Le Temps - Saint-Gervais Genève Le Théâtre

Date: 13.03.2014
Le Temps
1211 Genève 2
022/ 888 58 58
www.letemps.ch
Genre de média: Médias imprimés
Type de média: Presse journ./hebd.
Tirage: 39'716
Parution: 6x/semaine
N° de thème: 306.002
N° d'abonnement: 306002
Page: 24
Surface: 58'155 mm²
Marie Fourquet, l'art du cliché surexposé
L'auteur, le fils et le
père. Sur fond rouge,
couleur sang, celui
de Juliette, tuée et
violée un soir d'été.
,RcHvEs
Marie-Pierre Genecand
des leçons, non. Juste renvoyer au ture apparaît sur un écran, garée
> Scène A Lausanne
spectateur ces phrases, attitudes à côté d'une maison de poupées
de tous les jours, de sorte à ce qui trône sur la scène et qu'une
qu'elles apparaissent autrement caméra visite en gros plan. Lauune fois qu'elles sont dressées sur rent Valdès signe ces images désaun plateau, hissées haut.
gréables, qui paraissent engluées
avant Genève, un
polar théâtral épingle
la violence banalisée
> Dans un style
entêtant, l'auteur
renvoie le public
à sa responsabilité
Marie Fourquet aime les
cli-
chés. Française installée en Suisse
depuis dix ans, l'auteur aime tra-
vailler sur la culture populaire
- magazines féminins, loisirs de
masse, séries télé - pour la faire
dans une réalité figée, ouatée.
Sans doute l'effet des calmants
mène de manière quasi clinique,
que prend Anne, la mère de cette
légiste, dans Mercedes-Benz W 123,
famille stéréotypée, tout droit
polar théâtral à voir à l'Arsenic, à
Lausanne, ces jours, avant sa ve- sortie d'un roman noir. Une
blonde déphasée qui est seulenue à Saint-Gervais, à Genève, en ment évoquée et noie sa neumai. L'assassinat d'une jeune fille,
rasthénie dans l'alcool. Le père,
Juliette, 16 ans, suscite une radiojamais nommé, est chirurgien esgraphie sociale et familiale sur un
mode glacial.
thétique. Il a les traits inquiets et
On en parle tout le temps, mais le jeu éloquent de Pierre Banderet.
on ne la voit jamais, la Mercedes- La fille, victime retrouvée morte
Benz W123, modèle de 1976, de dans le coffre de la voiture du
ce spectacle. Ou à peine. L'espace père, souffrait d'un manque d'afCette démarche, l'artiste la
résonner. Pas question de donner d'un instant, une version minia- fection chronique et attendait
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tout d'un beau gosse arrogant qui rouge, des chaises: le décor minine pouvait rien donner. Quant au mal et la lenteur des témoignages
fils, Thibault (Tomas Gonzalez), il
relaient cette idée d'installation
où les actes les plus affreux sont
épinglés tels des insectes mortels
désormais neutralisés. Travail
Une ballade
d'entomologiste qui donne à voir
lynchéenne dont
le pire sur un mode distancié.
L'écriture elle-même, répétila sérénité glacée
tive, raconte la difficulté à réaliser
est plus angoissante
l'horreur de la violence, devenue
qu'un assaut d'hystérie banale à force d'être médiatisée.
«Je suis le père de Juliette. Mon-
sieur, nous sommes vraiment déest l'archétype de Fado blaireau solés. Je suis son papa. Monsieur,
qui alterne soirées de défonce et ne restez pas ici, s'il vous plaît. Où
vidéos trash postées sur Internet. est le père? Ici, je suis là, c'est moi, je
Clichés, donc. Avec violence à la suis son père.» Texte cauchemarclé. Cynisme à tous les étages de desque, obsessionnel, que Pierre
cette communauté où, comme il Banderet dit debout, de dos au dése doit, le flic couche avec la but du spectacle, et qui, en plus de
femme du toubib et où les gars de la violence, traduit aussi l'impossipassage, l'été, violent et tuent les bilité de se faire entendre lorsque
jeunes filles égarées.
l'individu se trouve face à l'autorité
Que propose Marie Fourquet à institutionnalisée
Un texte comme une rengaine,
partir de ces clichés sordides? Une
ballade mélancolique à conso- que Marie Fourquet a écrit sous
nance lynchéenne dont l'ultra-sé- le tutorat de Christophe Fiat, dra-
rénité est plus angoissante que
n'importe quel assaut d'hystérie.
Pour la première fois depuis dix
ans qu'elle a fondé la Compa-
maturge français, dans le cadre
créant un effet de réel qui aplatit
16 mars, à l'Arsenic, Lausanne,
021 625 11 36, www.arsenic.ch
Du 30 avril au 17 mai, au Théâtre
Saint-Gervais, Genève,
de Textes-en-Scènes 2012, action
de promotion culturelle qui associe la Société suisse des auteurs, Pro
gnie ad-apte avec son mari, Helvetia et le Pour-cent culturel MiPhilippe Soltermann, l'auteur a gros. L'effet est bluffant. On ressort
choisi d'être sur scène. Elle tient sonné de ce manège désenchanté.
son propre rôle, celui de l'écrivain,
et après s'être présentée au public, Mercedes-Benz W 123, jusqu'au
toute fiction, elle lit la partition du
policier, Vincent Radmanovic.
Une maison de poupées, deux
écrans, dont un qui se teinte de
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