Dossier Financement d`Infrastructures

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Dossier Financement d`Infrastructures
FINANCEMENT D'INFRASTRUCTURES
A la recherche des émetteurs perdus
Fabrice Anselmi et Sophie Rolland - 20/11/2014
Restrictions budgétaires et liquidités « artificielles » pourraient mener à des montages plus « tendus
».
Depuis deux ans, les investisseurs ne jurent que par elles. Rendements alléchants, sécurité apparente, diversité
sectorielle et géographique… Les infrastructures sont parées de toutes les vertus. Du coup, de nouveaux véhicules se
montent, des fonds sont levés et des partenariats avec les banques voient le jour en vue de se positionner au mieux
sur les nouveaux deals. Seul problème, et de taille, les fonds mobilisés ont du mal à s’investir. « Nous avions l'ambition
de cofinancer plus de 4 milliards d’euros d’investissements sur trois ans mais nous ne pourrons peut-être pas atteindre
cet objectif, reconnaît Benjamin Sirgue, responsable mondial des financements d'infrastructure chez Natixis. Le
marché ne décolle toujours pas car il y a une véritable pénurie de projets, que ce soit en ‘greenfield’ (projets
entièrement nouveaux, NDLR) ou en ‘brownfield’ (infrastructures déjà existantes, NDLR). » En cette période de disette
budgétaire, le rapport coût/bénéfice de chaque nouveau projet est longuement soupesé (lire page 34) « alors que les
Etats devraient rapidement engager de nouveaux projets, susceptibles de s'autofinancer, entièrement ou en
partie ».Comment changer la donne ? L’intervention de l’échelon européen pourrait être plus efficace, défend Benjamin
Sirgue. « La Banque européenne d’investissement (BEI) pourrait mettre ses compétences en matière d’évaluation et
de suivi des projets au service des Etats afin de les aider à choisir les projets avec la plus forte rentabilité socioéconomique et de suivre dans le temps leur performance avec l’aide du European PPP Expertise Centre (Epec) qui
collecte déjà des données sur les projets à l’échelle européenne. Cette validation des projets au niveau européen, audelà d’un certain montant d’investissement, pourrait en outre servir de garantie contre l’instabilité réglementaire ». Une
façon, peut-être, de tirer les leçons de l’écotaxe.
Les poches pleines
Les poches des investisseurs sont pleines, que ce soit côté fonds propres ou côté dette. A fin mars 2014, les fonds
d’infrastructures européens affichaient 87 milliards de dollars sous gestion, dont près de 40 % n’étaient pas investis (ce
que les professionnels désignent sous le nom de « dry powder »), selon Preqin. Le fournisseur de données recense 28
nouveaux fonds d’infrastructures en 2014 dans le monde (sur les trois premiers trimestres), pour un total de
27 milliards de dollars levés, dont 10 fonds en Europe pour 6,9 milliards. En France, InfraVia Capital a récolté
530 millions d’euros pour son fonds II en janvier – le véhicule vient d’annoncer une prise de participation de 20 % dans
Noorgastransport (NGT), un pipeline de gaz naturel en Mer du Nord – et Antin Infrastructure a bouclé son fonds II à
2 milliards d’euros en juin.Par ailleurs, les banques européennes ayant expliqué entre 2010 et 2012 que Bâle III
affectait leur capacité à prêter à long terme et que le surcoût en capital prudentiel les obligeait à s’aménager des
portes de sortie (via les prêts « mini-perm »), « l’année 2013 a été celle de l’éclosion des financements alternatifs à
l’initiative d’investisseurs institutionnels », rappelle Massimo Fiorentino, responsable financements chez Meridiam, qui
a financé en « obligations » la plupart de ses projets européens (Hertfordshire, L2, R1, M8) et nord-américains (NTE,
Waterloo Tram). Ces financements alternatifs peuvent prendre la forme d’investissements directs (pour Allianz ou
Axa), de partenariats avec les banques spécialisées (pour Ageas et CNP avec Natixis), ou de fonds pour compte de
tiers (via des gérants comme LBPAM, EdRAM, BlackRock, Rivage…) qui dépassent déjà plusieurs centaines de
millions d’euros.
