Bisphosphonates et Implantologie : est

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Bisphosphonates et Implantologie : est
CAS CLINIQUE
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Implant Tribune Édition Française | Août/Septembre 2016
Bisphosphonates et Implantologie :
est-ce bien raisonnable ?
Les bisphosphonates (BP) font partie des
thérapeutiques de prise en charge des ostéolyses malignes, de la maladie de Paget, et de
l’ostéoporose.
Les bisphophonates per os et IV peuvent se
compliquer d’une ostéonécrose des maxillaires. Cette ostéonécrose (ONM) est définie
par une mise à nu osseuse spontanée ou secondaire à un geste de chirurgie dentaire qui
ne cicatrise pas dans un délai de 8 semaines.(1–2)
Propriétés:
Les bisphosphonates possèdent une forte
affinité pour le minéral osseux, et leur distribution se fait plus particulièrement dans les
zones de fort remodelage osseux au niveau
des aires de résorption ostéoclastique.
Outre cet effet anti-résorptif ils possèdent
des propriétés anti-angiogéniques.
Il existe deux familles de bisphosphonates :
– les aminobisphosphonates : alendronate,
risédronate, ibandronate, pamidronate, zolédronate.
– les non aminobisphosphonates : etidronate, clodronate, tiludronate.
Leur mécanisme d’action :
Les aminobisphosphonates inhibent une
enzyme clé de la voie du mévalonate la farnésyl diphosphonate(FPP) induisant l’apoptose
des ostéoclastes par deux voies différentes.
Les non aminobisphosphonates sont métabolisés par les ostéoclastes en analogues
cytotoxiques de l’adénoside triphosphate
(ATP) et induiraient l’apoptose des ostéoclastes.(3)
Administrés per os ou par voie IV, ils représentent une avancée essentielle dans le traitement des ostéolyses malignes.
Dans la prise en charge de la maladie de Paget et de l’ostéoporose les BP sont actuellement la classe thérapeutique la plus distribuée dans le monde.
L’ostéonécrose
de la mâchoire :
Elle se définie comme une mise à nu osseuse spontanée ou secondaire à un geste
chirurgical qui ne cicatrise pas dans un délai
de 8 semaines, en l’absence d’antécédent de
radiothérapie sur la zone, de toute métastase
et de toute cicatrisation après un traitement
adapté.(4)
Incidence de l’ostéonécrose
(ONM) :
L’incidence réelle de l’ONM liée à l’administration de bisphosphonates est mal
connue. D’abord il convient de bien dissocier
les patients pris en charge pour des pathologies néoplasiques de ceux traités pour des pathologies fragilisantes.
Concernant les pathologies malignes l’incidence de l’ONM sous BP IV varie de 1 à 12 %.
Dans le traitement de l’ostéoporose et de
la maladie de Paget on estime que plus de
200 millions de prescriptions de BP oraux
ont été dispensées dans le monde. Le risque
dans le cadre d’un traitement contre l’ostéo-
porose est estimé par Mavrokokki entre 1 à
4 cas pour 100 000 patients/année.(5)
Cas cliniques
N° 1 Mme M. age:77 ans
Implantologie chez les
patients traités pour
ostéoporose par BP:
– Antécédants médico-chirurgicaux :
ostéoporose traitée depuis 2006 par Risédronate 75 mg/jour.
– Protocole opératoire:
Bilan radiologique
Concernant le risque le risque lié à la pose
d’implants, celui-ci semble faible, mais ne
peut être totalement écarté.
Après une évaluation rigoureuse du
risque, la pose d’implants est possible chez
les patients ayant une ostéoporose traitée
par BP oraux.(6) (Ref: Société Française de
Stomatologie, Chirurgie Maxillo-Faciale et
Chirurgie Orale sept 2013).
Le risque peut être directement lié à
l’acte chirurgical (l’ONM survient rapidement) mais la survenue d’une ONM peut
aussi être une complication tardive spontanée plusieurs années après la pose de l’implant.
Evaluation du risque:
Préalablement à la pose d’implants il semble recommander de prendre en compte plusieurs facteurs de risque :
– facteurs liés au type de molécule administrée, la dose, la durée de traitement
– facteurs systémiques associés âge, diabète,
tabac, alcool, traitement médicamenteux
concomitant : corticothérapie, immunosuppresseurs, …
– facteurs locaux maladie parodontale, hygiène bucco-dentaire, particularités anatomiques.
Le patient doit être informé des risques associés au geste chirurgical, et son consentement doit être recueilli.(7)
Précautions particulières
préopératoires :(7)
– Prescription de bains de bouche antiseptiques (Chlorhexidine 0,12 % 3 fois/jour
après les repas) avant l’intervention et les
jours suivants,
– Prescription d’antibiotiques la veille de l’intervention et jusqu’à cicatrisation muqueuse complète (amoxicilline 2 g/jour ou
clindamycine 1 200 mg/jour),
– Respect des bonnes pratiques chirurgicales
– Minimiser l’emploi de l’anesthésie locale et
l’usage des vaso constricteurs
– En cas d’implantation multiple il est préférable si possible de procéder par secteur
– Fermeture des sites opératoires sans tension
– Surveillance prolongée (8)
Résultats :
– Cette étude porte sur une cohorte de 3 patients avec 37 implants.
– Le recul clinique et radiologique est de de
43 moi, 7 mois, et 66 mois.
– Ces trois patients ont reçu un traitement
par Bisphosphonates pour une même pathologie osseuse : ostéoporose.
– Cette étude montre qu’en respectant un
protocole opératoire faisant références
aux Recommandations de bonnes pratiques édictées par la Société Française de
OPT pré opératoire 12/10/2009
Bilan biologique
Chirurgie implantaire:
· Réalisée en bloc opératoire sous prémédication sédative afin de minimiser l’usage de
vaso constricteur en anesthésie locale .
