Shehrazad Magrabi - Libyan women forum
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Shehrazad Magrabi - Libyan women forum
Juillet 2013 Libye : une discussion avec Shehrazad Magrabi Shehrazad Magrabi est la fondatrice de l’ONG « Libyan Women Forum », une plateforme créée en 2011 pour promouvoir les droits des femmes et tenir des campagnes d’information. Le but est d’après Mme Magrabi de montrer au monde que les femmes peuvent jouer un rôle efficace dans la construction de la Libye. This work is licensed under the “Creative Commons Attribution-NonCommercial-NoDerivs 3.0 Germany License”. To view a copy of this license, visit http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/3.0/de/ Libye : une discussion avec Shehrazad Magrabi différentes, leurs idées changent grâce à l’éducation. Notre prochain atelier parlera du processus démocratique et comment traverser ce processus au quotidien. Selon vous, quel(s) élément(s) doit contenir la prochaine constitution ? Notre ONG pousse les femmes à participer dans le projet de la constitution et nous souhaitons plus que tout qu’il n’y ait aucune différence entre les sexes mais aussi une reconnaissance en tant que citoyennes. Si vous êtes citoyens de ce pays vous avez donc des droits, j’ai vu beaucoup de gens contre la notion d’égalité dans la constitution. Il est temps que les préjugés changent, l’idée de l’homme qui va au travail et la femme reste à la cuisine est ridicule, il n’y a que l’éducation pour changer cela. Même les hommes sont parfois discriminés pour leurs idées, c’est un long combat. Quels changements remarquez-vous dans le quotidien des libyennes depuis la révolution ? La Libye ne peut pas être construite uniquement par les hommes. Le processus démocratique est une période sensible et les libyens n’ont auparavant, jamais activement participé à la vie politique. Les libyennes ont conscience d’avoir joué un rôle important pendant la guerre. Lorsque les femmes parlent de démocratie, de droits de l’homme c’est étrange car certains hommes trouvent cela inacceptable. L’égalité est dans la nature même de la démocratie, notre ONG a mené une grande campagne appelée « Nos Droits » pour promouvoir l’égalité et défier ceux qui veulent des différences entre l’homme et la femme. Nous avons organisé des ateliers sur l’éducation des femmes, les genres et le concept de droits de l’homme. Nous faisons prendre conscience que nous sommes des personnes quel que soit notre sexe. Certaines femmes ont du mal à accepter le message, elles prennent même peur. A la fin des ateliers, les femmes sont complètement Quelles sont vos inquiétudes concernant l’extrémisme religieux ? Nous n’accepterons jamais une constitution préparée par des islamistes radicaux. La révolution a eu lieu et les femmes souhaitent être libres de participer à la vie politique, de parler librement. Les éléments de la dictature sont encore présents, lorsqu’il y a un manque d’éducation, un manque d’expérience, habitué à la ségrégation homme/femme, la démocratie devient quelque chose de nouveau. Il existe très peu d’érudits religieux en Libye, la religion n’est pas étudiée, les gens font leurs prières, ils vont en pèlerinage à la Mecque et ça s’arrête là. Les femmes ont peur, elles n’osent pas parler en public, l’idée que dans le Coran les hommes ont plus de pouvoir que les femmes est une absurdité ! l’Islam n’a jamais dit que les femmes ne devaient pas participer dans le pays. Nous sommes des citoyennes à part entière, nous ne devrions pas être de la seconde classe. Beaucoup de femmes travaillent et ont une peur de l’Islam. Les femmes doivent revendiquer leurs droits. En Libye, les hommes peuvent épouser une deuxième femme dans la loi et personne ne s’y est opposé, les femmes n’ont pas protesté 2 Heinrich-Böll-Stiftung Bureau Tunis – Afrique du Nord 2013 Libye : une discussion avec Shehrazad Magrabi car elles ont peur de s’opposer à la loi divine. Les récentes violences à Benghazi montrent une insécurité, quelles sont vos inquiétudes vis-à-vis du respect des droits de l’homme dans le pays ? J’aime mon pays mais le chaos est énorme dans ce pays. Il n’y a aucun mouvement social, aucune expérience. Je ne vais pas comparer la Libye à la Tunisie ou l’Egypte, puisque ces deux pays ont une histoire des mouvements féministes. Comment voyez-vous la Libye dans le futur ? Je ne peux pas dire que la Libye est sécurisée, on ne voit pas de détermination du gouvernement pour mettre fin aux problèmes d’insécurité. La législation est un élément important et gigantesque. De nos jours, on voit des voitures sur la route sans plaque d’immatriculation, si nous avions des lois strictes les personnes seraient punies. Concernant les frontières de la Libye, c’est une situation dangereuse avec les armes et les milices, le ministère de la défense était censé récupérer les armes. Certaines milices font aujourd’hui partie intégrante du ministère de la défense. La Libye restera dans la même situation tant que le gouvernement ne fera rien, il est temps de trouver une solution aux milices, elles ne sont pas disciplinées pour assurer la protection des gens. On ne peut pas leur faire confiance comme à l’armée ou la police. Les milices pensent être les détenteurs de la révolution, ses membres n’acceptent pas les ordres du gouvernement et c’est dangereux. Il y a plus d’insécurité qu’auparavant, je suis parfois inquiète lorsque je conduis ma voiture le soir après 20h, je ne me sens pas en sécurité devant les jeunes au chômage qui trainent dehors et braquent les voitures pour de l’argent. Le gouvernement ne peut-il pas contrôler une population de 6 millions d’habitants ? C’est ridicule. Interview de Sihem Hssaini 3 Heinrich-Böll-Stiftung Bureau Tunis – Afrique du Nord 2013