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Retour des banques
Après une éclipse de quinze mois, les banques européennes se sont rappelé que les infrastructures présentaient des
taux de défaut et de recouvrement tout à fait intéressants, et ont réalisé que le coût de la liquidité chutait avec les
« injections » de la Banque centrale européenne (BCE), réduisant l’écart de compétitivité avec les banques japonaises
restées actives dans l’intervalle. Leur retour, combiné à l’abondance de capitaux institutionnels et à la rareté des
projets du fait des restrictions des budgets publics, aboutit à une amélioration spectaculaire des conditions de
financement.Les professionnels estiment que les marges demandées se sont resserrées en moyenne d’environ 50
points de base (pb) en un an, souvent à moins de 200 pb au-dessus de l’Euribor, voire moins de 150 pb sur les projets
sans risque de trafic et dans des environnements sûrs, comme pour l’obligation sur l’A7 en Allemagne début
septembre (120 pb après un rehaussement de la notation Moody’s en A3 via le programme PBCE). « Cela offre
toujours une prime de rendement par rapport à la dette souveraine, notamment pour les tranches Dailly de PPP sur
lesquelles la personne publique couvre les risques d’exploitation », note Stéphane Derouvroy, coresponsable DCM
chez HSBC France, pour expliquer l’appétit institutionnel pour ces actifs illiquides. « En France, on voit des
emprunteurs chercher à se refinancer à de meilleures conditions, en anticipant les contraintes de leur prêt initial
comme pour l'A63 en France », constate Laurent Bouchilloux, responsable financement de projets d’infrastructures de
Société Générale CIB.En parallèle aux offres de financements institutionnels, en général sous le format « obligations
de projet » et placements privés, des syndicats de banques font leur retour avec des prises finales de 50 à 100 millions
chacune. « La grande différence va porter sur la maturité des prêts bancaires, plutôt 20 à 25 ans (sans mini-perm
cependant) sur des contrats de 30 ans », poursuit Stéphane Derouvroy, ce qui tend à raccourcir la durée des garanties
publiques. Alors que certains institutionnels peuvent engager plusieurs centaines de millions – dès la phase de
construction pour Allianz malgré les problèmes liés aux tirages successifs – et sur 30 ans ou plus. « Les leviers se
tendent sur les projets ‘faciles d’accès’, mais on voit moins de banques sur les projets de pays périphériques ou avec
du risque de trafic. Dès lors qu’ils ont les équipes (en interne ou en externe, NDLR), les institutionnels les regardent
avec d’autant plus d’intérêt », poursuit Massimo Fiorentino. La préférence de ces derniers pour les taux fixes (alors
que les banques privilégient les taux variables) répond souvent aux attentes de la personne publique. « Nous trouvons
des solutions, explique Benjamin Sirgue. Sur un même prêt, une tranche bancaire et une tranche institutionnelle
peuvent coexister. La tranche à taux fixe dispose d’une clause spécifique de 'make-whole' pour assurer les
investisseurs contre un remboursement anticipé. »
Contraintes structurellement
Dans ce contexte, les banques doivent trouver une place entre conseil, structuration/placement et financement. « Les
institutionnels présentent, à nos yeux, une convergence de vues dans leur approche long terme, donc une bonne
compréhension des besoins de l’actif en termes de souplesse, avance Massimo Fiorentino. Les banques demeurent
structurellement contraintes par une logique de financement de leur bilan à court et moyen terme et, partant de là,
regarderont toujours la liquidité potentielle de leur prêt (encore plus avec Bâle III), voire voudront disposer d’une option
d’accélération du remboursement dès le début d’une période difficile, ce qui n’améliore généralement pas la
situation. »« Certains projets se financent encore entièrement via des banques », répond Laurent Bouchilloux en citant
l’exemple récent de l’A9 aux Pays-Bas. « Vu les besoins (un ‘funding gap’ de 500 milliards de dollars par an d’ici à
2030, selon S&P) et la diversité des projets, il y a de la place pour tout le monde », estime René Kassis, directeur des
fonds de dette chez LBPAM. Même avec des marges faibles ? « Probablement car au vu du marché de la dette depuis
20 ans, la tendance peut se retourner. Nous ne sommes pas là dans une logique de court terme, mais dans une
stratégie inscrite dans la durée », conclut Jean-Francis Dusch, responsable de la gestion infrastructures chez EdRAM.
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FINANCEMENT D'INFRASTRUCTURES
Une classe d'actifs attrayante mais délicate à évaluer
Sophie Rolland - 20/11/2014
La dette « infrastructures » répond bien aux contraintes de gestion actif/passif des assureurs mais
son risque ne doit pas être sous-estimé.