· Aseptie, champs opératoires, incision muqueuse, forage des puits, mise en place des implants, sutures.
· 3 implants mandibulaires et 6 implants maxillaires
OPT post opératoire 13/03/2010
– Prescription et soins post-opératoires :
· Bains de bouche Chlorhexidine 3 fois /j
· Antibiothérapie depuis la veille de l’intervention jusqu’à cicatrisation
· Amoxicilline 2 g/j .
Résultats :
OPT controle 15/09/2015
THOMMEN Days
19-20 JANVIER 2017
BIBLIOTHÈQUE NATIONALE DE FRANCE – PARIS
VERS L'EXCELLENCE EN IMPLANTOLOGIE
Sous la présidence
scientifique de
Jean-Louis GIOVANNOLI
Ueli GRUNDER | Markus HÜRZELER | Mauro MERLI | Konrad MEYENBERG
et
Sofia AROCA | Dominique AUBAZAC | Franck BONNET | Jean-Nicolas HASSON
Olivier LE GAC | David NISAND | Frédéric RAUX | Pascal VALENTINI
Renseignements et inscriptions : Quintessence International | Tél. : +33(0)1 43 78 40 50 | [email protected]
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CAS CLINIQUE
Implant Tribune Édition Française | Août/Septembre 2016
Cas cliniques
Cas cliniques
N°2 Mme J. age 76 ans
N°3 Mr T. age 64 ans
– Antécédents médico chirurgicaux : accident ischiémique transitoire,cancer thyrroidien,
artérite menbres inférieurs,ostéoporose.
Traitement : Exforge 5 mg, Lévothyrox 75 mcg, Risédronate 75 mg
– Antécédents médico-chirurgicaux : néant
Ostéoporose traitée depuis 2009 par perfusion annuelle d’acide zolédronique 5 mg pendant 3ans.
OPT pré opératoire 31/05/2011
OPT pré opératoire 09/06/2009
– Protocole opératoire:
Avulsions de l’ensemble de la denture
Prothèse amovible transitoire
Après cicatrisation implantation bi maxillaire de 16 éléments selon le protocole déjà décrit.
– Protocole opératoire:
Dans un premier temps :avulsions de l’ensemble des dents maxillaires.
Prothèse amovible transitoire
Dans un deuxieme temps après cicatrisation : mise en place de 12 implants maxillaires selon le protocole décrit pour le 1er cas.
OPT controle 12/03/2015
OPT post opératoire 19/11/2009
OPT controle 15/09/2015
stomatologie et chirurgie maxillo faciale,
l’implantation maxillaire est réalisable.
– L’ostéointégration est tout à fait satisfaisante, on ne constate aucun signe clinique
ni radiologique d’une éventuelle ostéo chimio nécrose maxillaire.
– Le patient doit etre informé préalablement du risque de complications événtuelles, et accepter les contraintes en matière
d’hygiène et de suivi régulier par son praticien implantologiste .
OPT controle 20/01/2012
Conclusion :
Chez les patients recevant un traitement
par Bisphosphonates dans le cadre d’une pathologie bénigne, l’acte implantaire n’apparait pas contre indiqué.
On peut conclure que dans ce cas « Implantologie et Bisphosphonates » sont « Bio
compatibles ».
Résultat esthétique
Bibliographie :
1. Marx RE. Pamidronate and Zoledronate induced avascularcnecrosis of jaws :a growing
epidemic .J Oral Maxillofac.Surg. 2003 ; 61 :
1115-8
2. Ruggiero SL, Mehrota B, Rosenberg TJ,Engroff SL. Osteonecrosi of jaws associated with
the use of bisphosphonates : a review of 63 cases. J Oral Maxillofac.Surg. : 2004 ; 62 :527-34
3. Rogers MJ, Gordon S,Benford HL,Coxon
FP,Luckman SP,Monkkonen J et all. Cellular
and molecular mechanism of action of
bisphosphonates. Cancer,2000 ; 88 : 12961-78
4. Khosla S ,Burr D Cauley J,Dempster DW,Eberling PR,Fesenberg D et all. Bisphosphonates
associated osteonecrosis of jaw : report of the
american society for bone and mineral Research .J Bone Miner Res,2007 ;22 :1 479-91
5. : T,Cheng A,Stein B,Goss A. Nature and frequency of bisphosphonates-associated osteonecrosis of the jaws in Australia. J Oral Maxillofacial Surg ,2007 ;65 : 415-23
6. 7. 8. Société Française de Stomatologie, Chirurgie Maxillo-Faciale et Chirurgie Orale. Ostéonécrose des mâchoires en chirurgie oromaxillofaciale et traitements médicamenteux à risque (antirésorbeurs osseux,antiangiogéniques) Recommandations de Bonne
pratique sept 2013
Dr Robert Fromental
est lauréat de la Faculté de chirurgie dentaire de Lyon et spécialiste en paro-implantologie. Il
est expert DGIO et directeur du
collège pédagogique de ESI
France Formation. Dr Fromental
est professeur associé de la Faculté dentaire de Lasi, Roumanie et correspondant
Europe de l’Université de Loma Linda en Californie.
Il donne des conférences au niveau international. Il
peut être contacté à: [email protected]
Dr René Gourmet
est ancien chef de l’unité d’odonto-stomatologie du centre
de lutte contre le cancer Léon
Bérard à Lyon. Responsable
scientifique de projet de recherche à l’ICE du centre anti-cancéreux, unité inserm 556.
Il peut être contacté à:
[email protected]