
des gens qui pensent qu’il faut faire
payer les riches pour les pauvres ».
Son leitmotiv : « Il faut que le Nord
paye encore pour le Sud » est assorti
d’une mise en garde : « Ne pas faire
travailler des employés à un euro en
Chine. Il faut préserver notre industrie européenne, ne serait ce que pour
sauver l’emploi. »
Hervé Novelli, ancien secrétaire
d’Etat au Commerce extérieur, a
rappelé que les pouvoirs publics ont
renforcé l’arsenal juridique et aggravé les peines dans la loi contrefaçon
d’octobre 2007. Il profitera de la présidence française à l’UE pour présenter un plan européen de lutte contre
la contrefaçon. Le Data Matrix, qui
permettra une traçabilité non plus au
lot mais à la boîte de médicaments, a
aussi été évoqué à Tours ! Il sera expérimenté en Allemagne dès le début
2009. Un projet largement financé
par l’industrie pharmaceutique. n
Patrick Le Bars
(1) « Contrefaçons : l’EFPIA met le
paquet », Pharmaceutiques n°158, juinjuillet 2008.