Allianz, Ageas, Axa, CNP Assurances, La Banque Postale AM, Aviva ou plus récemment Edmond de Rothschild Asset
Management... Les investisseurs sont nombreux à s’être positionnés sur la classe d’actifs « infrastructures » ces
dernières années. Avec de grandes ambitions. En juin 2013, Axa annonçait vouloir investir 10 milliards d’euros en
cinq ans dans la dette (soit 1,7 % des 582 milliards d’euros d’actifs sous gestion d’Axa France au 30 juin 2014). Quant
à CNP Assurances, elle prévoyait à peu près à la même époque de consacrer 2 milliards d’euros en trois ans au
financement de projets d’infrastructures. Mais faute d’opportunités, tous les objectifs ne pourront peut-être pas être
atteints. « Au niveau d'Allianz en France, la classe d’actifs 'infrastructures' (l’assureur investit à la fois en fonds propres
et en dette, NDLR) représente 1 % à 2 % de l’allocation. Nous aimerions faire plus. Notre objectif est de nous diriger
vers 3 %, mais nous devons composer avec le manque de profondeur du marché », regrette Edouard Jozan, directeur
des directions ALM et stratégie d’investissements chez Allianz France.
Maturité longue
La classe d’actifs reste très populaire parmi les assureurs. En dépit de l’écrasement des marges (lire page 30), les
rendements offerts sont toujours intéressants. De plus, dans certains cas, ils sont indexés à l’inflation. « En dette
infrastructures notée en catégorie d’investissement, les rendements attendus évoluent entre 3,5 % et 6 %, net de frais
de gestion, en fonction de la nature du projet (construction ou refinancement, NDLR) et des conditions de marché »
avance Edouard Jozan. Soit l’équivalent d’une fourchette de spread de 150 à 250 points de base au-dessus du taux
swap pour de la dette de 20 à 30 ans. Côté equity, « une fois déduits les différentes commissions, l’investissement en
fonds propres dans une transaction ‘brownfield’ (acquisitions ou des refinancements d’un actif déjà construits, NDLR)
peut rapporter de l’ordre de 5 % à 10 % par an en fonction du risque sous-jacent et de l'effet de levier. C’est le type
d’investissement que nous favorisons car nous privilégions la stabilité des 'cash-flows', mais lorsqu’il nous arrive
d’investir en ‘greenfield’ (construction, NDLR), les rendements attendus sont supérieurs ».La dette infrastructures
présente un autre avantage pour les assureurs, soucieux de leur gestion actif-passif : sa maturité longue correspond
mieux à celle de leurs engagements que celle de la plupart des obligations corporate « classiques ». « Que ce soit
sous format obligataire ou de prêt, la dette infrastructures nous permet de diversifier nos actifs à long terme », souligne
Emmanuelle Nasse-Bridier, responsable des investissements en crédit chez Axa.Ce type d’investissement est pénalisé
par une charge en capital équivalente à celle du crédit corporate classique. « Dans la mesure où cette charge en
capital dépend de la maturité et de la notation de crédit, la dette infrastructures à très long terme peut se révéler assez
coûteuse », remarque Emmanuelle Nasse-Bridier. De plus, le risque des projets d’infrastructures est complexe à
évaluer. « Les grands investisseurs institutionnels ont mis en place des équipes avec l’expertise nécessaire, mais ceux
qui sont moins outillés n’ont aucun intérêt à investir en direct », estime Sébastien Lecaudey, responsable des relations
investisseurs chez Antin Infrastructure. « En se développant, la classe d’actifs s’est segmentée et la diversité des
produits et des stratégies qu’elle propose permet de mieux répondre aux problématiques spécifiques de la plupart des
investisseurs, à travers par exemple des strategies visant un retour absolu 'absolute return', des rendements reguliers
sur le long terme 'long term steady income', une exposition aux marchés émergents ou une prime d’illiquidite comme
cela est le cas pour la dette d’infrastructure », détaille Philippe Benaroya, coresponsable de l’activité dette
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infrastructures chez BlackRock.Même Allianz, qui apparaît comme l’un des assureurs les plus en pointe sur les
infrastructures, n’est pas à l’abri de mauvaises surprises. Début 2014, le groupe a porté plainte en justice contre la
Norvège qui venait de décider unilatéralement de baisser de 90 % les prix du transit du gaz via Gassled – un gazoduc
qui achemine le gaz norvégien vers le continent européen et la Grande-Bretagne –, ce qui impliquerait une
dépréciation de l’investissement – réalisé en 2011 pour 1,3 milliard – de plusieurs centaines de millions d’euros. « Une
partie de notre travail est d'arbitrer entre la rémunération et la couverture des différents risques sous-jacents, y compris
pour le risque d'Etat », commente Edouard Jozan.Difficile pour autant de savoir quelle serait l’allocation optimale en
infrastructure dans un portefeuille. « En attendant les premiers résultats académiques de la chaire 'infrastructures' de
l'Edhec Risk Institute, les investisseurs cherchent la bonne dose d’infrastructure à inclure dans leur allocation. A cet
égard, certains sont allés très loin : des fonds de pension canadiens n’hésitent pas à allouer 15 % de leurs actifs sur le
secteur de l’infrastructure », souligne Benjamin Sirgue chez Natixis.
