Leçons des extensions de la Women`s Health Initiative

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Leçons des extensions de la Women`s Health Initiative
Leçons des extensions de la Women’s Health Initiative
(Médecine. Revue de presse novembre 2013)
Les risques et avantages du traitement hormonal de la ménopause s’intriquent de façon complexe,
mais au total, sans effet préventif à terme, même s’il reste une indication « symptomatique » chez
certaines femmes.
Les auteurs ont suivi 27 347 femmes ménopausées âgées de 50 à 79 ans recrutées dans 40 centres
aux USA [1] : 10 739 hystérectomisées et 16 608 non hystérectomisées, réparties par tirage au sort
en deux groupes : 0,625 mg/j d’estrogène équin vs placebo dans le 1er cas, 0,625 mg/j d’estrogène
équin et 2,5 mg/j d’acétate de médroxyprogestérone vs placebo dans le second. Les critères de jugement principaux étaient la survenue de maladie coronarienne et de cancer du sein invasif, un indice composite incluant également AVC, embolie pulmonaire, cancer colorectal, cancer de l'endomètre, fracture de hanche, et décès.
Chez les femmes non hystérectomisées, il y a eu dans le groupe traité 196 évènements coronariens vs
159 dans le groupe placebo (HR 1,18 ; 0,95-1,45) et 206 cancers du sein invasifs vs 155 (HR 1,24 ;
1,01-1,53), mais aussi plus d’AVC, d’embolies pulmonaires, de démences (chez les femmes âgées de
plus de 65 ans), de pathologies de la vésicule et d'incontinences urinaires, et moins de fractures de la
hanche, de diabètes et de symptômes vasomoteurs. La plupart des effets bénéfiques et maléfiques
ont disparu après arrêt du traitement, sauf pour le risque de cancer du sein (cumul lors du suivi postessai, sans traitement : 434 cas vs 323, soit HR 1,28 ; 1,11-1,48).
Les risques et avantages étaient plus équilibrés chez les femmes hystérectomisées : respectivement
204 évènements coronariens vs 222 (HR 0,94 ; 0,78-1,14) et 104 cancers du sein invasifs vs 135 (HR
0,79 ; 0,61-1,02 ; total cumulé en fin de suivi de diagnostics de cancer du sein : 168 vs 216, soit HR
0,79 ; 0,65-0,97), résultats analogues à ceux des femmes non hystérectomisées pour les autres critères. La mortalité toutes causes confondues était similaire dans tous les groupes. Parmi les femmes
hystérectomisées traitées, seules les plus jeunes (50-59 ans) avaient des résultats plus favorables
pour la mortalité toutes causes, l'infarctus du myocarde, et l'indice composite (p<0,05).
Le risque absolu d'événements indésirables, mesuré par l'indice composite, était pour 10 000
femmes traitées pendant 1 an par estroprogestatifs de 12 cas excédentaires entre 50 et 59 ans et de
38 entre 70 et 79 ans ; pour les femmes prenant des estrogènes seuls, 19 cas en moins entre 50 et 59
ans et 51 en plus entre 70 et 79 ans. Les résultats en termes de qualité de vie étaient mitigés dans les
deux cas.
L’éditorial qui accompagne cette publication [2] explicite les durées de ces essais : l’arrêt à 5,6 ans de
l’essai estroprogestatif et à 7,2 ans de l’essai estrogènes seuls, sont dus au constat des investigateurs
que les risques du traitement excédaient ses avantages. Les participantes ont alors été suivies jusqu’en 2010, cette observation clinique prolongée confirmant les données de fin d’essai : fin (provisoire ?) du dogme « feminine for ever » mis à mal par un grand essai (WHI) sur fonds publics…
1.
2.
Manson JE, Chlebowski RT, Stefanick ML, Aragaki AK, Rossouw JE, Prentice RL et al. Menopausal Hormone
Therapy and Health Outcomes During the Intervention and Extended Poststopping Phases of the Women’s
Health Initiative Randomized Trials. JAMA. 2013;310:1353-8.
Nabel EG. The Women’s Health Initiative—A Victory for Women and Their Health. JAMA. 2013;310:134950.
Que retenir pour notre pratique ?
- Ce que concluent les auteurs : reste une seule indication « raisonnable » en cas de symptômes
vasomoteurs importants chez des femmes en bonne santé au début de leur ménopause ; mais
sans en attendre de rôle préventif autre même dans ce cas… et la plus extrême retenue chez les
femmes plus âgées, même si ces symptômes persistent, étant donné le risque élevé de maladies
coronariennes et autres associé à l'utilisation de l'hormonothérapie.
- On objectera bien sûr qu’il s’agit d’estrogènes équins et de medroxyprogestérone… Mais il faudrait des faits solides pour remettre en cause ces conclusions…
- La remarque sur l’origine des fonds permettant des essais de grande envergure devrait aussi faire
réfléchir.