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INFRASTRUCTURES
Le rendement socio-économique revient au premier
plan
Fabrice Anselmi - 20/11/2014
Le marché des infrastructures et des PPP pourrait gagner à une communication plus précise sur les
coûts/avantages de chaque projet.
Ecomouv, recours sur divers projets (d’aéroport, de barrage, de stade…), privatisation « à bon prix » des autoroutes,
etc. Ces débats ont le mérite de ramener au premier plan l’analyse du rendement socio-économique des nouveaux
projets. « Il est indispensable pour l’Etat de choisir les infrastructures les plus profitables selon cette notion, encore
plus à une époque où l’argent public est rare, et donc de faire une évaluation solide en amont », rappelle Dominique
Auverlot, chef du département développement durable au Commissariat général à la stratégie et à la prospective
(CGSP). Comme pour une entreprise privée, il s’agit de comparer les coûts de réalisation et les avantages procurés.
Mais en les prenant en compte pour la collectivité dans son ensemble, en mesurerant notamment les effets non
financiers (en bénéfice par euro investi), même s’il reste difficile de donner une valeur au temps qui passe, à une vie
humaine, à l’environnement, à la biodiversité…Partant du constat que « les choix sont aujourd’hui insuffisamment
étayés », c’est cette évaluation socio-économique que la loi de programmation du 31 décembre 2012 a rendu
obligatoire pour les investissements de l’Etat (au-dessus de 20 millions d’euros). Une évaluation à réaliser au sein de
chaque ministère concerné selon une méthodologie précise élaborée par le CGSP en septembre 2013, avant une
contre-expertise indépendante par le Commissariat général à l’investissement (CGI) pour les projets au-dessus de 100
millions. « L’idée est d’éclairer le pouvoir politique avant sa décision, pas de la préempter », note Dominique Auverlot,
même si on peut imaginer qu’un projet au rendement négatif serait alors revu. Par cette loi, l’Etat a souhaité
réactualiser et fiabiliser les paramètres techniques de ce calcul sophistiqué, notamment sur l’environnement, et insérer
cette évaluation dans le processus de décision dans divers secteurs : elle est systématique dans les transports, mais
peu fréquente dans la santé et surtout l’énergie.Le rapport de méthodologie du CGSP a mis à jour les valeurs de
référence, notamment celles des biens non marchands : la valeur statistique d’une vie humaine a été augmentée de
100 % (à 3 millions d’euros), les coûts unitaires de la pollution atmosphérique et du bruit d’environ 50 %, etc. Il
préconise d’élargir le champ des effets pris en compte (concurrence, « externalités d’agglomération », effets
distributifs) sur la productivité, d’intégrer les incertitudes en décomposant le taux d’intérêt de référence choisi (4,5 %)
entre un taux d’actualisation sans risque et une prime de risque, d’adopter systématiquement une approche
prospective de long terme. « Mais ces recommandations techniques resteront lettre morte si elles ne s’insèrent pas
dans les processus de décision eux-mêmes, ce qui suppose une plus grande transparence dans la présentation des
résultats de ces évaluations au public », a expliqué le professeur Emile Quinet, auteur du rapport, soulignant un
nécessaire effort de communication.
Quid des PPP ?
Cet effort de pédagogie sur l’intérêt général est important pour les financements publics. Il l’est au moins autant dans
le cadre de partenariats public-privé (PPP) : alors que la France doit transposer cette année les directives sur les
marchés publics (dont feront partie les PPP) et sur les concessions (lire l’encadré), les sénateurs Hugues Portelli
(UMP) et Jean-Pierre Sueur (PS) ont remis cet été un texte proposant de restreindre strictement les critères de
complexité et d’urgence permettant depuis 2004 de signer des contrats de PPP – ils suggèrent également de
supprimer le critère d’efficience économique.« Si les méthodes de calcul du rendement socio-économique ‘ex ante’ ne
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sont pas complètement achevées, il est possible d’établir l’opportunité de construire l’infrastructure, répond Robert
Stakowski, directeur de projet à la Mission d’appui aux PPP (Mappp). Pour nous, la question est de choisir le mode de
financement (et de
gestion/maintenance). Mais établir cette valeur rend nécessaire de prendre en compte la totalité du cycle
d’investissement – ce que ne prévoient généralement pas les réalisations en maîtrise d’ouvrage publique (MOP). Tenir
compte de tous les risques, de la maintenance, etc., afin que la personne publique raisonne de façon continue entre
l’amont (décision) et l’aval (contractualisation) constitue une difficulté, pas insurmontable cependant, même s’il n’existe
pas encore assez de données sur le déroulement des contrats pour simuler les risques. »
Méthodologie projet par projet
La Mappp a donc choisi d’adopter une méthodologie spécifique, projet par projet : « Par exemple, l’avantage socioéconomique (en euros constants) créé pour le citoyen est a priori constant dans le temps pour un projet d’éclairage
public, il suit une courbe de progression jusqu’à une valeur cible pour un nouveau système de transport ou (encore
plus nettement) pour un réseau télécoms », commente l’expert de la Mappp. Celle-ci donne un avis sur des
évaluations préalables fournies par les porteurs de projets publics, avis facultatif pour les PPP de collectivités,
obligatoire et accompagné d’un rapport au ministère de l’Economie avant la signature du contrat pour les PPP d’Etat
(seulement 20 % du total). Mais elle dispose de peu de moyens, en comparaison de son homologue canadien par
exemple, pour une évaluation ex-post, pendant toute la durée de vie des PPP.Enfin, si les investisseurs spécialisés ont
tous adopté une démarche d’investissement socialement responsable (ISR), ils partent généralement du principe que
la personne publique choisit des infrastructures d’intérêt général. Certains introduisent aussi cette notion dans leur
analyse des risques, pour s’assurer contre la remise en cause du financement public avant le terme du contrat. « Mais
n’ayant pas la capacité de refaire ce calcul sophistiqué en prenant en compte tous les effets directs et indirects, notre
analyse ESG repose sur une analyse d’impact sur toutes les contreparties concernées. Cela permet d’évaluer le
niveau d’utilité et d’acceptabilité de chaque projet », explique Vincent Levita, président du fonds InfraVia, citant
l’exemple du Stade Vélodrome à Marseille, ou encore les débats autour de chaque nouveau projet d’autoroute en
France. « Concernant les énergies renouvelables (EnR), les avantages non financiers étant connus (réduction des gaz
à effet de serre, indépendance énergétique), notre démarche va surtout intégrer le calcul du coût global de l’électricité
(Levelized Cost of Electricity, LCoE) qui prend en compte l’ensemble des coûts de construction et d’exploitation
pendant la durée de vie de l’équipement », développe aussi Raphaël Lance, directeur EnR chez Mirova.
La difficile transposition des directives européennes
En 2015, la France devra transposer en droit national les nouvelles directives européennes sur les marchés publics
(par voie d’ordonnance) et sur les concessions. La commande publique sera alors réglementée via ces deux grandes
catégories de contrats, ce qui rend le chantier tout aussi complexe que le millefeuille de textes actuels. La notion de
« risque d’exploitation » sera, comme au niveau européen, le critère retenu pour distinguer marchés publics – auxquels
seront rattachés les contrats de partenariat (CP) de type PPP* – et concessions – auxquelles Bercy souhaiterait
rattacher la délégation de service public (DSP) française alors que ce n’est pas prévu dans la directive Concessions
pour les secteurs de l’eau, du transport, de la communication, etc. Concernant les CP, toujours soumis au régime
dérogatoire consacré par le Conseil constitutionnel, ils imposent une réflexion sur la notion de transferts de risques
pour éviter une requalification en concession au sens européen. Le ministère de l’Economie souhaite aussi revisiter la
législation sur les PPP en introduisant dans ces contrats certaines souplesses liées aux actuels BEA (baux
emphytéotiques administratifs) et AOT (autorisations d’occupation temporaire). Il pourrait enfin revenir sur les critères
de recours à un CP : conserver le critère de l’urgence, pas forcément celui de la complexité, en généralisant
l’évaluation préalable sur le bilan favorable à l’ensemble de la contractualisation publique, quitte à revoir à la marge les
calculs différentiels de rendement socio-économique.*Partenariats public-privé.
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